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BUREAU DU JOURNAL DES SAVANS.
Assîsians../
Auteurs. .
MoîssEiGNEUR LE GARDE DES SCEAUX, Président,
r M. DAciER,de rinîtitut royal de France, secrétaire perpéiuct
de racadémie des inscriptions et belles-lettres.
M. le Baron Silvestre de Sacy, de rinâtitut royal de France,
académie des infcHptiiMis et beiles-lcttres.
M. GoSSELLiN, de l Instiitit royal de France, académie deî ins-
criptions et belles- leitrc-s
M. CUVIER, conseiller d'état, de Tlnstitut royal de France,
secrétaire perpétuel de racadémie des sciences, €l merobre de
IVicadémic française.
M. DAUNOUjderinstttnt royal de France, académie des înscrip-
tîonî et belles-lettres, éditeur dn Journal et secrétaire du bureau.
M. TESSIER,de l'Institut royal de France, académie des sciences,
M. QuATREMÈRE DE QuiNCY, fie Tlnstîtnt royal de France,
secrétaire perpétuel de Tacadéniie des beaux-ans, et membre de
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JVl, BlOT, de rinstilut royal de France, ncaJérnie des sciences,
M. VandfrbourG, de rinsiiiiU royal de France, académie des
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pétuel de Tacadémie française, et membre de racadémie'des ins-
criptions et belles-kttres.
M» KaûUL-Rochettf, de linstitat royal de France, académie
des inscriptions et belles-lettres.
M, Chézy, de rinstilut royaj de France, académie des inscrip-
tions et belles-lettres.
M. y. Cousin, maître de conférences à FEccîc normale.
M* Létronne, de Tlnstitnt royal de France, académie des
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JOURNAL
DES SAVANS.
JANVIER 1820.
Leoms DiACONi Caloensis Historia , Scripîorcsfjae alii
42ci tes Byiantinas pertinentes, E Bibliotheca rei!;ia aune
primùm in lucem edidit , versione lathui et notis ilIuMrdvit C.
B. Hase, éTc, &i\ Un vol. in-fo!. Paris, i8ïp» de l*im-
jirimerie royale.
PREMIER EXTRAIT*
XliN publiant en 1 8 j o,dans lehuîiîème voltiine du Recueil des Notices,
un livre de THistoire de Léon Diacre, M. ila^e avoîi eu principalement
pour objet d'arracher au long oubli dont tlle a voit été frappée . une d.s
parties tes plus nnportantes de cette Histoire, L*édiîeur espéroit encore
que le public, mieux éclairé cju*il n'avoit pu Tétre jusqu^îilors sur l'utilité
de cet ouvrage, voudroit en connoître la totalité , et qu'ainsi la publîcaiiuu
A X
4 JOURNAL DES SAVANS,
entière de Léon Diacre, supplément si iiûlc ci la Byzantine, suîvroît cette
prcnifère coniinunicaLion Le vœu de lous Us hoinnies in iruits lu; en effet
conforme aux espérances de M. lLi>e : jnais ce vœu, suffisant pour cons-
tater le mérite d'une entrcj)rise litiér.iire, ne Te^t pas toujours pour en
assurer le succès. Jl faut, pour publier de pareils ouvrages, de.s ress<.>urces
que n'ont pas ordinairement ceux qui ont le courage et le talent néces-
saires pour les entreprendre; et il n'est pns absolument sans exemple qu'un
boji livre, mêfne connu et vanté d'avance, soit mort dans le porte-feuille
dcf l'auteur, faute de ces secours qu'on prodigue quelquefois aux plus mi-
sérables productions. Heureusement pour M. Hase, il s'est trouvé k
Péiersbourg un homme qui a senti le prix d'un ou\rage annoncé en
France, et qui, sur la seule garantie de la capacité de l'auteur, s'est chargé
d'une partie des frais de l'édition. Encouragés par l'exemple de cette
munificence étrangère, plusieurs de nos compatriotes n'ont pas dédaigné
d'en partager le mérite; et, grâce à cette honorable émulauon , ^Histoire
de Léon Diacre a pu sortir enfin de l'obscurité où elle étoit depuis si
long- temps reléguée.
Les difficultés qui avoient tant retardé la publication du Léon Diacre^
et dont M. Hase avoit enfin triomphé , n'étoient rien cependant en com-
paraison de l'accident qui devoit la suivre. Une partie considérable de
l'édition, cent cinquante exemplaires destinés pour la Russie, ont péri
dans le naufrage du brick le Mercure. Bien des éditions ont été de inême
épuisées en totalité, il y a quelques années, par l'efltt de spéculations
mercantiles; êl plus d'un littérateur eût aie rs recherché la faviM.ir d'un
pareil naufrage. Mais celui-ci est devenu pour M. Hase une perte aussi
réelle qu'inattendue; et ce qui peut seul lui en adoucir le sentiment, c'est
que ses regrets seront partagés par lous les amis des lettres.
L'Histoire de Léon Diacre, conservée dans un manuscrit jusqu'à ce
jour unique de fa Bibliothèque du Roi, n'éioit pas restée inconnue des
savans. Le P. Combefis, ce docte et laborieux Dominicain qui a
rendu tant de services à la littérature du moyen âge, en avoit fiiit une
traduction latine, laquelle, demeurée long-temps dans uiTe des biblio-
thèques de son ordre, et communiquée à divers savans, notamment au
P. Pagi, qui s'en servit avec fruit dans son Ciitka pour rectifier quelques
faits ou pour remplir quelques lacunes, n'a disparu (out-à-fait, suivant
^opinion de M. Hase, qu'à une époque voisine de celle de nos troubles
politiques. Mais ces fragmens recueillis par Pagi étoient trop courts pour
jnettre le lectei-r à portée de juger du j)lan, de Tordonnance et du mérite
de l'Histoire de Léon Diacre; et d'ailleurs, rédigés dans une langue
tlrangèie, ils ne pouvoient donner môme une idée du caractère et
JANVIER 1820. 7
du talent de Taufeur grec. Un autre motif plus puissant encore faisoît
désirer la publication entière de son ouM-.igé. L'hibtoire du X.*" siècle, fa
plus tléjiluraiJe sans contredit dans les fastes de Thunianité, est peut-
être aus^i la plus pauvre en documens originaux ; et, en particulier, la
période de temps qu'avoit traitée Léon Diacre, dt-puis la mort de
Romain II , jusqu'à celle de Jean Zimiscès, placée entre l'époque des
derniers et impuissant efforts tentés par Photius et par fempereur
Constantin pour retarder le déclm des lettres, et celle de l'espèce de
renaissance qui fut le fruit de l'exemple et de la protection des Comnènes ,
cette période, dis-je, ne nous ctc it connue que par les compilations
tardives de Michel Glycas, deCédiénus, deZonare et de quelques autres
Grecs du Das-Einpire. Il étoit donc important de connoîîre fa source
cC'mmune à laquelle ces écrivains avoient pui.^é, d'auîant plus que,
des trois règnes successivement décrite par fliistorien original et con-
ttmj>o;ain, celui de Nicéphore Phocas n'étoit pas sans intérêt, et que
celui de Jean Zimiscè.^ avoit je té un grand éclat sur cette obscure et dé-
plorable époque des annales byzantines.
Tels étoitnt les motifs de la curiosité quinspiroit Touvrnge de Léoa
Diacre. Mais, d'un autre côté, il étoit difficile dç fonder sur cet ouvrage
de bien grandes espérances. On ne pouvoit guère raisonnablement
attendre d'un Grec du x." siècle cette connoissance approfondie des
faits, cette critique judicieuse, cette élocution élégante et noble, qi>i
conviennent h l'histoire, et qu'on ne trouve pas toujours dans les
écrivains des Ages les plus éclairés. Bien loin de là, on devoit craindre
qu'un hi.^torien du temps et de la profession de Léon Diacre, imbu de
tous les misérables préjuges et dominé par toutes les terreurs supers-
titieuses de cet âge, ne nous donnât dans un long récit qu'un petit
nom.bre de faits, et ne mît le plus souvent que des mots sans élégance
ou des merveilles absurdes à la place des choses les plus essentielles à
savoir. Enlin il falloit présumer d'avance que, sous le rapport du goût
et du style, ce n'étoit ni la concision souvent tiéganle ou énergique de
Procope, ni l'a! ondance fleurie d'Anne Comnène, ni l'agrément de
Cinn.imus , ni le grand sens de Camacuzène , qu'on pouvoit trouver dans
une hi>toire produite k un égal intervalle du siècle qui vit naître le
premier de ces historiens, et de celui où fleurit le dernier , c'est-h-dire,
à cetie époque du moyen âge où les lettres tombèrent presque par-tout
au dernier degré de l'avilissement. L'analyse qr»e je vais faire de fllistoire
de Léon Diiicre , mettra nos lecteurs en état de prononcer eux-mêmes si
les craintes et les espérances dont elle étoit l'objet, éioient -également
Lien fondées.
6 JOURNAL DES SAYANS,
Cette histoire, divisée en dix livres, commence b la mort de Constan-
tin VII Porphyrogénète, et se termine à celle de Jean Ziiniscès : «lie
embrasse ainsi, depuis 959 jusqu'en 97 j, un espace de seize années ,
rempli par les règnes de Romain II dît le Jeune, de Nicéphore II sur-
nommé Phocûs,et de Jean Zimîscès. Ce dernier sur-tout, à cause de
l'éclat que ses victoires au nord et à l'orient de l'Empire répandirent sur
cet empire, déjà si chancelant, tient une place hrillanie dans les Annales
byzantines; et, par un honneur alors bien rare, il n'occupe guère moins
d'e.^pace dans celles des peuples qu'il combattit, je veux dire dans laChro»
nique de Nestor et dans l'Histoire d'EImacin. C'est donc à cet empereur
qu'est consacrée la plus grande et la plus imj>ortante partie de l'Histoire
de Léon. Il raconte ses victoires avec un intérêt bien naturel sans doute
chez un Grec, fier des derniers succès de sa nation , autant qu'accable' de
$iis longues disgrâces; et cet intérêt si juste, Léon réussit quelquefois k
le communiquer à ses lecteurs. Mais, malgré l'admiration quil a vouée à
son héros, il vCen expose pas avec moins de franchise et de douleur les
odieux détails du comj)lot qui le mit sur le trône; et cette véracité, qu'il ,
dut lui être si pénible de concilier avec ses affections, a produit, sans
contredit, l'un des passages les plus intéres>ans de son ouvrage, en même
temps qu'elfe nous donne l'idce la plus favorable de son caractère.
Le prenrier livre, composé de dix chapitres assez courts, et une par-
tie du second livre, jusqu'au chapitre IX inclusivement, sont consacrés
au règne de Romain JI. Mais les seuls événemens de ce règne sur les-
quels se fixe l'attention de l'historien , sont une expédition en Crète , diri-
gée par Nicéphore Phocas, et une autre guerre dans l'Asie mineure, contre
les mêtnes ennemis, c'est-à-dire contre les Sarrasins, et conduite par un
frère du même général, Léon Phocas. Ainsi te ut le cours de ce règne,
de près de quatre années, est rempli delà gloire d'une seule famille qui
devoit bientôt monter sur le trôiTC dont elle étoit l'appui. Dans la des-
cription que fait Léon du départ et du débarquement de Nicéphore, du
siège d^ Candie et des batailles livrées en Crète, on s'aperçoit qu'il a
Consulté son imagination plus encore que la vérité; et cette profusion de
détails inuiiles n'est que foiblement rachetée par une harangue que l'his-
torien prête au général, et dans laquelle se trouve pourtant développée
avec a.ssez d'art la situation déplorable de l'Em|Mre , au moment ou
Romain le Jeune prit les rênes du gouvernement. II y a aussi une harangue
dans le récit de l'expédition de Léon Phocas ; mais celle-ci est moins bien
placée, et n'offre guère que cts lieux communs de rhétorique niilitaire,
qu'un moine, à l'abri du danger, eut sans doute plus de satisfaction à
rédiger, qu'un lecteur sensé n^en peut trouver a les lire. Du reste, il n'y a
JANVIER .1820. 7
dans la partie de cette histoire consacrée au règne de Romain II pres-
que aiuun détail sur le caractère de ce jeune empereur, et nulle notion
sur son gouvernement. Après avoir dit sèchement, en deux lignes, que ce
prince étoit doué des plus brillantes qualités, il ajoute, en racontant plus
loin sajuort, que les flatteurs s'étoientemp)arés de son esprit, et, abuî^ant
de son penchant pour le plaisir, favoient bientôt entraîné dans tous les
excès. 11 faut avouer qinl n'y a rien là d'assez particulier h Romain le
Jeune , pour que les lecteurs qui aiment à saisir la physionomie de
chaque prince, puissent distinguer celui-ci de cette foule de souverains ,
nés comme lui avec des dispositions heureuses, et corrompus de mènje
j)ar la flatterie. Léon expose les divers bruits qui coururent sur la fin pré-
maturée de cet empereur, et dont le plus accrédité, suivant l'opinion su-
perstitieuse de cet âge, étoit qu'il mourut empoisonné : mais il ne tient
pas au pieux historien qu'on n'en trouve plutôt la cause dans une partie de
chasse faite un jour de jeûne , et au mépris des abstinences prescrites par
rÉofise ( I ). Il est donc vrai de dire que l'Histoire de Léon Diacre ajouté
bfen peu de chose à nos connoissances sur le compte de Romain le
Jeune.
Elle estplus instructive à l'égard de Nicéphore Phocas, dont fe por-
trait,peu flatté dans les histoires modernes, et notamment dans ce cha-
pitre où Gibbon a peint à si grands traits les empereurs grecs depuis
Héraclius, et où il semble avoir affecté d'enfermer plus de faits que de
mots (2), est présenté ici sous des couleurs plus favorables et qui pa-
roissent aussi pliis fidèles. L'auteur, qui, de son propre aveu, vîvoit k
Consiantiiiople sous le règne de ce prince , et fut témoin de fa révolte
qui y éclata contre lui en 966 ( j ) , devoit être bien instruit des particu-
larités de son élévation au trône impérial, et il les raconte d'une manière
qui tend à disculper la mémoire de l'impératrice Théophanon des odieux
soupçons trop légèrement accueilli? par d'autres auteurs. Les relations
intimes qu'on a supposé exister entre cette princesse et Nicéphore,
loin d'être indiquées par l'historien , sont même absolument démenties par
son récit, où l'on voit un fiivori du dernier empereur, nommé Joseph,
devenir l'instrument de la disgrâce, de Téloignement, et, par suite, de
l'élévation de Nicéphore.
(1) Léon. Diacon. H'istnr. lib. fl, c, 10 : 'Evh'^^y ^nt^ ttV y{gn(Ji 'ft'*Ktjçt/«r....
(2) Desl'inc (lîui Fiill of the Roman e/npire, |hap. XLVIil, p. 309-420.
(3) ^^y- L^ Beau, Hist. du Bis-Empire j loin. XVI , p. nj , édit, d^ ^77^*
Conf Léon, Diacon. Histor. lib, ly, ?. 7, p. 40,
t JOURNAL DES SAVANS,
Les premiers chapitres du livre îil renferment les détails delà revo-
Lition qui mit Nitéjihore sur le trône; etici encoie, la narration de Léon
difière, sur plusieurs poinis import.'ins, de ct-lle qu'ont adoptée le> mo-
dernes. On y voit Nicéphore poussé, comme malgré lui, à l'empire par
les persécutions de Josej.h, autant que |)ar les prières de ce même
Zimiscès qui devoit bientôt détruire son ouvrage, et forcé, en quelque
sorte, de se faire empereur/poiir éviter d erre la victime d'un favori.
Toute celle révolution est déciite av^c clarié et inttrêt; et le silence
absolu que Léon garde sur la part qu'en y atiril.ueà Théophanon, achève
d prouver , sinon la fausseté , du moins la léj^èreté des motifs .-ur lesquels .
est fondée !'( pinion générale. Une révolie à Constantino(;le, prélimi-
naire, en quelque sorte indisj^ensal le, de l'élection d'un empertur,et que
Lton raconte aussi comme un c>énement tout naturel et fort ordinaire,
ouvre à Nici'phore la dernière bairière qui le séparoit du lône. Son ca-
ractère, tel qu'il est tracé par Léon , et ses premières démarches, annon-
çoîentun prince éclairé, ferme et religieux. Les modernes, q-.i, en géné-
ral, croient montrer de la profondeur en supposant des vices, n'ont
voulu voir qu'un raffinement d'hypocrisie dans l'éloignement que té-
moigna d'abord Nicéphore pour les plaisirs de sa cour et pour les nœuds
du mariage. 11 ne céda qu'avec peine aux instances de son clergé, pour
embrasser un genre de vie plus mondain et pour épouser la veuve du
dernier empereur. Quoi qu'il en soit, le témoignage de l'historien sur la
tempéraiice de Nicéphore, et sur la chasteté de Théophanon ( i ) , qu'il
appt lie ote^'ŒpoêTw Tttïç û)£i//ç Kj etinip^ufjut Tu'),^i'hau^ Aûluouvcli^ , femme d'une
beauté accomplie , et d* une pureté vraiment lacéJémonienne; ce témoignage^
dis-je, est du moins positif, coiiforme à tout ce que l'on sait de la vie
antérieure des deux personnages, et paroît aussi digne de foi que les
conjectures malignes qu'on a ramassées dans des compilations récentes:
c'est un point que )'a!)andonne volontiers au jugement de nos lecteurs.
Une expédition en Cilicie, qui n'offre de reinarquable qu'une tentative
infructueuse contre la ville de Tarse, et la ]>rise de Aiopsuesie, termine
le troisième livre.
Les événemens racontés dans le quatrième livre doivent être placés
entre les années 964 et 969. On y distingue le second siège et la prise
de Tarse, et la conquête de tcu'e la Cilicie, qui en fut le résultat; une in-
vasion en Syrie et en Mésoj^otamie, et le blocus d'Antiothe. Quelques
faits épisodiques sont entremêlés avec assez d'adresse au récit de ces
événemens, tels qu'une ambassade vers les Russes, que l'auteur appelle
(i) Léon. Diacon. Histor. lïb, JJJ, c. f, p. jo.
JANVIER i8zû.
une expédition malheureuse en Sicile; une révohe à Consrantinople^
d*où Tautcur prend habilement occasion d'exposer les causes du mtcon*
lentement encouru par l'empereur auprès des divers ordres de citoyens.
Le princi|>al motif de celte haine, qnh avoir sitôt succédé aux acclama-
tions de Ui joie publique, éioit la multiplicîié des impôts, nécessnîie^
sans doute k la sûreté de rEm|jire, mais probablement aussi exigés avec
trop de rigueur. L'historien montre du discernement et de l'équité, en
blâmant Tempertur de cetterigueurinaccoutumée.etsur tout en le plai-
gnant de commander h une nation qui vouloit breti qu'on h défendit,
mais qui ne vouloit pas contribuer à se défendre ; et Ton entrevoit déjà
qu'un prince qui meitoii si souvent à Pépreuve le courage et le patriotisme
des Grecs, n'avoitpas long-temps à compter sur leur fidélité. Du reste,
les événemens que i*ai indiqués, occupent dans la narration de Léon
plus d'espace encore qu'ils n excitent d'intérêt; et les faits y disparoîssent
presque entièrement sous un amas de paroles inutiles* L'auteur, trop
éloigné sans doute_ du siège des opérations militaires, et, par son état
niêtne, peu familiarisé avec les notions qui s'y rapportent, multiplie les
harangues, au défaut des dérails; quelquefois il se livre à des exagé-
rations ridicules et réfutées par d'autres icjrioîgnages contemporains;
comme lorsqu'il assure que Nicéphore conduisit en Asie une armée de
quatre cent mille hotnjnes , çpwn^ hc mlAfeixûyTtL fAvcAiJkç ieAificvfJLîvo¥
tm^purcç : tandis que Lîutprand , qui vit partir cette armée de Constanti-
tiople, ne la porte qu*à quatre vingt mille, octaginta mîtlia mortalium.
Enfin, et c'est là sans doute le plus grave reproche qu'on puisse faire k
Léon, il n*y a pas, dans toute la partie de son Histoire qui est relative à
Nicépiiore , un seul mot touchant cette célèbre ambassade de Liutprand,
dirigée vers cet empereur même, et dont la relation est peut-être le mo-
nument littéraire le plus curieux du X.* siècle, ni sur les relations suivies
et publiques qui existoit^ntà cette époque entre lacour d'Orient et l'em-
pereur d'Occident, Othon le Grand- Une pareille omission est tellement
grave, qu'elle me paroît presque inexplicable : car c'est, à ce qu il me
semble, pousser trop loin fopînion qu'on doit avoirde l'ignorance de cet
auteur, que de supposer, comme le fait M. Hase,^i;;V/ ne connùissoit
ni les noms ni t existence des nations de t Occident. Léon lui-même ne
raconte-i-il pas cette malheureuse expédidon de Sicile, rapportée aussi
par Liutprandî II me paroît infinirnetit plus vraisemblable que Léon a
dissimulé, par attachement pour son pays, des faits qui ne compro-
mettoiem pas seulement l'honneur des armes impériales , mais le caractère
et la loyauté de la nauon grecque. Ori peut voir dam Liutprand, téinoia
lu JOURNAL DES SAVANS,
oculaire, le récit de ces faits, dont la honte ^ malheureusemenl trop sen-
sibfe, peut seule expliquer le silence de Thistorien. Mais cette partinlité i
quoiqu'elle ne doive pas nous surprendre dans un Grec, nous rend, il
ùuî bien le dire, justement suspects d'autres endroits ds sou récit, où fa
même raison a pu fui. commander la même réticence.
Le V.* livre, composé de neuf chapitres , renferme les détails de
la révolte d'un des généraux de TEmpire, à Hnstigation duquel les Russes
entrent dans la lîuîgarie, Pancienne Mocsîe, et s y rendent maîtres de
plusieurs places importantes; des négociations par lesquelles Nicéphore
essaya d'arrêter les progrès de ce nouvel et redoutable adversaire; de la
prise d'Antioche, à la suite d'une surprise nocturne qui ofire pins d'un
trait de ressemblance avec celle qui fit tomber la même ville au pouvoir
des guerriers de lapremiére croisade. C'est dans ces circonstances mêmes,
eu les talens et les succès de Nicéphore se faisoient admirer aux deux
extrémités de l'Empire, qu\m complot domestique vini mettre un terme
à son règne, aussi mal apprécié de ses sujets que de ['histoire. Le récit
de celte conjuration remplir les trois chapitres les plus intéressans, à mon
gré, et les mieux écrits de tout louvrage de Léon Diacre: tant il est
vrai que la source du talent est dans utie ame généreuse, et que Tesprit
le plus médiocre peut dr venir éloquent par rindîgiiaiion du crime! Je
voudrois pouvoir mettre ce récit entier sous ie> yeux de nos lecteurs ; ifs
partageroient, j'en suis sûr^ l'émotion que j ai éprouvée en lisant les dé-
tails des nocturnes entrevues de Zimi^céset de cette Théoptnnon, deve-
nuealors la complice des égarement qu elle avoit fait naître; les premiers
indices du cotnplot rendus inutiles par Tavei gle séciirité de l'empereur;
l'arrivée des conjurés, par utie nuit d'hiver, où toutes les rigueurs de fa
tetnpérature sembloient déchuînées contre le crime; et leur irruption
dans ia chatnbre du prince, quVn se retirant, sous un frivole prétexte,
rimpëratrice avoit bissée ouverte. On se rassure un moment, en voyant
la frayeur qui saisit Zimiscèset ses complices, lorsque, trouvant vide le
lit impérial, et déjà troublés par les reproches de leur conscience , ils
songent à se précipiter dans la mer, et îi prévenir ainsi !a punition due à
leur crime. Mais un misérable esclave leur montre dans un coin de
la chambre Fempereyr étendu par terre, selon son usage, et couché sur
une peau de panthère. Les conjurés se raffermissent à la vue de leur vic-
time; ils l'entourent et font briller à ses yeux trente glaives prêts k fa
frapper* Zimiscès fait traînera ses pieds son maître et aon ancien bien-
faiteur,déjà atteint d*uncoup ^la tête; il I accable desphis lâches outrages,
Cl ne rougit pas de donner à ses complices IVxemple d'insulter à la ma-
jesté des roisi en arrachant cruellement la barbe de i'emjiereur et en lui
I
JANVIEJl 1820. Ti
fracassant les dents avec la garde de son cpée. On voudroît pouvoir
conserver encore le doute qu'exprime Gibbon sur ta pari directe que prit
Ximhcès h^a mort de Nicéphore : maïs le récit de Lcon, si favorable
du resie à Ziiiiî^cèSy ne permet pas même la plus légère iacerlimdcî et
on le voit foulant aux pieds le corps de Nicéphore, et lui portant h travers
le crâne le premier coup mortel: tristes prémices d un règne, qui dévoient
se perdre, aux yeux des contemporains et de la postéritét dans féclat des
victoires et des succès du nouveau prince! Tout ce récit de Léon, je le
répète, est plein de chaiegr et diniérèt; son style , débarrassé d'une foule
d'expressions oiseuses, est plus ferme et plus rapide i on s'aperçoit, en
un mot, qu'if a senti vivement ce qu'il raconte, et Ion ne i>eut être tenté
de révoquer en doute des détails yt précis , si positifs» et qui portent en
eux-mêmes un si grand caractère de fraiictiise et de fidélité.
Dans le vi/ livre, dont je ne dirai rien ici, attendu qu'il étoît déjà
connu en entier par la traduction latine de M< Hase, insérée, en regard
du texte, dans le Vil L* volume du Recuiil des Notices des manus^
Cfils ( ï ) » Léon décrit les faits qui se rapportent à la première année du
règne de Zimiscés, On distingue dans ce livre un portrait de Zimiscès^
tracé avec \m^ profusion et une naïveté de couleurs qui ne 'manquent
pas d agrément , et de nombreux détails sur les préh'minaires de la guerre
des Russes, qui intéressent sur -tout ]iar rapport au caractère de ce
peuple, nouvellement apparu sur la sCmtt du monde. Le Vil/ livre,
rempli en entier par le récit de la révolte de Bardas Phocasi neveu
de fempereur Nic<^ptiore, n\i guèr,^ d'autre mériic que celui de raconter
plus longuement un événement assez peu important en lui-même, et
déjà connu par d'autres relations On y trouve pourtant, au chapitre vil i
une digression assez curieuse sur la révolution qui, en 929, mît le
gouvernement et la tutelle de Constantin VII entre les mains de
Romaîji L*' dit Licapem.
Dans le vuf/et le ix/ livres, qui sont les plus importans de cette
Histoire, Léon décrit, avec une prolixité qui paroît tenir à la-fois et de
fexactitude de Fauteur et delà vanité nationale» les vicissitudes et les
succès de la guerre contre les Russes, dirigée par l'empereur Zimiscès
en personne contre le grand duc Sviatoslav , que I éon appi^He Sphendos-
tUûbus, Celte guerre, plus remarquable par I acharnement avec lequel
elle fut soutenue des deux cotés , et par le nombre et la hardiesse des
opérations militaires, que par la durée des hostilités, fut termiTée,
(1) Ouvrage ciit, i/parJe^p, Zf^'2^6,
B a
ît JOURNAL DES SAVANS,
nu hut di quatre maisf comme le dit précisément lauteur, o¥ Tt-fltsfctf
fiMiç fjuan lir Vetfftnir Tna^vo^hidUf n^-ntyiUfi^iVùç (i), quoique, ]>ur une
singulière inadvertance, le P* Pagi en marque fe commenœment à Tan
p/i , et h lui à Tan 973 (2) , fut, dis- je, terminée par un traité gioiieux
et avantageux pour Fempire grec, traité dont le texte nous a été conservé
par l'annaiiâte russe Nestor (\). C'est aux cojnmentateurs de ce dernier
qu'il conviendra de concilier son récit, généralement favorable h s^s
comparrioles, avec celui de Léon, qui les représenïe toujours Fjattus:
mais il est juste d^observer que le traité de paix s'accorde mieux avec
les succès des Grecs qu'avec ceux des Russes ; en tout cas, c'est un pt^int
de critique cjui devra exercer la sagacité des savans du Nord. Ce qu'if nous
importe de ien>arquer ici, c'est que la nnrraiion de Léon est semét^ de
panîcularîtés sur les moeurs des nado js alors peu connues qui habiîoient
les contrées situées au-delà duDaiiul e.Telest, entre autres , le pî^sîage
oii cet historien décrit 4) '^^^ pratiques su|>trsiïtieuses et les sacrifices
humains en usage chez les Russc> de cet âge, pour apaiser les mines
de leurs compatriotes immolés à la guerre. Ce passnge a déjà é:é cité
par M, de Sainte Croix ^ j);et il est effectivement très-curieux. Malheu«
reusement-, les fausses notions dont il est accompagné, la ciraiîun
d*Arrit^n, dans le PmpU duquel on ne trouve aujourdhui rien de
pareil à ce qu'en rapporte Léon \6], le prétendu royaume d'Achille au
milieu des Scyihes; tout cela me tend l>ien sus]>ectt s'il faut que je le
dise, le témoignage de notre auteur, et j'aurois souhaité que M. Hase
nous eût expliqué à ce sujet &a propre opinion. En général, les
rapprochejnens que Léon va chercherdans Thisluireet dans la géographie
anciennes, n annoncent pas ries connoissances bien solides. Ainsi, lors-
qu'il assure très-gravement que le Phison, un des fleuves du jardin
d'Eden, est le même qui » sous le nom d'/j/rr, se jette par cinq bouches
dans le Pont-Euxîn (7); lorsque, quelques lignes plus bas, il attribue à
Oreste, fils d'Agamernnon, lafondaîion.et le premier nom d'Adria-
nopotïs (8), tradition rapportée, il est vrai, par Lampride (9) , et répétée
encore par Zonaras (10); lorsque , pour rendre raison de 1 orgueil humilié
(1) Lcon. Diacon. Hlstor. Itlh ix ^ c, ti. — (2) Pagï, Cmka ^ ly , zB , A i
tV , j2, A^ — (î) Voy\ p. j?/ de la traduction allemande de 5chérer, Leipsic ,
i^pr^.— (4) LeoiT. Diacon. Hîscor, UIk ix , r. 6, p. ^2,D, — (ç) Examen cri-
liquc des hriionens d'Alexandre, p 7S^'7S7 1 ^oîe j de la deuxième édinon, —
(6) Vid. in Peripl. Pont ij- ijj, A ; ij^ , B, — (7) Léon. Diacon, Hhtor. lier,
ViJt , c it P' So, — (8) loem ,ilfideTti,c. 2. — (9) Lamprid. în EhgabiiL c, yii.
^ (jo} Zonar. \n Constamin, Ahnçmûch, p. i^g.
JANVIER 1820.
M
Wun empereur, il rappelle les exemples des fils d*A(oce, du Babylonien
jNabuchodonosor, et d'Alexandre de Macédoine (î)til est évident que
reet historien entasse sans jugement et sans goût les fruits indigestes de
jes lectures : maïs il est vrai qu ou peut dire pour son excuse que telle
fétoit I érudition de son siècle et de son pays.
Le x/ et dernier livre de THistoire de Léon Diacre dcciii les expé-
ditions entreprises [>ar Jean Zimiscès en Mésopotamie ei en Syrie,
pendant les années 974 et 975. La matière étoit sans doute belle et
curieuse; il s'agissoit de raconter des succès dont les armes romaines
avoient dès long-temps perdu l'hatiiiude, et dan5 des contrées ou
Tétendard des Grecs ne s*étoil pas montré depuis Jovien. Alallu ureuse*
ment, Léon n'a pai compris rintçrêt de son sujet, ou plutôt, Tuile de
notions assez exactes , il s est presque constamment tenu à côté, en se
jetant dans des digressions plus ou moins oiseuses , en recherchant
comme à dessein des détails étrangers au principal ol/jet de son récit. Si
Ion dégageuit» en effet, du déluge de paroles où elles sont noyées, les
seules particularités vraiment historiques qui se rapportent à ces deux
années du règne de Zimiscès, on réduiroit à un bien petit nombre de
phrases la longue narration de son panégyriste; ei l'on a d autant plus
lieu de déplorer cette stérile abondance» qut* les écrits des Arméniens (2)
et les Annales d'AbuJpharadje (j), concernant cette même période de
l'histoire du Has-Empire, renferment une foule de notions précieuses sur
les expéditions de Zîjniscès, et notamment des lettres de cet empereur qui
durent jouir d'ujie grande puLliciié, et qu'il est étonnant que son histo-
rien n*ait pas connues ou consultées* Le premier chapitre, dans lequel Léon
fait, en deux lignes, arriver lempereur des rives du Bosphore à celles de
l'Euphrate, sans dire un seul mordes causes et du commencement de
cette guerre , ni du siège d*Amida qui la précéda, nous fait connoître
succinctement foccupation d*L'nèse et de Nrsibis , et , du reste , ne nous
entretient que de la mort d'un notaire impérial , qui se noya en traversant
TEuphrate. Dans le deuxième et le troisièjne chapitres, il nest presque
question que de la disgrâce du patriarche Basile, et de la nominatioji
de son successeur Antoine, aux vertus apostoliques duquel Thistonen
paie un long tribut d'admiration. On sent, en effet, que ce devoit être
h un (^es héros de Léon Diacre : mais on nendesireroit pas moins que
( I ) Léon* Diacon. Huton l'tb. V, c,j, p. 4$. — (2) Vay, les Détails de fa pre-
mière cxpédïtion des Chrétiens dans la Pdkstine, t aduiti de iarmcniei) en
français y par F* Mtttin , W^/^aj. encvclojf. septembre i8it* — (j) hli$!or^
D/nasî, jTj, B.
i4 ^^ JOURNAL DES SAVANS,
cette admiration se fût conifnue dans de justes bornes- La fin de ce
chapitre est consacrée à la description de deux jumeaux monstrueux qui
se réunîssoient dans la partie inférieure du corps. Dans fe iv/ chapitre,
fhistorien reprend le chemin de la Syrie, sur les pas de Jean Zimiscès,
<-*t, d'abord , nous conduit h une place où leiiipereur se rend maître des
sandales du Sauveur; de b > il traverse le mont Liban, et vient prendre
liéryte, où un tableau du crucifiement devient la matière d'une digression
nouvelle et d'un récit qui remplit taut le chapitre suivant, La marche de
Zi.iiiscès le long des cotes de la Pbcnicie, et les jjrogrès de ses armes,
sqnl encore interrompus au chapitre vt par l'apparition d'une coinére
et par le récit des interprétations diverses auxquelles ce phénomène
donna lieu. L'auteur ne nous fait même pas grâce de (a sienne ; il afiîrme»
avec une assurance qui peut nous donner h mesure de ses connoissances
et de celles de son siècle, que cet astre, dont les flatteurs du monarque
liroient de si favoraf^les préb^ages, n annonçait a^i contraire que relfctlions
Junestes, incursions dt baib trcs ^ gutrra chiles , proscriptions univirsellts ,
pestes ^ Jûm Inès t korrihUs trcmbhmcns de terre, en un mot, ajoute- t-il,
ranéantisscment presque total de l'empire romain ( i ) ; et , pour le prouver,
il enianie une longue digression qui remplit à elle seule les quatre
chapitres suîvans,et dans laquelle il semble se cojnpfaire à énumérer
tous les désastres de toute espèce qui affligèrent TEmpire après la mort
de Zimiscès, sous le règne de Basile II et de Constantin IX, Après tant
d*écarls , entremêlés eux-mêmes du récit de ireinblemens de terre,
d étoile tombant dans le camp de fempereur, pour en prédire la ruine,
comme celle qui tomba parmi les Troycns au moment ou Pandarus décocha
son javelot contre Aiinélas {2), Léon revient enfin ^ Zimiscès, mais
seulement pour raconter sa mort, et rendre compte de ses derniers
momens. Ce qu il y a de plus important dans les pariicularités que
l'historien rapporte à ce sujet, c'est d'y voir confirmé, de manière à ne
lni>ser aucun doute , le propos attribuée Zimiscès, et qui lui coûta la vie.
En voyant de vastes et fertiles provinces possédées par 1 eunuque Basile,
I empereur s'écria, dît-on, avec i*accenl d'une juste indignation : Est-ce
donc pour de pareilles gens que nous avons vaincu , et que le peuple
(1) Léon, Diacoo. Hhtor, Iil\ x , c. 6 ^p, ro^, D.^ *Am* v^i %imtu n tB kû^tit
(a) Idem, ibidem t c* S, p, 106^ D : TîJtjut^neA^/ rin ja^i c ô à^ twç T^^ïvmç
JANVIER 1S20.
romain prodigue son sang et ses trésors î Ce reproche fût entendu , et
rafTolblissenient qui , en peu de jours, à dater de ce iiioiiient, conduisît
Zimiscès au tombeau , dans la force de son âge et dans le cours de ses
succès, ne justice que trop le soupçon de poison et l éloquente douleur
cfe L^on.
Telle est la substance de cette Histoire, que son auteur se proposoit
sans doute de pousser plus loin , à en jt^ger par une phrase qui termine
la plus longue et la dernière de ses digressions ( 1 ) , mais que probable-
ment il n'eut pas le temps de continuer* Dans une analyse aussi rapide ,
je n*ai pu indiquer que sommairement ce que l'ouvrage de Léon renferme
de neuf et de curieux; j'ai dû au;^i exposer avec la même franchise les
notions coïnmunes ou superflues, ou même tout- a-fait indiflerentes, qui
s y trouvent jointes en assez grand nombre* Cetoit là la partie (a plus
ingrate de la tâche que j'avois à remplir. Dans mon second et prochain
extrait, où je m'occuperai des notes de Téditeur , remplies d'une érudiiron
si variée et <i profonde, de sa traduction si élégante et si fidèle, et de
quelques pièces inédites qu'il a placées à la suite de l'Histoire de Léon^ i«
n*aurai que des éloges à donntr, et je puis prendre d avance auprès de
nos lecteurs un engagement qu'il ine sera si agréable de remplir,
RAOUL-ROCHETTE.
De Mohammede Ebn-Batuta Tincitano, ejmque
i tin tri bus, CommenUitio ûciidemica, quam... publico eruditorum
exûinini submitîit,a* d, y martii iSrS , aucîùr Johan. Gothofr.
Ludov» Kosegarten, lena?, 18 18; 51 pages m-^/
On connoissoft à peine de nom, en Europe, le voyageur arabe qui est
le sujet de ce programme* M. Kosegarien , jeune professeur dléna,
déjà connu avantageusement par un petit recueil de poésies arabes ,
persanes et turques, qui! a publié en 1815 (2) , à son retour de Paris ♦
où il avoit passé plusieurs années pour s y perfectionner dans l'étude
des langues de fOrient, ayant eu pendant quelque temps à sa dispo-
sition un manuscrit arabe qui coniieat la relation abrégée des voyages
(i) Léon. Diacon. Hlston Ht» X ^ c. iQ, p. lop^B : 'Am* liwTtt iâÙ t^ /uMç^r
[2) Carmhwm crtintalium Triga.bir^ksundïï, 181J.
^ JOURNAL DES SAVANS,
d'Ebn-Batoiîïa , n pensé avec raison qu'il rendroit un service împorfane'
aiJX leiires, en faisant connoître ce voyageur, et en publiant quelques
extraits de sa relation. C'est ce qu*il a fait dans le programme que nous
annonçons,
Abou Abd-a!Iah Mclianimedi fils de Mohammed, surnommé lAwaiL
parce qu*il étoit de la tribu arricainede Léwata, et Tandf} ^ parce qu*il
étôh natif de Tanger, vivoit dans le Vlll/ siècle de Thégire. H est plus
connu sous Je surnom d'Etn-Bûimiia» aIjJjU ou Ijyj : car on trouve ce
nom écrit de ces deux manières. JI quitta Tanger, sa patrie, en Tannée
725 [î324-t}iî], et employa vingt ans entiers ît voyager. Il visita
l'Egypte^ FArabie , la Syrie, les pro^nces de fempire grec, la Tar*
tarie, la Perse, Flnde, les îles de Ceyian et de Java, les Maldives e
la Chine. De retour en Afrique, il passa le détroit et parcourut TEs-
pagne; puis, ayant repassé (a mer pour rentrer dans sa patrie, il se
rendit h Ségelinesse, et entreprit un voyage dans intérieur du pays
des Nègres» dont if visita fes principales villes et notamment celles de
Tombouctou et de Melli. Rentré dans ses foyers, il rédigea une aiiiple
relation de ses voyages. Cette relation fut ensuite abrégée par un
Arabe nommé Mokammtd htn-Alohdmmed KélibU et par Tordre du
suîian de Fèz, Motéwakkel-ala-a!lah. C>i»t cet abrégé seulement que
M. Kosegnrten a eu entre les mains. M, Kosegarten n'a point déterminé
lepoque à laquelle i! a été fait, et je ne saurors la fixer, parce que
fignore de quel sultan de Fèz il est question ici. M. de Dornbay, dans
son petit ouvrage sur les monnoies de Maroc, intitulé Bcsckmbungdtr
gangbûrm Afarùkkdniscltcn Cold-Sllbcr und KupJerAlun^cn , parle de
deux princes qui ont porté le îurnom de A'Iotéwnkkcl'ûld'aHûh , c*est-k-
dire, qui met sa confiance en Dieu, et dont îl existe des monnoies sans
aucune date* L*un des deux, Abou-Abd-allah Mohammed, appartient,
sm'vant lui, îi la famille des Mériniies, dont la puissance a duré> dit-îl,
depuis Tan 1 2 j 8 jusqu*en 1 ç J 1 î Tautre est nommé Ald-allûk, prince ,
dit toujours M. de Dombay, de la famille des Saadîtes, famille qui a
régné depuis 1 J J 1 jusqu*en 1 6 j4- Le second souverain de cette famille
se notnmoit Abd-allah, fils de Mohammed, et mourut eji ï 574 ( y^y^\
Hoest, NacftK von A'IarckoSt p. p ), Cest apparemment sous ce dernier
prince qu'a été fait Tabrégé de la relation d^Ehn-Batouta.
Le programme de M. Kosegarten est divisé en quatre sections. Dans
la première, Tauteur traite en général des voyages faits par les Araires ,
et en particulier de celui d'Ebti^liatouia ; de Tabrégé qui en a été fiit
par Mohammed Kélébi, et enfin de ce qui en a été dit dans le recueil
fie M. Zach, intitulé Monûthikhe Corrcspondinit d'après I^ docteur
\
JANVIER 1820. n
Seeïzea, ^t qui inanque souvent d*exactuude* Si Toa prenoit \ la fettre
les expressions de M, Koseganeii, on devroit croire que le manuscril
dont i( a fait usage, est différent de celui que le docteur Seeixen a acheté
au Caire, et qui fait partie de la collecîion déposée à Gotha: nous avons
lieu de conjecturer le contraire, SuivniH M* Seetzen» la bïbh"oihèque de
feu i\L de Donihay renferruoit un manuscrit de la relation originale
dTbn-Baiouta. Si cela étoît, on pourroit en attendre une notice de M. de
Hammer : mais il est permis de douter de Texactitude de cette assertion,
M. Koseganen pense quEbn-Batoula est digne de toute confiance»
et que, faute de la relation originale que nous n'avons point, labrégé
de Mohammed Kelébi rnériteroit d*éire publié en entier. Laperçu général
qu*if donne de celte relation, et les divers extraits qu'il met soia /es
yeux des lecteurs, justifient pleinement ce double jugement. Q^% extraits^
avec fa traduction latine qui y est jointe, et les notes qui les accom-
pagnent, forment ks trois dernières, sections de ce programme, inti-
tulées lur Pcrsicum, Itcr Aialdmcum et lier Afrkanum, Le premier de
ces titres n'indique que très-imparfaitement le contenu de la seconde
section, £bn-Batouta, dans le tnorceau que comprend cette section ,
rend compte de son voyage à Brousse, dans TAsie mineure; de là à
hnik ou Nicée, puis à Maternî, Boli^ Casumounî, c'est-à-dire, suivant
M. d*AnviIle, Comopolis Modrcn^^ Hadrianopolts et Germankopolis t
et enfin à Sinope* Là il s'embarque sur la mer Noire; puis il arrive
à CalFa, d'où il se rend à Crira et ensuite à Serai, capitale des états
de Mohammed Usbtk^klian* De Serai*, il prend un guide pour aller dans
le pays des Bulgares ; le désir de voir la contrée que les Arabes nomment
Pdys des ténil/reSt le porroii h s'enfoncer de là dans un désert qui a
quarante jours de marche; mais il renonça à ce voyage à cause des
difficultés qu'il ofîroit* Revenu auprès de Mohamtned Usbek-khan, il
profita, pour aller à Constantinople, d'un voyage que la suhane, femme
de Mohammed et fiile de Tempereur grec , faisoit, avec la permission
du prince son époux, auprès de son père. H passa un mois dans la ca-
pitale de l'empire grec; puis, étant revenu à Serai avec les Turcs qui
avoient servi d escorte à la princesse, il se rendit dans le Kharizme et
'^ ensuiteàBoLhara,Nakhschab»Samarcande et Balkh. De Baikh, il revint
vers l'occident, visita les principales villes du Khorasan , et, se dirigeant
vers le midi, vint à Ghazna et à Caboul, dans le Pendjab, traversa le
Sind, le Moultao, et entra dans l'Inde. La preinière ville de Tlnde qu'il
visita fut Abouhar, d'où il alla à Adjoudahan. loi rinit le premier frag-
ment*
Le second fraggment ne contient que le voyage aux îles notnjnées
c
i« - JOURNAL DES SAVANS,
Dhihet ûl*mahal Jl^l i^ji ^ dans lesquelles M. Kasegarten reconnoîP
les Maldives. Àbd-alraz£ak^ comme j ai eu occasion de le faire observer
en rendant compte du tome I/' du Voyage de M. Ouseley» dans ce i
journal, année 1819, p. 588» nomme ces mêmes îles Dîweh i-mahat
J^ *jj^i ce qui est essentiellement la même chose. Cest un nom
composé de dhe ou diùe, qui, dans les langues de Tlnde, veut dire tle, et
de makalo\x mhal, mot dont nous ignorons la vraie signification. Mais il
^lut remarquer que, suivant Tanalugie d^s langues de Tlnde, le mol dive
.ou dihe, qui est Tantécédent du rapport établi entre ces deux mots, doit
être placé le dernier, cojnme dans Serand'tù , Javadlb , c'est-k-dire île de^
Séran ou Ceyian, île de Java, tandis qu*en arabe et en persan, comme
en français , ce même mot doit être placé le prejnier. Il en est du mot
Mve comme du mot vnt^ç en grec , dans les noms de Péloponnèse ,
Ckersonnise, ôtc. II faut encore observer que les Arabes ont, suivant leur'
usage, placé leur article al devant le mot înahal(\m forme leconséquentj
de ce rapport. Au moyen de ces observations, on demeure convaincu
|tque Dhihet al-mahal, Dlweh i-mahal et Maldives ne sont que diverses'
[-formes du même nom. Quant au mot maie , est-ce une corruption
Ld'un mot indien, ou le nom de la principale de ces îles, de celle qui
] -servoit autrefois d^habiiation au souverain ( Renaudot , Ane, RelaL des
Indes et de la Chine, p. f^^)f ou enfin, comme quelques personnes
font cru, est-ce le même mot qui entre dans la composition du mot
Malabar! c'est ce que nous n^osertons décider. Toutefois nous sommes
peu enclins à admettre la dernière supposition. L'aspiration que les
Arabes et les Persans conservent dans le nom des Maldives , et qui n'a
pas lieu dans le nom qu'ils donnent au Malabar, nous semble former
Lune grave objection.
Dans le troisième fragment, Ebn*Batouta raconte son voyage dans
le pays des Noirs, fait en l'année 7J3 [ijj^-ijîî ^^ ^' *^' 1* ^' ^^ ^^^^^
d*abord à Ségelmesse: delà, en vingt-cinq jours de marche, il arrive à
Tagaza, où il y a des mines de sel, puis à Tasahl. De Tasahl, en tra-
versant un désert de douze journées de marche, il arrive à Eiwélaten,
premier lieu du pays des Noirs. Eiwélaten est habitée par des hommes
de la tribu de Mésoufa. Après avoir résidé quelque temps à Eiwélaten ,
il se rend à Mali , ville éloignée de la précédente de vingt-quatre grandes
Journées de marche; puis à Stghéri, qu'habitent principalement des
commerçnns noirs, et à Karsékhou, située sur le rivage du Nil. «De
» Karsékhou ,dii-il , le Nil descend i Kabara , puis à Sagha , Tombooctou ,
» Kok ( iê^j ou plutôt Koukou, ^S^f*, comme on lit plus loin ) , Mouli,
^ dtrnier lieu du royaume de Mali; h Youï, le plus considérable des
JANVIER 1820. if
^» royiumes des Nègres; au pays des Nubiens, à Dontola; et enfin aux
«Cataractes, ail se leriiiine le domaine des Nègres et commence le
» rerrftoire de Syèiie » Ehn-Batouta alb de Karsékhou à Mali , de Mali k
Tombouctou, ville éloignée de quatre milles du cours du Nil; de là à
Koukou, située sur ce fleuve; à Bourdana, lieu habité par une tribu de
Berbers, et enfin ^ Tékedda, dont les habilans commercent avec TÉgyp e.
Là, ayanc résolu de retourner à Ségef messe , il partit de Tékedda i et vint,
en soixante-dix jours démarche, à Téwat» contrée dont une des villes
principales se nomme Bouda, De Bouda, Ebn-Batouta se rendit k
Ségelmesse, II indique quelques positions et quelques distances entre
Tékedda et Bouda.
Cet aperçu du contenu des fragmens choisis et publiés par M, Kose-
garien suffit assurément pour recommander aux amateurs de la litté-
rature orientale et de la science géographique et ethnographique en
général , la relation d*Ebn Batouta , et leur en taire désirer la publication.
Ce desîr ne pourra que s'accroître, si, au lieu de lextrait sec et décharné
que nous avons présenté de ces fragmens, on prend la peine de les
lire en entier. If nous semble impossible de douter de la bonne foi et
de la sincérité du voyageur; et si parfois on lut trouve une crédulité
excessive, ce défaut ne peut nuire h la confiance que mérite son témoi-
gnage , quand if raconte ce qu il a fart ou ce dont il a été témoin* Qielquc-
fois il entre d^m des détails urinulieux et peu întéressans, caractère de
simplicité qui est encore favorable à la véracité de sts récits. Sans doute
toutes les parties de sa relation n offriraient pas un aussi grand intérêt
que celui qu inspirent les morceaux choisis par M. Kosegnrten. Toutefois
on a publié jusqu'ici si peu de relations de voyageurs musulmans , qu*0Ji
seroit certainement satisfait de posséder celle-ci, en entier.
Je crois maintenant devoir présenter yiïi très- petit nombre d'obser-
vations sur quelques-uns des faits contenus dans les fragmens publiés par
Al. Kosegarten.
Ebn-Batouta, racontant la conversion des habî tans des Mafdives au
mahométisme, [attribue à un Arabe d'Afrique nommé Abou'lbérécat; et,
quoique Ton puisse très-raisonnablement douter de la vérité des faits
extraordinaires qui furent, comme on le lui a raconté, Toccasion de cette
conversion, on ne peut guère révoquer en doute qu'elle n'ait été
réellement louvrage d un Africain , puisque les peuples des Maldives
stiivoient, au temps d'Ebn-Baiouta, la secte de fimam Malec, qui est
professJe paniculièrement eji Afrique. Ebn-Bafouta ayant exercé dix-
huit mois, dam la résidence de la reine de ces îles, les fonctions de kadhî,
son témoignage à cet égard nous paroît irrécusable.
C X
zc JOURNAL DES SAVANS,
E!>n Batouta dit que, deson temps , fes Maldives étoient gouvernées
par une reine qui se nomrnoit Khadid/a; ce qui sufîiroit pour prouver
qu elle éfoit mahométane. Le premier des voyageurs arabes dont Renau-
dot a îraduît les relacions , dit aussi que les Maldiveç.sont gouvernées par
une reine, L'abréviateur d'Edrisi, connu sous le jfbm de Géographe de
Nubie, généralise, à tort peut-être, cette observarion,ei affirme, en en
pariant comme d'une couiiune générale, que la principale autorité dans
/es îles est entre les mains des femmes» Renaudot, remarquant que les
Yortugaîs n'ojit point trouvé une pareflle coutume établie dans ces îles ,
suppose qu'elle avoit été abolie depuis que les peuples des Maldives
avoient embrassé le mahomètisme. Le récit d'Eba-Batouta réforme ce que
ces diverses opinions peuvent avoir d'ejtagéî-é. On y voit qu'avant Kha-
,didja le trône avoit été occupé par son aïeul, son père et enfin sou
frère ;qu*après la mort de ce dernier, Kbadidja avoit été appelée au trône
par le vœu des habitans, et avoit épousé son vizir Abd-allah Hadhramî,
La même chose pouvoît avoir eu lieu plusieurs fois , et avoir donné
naissance à lopinion d'Edrisi, qui affirme que le roi n avoit qu*une auto-
rité fort inférieure îi celle de la reine.
Ebn-Iîaiouta vint à Brousse , capitale de lempire turc dans la Natofie >
sousIeYègne d'Orkhan fils d'Othman, et lorsque le sultan Orkhan avoit
déjà enlevé aux Grecs la ville de Nicée, cest-à-dire postérieurement à
fan de Thégire 7 j ^ [ i 3 î j de J, C, ]• A cette même époque, Mohani-
med Uzbek-khan régnoît dans le Kaptchac. Au nombre des femines de
ce sultan, é toit, suivant Ebn-Batouta, une princesse grecque, que notre
voyageur nomme, suivant la traduction de M. Kosegarten, Bi/oun,
Ntkefori régis Constantlnijjût magnœ flia. Au temps dont parle le voya-
geur africain, le trône impérial de Constantinopleétoit occupé par An-
dronic III Paiéologue, dit Je Jeune. H suit de là que AL Kosegar-
ten a eu tort de prendre Ntk'ifcur^ jlj^» I^"'^ '^ ^^^^ propre de fem-
pcreur grec» Je présume que le jnanuscfit portoit jjfiXJ Tâcfour: car c'est
ainsi que les Arabes nomment tous les empereurs de Constantioople. Je
crois néanmoins que cette dénomination n'est autre chose qu'une altéra*
lion du nom de Nicéphore ,qui s'écriroit en arabe jyCLi ou jjiXj.
Celte alléraiion peut s'être introduite accidentellement, comme plusieurs
autres auxquelles a donné fieu la confusion des points diacritiques : elle
peui aussi avoîr été admise à dessein, et comme un sarcasme, pour faire
dériver le nom des empereurs grecs de la racine jju^qui signifie ïncrédu-
lUét irré/ighn. L'usage de donner aux empereurs grecs le nom de Nice-
phore ou TarfoiJr peut remonter au temps de Haroun airaschid, qui dé*
claia la guerre à Nicéphore L*' Au surplus, si, comme je le crois, le mot
JANVIER 1820.
21
Tdcfûur est une corrupiîon, cette corruption est consacrée pnr l'usage
depuis long- temps* Ce même mot a encore été altéré de nouveau par les
Turcs, qui en ont fait j^ et j^ 9 mot mal interpréié par Leuncbvms ,
quî écrîf t^gff^!^ (Annal, sultan. Or/tman., p/iijt t^p et 140). Le
poisson nommé par les Turcs jJL jy^ ^t jJL jd;, le surmuht^ ne
doit certainement son nom qu'à sa couleur rouge, qu^on a comparéei la
pourpre Ati empereurs grecs. C*est aussi, je pense, pour la même rar^
Non, qu'ils appellent ^Li» ^>jCj , comme qui diroit montagne rouge ^ (a
montagne voisine de Rhœdestum on Rhodoston (JAnville, G/ogr,anc,^
fcm, /.*% p, ^çf)' On ne doit pas, au surplus, s'étonner qu Uzbek-Lh^a
eût obtenu en mariage une princesse grecque, puisque le sultan Oiho-
mnn Orkhan épousa Théodora , filfe de l'empereur Jew Cantacuzène*
En parlant d*Orkhan, Ebn-Batouia le nomme Ikhtiar-eddin Orkhan-
beg, fils d*Othman Djouk; c'est ainsi du moins que traduit M. Kosegar-
ren, II ne s'est pas souvenu sans doute que le prince Othman , fîfs
•d*ErtogruI, et fondateur de la puissance otto!nane,étoit nommé par les
Turcs ^ ^jli^ , Othmandjik , cVst*à-dire le prtii Oiliman [ Othmanu-
tus, comme ledit Démétrius CantemirJ.
A l'occasion de la ville et du grand royaume de Mali ou Mellî , au
pays des Noirs, Ebn-Batouta dit que, de son temps, en yj 3 de Thégire
[1352-1 de J< C.J, le souverain de ce royaume s'appeloit Aténassi
{ou plutôt Afenia) Solerman 0^4^ ^^'i^^' '^ ^^* assurément très -re-
marquable que, suivant Léon Africain, IavilledeTombottCtou,qu*£bn-
Batouta comprend dans le royaume de Mali, a été fondée en Tan 6 ta
de rhégrre [ 1 2 1 3 -4 de J. C. ] par un roi nommé Afense Suléiman (éd.
de i^j2, in- 18, p. 642). On doit, ce semble, en conclure, ou que ce
nom étoit d'un usage fréquent parmi ces monarques nègres, ou qu'il éfoit
fa dénomination commune des souverains de celle partie de l'Afrique*
Et en efl'et nous savons, par la relation du Voyage de Mungo-Park,
quen langue mandingue manxa veut dire toi. {Voy, Tmvtts in the itiie-
rhr districts of Afrha hy Mungo-Park, th. Xi>c^p. 2^; et suh*
et p, jfg dans le Vocahlûhe mandiitgue).
Je pourrois multiplier les remarques de ce genre; mais celles-ci suf-
fisent pour confirmer ce que j'ai dit de Timportance de celte relation, et
même pour faire regret tet que nous fie .connoissions, jusqu'à présent,
que l'abrégé de la relation ofigin^Ie. Je vais maintenant plisser à la cri«
tique de plusieurs endroits du texie et de la traduction,
Je ne relèverai point quelques légères fautes qui se ioht glissées dans
le te«e, et qui peut-être se trouvent dans le manustrit même dont a fait
usage M» Kosegarten; mais je proposerai quelques corrections qui me
2z JOURNAL DES SAVANS,
paroîssejit certaines. Dans un passage où Ebii-Uatoufa parle des chiens
dont on seserLau lieu de chevaux ou autres bêtes de trait, dans les dér
serts de la Sibérie , ii dit, suivant le texte imprimé ( p» t], /. dern,) »
jLlUVI L^- (^iblff^; M. Kosegarten a traduit, Cams verà un^nibus prœ-
dit} , et il observe (p. %y) que le mot L^ lui paroit incomplet. En Usant
l^, Je sens ne laisse rien îi désirer , et je crois cette restitution à-peu*
près indubitable. On lit (p, ^, L y) que, dans une certaine contrée du
pays des Nègres , on se sert de morceaux de sel en guise de monnoie d or
et d'argent: puis le texte ajoute ^U^ 1^:4 L^f c*est-à-dire, « ses eaux
» sont et on prend là une provision d*eau pour traverser le désert
^ que Ton trouve ensuite, et dont Té tendue est de dix journées de marche;
» car il n*y a j)oint d'eau dans ce désert. « M. ICosegarten a traduit fe
commencement de ce passage d'une manière peu intelligible, yw/^Mf
(salis stgmtmls) paritcr aîqut torum aquâ utuniur^ et il a observé (p. p)
que le mot jUj Iiji paroissoit altéré. II falloit, comme Ta déjà conjec-
turé M. Freytag, lire ^jLt), et rétablir ainsi le passage: ^^Uj UjLy;'
ce les eaux de ce liai sont saumâtrcs. » C'est même vraisemblablement
la leçon du manuscrit: car, dans le caractère arabe d'Afrique, le j final
ne porte pas de points diacritiques.
Pour avoir mal séparé un mot (p, ^j, L iS ) et avoir lu L jj> au
lieu de #Ui>>\ M. Kosegarten a commis une erreur plus grave. Uau-
teur dit que leshabitans de Zngha ont embrassé Tislamisme il y a long-
temps, que ce sont des hommes pieux et amis de la science; et le Iraduc-
teur lui fait dire: .... Sagka, cujas incol^ sacra is/amitua non nmis
iurant^ ntqMpenUtts affipsctre studenL Cette observation est encore de
M. Freytag, qui me i*a communiquée. Il est possible que, dans le manus-
crit, le mot UoJ» soit p;irtagé entre deux lignes, suivant un usage assez
ordinaire aux Arabes d* Afrique» et contraire à celui des Arabes d'Asie.
Au sujet du tombeau de Karham , fils d'Abbas et peiit-filscTAbd^almo-
talleb,que Ion voit à Bokhara, EbnBatouta dit, suivant la traduction
lAime( p, jrj : Supra quod magnum exstruxerunt cœnohium ; prospéra di cq
sibi ûugurantur.jidimqut ci habtnt insignem , itn ut magni faciani id ipsi
Tartaripaganî, Ii talloft traduire : Super quod magnum exsrruxcrunt cœ/w-
bium» hoc sepulcrum pro faustù omim rtpuîantes : quin et ipsi pagani }
Tartarorum numéro illud ( jepulcrj^m ) veneranfur et magna prosequunlur
rfv/rmf/^. IJjîsl impossible que dans ce lexte^ a tti^jj î)JL^j aj {j^(jjuj
jxJI j\â£s»sS^ ( ^* ^f )m iç* verbes yyf^-i-o — t>i^ et JLuî se rap-
portent au même sujets
Un peu plus loin, £bn-Batou(a , parlant desdeux villes de Caboul et
"^■^ JANVIER i»2â 2}
®Mlwisch, dît qiveHes hom habitées par le» Afghans , et ^ q^l^'^uTou^de
» ces deux villes H y a des monfîignes qui favorisent tes brigniidages de
^ ce peuple î> : ^JjWI if^ pyrtaft* JL^ U^^^ ^;>. /tf / M. Koseganen a
eti tpri de induire iDtin yervtnimus ad ùrbem Kahul, indt ad Ktrmâsch ,
(juarum incofit Afghanï ; ufr/ique moniilus vtas prœciudeutttus ctrcu m sep tu,
11 est impossible que le verbe ^yJ^îb *« rapporte k JL*^t et le pro-
nom U dans l^ aux deux villes précédemment nommées.
Je ne relèverai plus qu'une seule inexactitude, ou plutôt une phrase
un j)eu louche de la traducuon : car je crois que M* Kosegarten a bien
compris le sens du texie. Ehn-Batouta dit qu'il s'est trouvé dans la con-
trée habitée alors parles Bulgares, et éloignée de dix Journées de marche
de fa ville capitale des étais de Mohammed Uzbek-khan, durant le mois
de ramadhan, et que ia nuit y étoii si courte, que, de|mis le coucher du
soleil jusqu'à son lever, il n*avoiï que Je temfi6 nécessaire pour prendre
%Km repas, et faire, avant et après le repas, les prières, tant Joblrgarion
que de dévotion, dont un musulman s'acquitte dans les nuits de ce mois;
puis il ajoute: <JUiJ j ^^xf! j-Ju eLfj^, c'est-à-dire: «U en est de
» même du jour; il est pareilleuient très-court, quand vient la saison
» (des jours courts). » Dans la traduction latine, on lit : AJci hrt\4s suo
tfmpore ettam J'tes rsi ( p, 19 ) ; ce qui ne ftrésente pas un sens très-cfair.
M. Kosegarten, dans les notes qui accompagnent la seconde section
de sa dissertation, adonné un petit nombre d extraits de deux manuscrits,
fun arabe, l'autre persan, de la bibliothèque du duc de Saxe-Gotha, tous
deux relatif* à la géographie. Le premier est intitulé ^bYl ^jL^" et a
pour auteur , si l'un en croit le litre que lui adonné le copiste, le scheïkh
Aiau-Afi Fansiy mais quelques notes écrites sur le premier feuillet lat-
tribuent à diflereris écrivains, et le peu quen rapporte M, Kosegarten
ne permet pas de décider à qui il appartient eâecnirertient. Le second, si
Ion s'en rapporte à ce qu'on lit sur la première page , a pour litre
4fUUlt cUU!# , e>t connu plus généralement sous le titre de rJUVI j^^ ,
et a pour auteur Abouikasem Abd*allah, fils de Khordad <^bj^ Khorat
sani. M. Kosegarten ne doute point que cet Âbd-aIIah« fils de Khordad,
ne soit le même qu'un géographe cité par Abou Meda et par d'Herbelot,
sous le nom à^Abd-tdlah.Jils de Khardadbih, qui doit être mort \kn
Tan jco de Thégire. H y a sur tout ceci beaucoup de choses à observer.
I.* L'ouvrage intitulé A)\j!)i\ jy^^ et dont Hadji-Khalfa parlu dans
sa Bibliographie, n'est pojnt du nombre de ceux qui portent le titre de
<4JUil LîUU^ ( ou plutôt u^UUjdWL** }; il a pour auteur Abou^Zeïd
Ahmed ben-Sahel Baikhi * et contient vingt cartes représentant tom
Jes pays mu4ulnian&, avec I explication de chaque carte.
I
i4 TOURÎ4.4L DES.SAVANS,
a/ Si Vçfiy .sejj rapporte k 'ce <jue 4it Hadji-Khalfa au mot cjULwt
cliUj» AbQa'Jitasem AI d-albh,; fils de Khordad (ou , comme on ii*
dans le nun}isçrhj Aforé/aJ] Khorasanii est différent dVAbd-ailaii, Bh
de Khordadbèh, et chacun de ces auteurs a composé un livre sous c©
litre.
3/ Tous fes passages cités de ce manuscrit, si Ton en excepte la pré-
face, ajoutée après coup et par une main différente de celle qui a copié
fe corps du manuscrit, se relrouveni précisément dans la traduction per-
sane de l'ouvrage rfÇtn-Haukaf , cotnnie on peut %en assurer en compa-
rant les passages rapportés par M. Knsegarten , avec ce qu'on lit dans le
livre intitulé T/te oriintal Gcography of Ebn-Haukul , et publié par
M, W. Ouseley, p. 95 , 1 16, i4^ et 286.
4.* Au contraire, la préface est tout-à-fiut d'accord avec la description
que donne Hadjilvlulfa dii jfiîJlj'ïf jy* d'Abou-Zeïd Ahmed ben-Sahel
licilkhî. On y lit que fauteur, au lieu de suivre la division ordinaire en
sept climats, a ])artagé les pays quil décrit en vingt parties {^jJci et
non pas ^;i^*, comme la imprimé M. Kosegarten) , a donné kces vingt
parties le nom de dimats^ et en a tracé la figure.
De tout cela Je crois être tn droit de conclure que ce manuscrit n'est
qu*une copie de la traduction'persane du ijULrj t^L^ d'ILbn-Haukal,
et qu'ujie main récente a mal-à-propos placé en tête du volume la pré-
face du i?JUVI jys d'Abou-Zeïd Ahmed ben^ahel Balkhi*
Je noserois affirmer qu*Abd-a!Iah fils de Khordadbèh soit un person-
nage différent d'AI)ou'Jliasem Abd allah fils de Mordad, parce que, 1 .** il
est très-possibJe qu*un copiste ait écrit ^b^ au lieu de ->lj>>k; 2,'' le
monosyllabe bih *^ est une épilhète que les sectateurs de Zoroaslre
ajoutent volontiers à leur nom , et qui signifie d'tscipU de la vraie
nJigion, Au reste, on peut voir ce que j*ai dit sur les divers ouvrages
intitulés tdJUj ellL^ et sur leurs auteurs , en rendant compte de ik
Géographie d'£bn-Haukal, publiée par M* Ouseley, dans le Magasin
incjctùpiit'tque, année VII, tom, VI, p, JJ et suivantes,':
En lètç de fa préface du manuscrit persan dont il vient d'être question,
on lit ces mots lsIL» J^y j\ j(Jj ijf jà^.i, que M. Kosegarten a traduits
ainsi; Audi, 6 regens , frequentatorem regni. H paroît avoir confondu
jlj^» mot arabe qui signifie in orbem circumagins se et se dit du ciiîf ï^vec
jj' j , mot persan qui veut dire judex, administer regni, prînceps. En outrp
il est é\iden( que Je mot elU , qu*il a lu mouk et rendu par rcgni, est ou
déplacé , ou superflu , puisque [es deux membres de celte phrase doivent
rimer ensemble. Peut-être faut-iilire ainsi ; j\^ jl ^^^ ^1^ <AU^l.
^JANVIER 1820.
O domine ccefi, quoJsese cîrcuniûglt, audi votaillius qui ad te col en dam venitJ
Pendant que je rédigeois cette notice , j'ai eu connoîssance d'un nouveau
fragment de la relation des voyages d*Ebn-Baiouta, publié à léna avec
une préface, une traduction latine et des notes, sous les auspices de
M. Kosegarten , par un jeune orientaliste , M* Henri Apetz. Ce morceau
est intitulé: Desm/^iia terrm Malabar ,tx arabko Ebn-Bâtatœ itinerario
édita, &c. Unœ , 18 1 g. On reconnoît dans ce fragment > comme dans ceux
dont jai déjà parlé, la crédulité et la bonne foi rfEbn-Barouta. Une
chose singulière, c'est que, suivant cette relation, le nom arabe du
Malabar, jUJU, devroît être [)rononcé Aiouîdibar i mais il faut faire
attention que c'est labréviateur d'Ebn-Batouta , et non le voyageur lui-
même, qui a fixé la prononciation des noms étrangers, ainsi que cet
abréviateur a eu soin d*en avertir. Ebn-Batouta parle des Djoguîs,
4^^ , et de leurs mortifications prodigieuses ; d'un douli, sorte de palan-
quin 1 dont il écrit le nom Jji { voy. Zend-Avesta, t, l, //' partie,
p, 4^, note; a Dlctionary of Mohamedan Law, éfc.p* S6\\ des jonques
chinoises, dUa^, erau pluriel Jyoi., en chinois tckouen ; et de deux sortes
de bâtimens plus petits, que les Chinois nomment jj ^au et ^X^ cacam»
Le premier est le mot mo ou seou, qui sert de terme numéral quand on
parle de barques ou bateaux, et le second est peut-être le mol composé
koû'hdffg, petit bateau. Ces remarques , que je dois à M. Rémusat,
paroîtront peut-être minutieuses: maïs elles me paroîssent d'un grand
poids pour confirmer ce que f ai dit de la confiance que mérite la reiatioii
d' Ebn-Batouta*
SILVESTRE DE SACY.
EqueîAde , mofiumetîto antico M ùronio del Museo tmiionale
Ufigherese , considerato ne suai rcipporti coll' antichitâ jigu--
rata, &c. da Gaetano Cattaneo, &c. &c» &c.
On sait avec quelle profusion les Romains avoient répandu dans
toute l'étendue de leur empire les objets de leur culte et les symboles
de leur religion; il semble même que plus les sentimens de la piété
s'affoiblissoient chez eux, plus ils aflectoieni d'en muliiplier les images.
Lorsqu'ils eurent successivement déifié presque toutes les qualités morales
et physiques, et rempli leurniythologîe de divinités étrangères, il leur
resta encore des places pour une fouîe de dieux subalternes, dont les
attributions honteuses ou ridicules donnèrent souvent matière aux
D
JOURNAL DES SAVANS,
sarc:ismes de leurs philosophes, et sur-lcut aux inVectîves des premiers
écrivains thréiiens. TerluHien, enire autres, reprochoit aux Romains de
son temps feurs ma bons » leurs bains, leurs étabUs remplis d^idoles (i);
et Prudence s*exprirne à ce sujet à peu près dans les mêmes termes (2) :
Quanquam cur Ccnlam Roma mlh'i fingttls unum ,
Cum partis, domilfiis, thcrmis, stabults» so/eatîs
Adsignare suos Genws, perque cm nia membra
Urbis ,perqae locat, dniorum mil lia mal ta
Fingcre, ne propria vaat angulus ullus ab umbrat
Dans iiii autre endroit, le même poète désigne nominaiivejnent deux
de ces divinités, dont le siège est compris dans rénuméraiion quon
Yieni de lire ( 3 ] :
Nemo Cloacinx ^i/f Eponx supir astra deabus
Daî solium,
I^ première, dont le seul nom indique assez fa nature, présîdoit aux
égouts» La seconde, qu'il est moins aisé de caractériser, résidoit dans
h% établis, ainsi que lindiquece vers de Juvénal (4) :
Jurât
S&lam Eponam n fades olida ad pr^epia pic tas.
Et il existe un curieux passage d'Apulée, qui nous apprt^nd que limage
de cette grotesque divinité se plaçoit dans les élahles, et que Tonavoit
grand soin de la couronner de fleurs toujours nouvelles 1^) : Pilœ
mediœ, quœ stahuli trabes sustinebat ,jn ipso fer è medituHio, Eponœ deœ
simutûcrum , residens stdiculœ , quod accurati coroltis roseis] et quidem
rtcentibus , fverat ornatum.
Voilà à peu près tout ce que nous savions de la déesse Epone, dont
juîiqu'à ce jour limage avoir échappé à toutes les recherches des anti-
quaires; car il est reconnu depuis long-temps [6) que fa médaille avec
finscriptron Hippone, que Séguin aitribuoità cette déesse (7), appar-
tient à la ville ^Hippune, dans la Mauritanie Zeugiïane* C'est cette
lacune de rantiquiié figurée, que M» Catianeo a voulu remplir par la
publication d'une figure de bronze, portant Tinscriplion Equdas. Cette
figure, trouvée, en 1807, dans les ruines de Tantique Sirmium , et
déposée maintenant au musée national de Hongrie à Peslh , étoît
déjà connue par une dissertation de M, Haliczlii, directeur de ce musée;
(i) Tertuiî, dt SpectûCuL — (2) Contra Spnmachj Vib. Il , v, 44^ seq. — *
II) Id* Apoth. V. /j?7. — (4) Sa^r. VUi, v. /j/, — (5) Ahtamorph. lik iil ^
p, 2.2^, ed/t» Oudendorp, — (6) Vo/t-^ Le Blond, Acad. dts IfiscrJpi, tom,
XXXIX , p, jjj/ Eckhel, Doar. num, tom^ IV ^ p* /^<?. — (7} Sdtaa JVu*
tfihffj, p, ijt
li
JANVIER 1820. %7
nfais, en la reproduisant, le nouvel édifeur fa accompagnée de beau-
coup de notions, neuve? en partie, souvent curieuses, et toujours propres
k répandre un peu plus de jour sur divers points d'archéologie qui se
rattachent à ce(ut-Ià. On doit seulement regretter que (érudition que
déploie M, Caitaneo, naît pas été ejnpioyée sur un sujet plus impor-
tant, et que le résultat de tant de recherches et de rapprochemens se
Jjorne en définitive à nous faire un peu mieux connoître une des choses
que nous pouvions le mieux nous résigner à ignorer,
La figure dont il s'agit est un buste en bronze de douze pouces de
hauteur et du poids de quatorze livres et trots grains métriques; fa
grossièreté du travail lui assigne une époque voisine de celle de la
" lécadence des art5 , suivant lopinion de M. Cattaneo ; et celle du
premier éditeur , qui , d*après quelques signes particuliers , la rapporte
au temps d'Alexandre Sévère , ne s'en éloigne pas assez pour qu'il y ait
là matière à discussion. La tète est ceinte d'un large bandeau, qui aboutit
par derrière à un réseau d'une forme peu usitée. De ce bandeau s*élève,
droit sur Je milieu du front, une autre bande» laquelle se tennine, au
haut de la tête, en un corps fragmenté, qui, d'après le peu qui en
reste, est supposé avec beaucoup de vraisemblance avoir formé un
ajineau : il y a tant d'exemples de ce genre, et le cabinet du Roi, en
particulier, en fournîroit tant de preuves , que je n'hésite pas à changer
celte conjecture en certitude. Je n oserois en user de même à I égard
dune autre conjecture de M. Cattnneo, qui croit que, dans la partie
supérieure de la tète, lartiste a voulu modeler des cheveux , corne lisciûti
da un petrine (ij. Cette explication ne me paroît pas conforme à la
gravure du monument, tel quil est représenté dans l'ouvrage mêjne de
M. Catianeo : car, outre que cette coifiùre est toul-à-fait insolite, ure
pareille intention de l'artiste me semble réfutée par la manière assez
élégante dont les cheveux sont disposés en boucles au-dessous du
bandeau. Jajoute que des cheveux si lisses, si bien peignés, auroient
assez mal convenu à la divinité tutélaire des chevaux, qui, étant censée
dans un mouvement violent , devoit au contraire être représentée avec
les cheveux épars et flottans, comme on le voit sur cette peinture
antique du cirque de CaracaKa, publiée par AL Fea (2) et reproduire
par M. Cattaneo lui même (j). Enfin il me semble qu*à en juger par {a
gravure seule que M. Cattaneo a jointe à sa dissertation , l'artiste a voulu
exprimer ici, au lieu de cheveux plats, un de ces casques que nous
( I ) Pag. I j. — (1) Ùescriziane dti circhij ifc* Voy, tab* Jr y/. — (3 ) Tab. m,
it lab. /y, n, /.
D 1
zi JOURNAL DES SAVANS,
voyons sur la tête des conducteurs de chars , dans presque tous les bas-
reliefs représentant les jeux du cirque (i ) ; et ce que notre auteur appelle
un bandeau, n'est, à mes yeux, que le rebord ou le bourrelet de ce
casque, qui formoit un des signes caractéristiques de la profession de
cocher, et qui ne seroît sûrement pas déplacé sur la tète d'une divinité
de la nature de celle-ci.
Je seroîs également tenté de m'éloîgner de l'opinion de M. Cattaneo,
touchant lexplication qu'il donne de quelques signes ou ornemensque
porte le front de la statue. H appelle demi-lune une portion d'ornement
placée immédiatement au-dessous du bandeau , et dont le peu qui reste au-
jourd'hui, forme une ligne presque entièrement droite. De ce peu qui reste,
M. Cattaneo conclut que l'artiste a voulu exprimer un croissant, et , dans
un long cha|)itre (2^, il s'attache à montrer Tétroite relation qui devoit
exister entre la déesse des chevaux et celle de la nuit. II y a assurément , dans
les rapprochemensde notre auteur, des aperçus fins et parfois ingénieux:
mais n'est-ce pas aller chercher bien loin l'explication d'un signe peut-
être très-indifférent! et n'est-il pas à craindre qu'une érudition appuyée
sur un aussi frêle fondement ne soit déployée ici en pure perte (3) î Un
autre ornement qui, placé plus bas encore, sur le front même de la
déesse, ressemble passablement à deux croissans adossés, a paru plus
embarrassant h fauteur, qui, après quelques hésitations , s'est enfin décidé
à y voir un double éperon, symbole très-propre, selon lui, à caractériser
la déité des chevaux, et dont il cherche à prouver fusage par des té-
moignages d'auteurs grecs et latins. Cette dernière partie de son opinion
h'étoit pas la plus difficile h établir, et je conviens que les passages des
poètes et des lexicographes ne permettent nullement de douter que,
dès la plus haute antiquité, les cavaliers ne se soient servis d'éperons*
Mais ce qu'il falloit démontrer, c'est que l'ornement en question fût
Véritablement un éperon, représenté sous la double forme qu'on donnoit
à cet instrument : che la duplice sua forma ivi espress^i possa appunto
alludere alla duplice forma da me accennata degli stimoti posti in uso (4j.
Or, voici qticlques difficultés qui me semblent s'élever contre cette
opinion. D'al>ord cette double forme d'éperon n'est indiquée par aucun
auteur, que je sache : les expressions dejûv)fm et de iyiukvleA^f ^ qu'emploie
Julius Pollux (5}, paroissent plutôt être des termes synonymes, que des
(i) Voy. Onnphr. Panvin. de Lud. circens, lit. l , c. X ,p, jg; ibid. c, Xiv ,
p, ^0 et 4/. — (2) Chap. XIII, p. J6-65. — (3) Abbench} troncata in ainbe le
estreiniià, è évidente che ad altro soggetto non si saprebbe ricorrere per interpre^
tare il Jrammento che tuttavia ne riinane , p. 57. — (4) Chap. XI V, p. 71. — -
(5} J. Pollux, Onomast. lib, X , segm, XJJ.
"anvier 1820.
qualfncations de deux înslrumens divers, ou, du moins, je ne trois paa
que nous puissiojis, d'après ces expressions, dont nous sommes si pei
capables d'apprécier la différence, établir une double forme de l'objet
quel/es signifient. En second lieu , les éperons antiques qui nous restent,!
Cl que M. Catt«aneo donne d après le P. Monifaucon (i) et M. d«
Caylus (2}, ne ressemblent point à rornement figuré sur le front de
la statue: deux de ces rnstrumens» Tun de^^quels me paroît être cefui*tîn
même qu'a publié M, de Caylus » existent au cabinet du Roi, et la forme
en est presque absolument identique avec celle qu'on leur donnej
actuellement parmi nous, c'està-dire, fort peu analogue à celle de
fornement en question. Enfin il me semble qu© ce seroit tout an
moins une idée bizarre, que d'avoir placé sur le frorir d'une statue ur
5ymbole de cette espèce; et j'engage M. Caiianeo à en chercher uni
explication plus vraisemblable.
De J exjîlication desornemens qu'offre la tète de la déesse, Je passe,
avec M. Caitaneo, à l'interprétation même du nom de cette divinité, H
lequel nom , écrit Equeiûs, paroît avoir beaucoup embarrassé îe*J
docte commentateur, La dénomination sous laquelle elfe fut connue^]
des Romains (car il ne semble pas quelle Tait jamais été des Grecs ),^
est celle d'Hippona, dérivée, suivant les scholiastes de Ju vénal, de.
t'mmi^ cheval, et de ovcç, âne, ou plutôt, Epcna^ comme iiorïentj
invariablement les textes que j'ai déjà cités, et auxquels on peut joindre
les inscriptions rapportées dans Gnuer ( j ) , dans Doni ( 4) , et ailleurs ( ^
Un pass.'ige des ParnUihs de Plutarque (6), le seul, à ina connoissance^
.cil cette divinité soir nommée en grec» l'appelle imrwfojr (7) ; mars']
i
(i) Supplém. tom. IV, tab. XJl,fig,j, — (2) Recueil d'antiquités, r^m. ////
7. LXIX, fig^ j, — (3) Corpus in5cripl, wn, I , p. LX XXVil ^ n. p —
4) In script, antîq./?* jS, /i,* /02» — (ç) Tomasmi , fie Dû/jar, p, 210, M, Cat-
ianeo cite la page 1 76, qui esi etTectivement marquée dans la râble de l'ouvrage
de Tomasinî; mais le passage qu'il rapporte ne se trouve qu*à la page que j*aî
indiquée, — (6) Tom. Vil, p. 241 , edit. Reiske. — {7) Ni Keiske, nî
AL Huiten, éditeur plus récent des Œuvres morales de Plutarque {vid, loni. II.
p. 4-^9)» "*^ f<5"* 5^**" ^^ ^'^^^ aucunt! observation. Je relèverai ici une légère.^
inexactitude de M. Cattaneo, qui, dans sa noie sur ce passage de Plutarque"
fp. 2j}f dit q^yxEpona, Héité des chevaux ,éloit connue desUrientaux, et que les
habitans de Gaza rinvoquoicnt sous le nom de Aiarnas, li s^autonse de i>elden
(de Dits àyris , p. 2j6): mais Selden ne dit rien de parril, à Tendroil indiqué par,
M. Cartaneo; etr^xplrcanon qu'il donne en un aut re endroit ( p, i^t ) cfu mot ,
syriaque Aïarnas , ne répond nu lie m nr à Tidrede M. Cattaneo, puisque, selon
-Selden, ce mot signifie pater homini/m, dominas mortaltum , tt ne peut, avec
cette signification^ s'appliquer quau maître des dieux, au Jupiter grec.
}o JOURNAL DES SAVANS,
pfcisfeurs manuscrits et Tédition d'Aide portent E^^df , îeçon qui s'ac-
corde mieux avec celfe des écrivaiiis latins, et qui, à ce litre, mérite
d^èire préférée; Qaoi quil en soit de celte difficulté, sur laquelle j'aurai
peut*êire occasion de revenir, l^étyniologîe du nom de cette déesse , telle
quelle est donnée par le scholtaste, est trop conforme aux attributions
connues de cette déesse, pour que nous puissions refuser de l'admettre,
«fautant plus qu'elle est, en quelque sorte, confirmée par ce passage
de Minucius Félix : Vos H toios Asinos in stabuUî cum vestra bella Epona
consecratis. Cela posé, examinons fexplication que M, Cattaneo propose
du mot EQUEiAS. Ce savant, d après iobservationjque le mol Epona est
constamment usité par les Latins, quoiqu'étant d'origine grecque, pour
désigner une divinité qui leur est propre, trouve une extrême difficulté
à expliquer le mot E^ueias offert pour la première fois sur la statue en
question : Confessa che la difficolta cgrandissima, e pcr veriti non è {fuesta
la sold che pone a cimento la patienta , non chc il sapere dclV archeotogo ( t ) •
Pour résoudre cette difficulté, il s'attache à prouver que le mol Equdas
a pu provenir de celui d' Epona, par une suite de ces iransforjnations ou
altérations si fréquentes dans les âges de décadence où les deux idiomes
tendoieni perpétuellement à se confondre; et il s'autorise d'un passage
de Banhius (i), lequel prétend avoir lu Equonam, au lieu d'Eponam,
dans plusieurs manuscrits d auteurs latins* Nous aurions alors , s'écrie
M. Cattaneo, d*unt manïtre incontestable , Vanneau des changemtns çue ci
nom eut à subir dans son passage de la langue grecque a la langue latine, '\
Mais j'avoue que je ne puis encore approuver cette supposition. Le mol
que Barthius prétend avoir luj est un véritable barbarisme, qui n*a pour
lui aucune autorité; et Ion sait combien Ton doit en général se défier
de 1 érudition de cet auteur, et de sa mémoire, qui nétoit pas, à beau-
coup près, aussi fidèle qu'étendue. Pourquoi, d ailleurs, se créer une
difficulté si grave, d'une chose qui paroîten effet si simple î Pourquoi
voir dans le mot Equeias autre chose que la traduction latine du mot
grec ImwLvnl £t pourquoi s'étonner enfin qu'un monument appartenant
aux Romains nous offre la dénomination latine , au lieu d'un nom
plus usité peut-être par les poètes, mais qui, étant d'origine étrangère ,
n'étoit peut-être jamais devenu vulgaire ! Le premier éditeur avoit à
peu près eu la même idée, en supposant que les Latins avoient voulu, par
la terminaison en as du nom d^Equeias, conserver quelques traces de son
origine grecque : ce qui ne me paroît pas toulà-fait exact; et, en
(i) P^g. i9»20. — (i) Advtrsarior, commentât.'^, i^^lS-
JANVIER 1820, mAP îi
iMjvani ridée exprimée par le scholiaste, je croiroîs plutôt que le mot
JE^Lciasen formé des élémens latins equus et asinus^ correspondant aux
élémens grecs qui entrent dans la composition du mot i^ttwVii. Quoiqu'il
en soit de cette conjecture, à laquelle je suis loin d'attacher moi-même
aucune îrnponance, il me semble du moins très-probable que rinstription
latine du monument dont il s'agit, et qui a si vainement tourmenté
M. Caitaneo, n'est que Imterpré talion du nom pureinent grec de la
divinité qu'il représente.
Une dilBculié qui me semble plus réelle, et à laquelle cependant
M. Cattaneo ne p^iroit point avoir fait attention, c'est celle qui résulte
de la leçon même Eponam dans le \^xs. de Juvénal et dans celui de
Prudence, que j'ai cités plus haut. Quoique les manuscrits offrent
plusieurs variantes de cette leçon ( » ) , il est à peu près certain que celle-
ci est la seule bonne, puisque nous la voyons reproduite par un autre
poète avec la même quantité, et sur *des inscriptions d^une autorité
irrécusable. Or, comment le mot x^mTmt^^ originairement composé de
trois syllabes longues, a-l-il pu produire, en passant dans la langue des
Romains, un mot dont les deux premières syllabes sont nécessairement
brèves, indépendamment des autres modifications qu'on y remarque,
comme le changement de ïi en t et le dédoublement du^rî A cela je
pourroîs répondre que les Latins» en adoptant des mots de la Tangue
grecque, ne s'asserxissoieni pas toujours à la quantité fixée par celle-ci;
et j'en pourrois rapporter plus d'un exemple. De plus, on peut aisé-
ment rendre compte de la transformation successive du mot Hippona
en titponn et Epona^ par ce qu'on sait de Fusage où étoient probablement
les anciens Grecs et que fes nouveaux ont conservé i de ne prononcer
qu'une des deux mêmes consonnes qui se suivent immédiatement : les
exemples en sont encore assez connus, et Ton me dispensera d'en rap»
porter aucun* Quant au changejncni de Vi en t, qui a produit ensuite le
mot Eponam, il est de même expliqué par une foule de mots où cette
confusion se rencontre, ainsi que celle de la plupart des voyelles initiales*
Cestà l'usage de celte double transformation que fon doit ra[)porter la
permutation , assez fréquente dans les manuscrits, des syllabes Vm et mm y
comme, entre autres exemples que je pourrois en citer, dans celte phrase
de S* Basile (2) , Êvïfyi t6 m/vamt^H K^ riç èmtfÂAX^ttf tvl o^timuaL xafÂt^Hfnv , où
plusieurs manuîcrits portent ritç 1*9-7^^(^^x1 mi comme encore, dans cette
(1) M. Cattaneo en rapporte lui-même quelques-unes, d'après hifh manuscrits
de ta hibiiothcqtic Ambroisienne, p, iS* -* (2) HomïL VUS , tn Hrxûëmnçrt ^
rdit. Par. 1618 j lom. 1^ p. 104, B»
jt JOURNAL DES SAVANS,
phrase de S, Clément de Rome (i), 6 Â gS mS cifJ^ùç àJ^çUf l'pntJMVHç
(4Jbv tî ©41 > où l^s manuscrits portent i^Tr^ro/iArïc au lieu de imtfjuiniç* Je
n'en dirai pas davantage sur celte difficulté, à laquelle |e crois avoir
3>ufl] sain ment r(^pondu.
M. Cattaneo examine ensuire f'usage auquel a pu servir le bronze
S Equciadc , et il .se livre, à ce suyet > à des hypothèses fort doctes et fort
ingénieuses sans doMte^ mais que je noserois encore adopter aveuglément.
H trouve que la forme même de ce monument imite celle d'une clochetfe,
lintimiabuli}, et, en conséquence, il conjecture qu'il a bien pu servir à
cet usage (2.), Les témoignages qu'il rapporte, prouvent, en effet, ce
quiétoit probablement ignoré de bien peu d'antiquaires, que les anciens,
aussi-bien que les modernes, suspendoient des clochettes à diverses parties
du harnois des chevaux, pour les excitera la course. Mais ce qu*il
falloit prouver, c'est que ces clochettes avoient quelquefois la forme
d'une figure humaine ou d'un buste; et le seul exemple de ce genre que
cite M* Cattaneo, d après Montftucon (3) , loin de s'accorder avec son
opinion, y est manifestement contraire : l'ajoute que, de tous les îns*
trumens de cette espèce que possède fa collection du Roi, au nombre
d'une vingtaine, il n'en est aucun qui se rapproche tant soit peu de la
forme imaginée par M. Cattaneo, et que tous au contraire sont faits sur
le même modèle que nos clochettes modernes, M. Cattaneo exprime
ensuite une autre conjecture sur la destination probable de ce monument ;
et celle-ci du moins est plus vraisemblable: il pense que, comme la
cavité en est remplie d une matière solide , de la nature de celle que Pline
appelait probablement InhacoUa, ce bronze a bien pu servir de poids
de balance; et il cite à Fappui de cette supposition plusieurs bustes de
même métal, également remplis de matière solide, publiés par M* de
Caylus (4)* Toutefois, la seule preuve indubitable quon puisse produire
de cet usage où les anciens étoieni de donner à des poids de balance
la forme et les traits d une figure humaine , se tire de la balance entière
et bien conservée du musée du Capitole ; car les bustes détachés de
rinstrument donc on sitppose qu'ils ont fait partie, tels que ceux qu'a
publiés M. de Caylus, et qui existent au cabinet du Roi, ne prouvent
évidemment rien par eux-mêmes» N'y a-t-il pas, d'ailleurs, plus d'une
objection à faire contre cet usage, que M. Cattaneo semble regarder
comme si commun dans rantiquité, quoiqu'il en existe si peu de nionu-
{i) De Peregrinat, S. Pétri, ed. Par. 1 55 j , p. 43 , C. — {2) Chap. XV, p, yi*
— (3) Anliq. explîq. tom. V , pL LV , p, to6. — {4) Recueil dVntiq. tam. IV ^
pL XCiV'XCVU;t. VI, pi LXXXin u Vil^p^ XXXiV. r^
JANVIER 1810. 3r
mensJ Tous les poids qui nous restent sont solides, et le simple Ljoîi
sens prouve que cela devoît être ainsi. La méthode rfiniruduire en des
figures creiises une certaine quantité de niatîère solide» aétoit-elle pas,
en effet, sujette à une fouie rfinconvéniens , par la différence dt-
pesanteur spécifiqiîe des matières empfoyées à cet efletî et n étcit-il pas
plus simple, comme il est d ailleurs plus avéré > que Ton fondît de suiie
des poids de métal de la pesanteur déterminée par la loi, et dans le
rapport que cette loi établissoii pour les diverses mesures l De plus, un
gratid nombre de ces bustes de bronze ont pu n'être que postérieure-
ment remplis de liihocollc, pour leur donner plus de solidité et leur assurer
plus de durée; et fe soupçonne que, dans Je principe, ils ont pu être
destinés à plus d'un usag^Tel est, entre autres, un monument de la
colfection du Koi, qui a évidemment servi de vase, pour contenir, soit
de leau lustrale, soit toute autre liqueur. Quoi qu'il en soît, il me semble
que M, Caltaneo s'est laissé entraîner ici il des suppositions fort étran-
gères à Tobjet de ses recherches; et, au lieu de voir dans le monument
dont il s'agit un^' clochette ou un poids de balance » conjectures qui , Tune
et fautre, me semblent trop avilir fe monument qu*il s'est proposé
d'expliquer, il faut y voir tout naturellement un des objets du culte
particulier qu'une certaine classe d'hommes rendoit à la divinité des
chevaux, et qu Apulée assure en termes exprès que ton suspendoil dans
les écuries (1). L'anneau, dont cette figcire conserve des restes, n'a pas
eu certainement d'autre objet; et je pense qu'en pareil cas lexpiicaiioM
U plus naturelle doit être censée la plus vraie.
Je ne suivrai pas M. CatLmeo dans les autres parties de sa disserta-
tion , où il examine plusieurs questions relatives au sujet principal qu'il
s'est proposé de traiter. Toutes ces recherches n*y ont pas effectiveiiient
un rapport assez direct pour qu'il nous soit nécessaire de fy suivre : telle
est, par exemple, celle qui a pour objet les princtpaUs dénouïnntions diS
parties constituant réqulpement dun cheval (2) , où il me semble qre
fauteur a ajouté bien peu de chose aux connoîssances quon avait dcjà
sur ce point, H y a plus d'observations neuves et curieuses dans deuîc
autres chapitres où M. Cattaneo explique plusieurs inscriptions latines
relatives à la déesse Epona (j), et fait counoître égaltment quelques
monumens qui attestent l'existence de corporations formées , chez les
Romains , pour prendre soin de la nourriture et de l'éducation des
chevaux. En définitive, cette dissertation de M. Cattaneo, destinée à
(i) Voyez le passage d*Apiilée cité plus haut, p. 26. — (2) Chap. xi, p., 47'
î4. — (3) Chap. vin, p. 27-36.
54 JOURNAL DES SAVANS,
faire connoître un monument tout nouveau, et enrichie de notions
archéologiques fort variées , ne peut qu'ajouter à la réputation qu*if
s'est déjà acquise , et à la reconnoissance des antiquaires ; et je me
flatte qu'il ne verra à son tour, dans les observations que j'ai pris la
liberté de faire sur son travail, qu'un témoignage de l'intérêt que ce
travail m'a inspiré, et du prix que j'attache à l'estime de son auteur.
RAOUL-ROCHETTE.
A CLASSICAL AND.TOPOCRAPHICAL ToUR THROVGH GrEECE^
duTing theyears i8oi , i8oj et 1806, by Ifciward Dodwell , &c. ;
c est-à-dire , Voyage classique et topographique en Grèce,
exécuté pendant les années 1801 , i8oj et 1806 ^ par Ed".
Dodwell, membre de plusieurs académies, &c. Londres,
i8op, 2 voi, i/;-.^/ de près de 600 pages chacun, avec
une carte de la Grèce , soixante vues pittoresques en taille-
douce , et quarante-cinq gravures en bois.
Peu de voyages ont été plus impatiemment attendus que celui de
M. Dodwell. Depuis l'année 1806, où ce savant voyageur revint de
Grèce ^ rapportant de magnifiques dessins des plus beaux nionumens
et des plus beaux sites de cette terre classique, il avoit fixé sa résidence
i Rome, cette hôtellerie de TEurope, comme on la surnommée quelque-
fois. Là, il donna sans difficulté communication de ses dessins et de
ses plans aux voyageurs attirés de toutes parts dans cette capitale; ils
purent juger en outre, par sa conversation, avec quel soin il avoit
étudié les diverses parties de la Grèce, et que de notions précieuses
H y avoit recueillies 1 chacun rapporta dans sa patrie le nom du savant
voyageur , et inspira le plus vif désir de voir paroître cette riche col-
lection.
Ce Voyage vient enfin d'être publié, et nom nous empressons d'en
donner l'analyse à nos lecteurs. L'auteur a parfaitement senti que, s'il
loignoit à la narration de son Voyage des gravures dignes de ses magni-
fiques dessins, il en résulteroit un ouvrage extrêmement cher, à la
portée principalement de ceux qui ne liroient pas son livre; et, d'un
autre côté, s'il reproduîsoit tous ses dessins dans un petit format, il don-
neroit une imparfaite idée (Je cette m^tgniôque collection, que les amateurs
ont tant admirée il y a deux ans, lors de l'exposition que M. Dodwell
JANVIER 1820-
voulu en faire dans les salles de la biblîorhèque Mazarîne, C^i
voyageur .1 pris un mcno termine , en publiant le texte de son Voyage]
în-^J' f avec un certain nombre de vues pittoresques du même formatai
cjut sont» à proprement parler, des vignettes , et en réservant ses grajids*j
dessins pour une collection particulière qui se publie en ce jnoment sous J
fe titre de la Grice ; elle sera composée de douze parties ou livraisons j
contenant chacune cinq vues gravées en grand format et coloriées dans]
le genre des vues de Tlnde par Daniels. Le prix des douze livraisons]
doit être d*à peu près 800 francs. Mais revenons à la narration don
nous devons exclusivement nous occuper.
Elfe embrasse fa plus grande partie du continent de la Grèce , et nou^j
en donne une description complète. M. Dodwell la intitulée VoyagA
' classique , parce qu'en décrivant chaque lieu il ra|>porte et combin(f]
les textes anciens avec Péiat présent des villes, des nionumens^ avec]
les usages actuels: il discure les opinions de quelques-uns de ses prédé-*!
cesseurs, et s efforce de fixer les idée* sur des points encore obscurs J
Cette méthode Ta entraîné nécessairement dans beaucoup de longueurs!
H reproduit très-souvent des détaili que nous ont déjà lait connoitr^j
[es Voyages récens de Gell^ de Leake, de Hobhouse, de Clarke, le^j
Mémoires de Wafpole (1 ), de. ; en sorte que, si l'on réduisoit son livre
aux observations et aux descrîpîions propres à l'auteur, on en dimi-
nueroit probablement 1 étendue des deux tiers. Nous regrettons qu il
n'ait voulu rien sacrifier des notes de son journal: son ouvrage y auroi(|
beaucoup gagné, et le public n'y auroit point perdu.
Dans l'analyse que je vais en donner, je nliisisterai en conséquence]
que sur les observations propres h M. Dodwell, en glissant fort légére-^i
ment sur ce qui me paroîl avoir été bien décrit par ses prédécesseurs^
dont les ouvrages sont sous mes yeux, et que je cojnpare avec le sien.
Parti de Trieste en avril 1 801 , M. Dodwell longea la côte orientale
du golfe Adiiatique, et recueillit dln té ressan tes observations sur toutes
Tes îles dalmaiiennes ; sur Raguse» Cattaro, Monteneg:o, les monts!
Acrocérauniens, qui, dit-ih ccs^élèvent sous la forme de pics aigus, doni
i> la hauteur peut être de 4o<^<3 pieds; ils sont nus et stériles, excepté!
» vers la base, qui est couverte de bois. La partie qui s'avance 1^1
» plus dans la mer est une langue de terre appelée, d'après sa forme gi^i
» linguena. De là, à la côte de Tltaliela plus voisine, il y a jo mille*'
•* géographiques : cependant nous ne pûmes apercevoir la cote det |
» ritalie, bien que Tair fôt très-serein, parce que la terre est basses
' (1) Viy* le Journal des Savans, août 181 S> pag. 4^4'47^-
E
3Ô JOURNAL DES SAVANS,
î> circonstance qui n'n poînt échappé h Virgife ( yflmiJ, III , v. p^)*^^.
Apres avoir dépassé les rnonis Acrocérnuiiiens , M. Dodwell arrive à
Corfou, où il reste assez de temps pour bien observer tout ce que cette
île renferme. Elïe se divise en quatre provinces, Oros , Lcukimmo ou
Alcjk'tmo, MtTjo et Agfrtd ; elle contient environ cinquante-cinq mille
habîîansjdont quatorze mille dans la capitale, et le reste dispersé dans
une qunrantnîne de villages. «La partie méridionale de I île est sablon-
yy neuse et stérile j tout le reste est d'une extraordinaire fertilité, sur-tout
a» le canton de Mezzo, qui est un jardin continu, digne d^AIcinous. «
Cette île abonde en sites délicieux; à chaque pas on voit un paysage
digne du pinceau des plus grands maîtres.
Dans le |>assage de Corfou à Sainte-Maure [Leucade], on aperçoit
les îles de Sybora , dont parle 1 hucydide, et qui conservent encore leur
nom , et celles de Paxos et dAnrtpaxos: cette dernière n'est habitée que
par des chèvres. Le canal qui sépare Sainte-Maure du continent, est
guéable dans un temps calme : on y voit encore tes ruines d'un pont
construit par les Turcs, La plus grande partie de Hle est montueuse ; la
ville est malsaine en été» à cause des lagunes ou marais salans qui
Tenvironnent. Il reste bien peu de chose des ruines de Liucas : on y
rejnarque des pans de muraifles, où Ton reconnoît évidemment trois
genres de construction J'un sur fautre : le pretnîer est celui des poly-
gones irréguliers; le second, seinblable à celui des murs de Messène,
paroft être du temps d*£paminondas; le troisième est du temps des
Romains, comme on en juge par le mélange des briques et du ciment
avecles pierres. Ces murailles, qui conservent ainsi des traces de plu-
sieurs époques de construciion , sont assez communes dans la Grèce ;
la construction en polygones irréguiitrs est toujours placée sous les
autres constructions. De remplacement de Lcucûs , qui fut située sur
une montagne élevée, on jouit d'une vue étendue et magnifique sur
toute la côte de TEpire,
Après avoir fait une excursion sur les ruines de Nicopolis, appelée
maintenant Pûlaia Prtvesaf M. Dodwell se rendit à Ithaque , dont il
donne une description détaillée : mais , cotnme il convient que ses obser-
vations s'accordent en tout avec celles de M, GtH , dont louvrage est
sans doute connu de nos lecteurs , nous passeroas sous silence cette partie
dj nouveau voyr^ge , de même que la description de Cejïhallénie, qui
nous pnroît moins instructive que le f e^te.
Celle de ZaïynthCtau contraire, nous paroît renfermer des détails
curieux et neufs* Celle ile, dont la population est de quarante mille âmes
environ j ne j osséde aucun reste d'antiquité, excepte un bloc de marbre
. JANVIER 1820. J7
qui sert d autel dans une église; ii contient une inscription déjà publiée
par Chand 1er, ainsi que par Wright, dans son poème intitulé Homlonicœ.
«c Les célèbres sources de poix mentionnées par Hérodote ( i ) sont
» à douze ou treize milles de la ville : le puits qui en est à présent la
55 source principale, est à peu de distance de la mer; son diamètre n'ex-
» cède pas cinq pieds , et sa profondeur est de trois ou quatre. Sous
» ce rapport, il diffère complètement de la description d'Hérodote:
» mais, à la distance d'un quart de mille du rivage, on trouve un lieu
» qui paroît correspondre à la description de l'historien. Dans ce lieu ,
y> entouré d'un mur circulaire d'environ soixante-dix pieds de diamètre,
» le terrain est beaucoup plus tremblant qu'au dehors : ce qu'il y a de
5> singulier , c'est que le mode d'extractron du bitume, décrit par Héro-
» dote, s'est conservé sans altération, quelqu'imparfait qu'il soit; on y
« emploie les mêmes instrumens. Le bitume est produit dans un état
» de pureté complète; il s'élève à la surface de l'eau, qui est tellement
» imprégnée de cette substance, qu'elle réfléchit à l'œil une foule de
5> couleurs variées. »
En quittant l'île de Zacynthe, notre voyageur aborda sur la côte
d'Etolie , à la petite ville de Mesalongi , tout près de laquelle sont les
ruines considérables d'une ville antique, appelée maintenant tîç KweÎÉ^
Blpnvnç 79 i(^iy [h château de Sainte- Irène ] y et qu'on suppose être
(Eniajœ (2) : on y voit un réservoir ou un grenier d'une construction
singulière, un théâtre et plusieurs édifices , et sur-tout des murailles ,
dont l'enceinte, qui a environ deux milles de tour, est j)resque entière:
Jeur épaisseur est d'environ huit pieds; elles sont formées de gros blocs
bien unis; l'intérieur est rempli de blocailles qui forment une masse
extrêmement solide. « C'est, dit M. Dodwell, ïemplectum de Vitruve,
3> que cet auteur prétend n'avoir jamais été pratiqué chez les Grecs ; .
» mais il se trompe , comme le prouvent des murailles en Grèce d'une
5> haute antiquité. Les savans du pays croient que cette ville est Caly-
»don; ils furent très-fachés et désappointés quand je leur eus prouvé
»queCaiydon étoit située à plusieurs milles de là, sur les bords de
5> YEvenus. » Une excursion dans les environs de ce lieu fournit au
savant voyageur le sujet d'articles intéressans sur VAcAe/ous , fes
Eihinades , Dul'tchium et ÏEvenus. On sait que l'île de^Dulichium , dont
parle Homère, a été, chez les anciens et les modernes, l'objet de beau-
coup de discussions, et que sa situation est néanmoins encore inconnue.
—■^-^^-^ — - I . I ■ - - ■
(1) Herodot. 2 ,j^6.
(2) Cf, Geir^ Itinerary of Creece j p, 2^^^
38 JOURNAL DES SAVANS,
M. Dodwell pense que cette île, comme la Chrysédt Lemnos, pourroit
bien être mniriienant sous les eaux de la mer. ««. Dans le trajet de Za-
» cynthe à la côte d'EtoIie, dit-if, nous passâmes sur un bas-fond à huit
5> pieds au-dessous de l'eau; le capitaine me dit, Cela est Doulichût
» Surpris d'entendre prononcer un nom que je croyois inconnu dans le
»pays, je fui demandai ce que cela signifioit; il me répondît que Tîle
»de Donlichion, si célèbre au temps d*Homère, étoit le bas-fond sur
>> lequel nous passions actuellement, w Ce fait est bon à recueillir, bien
qu'on puisse soupçonner le capitaine d'être savant à la manière des
antiquaires de Cafydon, .
M. Dodwell se proposoit de partir de Patras pour visiter le Pélopon-
nèse : mais il apprit que la peste venoit de faire une apparition à Co-
rinthe , et qu'on craîgnoit qu elfe ne se fut étendue dans le reste de la
Morée; ce qui l'obligea de changer son plan et de se diriger vers la
Phocîde et la Béotie, après être resté peu de jours à Patra, Nous
n'extrairons point ce qu'il dit de cette ville, parce que les voyageurs
l'ont assez fiiit connoître; mais nous croyons devoir transcrire le passage
suivant sur la peste, ce II est surprenant que la Grèce ne soit pas plus
» souvent ravagée de ce fléau , quand on considère le moyen infernal
» que prennent pour l'étendre et le propager quelques misérables, vil
» rebut de l'espèce humaine ; je veux parler de la basse classe des Juifs
» et des Albanais. Rien ne peut donner une idée plus juste de leur
» infâme rapacité que l'anecdote suivante, qui m'a été racontée par
y> M, Strani. On sait qu'un homme qui a pu échapper à la peste, en est
^ plus difficilement atteint et y résiste beaucoup mieux ; qu'après une
» seconde maladie , sa constitution s'est en quelque sorte fortifiée contre
» fa peste, et qu'il peut presque impunément toucher aux objets infectés.
» Ceux des Juifs ou des Albanais qui sont dans ce cas, achètent ou
» volent les habits Ae% personnes qui ont succombé à la maladie: on
» a vu ces misérables plonger des éponges ou des linges dans le sang
» et dans les plaies des morts, et les jerer par les fenêtres dans les mai-
3> sons riches, avec l'espérance d'en faire périr lès habitans et d'hériter de
» leurs dépouilles. M. Strani vit un Albanais jeter chez lui une éponge
» infectée par fa fenêtre ; et ce fut par un^pur hasard que lux et sa famille
» échappèrent à la contagion, w
M. Dodwell, parti de Patras, longea la côte de l'EtoIie et de la
Locride; il y fit plusieurs stations, notamment à Naupncte et à Galaxidi,
qu'on suppose êire VŒanthia des anciens: cette dernière ville étoic prin-
cipalement située sur une péninsule de quelques centaines de toises,
où se trouvent des ruines peu considérables : il n'y découvrit qu'une
JANVIER 1820- 39
inscription tainulaîre insignifiante. Notre voyageur arriva dans ce lieu
un jour de grande fête ; ce qui lui permit de faire des observations
curieuses sur la danse, fa musique, les jeux et les costumes des gens du
pays.
A partir de Galaxidi, M. Dodwell s'achemina par terre vers la
Phocide : k trois heures de distance , sont les ruines d'une ville assez
considérable , sans acropole , comme Mégalopolis et Mantinée : on
ny voit ni fragmens de sculpture ni ornemens d'architecture; on n'y
trouve aucune inscription qui puisse en faire connoître le nom. La vif le
deSalona, anciennement Atnpkissa, est encore, comme autrefois, fa
ville la plus considérable du pays. L'acropole est un monceau de ruines;
M. Dodwell y découvrit un pavé en mosaïque grossière?nent tra-
vaillé. Voici ce qu'il dit à ce sujet : « Quoique, selon Pline, les Grecs
3> soient les inventeurs des pavés en mosaïque (1), il en existe main-
35 tenant très^peu dans la Grèce; ce pavé est le seul que j'aie vu entier:
»'il y en a encore un autre à Orchomène en Béotie; mais il étoit
^ y> couvert par les eaux lorsque je passai dans cette ville, et je ne pus
53 le voir. On trouve encore quelques pavés en mosaïque à Athènes
» et à Délos. 33
Un peu au-delà tie Salona, commence la plaine crîsséenne, fertile
et bien cultivée, qui s'éfend jusqu'au pied du Parnasse; on passe près
de Crissa, où, selon M. Gell,^il existe une inscription en boustro-
phédon, qui n'a .point encore été expliquée (2). Avant d'arriver au
village de Castri , on trouve des restes de murailles appartenant à l'an-
cienne Delphes; elles sont en emp/ecium : *c d*o\i il résulteroit, dit
» M. Dodwell, que Justin s'est trompé, quand il a dit que Delphes
» n'avoit point de murailles et n'étoit défendue que par des précipices»
» Toutefois il a pu dk être de Delphes comme d'OIympie (5) : elle fut ^
(i) Plin. XXXVI, 2j. — (2) Gell'j Itlnerary gf Gre.ce , p. tg4.
(3) 11 résulteroit de ce passage , que M. Dodwell regardoit Olympie comme
une ville; cependant il se contredit daris un a^ire endroit, puisqu'il dit for-
mellement: Olympie n'a Jamais été une ville (lom, 11, p. 326). Quoi qu'il ea
soit de cette contradiction, M. Dodwell auroit dû citer M. Gail, qui, le pre-
mier, a mis en avant cette opinion ingénieuse sur Olympie: elle finira, selon
toute apparence, par être généralement adoptée. Aux preuves qu'il en a don-
nées dans son mémoire lu en mars 1812, j'ajouterai ce texte positif d'une
scholie curieuse : *0?vfjLma. Ji 'Hi lêinç itç xj^ w UiKo'jnv/r.nY , ôr U.ffv m^i 'f'HhiJ^
A?*'^f (SchoL in Platon, Ruhnken. P'^8 ) i c'est-à-dire, « Olympie est un lieu
» du Péloponnèse, près de Pise, ville de l'Elide. » La préposition àf a ici le sens
de 'oe/f, comme en cent autres passages. ( Voy, ma note sur birabon, tom, V ^
f'JSiZ de la trad.fran^,) Cette scholie a été tirée d'une très-bonne source : car
4o JOURNAL DES SAVANS,
3> peut-être défendue dahord par la sainteté de son oracle et par la
» présence de son dieu, jusqu'à ce que l'événement eût prouvé qu'il
» falloir d'autres reinj)arts pour protéger le temple contre les profanes.
» Il est donc probable que la ville fut fortifiée après les incursions des
*> Phocidiens. » Celte conjecture parort d'autant plus juste, qu'à bien
examiner le texte d'Hérodote, on voit que la ville de Delphes, qui
existoit bien certainçment alors, quoi qu'en dise un savant helléniste (i),
n'avoit point encore de murailles à Fépoque où l'armée de Xerxès tenta
le pillage du temple. Il est vraisemblable que Justin applique à Tan 277 ,
éjjoque de l'expédition de Brennus , un état de choses plus ancien. Au
reste , on chercheroit vainement à Delphes des vestiges du fameux temple
d'Apollon, dont l'emplacement jest- tour-à-fait inconnu: on y trouve
seulement des fragmens informes , quelques inscriptions ; le staJc ,
le fait qu'elle exprime se retrouve dans une inscription du temps de Commode,
laquelle est relative à des jeux. On y lit : 'ÛAy/tt^na c# IT/Vif , UûjtA cr ùth^îç, &c.
^ap» Grurer ,;?. cccxiv, ;;.* i,) On voit par-là que les jeux olympiques se célé-
broienc à Pise, comme les jeux pythiques à Delphes, &c. II s'ensuit Qu'O-
lympie-étoit^ un hieron, distinct mais voisin de Pise, tel aue Yhieron d'Escu-
lape près d'Épidaure. Je passe sous silence d'autres textes au même genre qui
expliquent le passage d'Hérodote qu'on avoit opposç à M. Gail (voy. Rapport de
M. Ginguené sur Us travaux de ta classe de littérature, en i8ij ,p» ^et suiv,),
(i) L opinion du même savant sur lawilie de Delphes ne me paroît pat
devoir réunir autant de partisans que celle qu'il a émise sur Olympie. Les
lecteurs de ce Journal me sauront gré de consigner ici quelques mots sur ce
sujet assez curieux; et si M. Gail trouve justes les observations que je vais lui
«oumcttre, il pourra modifier son opinion quand il publiera son édition com-
plète d'Hérodote, dont il a déjà donne un important spécimen.
Dans ses Extraits d'Hérodote (p. 68 ), et dans ses Recherches historiques,
militaires et philolog'tjues (p. 198), ce savant s'exprima îunsi : «Je suis con-
» vaincu que, dans les temps anciens, la ville de Delphes n'a pas plus existé
n qu'Olympie. » Ailleurs il dit : « Hérodote ne parle jamais de la ville de Delphes,
«qui, ainsi que je l'ai déjà remarqué, n'existoit peut-être pas du temps de cet
m historien ( Kech. p. 201 ; Extr. d'Hérod. p. 85 ), &c.
Il paroît cependant bien certain qu'Hérodote parle en termes formels de
Li ville de Delphes : c'est au livre VllI, où l'historien décrit l'approche des
Perses et la consternation des Delphiens, « Les Delphiens, dit-il, ayant reçu
• cette nouvcllr, s'occupèrent de leftr propre salut; ils envoyèrent leurs cn-
wfans et leurs temmes de l'autre côté de la mer, en Achaïe. La plupart d'entre
■• eux gravirent sur les sommités du Parnasse, ou montèrent à l'antre de Corycie;
M d'autres se réfugièrent à Amphissa de Locride : ainsi tous les Delphiens aban^
jo donnèrent Id vV/^^ à l'exception de soixante hommes et du prophète, m {lituiiç
Ji Zt 0/ ArA^oî 'EHL'AinON TH'N ITO'AIN , 7:^nv î^tinjo/io. ccV/^wr ^ « éOt^i^na
Herod. viil, j6 fin») Quoi de plus positil^ que ces paroles, pour prouver
l'exiitence de la \ille de Delphes ! Le même 9
! savant helléniste dit ailleurs (Notes
JANVIER 1820- 4i
qui est assez hien conservé ; un édifice circulaire , qtai me paroh avoir été
un exidre pour s'asseoir et se reposer, et où on lit une inscription fruste
qui apprend que fédifice fut construit sous Farchonîat d*Aristagoras (t) ;
la fontaine de Castalie, dont les eaux sont encore limpides et excel*
/entes; enfin la grotte de Corycie, que M* Dodwell recommande fi^rt
aux voyageurs de ne pas se donner la peine d*alfer voir, attendu qu'elfe
n'offre absolument rien de curieux. En plusieurs endroits, près de
Delphes , M, Dodwell vit des tombeaux taillés dans le roc : « Quelques-
a> uns des sarcophages qui y sont contenus, dit-il, sont encore couverts ,
» et je ne doute point qu*ils ne contiennent des vases d'une grande
» antiquité. Je me repentirai toujours de ne les avoir point fait ouvrir; et
sè je recommande fort aux voyageurs à venir de ne pas manquer de
» le faire. >ï
De Delphes ou Castrî, notre voyageur se rendit à Lébadée , en pas-
sant par Ddulis et Panopée» Entre Delphes et Daulis, if existe les ruines
d'une ville antique, dont il est très-dijfficile de déterminer le nom.
Tout près de là, on arrive à un endroit où trois routes se rencontrent,
appelé dans le pays çiri, ou h défilé. M. Dodwell soupçonne que c'est là
ii chemin qui fourche, oii fut tué Laïus; et en effet, Apollodore (2) [e
iur le discours de Déwosthène pour la Couronne ^ p, t^^) : «Pourquoi, en parlant
î« des Delphiens, Démosthéne ciie-t-H leur hîtron et leur territoire, et non leur
>i ville! C est qu'alors, du temps de Démosthéne, la ville dt- Delphes n^exlsioitpas
'»encore*n II est certain au contraire qu*elle existoit déjà depuis long-temps; car,
indépendamment d'Hérodote, Euripide, presque contemporain de cet historien,
parle de cette ville comme déjà existante lors de la guerre de Troie, et même des
le temps d'Érechtltée ; il dit, dans VAndromaque (v, S1S4.) , Am' *^Tn ^£A<I>rïN
uç dieSfJLêiTBy no'AIN, et dans V/on (v. 66$) , MiMm AEA^I'a' <MtAm7y no'AIN.
Dans ces passages, le poète reporte IViistence de la ville de Delphes à une
époque fort ancienne, sans doute d'après !a tradition conservée par Pausaniâs
( X ,c, 6), Cette tradition, suivie par Euripide, prouve du moins que, de son
temps, Deïphes passoii pour une ville si ancienne, que son origine se perdoit
dans la nuit des temps mythologiques.
(i) Cette inscription, trés-curieuse, est maintenant tronquée 5 Us deux lignes
ne portent plus que :
' £niAPI2TArOPAAPXONTOEENAEA<»OIS
AITnADNnOAIMAPXOTAAEHANAPOr
Du temps de Cvriaque d'Ancône, elle étoit entière, et portoit, tTil AM2TA-
rOPA APXONtoS EN AEA<^OI2 HTAAIAS EAP1NH2 lEPOMNHMONOTN-
THN AITHAfiN nOAEMAPXOT AAEHAMENOT (il est probaiilc queCyriaque
a mal lu) AAMONOS; c'esi-à-dire, « Aristagpras étant archonre à Delphes, fas-
10 semblée étant celle du printemps, les Etolrens exerçant rhiéromnémonie,
» Alexaméne (ou Alexandre) fils de Damon étant polémarque).
{2) h^oMoi. BMÎQth. 111,$,/^
4* JOURNAL DES SAVANS,
nomaîe nrn i^iç) ce qui est presque le nom moderne. Avant d'arriver
i Duu/Jsm on traverse le village de Disiomo , qui est Tancienne Ambrysos.
DaaVis n'est plus qu'un village de soixante maisons, qui renferme néan*
Jîioins dix^huit églises, te La même disproportion, dit le voyageur,
>» existe dans la plus grande partie de la Grèce ; toutefois i^e^l bon
» d'observer que ces «'ciifices sacrés ne sont, en général, composés que
^ de quatre murailles nues, formées de fragmens antiques, et le plus
jî souvent sans toit ; Tautel n*est ordinairement qu un morceau de marbre
» avec une inscription en dessous, supporté par un fragment de colonne
n ou le piédestal d'une statue. Les prêtres grecs imposent quelquefois à
*> leurs [léniiens, en expiation de quelques fautes, lobligaiiun de cons^
» tiuire une église; et c'est ce qui rend raison de ce grajid nombre d'édp-
» lîces sacrés ( i). Les portes, même des plusbeaux,sont si étroites,qu*mt
» seul homme peut y passer à- la-fois; cest afin que les Turcs, ne pou-
» vant y faire entrer leurs chevaux, ne convertissent point les églises en
» écuries-, ce qu'ils ne manquent pas de faire toutes les fois que la porte
» est assez large. >» Notre voyageur trouva la curiosité des Dauli^ns assez
incommode: sa maison ctoi| toujours remplie de visiteurs, en présence
desqueL il ctoil obligé de prendre ses repas. « J'avois, ditil , une bouteille
3> d'un x^u^ sombre, remplie de vin ; les villageois , qui n «voient jamais
n vu de bouteilles de Cette sorte, imaginoicnt que celle ci liroit sa cou*
^ leur du vin qu'elle contenoit : quand ils virent qu'elle fa conservoit , bien
>î qu'on Peut presque vidée, ils s'imaginèrent que c'étoit une bouteille
>ï magique qui avoit la propriété de rester toujours pleine j et ce ne fut
n qu'après l'avoir bien maniée et retournée qu'ils revinrent de leur foife
»9 opinion. » Les murs de Wicropolïs de Daulis subsistent encore; ils
n'offVent rien de bien remarquable : ceux de Panopée, maintenant Agios-
Blashs, offrent trois genres diflïrens de construction.
Lébadée est une ville de dix mille habitans, dont la moitié Turcs;
elle est située dans un pays fertile en soie, coton, riz, tabac et blé.
Le vin y est abondant, mais de mauvaise qualité, à cause de la résine
qu'on y met en assez grand* quantité (2), selon l'usage dont les auteurs
anciens parlent souvent. Le territoire de cette ville est fréquemnient
ravagé par les sauterelles. Dans le printemps de i 8oj , la quantité de ces
insectes fut si considérable, que, les primat^ grecs ayant promis quatre
paras pour chaque oque [1 kilogr. i^y gr. ] de sauterelles, on leur
(j) II paurroilse faire ausu que cette diiproportion indiquai que la popula-
tion des villes ( t des village» a tou|ours été en 4écrots5anr.
(2) ClaxU'-^ Trjyds, yçfJ/J.iKpj.
JANVIER 1820. 4j
apporta quatre-vingt iîmIIc oques ou quaire-vingt-dix-neu^ mille sept
cent soixante kilogrammes pesant. De tous les monumens de .Lébadée,
il ne reste presque rien. Ûantre de Trophonius ayant déjà été décrit
par d autres voyageurs, et sur- tout par le D/ Clarke (1) , je passerai >
sous silence ce qu'en dit M. Dodwelf. '
A deux heures de Lébadée est ie village de Kapourna , situé sur Fem*
placement de l'ancienne Chéronée, cù l'on voit encore les murs de
Yacropolis, qui paroissent être du temps d'Epaminondas ; un théâtre
fort petit, mais bien conservé; un trône en inarbre blanc , que les habi-
tans appellent le rrone de Plutar^ue (2). Sur la route de Chéronée à
Orcbomène, on traverse ia plaine où se donna la bataille. Orchomène
conserve des restes de son ancienne magnificence, parmi lesquels il faut
remarquer le trésor de Aiinyas , que Pausanias appelle une des merveilles
de la Grèce (3), et qui est encore assez bien conservé. Les murs de
ïacropolis sont de trois constructions différentes: « ce qui s'accorde très-
» bien avec Fhistoire ; car Diodore nous apprend qu'Orchomène fui
>> détruite deux fois, Tune par Hercule (4), l'autre par lesThébains,
» vers }(î4 avant J, C.» ( j). C'est du haut de celte ûcropolis qu'on jouît
de la plus belle vue du lac Copaïs, dont Spon a déjà donné une descrip-
tion très- exacte; M. Dodwell y ajoute beaucoup de détails nouveaux et
intéressans, principalement sur les catabathra ou canaux souterrains qui
servoient à Tépanchement du trop-plein des eaux.
Sans offrir le même intérêt que les ruines d'Orchomène, celles
^'Haliarte et de Thespies méritent de fixer l'attention du voyageur-:
Thespies paroît avoir été située sur l'emplacement d'un village appelé
Eremo-Castrq.
Thèbes , si célèbre dans l'histoire, n*a presque plus aucun verstigede
son antique splendeur; les édifices mentionnés par Pausanias ont tout-
à-fàit disparu. M. Dodwell fait quelques efforts pour éclaircir la topo-
graphie ancienne de cette ville : ce n'est pas sa &ùee, s'il n'est arrivé qu%
^s résultats assez incertains. De Thèbes , il dirigea sa route vers Athènes ,
en passant par Platées et Eleuthères, dont il donne une description dé-
taillée, que je n'analyserai pas, M. Spencer Stanhope ayant fait connoître
suffisamment ces deux villes (6) ; je mécontente de transcrire cette
( \) Clarkc'j Travels, vol IV, p, 126. — (2) Idem , vol. IV, p, 128-148. —
[i] Pausan. ix,j8»-^{4) Diod. Sic. /F,/, /o. — (j) J'observe que Diodore ne
dît point qu'Orchomène fut détruite par les Thébains : il dit seulement , comme
Pausanias, que les habitans en furent massacrés ou chassés. (Dîod. XV, S*7^*i
Pausan. xv , /. 27. ) — (6) Fiy*^ le Journal des^Savans, Décembre 1817.
F £
U JOURNAL DES SAVANS,
observation, que je crois neuve; « Les murs de Platées sont , en quelques
y» parues, très-bien conservés : ils sont curieux pour i histoire de Tartf
>y parce que nous connoissons I époque précise de leur construction , ou
^ plutôt de leur restauration ;car ils furent rebâtis au temps d'Alexandre,
» II est digne de remarque que les murailles des autres villes de ia
^5 Grèce ^ dont la construction est semblable h celle des murs de Platées,
M ont toutes été bâties k peu près len même ten^ps. Les murs de Messène
» et de Megalopolts , une partie de ceux d'Orchomène et d*A/nùryfof,
» ressemblent à ceux de Platées : or nous savons que leur érection ou
» leur restauration correspond avec cette époque, n
AL Dudwell a consacré à la description d'Athènes et de FAttique
environ trois cent soixante pages du premier volume et cinquante du
second; cette description est un peu longue. Comme les mcnumens
de cette ville ont été souvent décrits et dessinés, il est peu nécessaire
d avenir que presque toute cette description porte sur des objets connus;
aussi , sans entrer dans lanalyse des détails nombreux qui fa composent,
je me contenterai d avertir qu'elle laisse peu de chose à désirer pour Tétat
passé et présent de (avilie. Les lecteurs y trouveront réunis tout ce qu'ifs
savent et ce qu1ls ignorent ; car les observations propres à M, Dodwefl
sont fort nombreuses et presque toujours intéressantes; elles ajoutent
beaucoupàceque nous ont apprisses prédécesseurs, et même, en dernier
Iîeu,sescompatriotesCIarkeet Willtins, dont l'ouvrage a été analysé dans
ce journal (*)/ Ses observations intéressent sur-tout l'histoire de V^H;
elles sont entreu^éiées d'anecdotes souvent curieuses : par exemple , après
avoir décrit le monument choragique de Lysicrates, dit /a lanttrne de
Démcsthinc , il ajoute : «Ce monument, qui a traversé vingt siècles, a été
^ construit avec une si grande solidité, qu'il peut subsister un égal nombre
» d'aruiées,!! moins qu'on ne le munie pour satisfaire la cupidité sans goût
» de quelque riche voyageur* Le supérieur du couvent m'a assuré qu'en
»> tSoi on lui fit des propositions à lui et au vayvode, pour l'achat du
» monument entier, qu*on auroit transporté dans un autre pays; ce mo-
» nument ne fut conservé que parce qu*il étoit renfermé dans l'enceinte
>i du monastère. Ainsi, tant que le couvent subsistera, on peut espérer
» qu*un si curieux monument sera garanti contre la ra}>acité aveugle des
3î amateurs et l'ignorance destructive des Mahoinétnns. jj On voit par
ce pa^^îage que notre voyageur est fort peu partisan de ceux qui ont
mutilé les monumens rfAthènes. Toutes les fois que loccasion s'en pré-
sente, il ne manque pas d'exhaler I indignation que lui fait éprouver une
(i) ^/fifwit/i; a. Voyci k Journal des Savan.^ d'octobre 1817* p. J9C*596,
JANVIER 1820.
45
spoliation qu il qualifie de désiionorante pour (a nation britannique. A
propos des cariatides du PauJrosium , il dit^ « Il n en reste plus que
^ quatre, depuis hriZ/ûge de Vûcropolis en 1 801 ; un pilastre mai cons-
» truit fui substitue à la cariatide enlevée, afin de soutenir Tentable-
ï» nient : les voyageurs à venir graveront probablement sur ce pilastre »
» EAFiNOi £noi£l, pour conserver le nom de l*auieur. Le comte de
*>CuiIford, entraîné par sa vénération pour les ruines classiques de
» Yacropolis , a fait faire une copie en pierre de la cariatide du ituisée
>> britannique , et Ta déjii envoyée à Athènes pour remplacer l'original.
« Ne seroit-ii point digne de notre pays d'imiter un si noble exemple, et
» de rendre ainsi à YErechtkeum la colonne et la portion d'entablement
» qu^on en a détachées! j>
Jai dit que M, Dod\veII écJaircii, en passant , fceaucoup de te^tles
anciens; quelquefois il en propose des explications puisées dans la
connojssance des lieux : je citerai pour exemple son opinion sur le
YitfmfK^v ru];fç de VacropoUs , construit par Cimon. Selon lui, c'étoit non
pas une portion de mur , comme on Fa cru , mais un petit fort, bâti au sud
de ïaçropolh ; cette opinion a beaucoup de vraisemblance. A farlicle qui
concerne la pvorte d'Hadrien, M, Dodwell entend le> deux vers ïambiques
qui sont pWés sur la frise, dans le sens que je leur ai donné, contre
Topinion de M. Willtins (1).
Après la description d'Athènes, M. Dodwell passe à celle des ports
de Pirée , Phalère et Munychie. Les traces des longs murs sont encore
visibles en plusieurs endroits; mais ceux qui entouroient la péninsule du
Pirée sont les mieux conservés. Près du port Munychie, on voit les
ruines d'un périt temple dorique, que M. Dodwell croit être celui de
Diane Munychienne. Le Phalère est plus petit que le port de Munychie»
et entièrement abandonné; à la vérité, il est si ensablé» qu*il ne peut
recevoir que de irès-peîites embarcations. Les ruines de la bourgade de
Pirée se voient encore à Test de la péninsule. Les carrières dont on a
(1) En relisant le passage de mon article relatif à cette inscription (v* SPO *
je vois qu'une transposition^ qui m'a échappé, à la correction de l'épreuve,
estropie le vers ïambique; an lieu de A^*/!* tU* ^hintm ^^ « ©jîcriWf Wa^c, lisez
At tf[ f/V iSîtvtf^ ©«flia'f « *»fif mMç, Je profiterai de Toccasion pour relever
quelques fautes dans un autre article imprimé pendant mon absence. Cahier
de juillet 1819, p, 300, U 19, ^éhniav, lisez élhHim, Même page, note a, I, 2,
lOTa^^tr{-, lisez l^zwpiiç^. Note 5, la correction que je propose nVsi point néces-
saire; x^ tpvjuaif s'entend si l'on donne à t^lt sens de tjuùique , qu*il a bien
souvent. Noie 4 , tWft/df , lisez i^rirM^. Pag. 393 , \, a, l^'^iiyHi \ut^ J^fm-
^rof. Fag. 396, note, ttff^iAffiî, liseï ùi<rpaLhiiùf.
46 JOURNAL DES.^AVANS,
tiré les pierres pour la construction du Pirée, sont encore visibles et
ressemblent en petit aux Iitomies de Syracuse.
C'^st au nord du Pirée qu'étoit la necropolis ou le cîineiière de la
¥ille. M. Dodwell fit ouvrir quelques tombeaux qui lui parurent par-
feftemei\t conservés; ce qui résulta de cette opération est assez curieux
pour que j'en dise quelques mots. I>ans fe premier tombeau , il trouva
d'aboitl les os d'un bélier, qui tombèrent efi poussière , excepté fes
cornes et les mâchoires ( i ) ; au-dessous étoient des ossemens humains
et une patèrede bronze: (e second tombeau renfermoit, outre des osse-
mens humains , une lame de bronte (2) , portant 'AiOAaPOS ♦PEA-
{fftn)* Dani un troisième tombeau, il trouva deux squelettes et huit
bouteilles de' verre non brisées : dans un autre étoit une épée de fer de
deux pieds cinq potdlk (736 millim.), y compris la poignée. M. Dôdwell
conjecture ingénieusement, d'après cette petite dimension, que Fépée esC
antérieure à Iphicrate, qui fit doubler la longueur des épées athé-
niennes {3 )• « II est digne de remarque que toutes les armes défensives
* et offensives qui, Jusqu'ici , ont été trouvées en Grèce, sont de bronze,
t> excepté cette épée, un curieux casque déterré à Athènes, des balIes^
» de fronde en plomb, et des pointes de flèches en pierre. »> Un autre
tombeau renfermoit un peiit masque en terre cuite avec- la bouche
ouverte. II y avoit dans un autre sépulcre une figure de philosophe en
terre cuite polychrome et de petite dimension : elle ressemble tout^à-
fait aux statues de marbre de Ménandre et de Posidîppe, et plus encore
à celle de Démosthène, qui tient un volume sur les genoux; les parties
nues sont couleur de chaff ; la draperie est en ptetie blanche, le siège
bleu, le volume rouge. Plusieurs tombeaux* renfermoient des vases en
marbre, des flacons d'albâtre et des vases peints, des lampes, dont la
description, dans le nouveau Voyage , est pleine d'intérêt et très-cuneuse
pour les antiquaires. D'après le petit nombre diurnes cinéraires qui ont
été découvertes en Grèce, on peut juger que iusage d'enterrer le corps
entier étoit plus commun que celui de le brûler, ce Comme on suppose
» généralement 9 dit M. Dodwell , que les Athéniens mettoient une petite
)• pièce de inonnoie dians la bouche de leurs morts » je m'attendois à en
»» trt>uverune dam chaque tombeau, et je cherchai avec soin; mais je ne
(i) On sacrifiott ordinairemeot un bclicr noir sur les tombeaux aux divi-
nités infernales ; et probaWemitfnt les 0$ de la victime étoient enterrés avec
\t défunt. — (2) Feu M. Akerblai) a composé et publié à Rome, en i8r 1 J
une dissertation fort curieuse lur cette sonc de lames de métal. — (3) Diod«
Sic. XV, 4i'
JANVIER iQlCk ï?
^ pus en découvrir qu'une seule r qui étoit de cuivre et presque eflfàcée :
^ d autres personnes, qui ont ouvert quelques centaines de tombes , m'as*
9> surère;|it qu'elles y avoient bien rarement trouvé des pièces de monnoie ;
» celles qu'on en a retirées sont ordinairement l'obole athénienne. Si
p» elles ont servi à payer l'entrée des lieux infernaux , il faut croire que
«••les mprts privoient souvent Caron de ce léger tribut. »
Dans un second article , nous terminerons l'analyse de ce Voyage. •
LETRONNE.
Deux Lettres a Mylord Comte dAberdeen sur
l'authenticité des Inscriptions de Fourmont; par M. Raoul*
Rochette, membre de f Institut royal de France, Conservateur
du Cabinet des médailles et ^antiques de la Bibliothèque du
Roi, Tun des Rédacteurs du Journal des Savans , etc. Paris «
1 8 ijp ,îniprîmerle royale, M-^.'de i4o pages , avccjfigures.
SECOND EXTRAIT.
: J'Ai iàit voir» dans mon premier extrait , avec quel avantage l'auteur
de ces Lettres repousse les objections faites par M. Knight contre fins*
cription de la chapelle d'Oga et contre celle SAmyclm. Je continuerai
d'analyser ces jobjections, et les réponses de M. Raoul-Rochette, en y
joignant f comme ffiTai déjà fait, quelques observations kur les' points
qui me laissent encore des doutes» Je les soumets d'autant ptùsvoldhliers
à l'auteur, qu'ils pourront fut fournir, soit l'occasion de modifier ou
d'étendre ses idées , soit laanatjère de quelques discussions nouvelles,
quand il publiera le travail complet qu'il annonce sur les inscriptions de
Fourmont. .
.. Qxi a pu remarquer que les difiScuItés élevées par M. Knîght contre
Finscription dAmyclœ ne reposent toutes que sur des argument- négatifs.
J-en citerai encore denjix exemples.
il s'étonoeque , dans la plus ancienne des deux inscriptions SAmytla,
ou plutôt dans l'un des deux fragmens de la même inscription , écrite »
comme on le croit , à deux époques différentes» Fourmont ait «remplacé
Xita omM alpha ç^\ se trouve dans l'autre fragment, par deux fpsihn,
cdmme dans le mot amtmoneb au lieu de AMTMpNH ou amtmona : il
l'accuse d'avoir ainsi trahi son ignof^nçe ; « car nos pareille orthographe ^
» qui n'est autorisée par aucun monument^ est, selon M, Knight,
4J JOURNAL DES SAVANS,
» en formelle contradiction avec le passage du Cratylus ou Platon die
*> Ncus nous servions autrefois de /'epsilon , et non de /'êta ( r ). » M. Raoul-
Rochette observe très-judicieusement que ce lexre de Platon, n'étant
relatif qu*aux Athéniens , nVmpéche pas d admettre que, dans des temps
encore plus anciens, chez un autre peuple, et dans un autre dialecte, on
ait pu employer les deux ee à la place de l/iû, de même que fe double
wmieron à {a place de Vomega : à Tappui de cette observation , il rapporte
plusieurs exemples de leinploi des lettres doubles pour exprimer le son
des voyelles longues* Il est vrai que, dans le nombre de ces exemples, il
u'en cite point de deux EE pour ïéia; mais Tanalogie suffit pour en
rendre Temploi extrêmement probable, La réponse de M. Raoul-Rochelte
ine paroît donc convaincante contre lassenion de M. IGiight ; toutefois
il ne s'en contente pas encore, il allègue de plus en sa faveur un autre
passage du Cratylus : «M, Knight, dit-il, aura lu ce traité avec bien
i9 peu d^atteniion, puisque , quelques pages auparavant, Platon dît qu'(?n
99 se servQit anciennement de deux ee au lieu de /'êta. Ce passage donne
*>à son asseïtion un démenti bien formel, et je pourrois me dispenser
>i d'une réfutation plys longue, » Ici, f avoue que M, Knight n*a pas
tout le tort dont laccuse son critique ; car, à mon sens, le passage de
Platon, examiné dans son ensemble, et non dans un seul membre de
phrase, ne prête nullement à cette interprétation. Platon hasarde ici, par
la bouche de Socrate, une étymologie du mot vitiçjç^ ridicule, comme
le sont presque toutes les étyinologies du Cratylus : il fait venir ce mot
de tin lOTf , désir du nouveau. «C*est, dit-il, ce penchant de lame vers ce
>>qui est neuf, que l'inventeur du mot a caractérisé par nUmçx car»
>» dans Torigine, ce mot ne se disoit pas riwwc; au lieu de ranCTc par H, on
:»> devoit écrire nit^n par deux EE (2), » Or, remarquez bien que hh
deux £E ne sont point consécutifs, comme il faudroit qu'ils le fussent s^ib
étoient là pour remplacer l'éta; ils sont séparés par Vùmieron : cette seule
observation suffit pour montrer que Platon, bien loin de dire en général
fu'au Heu de /'êta an employait anciennement deux EE, ne parle que d'un
cas particulier au mol dont il donne actuellement letymologie, Afin de
Tappuyer, il rapporte une prétendue forme antique du mot, laquelle,
selon toute apparence, n*a jamais existé; et cette forme même, indé-
pendamment de Tensemble du texte, dépose contre Finterpré talion
(l) Ou )S H i)^eifjLA% , mu E, W vraxtucf, { Platon. Crayl, p. ^€ , ^') -^
(2) Tr»v (iiV))rf iVA«S«f 7nf^)(^f fAMVviji tn/A^i 3%'/iaroc w NEO'ESIN. Oo >t>
NO'HSIX w ct/.%a7#K à«tAW7ç, ^A «m w H, ££ ÏAi hiynf <A/a, NiO'BSIN, ( Plat*
ÇTatyip.^r,£,)
' JANVIER 1820. I9
proposée. Au reste, comme I auteur des Lettres n avoît nul besoin de cette
preu\e, sa réponse à lobjection de M, Kiiight n'a rien perdu de sa force
par l'observation que je viens de faire, dans Tîntention de fixer le vraî
sens dun passage qui seroil fort important, s*ïIavoit la signification que
ïui a donnée M. Raoul- Rochette.
M. Knigiit trouve encore surprenant qu'un monument aussi ancien que
finscription é'Amyclœ , et aussi imponanî, soit resté inconnu aux voya-
geurs et aux aotiquaires qui , dans les différens âges, essayèrent de rectifier
raniîque chronologie. M. RaouI*Rochette répond à cette objection, sf
c*enest une, quon pourroii faire le même argument contre une multitude
de monurnens découverts dans la Grèce, et notamment contre les Marbres
de Paros, dont personne ne pourra nier l'importance. Cette réponse me
semble péremptoîre contre une objection purement négative, comme
toutes celles de M. Knight,
A^L Knight èfève contre l'authenticité^de rinscrîption à'Amyclœ, et
sur-tout contre celle d'Oga, d'autres difficultés que M. Raoul-Rochettô
a fort l>ien résolues ; je me contenterai den exposer une seule, parce
qu'elle a donné lieu de sa part à une discussion qui n'est pas sans
intérêt. Cette difficulté est fondée principalement sur ce que Fourmont
attribue rinscription du temple d'Oga au roi Enrôlas, quoique rien
n'autorise cette opinion»
«Conformément à ce calcul (celui de d'Hancarville ) ,. Eurotas et
s> Lacédémon furent contemporains de Cadmus, à qui une tradition
35 générale a aiirîLué rintroduciion des lettres dans la Grèce, Si cette
» tradition est fondée, Eurotas n*a pu écrire dans d autres caractères que
» ceux des Phéniciens, tels qu'ils sont conservés sur les médailles de ce
3> peuple, sur celles de leurs colonies en Afrique, en Espagne , en Sicile,
a> Ces caractères étoient au nombre de seize, comme on le reconnoît,
» et s'écrivoient de droite à gauche : or les formes de ces lettres, com-
» parées à celles de Tinscriptron d'Oga , offrent une extrême dis-
» semblance. »
Ici, comme on voit j M* Knight tranche une difficulté qui a arrêté de
grands critiques; il pose en fait que les caractères phéniciens apportés
par Cadmus doivent avoir été les mêmes que ceux qu'on retrouve sur
des monurnens dont le plus ancien ne remonte peut-être pas au-delà du
V.* siècle avant notre ère : or voilà précisément ce qu il est impossible
de prouver* M. Raoul- Rochelle prend occasion de ce passage de
M. R, P, Knight , pour se livrera une discussion qu*il !i'a pu approfondir
autant qu'il Tauroit fait si le plan de ses Lettres le lui eût permis. U y
présente les raisons déjà mises en avant dans une savante note de
jo — — JOURNAL DES SAVANS,
M. Lnrcher (i) pour ëtal>lir que les Pélasges possédoîcnl une écriture
aipliabétique av;\iu Tarrivée de Cadnius, et que rinvention attribuée à ce
dernier se borna à changer ou à modifier h forme de quelques caractères,
à régler Tordre tfans lequel ils dévoient être ningés, enfin à nommer
chacun de ces caractères du iiojn par lequel il éloit désigné dans sa
propre langue. Ce n'est pas ici le lieu d'examiner une question déjà tant
débattue I dans laqueltt les opinions les plus contradictoires ne manquent
point d'autorités respectables: je me contenterai de soumettre à l'auteur
mes doutes sur Tinterprétation de plusieurs textes de Pausanias dont il
tire, en faveur de Fexistence d'un alphabet ûTitécadméen, des pretives ou
tout au moins des inductions qui ne sont peut-être pas très-fondée'î.
II dit, par exemple: ce Cette tradition rfune écriture particulière aux
» Pélasges est encore mieiir confirmée par l'existence irinscrtptmiS anU-
» rieures au siècle de Cadnius , telles que celle que portoît probablement
» le tombeau de Corœbus à Mégares, monuiuent que Pausanias estime le
>» plus ancien qui existât dans la Grèce, comme étant de Tan 1678
30 avant notre ère, « D'après ces paroles, il sembleroit que V existence
d*inscrtptions antérieures a CûdmuS n'est pas douteuse, puisqu'elle sert à
confirmer la tradition d'une écriture pet rticu litre aux Pélasges, Je ne croîs
pas qu*on puisse en trouver aucune; M. Raout-Rochette n'en cite d'autre
exemple que celle que portott probablement le lomlîeau de Corœbus :
mais une inscription dont rexîsience n'est que probable, ne peut servir
de preuve, D\iil!furs, j'observerai que Pausanias ne permet point ici le
doute: il atteste j^ositivcment que ce tombeau de Corœbus portoit une
inscription en vers élégîaques (2) , qui contenoit le récit des aventures de
Psnmathe et de Corœbus. Or, h moins d'admettre que, vers 1700 avant
J. C*, on écrivoit déjîi des vers élégiaques, on est obligé de reconnoître
qu'il s'agit d'une de ces in>criprions que les Grecs faisoient graver après
coup» pour coni^acrer une tradition reçue. J ajouterai que Pausanias ne
dit point que ce tombeau fût le plus ancien de tous ceux de la Grèce;
il dit seulement que la figure de Corœbus sculptée sur ce tombeau étoil
le plus ancien ouvrage en marlire qu'il eût vu dans (a Grèce.
t< Le même Pausanias, dit ensuite M. Raoul-Rochette, cite en d'autres
3» endroits des monumens en anciens caractères ou lettres atti^ues , lettres
« également mentionnées par Démosthène et par Diodore de Sicile, lettres
» dont s'éloil servi l'ancien Linus pour composer ses ouvrages , et dont
3> Jes formes étoîent , de faveu de Tacite et de Pline , presque semblables
(1) Larchrr sur Htrodote , rrm, IV, p, 2^;, — (2) Pa
^^ usan. i , r. ^J Jin
JANVIER l8zQ. ji
» i celfes quavoient de Leur temps les lettres latines ( p. 66 ).» Je ne
parlerai point ici des textes de Démosthène et de Diodore de Sicile, de
Pline et de Tacite, dont la discussion m entraîneroit beaucoup trop loin :
f n me bornant aa témoignage de Pausanias allégué par M^, Raoul-
Rochette, je dirai que, si Ton distingue avec soin les époques diverses
auxquelles ifs se rapportent, on acquiert la certitude quils ne fournissent
réellement aucune preuve ni pour ni contre un alphabet antérieur k Cad-
niU5;il n'en résulte autre chose, sinon que les lettres grecques, jusqu'au
temps de ce voyageur, avoient successivement été détournées de pfus en
plus de leur forme primitive. Pausanias parle quatre fois, si je ne me
Irompe, de ces lettres ûndennrs. La première fois, il désigne ainsi des
inscriptions en boustrophédon gravées surle coffre de Cypsélus ( i ) , monu-
ment qu'on croit avoir été exécuté entre les années 600 et 6 j o 2) : cToù
Ton voit qu'il n'entend ici par lettres anchnms que celles dont nous
trouvons l'emploi dans les inscriptions de Sigée et (SAmyclœ / elles
méritoient bien de Pausanias réj)iihète S anciennes. La seconde fois, il .
s'agit d'une corne d'abondance, offrande de Miltiade, fils de Cimon,
qui y avoît fiiît graver deux vers hexamètres en caractères que Pausanias
appelle ^;?aV;?j (3), désignant, sans aucun doute, des lettres telles que
celles des inscriptions antiques antérieures à l'archontat d'Euclide. Dafns fe
troisième passage, Pausanias donne à ces expressions un sens analogue,
puisqu'il ait mention des quatre vers élégiaques qui consacroient une
offrande faite par les Apolloniates de l'Adriatique après la prise de
Thronium (4) t événement qui n'est point antérieur à l'an 500 avant
J. C. Enfin, dans le. quatrième exemple, il est fait mention simplement
d'une inscription en caractères «j//r/V/iJ, qui indiquoient les limites de
Psophis et de IheJpuse (5) : on ne peut également rien conclure de cette
vague indication^ Le témoignage de Pausanias n'a donc réellement
aucun rapport avec le fond de la question, qui est de savoir si les Pélasges
avoient une écriture avant Cadmus.
Le 4é&ut d'espace nous force de renvoyer à un troisième article,,
qui sera très-court, ce qu'il nous reste à dire de la- seconde Lettre, où
l'auteur a su réunir égjalement be^coup de notions curieuses et neuves.
LETRONNE.
(i) Pausan. V,iy. — f2) 0"atremère de Qv.incy ^ Ji/pi ter Olympien , jy, tij,
— (3) l'autan. Vf , p. — (q) Id. V, 22. KV «W j fAi^Vor ^âi,u^Mi9tf *éhf â^^iof
vwo' A/eV Ttiç Tnti, Je lis àp^'otç avec Vaickenacr { ad Herodot* v , ^g )» —
(j) Pausan. vni »2f.
G 2
H
JOURNAL DES SAVANS,
De l Auscultation médiate , ou Traité du diagnostic des^
maladies des poumons et du cœur , fondé principalement sur ce
nouveau moyen d'exploration; par H, T. H. Luëiinec. D. M*
P. médecin de f hôpital Alecker^ médecin honoraire des <//j-.]
pensai res , membre de la Société et de la Faculté de médecine de
Paris et de plusieurs autres sociétés nationales et étrangères.
Pouvoir explorer tst , à mon avis, une grande partie
de l'drf,{ HlFP, Epid- UL)
Deux volumes in-8/^ , l'un de 45<î et lautre de ^jx pages.
A Paris» chez J, A. Brosson et J. S, Chaude, libraires/
rue Pierre-Sarrazin, n.*" c^. i8ip.
Cet ouvrage est dédié k MM. les professeurs de l'Ecole de médecine
de Paris par un petit discours écrit en latin.
M. Laénnec a étudié ranatomie pathologique pendant Iong*temps
avec un zèle ardent, une application constante, et le désir de faire servir
les connoissances qu'il acquéroit au progrès de la science et à la gué-
rison des maladieîi; il s est particulièrement attaché à lexamen des or-
ganes internes de la poitrine, dont les lésions, trop communes, sont sî
funestes. Nourri de ses propres observations ♦ et profitant de celles de
At. Corvisart, son maître, et de feu M. Bayle, son ami, que la mort a
enlevé trop tôt, il a cherché à éclairer les médecins surTéiat paihologique
de la poitrine, pfus qu'on n'avoit pu le faire jusqu'ici. On doit à M. Cor-
visart un essai sur les maladies et les lésions organiques du cœur et d^s
gros vaisseaux, et une traduction de la méthode d'Avenbrugger, mé-
decin allemand, pour lecojînoître les maladies iiuernes de la poitrine
par fa percussion de cette cavité; et à M. Bayle, des recherches sur la
phihîiie pulmonaire; ces deux ouvrages sont estimés. Mats M, Laénnec
les a dépassés et a complété ces travaux.
Le livre que nous avons à faire connoîlre, étant formé presque en
entier de descriptions de maladies e^de faits aoatomiques, n'est pas
susceptible d*une analyse suivie. Nous nous bornerons, à cet égard, à
ftire remarquer que ces descriptions peuvent intéresser les médecins, et
sur- tout les élèves, parce quih y trouveront les effets liés avec les
symptômes qui dévoient les présager, si ion en excepte des anomalies
împossiMes à soupçonner.
Les détails qui |3aroissent minutieux aux lecteurs peu versés dans la
science médicale, ne le sont pas pour ceux qui en font lob jet de leurs
JANVIER 1820. J3
médhaiîons. M. Laénnec a craint même qu'en omettant la moindre dr*
constance, il ne laissât quelque chose à désirer; car souvent une obser-
vation qu'on auroit regardée comme peu de chose, a plus d'importaQca^
qu'on ne croit pour expliquer un point embarrassant.
Les motifs et les vues de l'auteur sont consignés dans sa préface et
dans son introduction. Nous allons en faire connoître ce qui est néces*
saire pour l'intelligence de l'auscultation médiate, que M. Laênnec
appelle lobjet principal de son livre , et que nous regardons comme
l'accessoire, eu égard à la totalité de l'ouvrage, qui est un bon traité des
maladies de la poitrine.
Les lésions du thorax , d'après M. Laénnec, sont les plus fréquentes ; il
est rare même qu'une fièvre essentielle n'attaque pas, par complication»
plus ou moins la poitrine, ou ne se terminé par une affection de cette
partie du corps. Quelque dangereuses que soient ces lésions , et elles
le sont beaucoup sans doute , ce sont celles qu'on guérit le plus souvent.
Aussi les médecins ont-ils toujours cherché des signes propres à les faire
leconnpître et à les distinguer entre elles. Leurs efforts ont peu réussi,
parce qu'on s'en est tenu, suivant M. Laênnec, aux signes fournis par
Tinspection et l'étude du trouble des fonctions; et ces signes sont insuf^
fisans, les maladies de ces organes étant nombreuses, diversifiées, et
présentant des symptômes semblables. Ce qu'on apprend par la perçus- .
sion qu'a conseillée Avenbrugger, donne, à la vérité, quelque certitude
de plus, mais nen donne pas encore assez ni pour tous les cas. La pra-
tique d'ailleurs en est difficile, et souvent les maladies du cœur lui
échappent. M. Laénnec en a fait usage et en a reconnu les avantages;,
il y a ajouté ce qui manquoit pour avoir des données plus sûres. II a*
imaginé un instrument, très-simple, qui l'a conduit au but qu'il desiroit.
atteindre. Voici comment il s'en explique dans l'introduction : « Je vins,
» dit-il, à me rappeler un phénomène d'acoustique très-connu. Si l'on
» applique i'oreilie à l'extrémité d'une poutre, on entend très-distinctC-
» ment un coup d'épingle donné à l'autre bout. J'imaginai que l'on pouvoit
y> peut-être tirer parti, dans le cas dont il s'agissoit, de cette propriété
3> des corps : je pris un cahier de papier ; j'en formai un rouleau bien serré,
» dont j'appliquai une extrémité sur la région précordîale; et, posant
» i'oreilie à Tautre bout, je fus aussi surpris que satisfait d'entendre les,
» battemens du cœur d'une manière beaucoup plus nette et plus dis*
» tincte que je ne l'avois fait par l'application immédiate de l'oreille.
» Je présumai dès-lors que ce moyen pouvoit devenir une méthode
» utile et applicable, non-seulement à l'étude des battemens du cœur^:
» mais encore à celle de tous les mouvemeas qui peuvent produire du
j4 JOURNAL DES SAVANS^
» bruit dans fa cavité de la poitrine, et, par conséquent, h rejcpfôratioa
*t de la respiration , de !a voix, du râfe, et peut-être même de la fluctua*
n tien d'un liquide épanché dans les plèvres ou le péricarde. » Après avoir
comparé des cylindres faits de diflerentes matières plus ou moins denses ,
M. Laénnec reconnut que le meilleur étoit celui de bois. Il finit par n'en
pas adopter d'autre. Le cylindre dont il se sert maintenant, soit dans Thô-
pital qui lui est conJfié, soit pour explorer sur des malades qu'il visite chex
eux , est brisé au milieu , moyennant une vis ; ce qui le rend plus portatif;
li est creux dans son centre et évasé à une des extrémités; il a un pied
de longueur : il convient pour l'exploration de la respiration et du râle.
Gelai (|u'il emploie pour la voix et les battemens du cœur, doit avoir les
parois plus épaisses : oii ne pourroît tirer parti d'un corps mou. Divers
noms ont été donnés à cet instrument, tels que soiromctre, pectoriloque ,
tkoracUoque , &c, M. La^nnec l'appelle maintenant stéthoscope. Il assure
que les signes qu'on obtient par l'auscultation médiate sont faciles à
saisir , et qu'il suffit de les avoir entendus une fois pour les reconnoître;
par exemple, ceux qui indiquent les ulcères du poumon, la communi-
caiipn fistuleusc entre la plèvre et les bronches, &c. II convient toutefois
qu'on ne doh pas négliger la méthode d'Aveitbrugger , que l'ausculta-
tion médiate ne fait que confirmer , ne doutant pas que les deux moyens
ne puissent concourir- ensemble pour étendre les connoissances sur les'
signes des maladies de poitrine.
Le mot de râle, dont nous venons de parler, n'est pas pris unique-
ment pour ce murmure bruyant de Pair que font entendreies mourtms,'
qui ne peuvent plus expectorer, mais pour tous les bruits produits par
te passage gêné de l'air qui sort de la poitrine. Ainsi ce mot a, chez
routeur, une acception plus étendue.
Nous regrettons de n'avoir pas vérifié nous-mêmes les avantages qu'on
retire de l'application du stéthoscope sur la poitrine d'un individu. L'au-
teér, qui ne jouit de sa découverte que pour la rendre utile ^ a été em-
pressé de la faire connoître, autant qu'il en a trouvé l'occasion, et n'a
point négligé de solliciter un examen et des témoignages authendques.
Des commissaires de l'académie royale des sciences ont constaté qu à
tl'âVers le cylindre, placé sur la poitrine d'un homme sain, qui parle et
dumte, on entend un frémfssement plus marqué dans certains points de
la poitrme que dans d'autres; mais que, quand il y a un ulcère dans les
poumons, ce frémissement se change en un phénomène tout-è-fait sin-
gulier : la voix du malade cesse de se faire entendre par l'oreille restée
libre, et elle parvient toute entière à l'observateui* par le canal pratiqué
4ins le cyfihdrev Le même phénomène a lieu Ictbqu'en applique le
JANVIER 1820. jj
cylindre stir ia trachée-anère et %ur le larynx. Ce fait seul, et par luî-
mêrne, iiispireroit de la confiance dans les assertions de Fauteur, quand
d'autres témoignages , également admissibles , ne \ îendroient pas à
f'appuî.
L'ouvrage de M, Laénnec est divisé en quatre parties, dont la pre-
mière renfenne les signes quoii peut obtenir de la voix à Taide du
cylindre; la seconde contient ceux que fournit la respiration ^ la troi-
sième, ceux que donne ie raie, et les résultats que Tauteur a obtenus de
ses recherches sur la fluctuation des liquides épanchés dans les cavités
du thorax ; la quatrième offre fanalyse des Laiiemens du cœur dans fétat
de santé et de maladie, et les signes particuliers des maladies du cœur et
de faorte. Chacune de ces parties est divbée en chapitres» et ceux-ci ea
articles. Au commencement du premier volume, ainsi que du deuxième,
est une table analytique, et h la fin du deuxième, une table des ma-
tières par ordre alphabétique. Quatre planches représentent le cylindœ,
réduit au tiers de ses dimensions réelles; sa coupe, dans le sens de sa
longueur; Tobturateur, qui est au bout ; le corps supérieur de ce cylindre,
son diamètre, et les lésions du poumon.
Il eût peut être été possible à M. Lnénnec de donner moins de lon-
gueur à son ouvrage, en abrégeant un peu des descriptions d ouvertures
de corps, sans omettre les léi^ions imporiajitts.ll l'auroit fait, sans doute»
si d autres occupations le lui eussent permis. Tel quesl cet ouvrage, il
ne peut être que très-utile aux médecins, puisqu'il leur présente des
moyens de s'asaurer du féiat des maladies de poitrine , et par conséquent
et pouvoir mieux les guérir.
FESSIER,
NOUVELLES LITTÉRAIRES.
LIVRES NOUVEAUX.
FRANCE.
Discours sur rêtudt philosophique des fangires , par M. le Comte Je Volney.
Paris, Baudouin , 1820» in-à.\j 3 feuille*.
Epi grammes choisies d^Oiven , traduites en vers français par ftfu M. de Kérr-
valant y avec des imitations par P* Corneille , La Monnoye , Cocquard ,
Chevreau » Senecé, A. L. Le Brun > Voltaire, Desniahis, MM. François de
Ncufchateau, Pommerfuï, «Sec. j publiées par' M. de la Boaîfse* Lyon
M, Buynand, ïn-t8 ^ 10 feuilles.
T
S^ JOURNAL DES SAVANS.
Tiièrt, tragédie de M. J* de Chcnier, avec une analyse de celte pièce ptr
M. Népom. Lemercier. Paris ^ Baudouin, 1819, in'S.\ 7 feuilles 1/4,
Louh IX , tragédie en cinq actes ^ par M. Ancelot. Paris, impr. de P. Didot,
chez iVU*"*^ Hiiet, irt-S.* , vj et 64 pages: 3 francs, et en papier vélin 6 fr.
Dieu , ode, suivie d*un sonnet et d'une romance sur le même sujet, avec une
flégie sur l'anniversaire { de la mon) de Marie-Antoinette , Reine de France ; par
M, d'GalIia, auteur des opuscules intitules : l'Homme, ode, &c-; le Retour des
lis , &c. ; des Ahus en iSt^, iScc. <Scc. , iVt-^.% 16 pages. Prix, 50 cent. ; à Paris,
chez Pillct, libraire, rue Christine, n.° y.
Les quatre premiers volumes des Œuvres complètes de M,*^*^ de Staël viennent
d*être mis en vente chez Treuuel et Wiinz^ à Paris, à Strasbourg et à Londres,
PfBc, 24 fr. — Tome L^^, viij, ccclxitij et to6 pages. Le premier volume, orne
d'un portrait de M,"^ de Staël, contirnt, 1.* un avertissement de l'éditeur
{ M. Auguste de Staël ); 2.® une Notice sur le caracthe et les écrits de M.™' de
Staël; 3.** ses Letiressur le caractère kt les écrits du i. S, Rousseau. — La NOTICE,
composée par M.*"*^ Necicer de Saussure, occupe plus des trois quarts de ce
■volume. Ce n'est point une vie de M.'"' de Staël; il y a fort peu de détails
biographiques: mais c*est un corps d'observations importantes, d*abord sur les
écrits de cette femme célèbre, ensuite sur son caractère moral» *tjr ses opinion
et sa conduite politique. Ses écrits sont divises ,en trois classes : i,^ ceux
qui ont précédé la révolution ; z** ceux qui ont été composés depuis 1789 jus-
qu'à h mon de M, Necker; 3.** ceux qui n*ont paru qu'après 1803. A la
Première période appaniennent les Lettres sur J. J, Rousseau; à la seconde,
Influence des passions, l'ouvrage intitulé De la littérature, et Delphine; à la
troisième, Corine, ou Tltalie, TAilemagne, et les Considérations sur la révo-
lution française* LVxamen de ces divers écrits, et de quelques autres moins
considérables est précédé d'jun tableau de Téducation de M.*^ de Staël, suivi
de réflexions <\ir le caractère de son talent. Quoique ces jugemens soient ceux
derâJTDTtiép il y en a quelquefois de fort séiéres. Les éloges sont beaucoup plus
fréquens^la justice les réclamoit presque tous. La panie de cette Notice qui
concerne les relations domestiques, sociales, politiques de M/"*^ de Staël,
contient des anecdotes, dont quelques-unes éioient peu connues; on y remar-
quera des trait» ingénieux I des reparties heureuses, et des actions honorables.
— Les six lettres sur Rousseau, qui terminent ce volume, avaient paru en
1788; elles ont été réioiprimées en 1B14 : on retrouve ici les préfaces de ces
deux éditions. r= Tome U, 374 P^è^^^ Réflexions sur le procès de la Reine,
publiées en 1793; Réflexions sur la paix, adressées à M, Pitt en 1794 ; R^^<-'*i^ns
iiir la paix intérieure, en 1795 ; Essai sur tes fictions; trois Nouvelles, savoir,
M'tnaLf Adélaïde et 1 héodore, Histoire de Pauline; un épisode, intitulé
r^w/z/i/j. Ces derniers articles étoieni inédits: ils peuvent servira montrer les
premien progrès d'un laient distingué, et ce n'est pas Tunique intérêt qu'ils
présentent. Quant aux trois opuicules qui remplissent les 172 premières pages de
ce volume, ils tiennent à Thistoire de trois années trop nirmcjrables*^ 1 orne
JIl, 390 pages. De Tinfluence des passions sur lé bonheur des individus et des
fiations: c tst la troisième édition de cet ouvrage; la première est de 1796, et U
Çconde, de ihi8, — Réflexions sur le suicide, adressées au prince royal de
ucdc, en décembre 1812, et publiées en j8j j.nz: Tome IV, 604 pages. De
la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales; ouvrage
JANVIER 1820.
17
«niv^rsirircment connu par les itoh éditions de 1803, 1804 et 1818; chacune
^n z vol. //i-^/^ Tel est le contenu des quatre premiers tomes d'une collection
qui doit en avoir dix-huit. Elle a été" jusqu'ici imprimée avec beaucoup de
correction et d'élégance, chez M. Crapelec. Le prix de chaque volume est de
6 fr. à Paris; 7 fr. 50 cent, par la poste dans les départemcns* On tire un petit
nombre d'exemplaires sur papier vélin superfini au prix de 12 fr., ou lyb^
JO cent, par volume.
(Euvns de M."''' de Staël, tomes V, VI , VII ( Delphine ) , avec des change-
mens et additions. Paris, Treuttel et Wiirtz;le prix de chaque volume est de
6 frr. Cette collection paroît en même temps, en format in-ii, au prix de 3
fr. par volume. On vtfnd à part les trois tomes de Delphine, ainsi que la Notice
sur iVL""^ de Staël par M."»'' Nccker-Saussure*
(ouvres compiles de J. La Fontaine, ornées de 120 gravures en taille douce,
accompagnées d'une histoire de la vie et des écrits de La Fontaine par
Al. Walckenaer, membre de Tinstitut. Cette édition» imprintée chez: P. Didot
l'aîné, aura 16 tomes in-iS; les deux premiers viennent d*être mis en vente chci;
Nepveu. Prix pour les souscripteurs, 10 fr.
Le libraire Lequien,rue Saint^Jacques, n.* 4'» publie le prospectus à* \xnt
nouvelle édition ét^iEuvres de Reghard, Ce recueil sera imprimé chet P. Didot
et formera 6 volume*. Le prix de chaque volume est de 4 francs pour les
souscripteurs.
(Euvres deJ. F, Ducis , ornées d'un portrait et de gravures. Paris, impr, de
P. Didot aîné; chez Nepveu > 5 vol. /w-^.*
Œuvres complètes de M. Amault : tomes I , II et III. La Haye, de Timpr.
Belgique; à Paris, chez Foulon, Prix de chaque vol. 6 fr.
Les Vêpres siciliennes , tragédie en cinq actes et en vers, par M. Casimir
Lavigne. Paris, imprimerie de Fain, chez Barba, in-S,", x et 92 pages.
Prix, X fr. 50 cent.; et en papier vélin, 5 îr,
Œuvres complètes de Voltaire { éàïiïon disposée et revue par M. Bcnchoi),
tome XXX ( Dictionnaire philosophique, tome II ]. Paris, impr. de Dupont ,
chez M.«* veuve Perronneau, rn-tz ae 35 feuilles. Prix , 3 fr. 50 cent.
Œuvres complète s de Voltaire ; tome XXXI V. Paris, impr. de M.""^ Jeune-
Homme, chez Plancher, in-12 de 20 feuilles. Prix* 3 fr. 50 cent.
Précis de l'histoire de la révolution française j avec une table des principaux
décrets rendus pendant les années 1789* 1790 et 1791 , par Rabaut Saint-
Éticnne; nouvelle édition , augmentée par M. de Norvins. Paris, imprimerie de
Laurens* chez B.-iheuf , in-tz de 10 feuilles.
Voyages dans la Grande-Bretagne en i8i6't8tp ; par M. Ch, Du pin , membre
de rinîtituf ; 6 vol. in-S.^ , avec 3 atlas. L ouvrage sera divisé en trois parties:
force militaire, force navale ^ travaux intérieurs. La première partie ou livraison
paroïtrcî le i/^mai 1810, On souscrit, sans rien payer d'avance, chez Bachelier,
quai des Augustins, n.*» 55 , à raison de 22 fr. par livraison. La souscription sera
fermée le i % mars ; et passé ce terme, chaque livraison coûtera aj fr.
Description du royaume de Camboge , par un voyageur chinois cniî a visité
cette contrée à la Im du xill.* siècle (en 1295, précisément la même année
que Marc-Pol revint en Europe); précédée d'une iiotice chronologique sur le
mcnie pays , extraite é^h Annales de la Chiner traduite du chinois par M. Abel-
j« JOURNAL'DES SAVANS,
Rémusat. Paris, Smith, 1819, in-8/ , avec une carte du pays de Cambogc^
gravée, d'après d*Ayot et les recherches de M. Abel-Rémusat, par Ambroisc
Fardieu.
Mémoires historiques et géographiques sur VArméme , suivis du texte arménien
de l'Histoire d^s princes Orpelians, tt de, celui des Géo,^raphies attribuées à
Moïse de Khoren et au docteur Wartan , &c. , avec traduction française et notes
Îar M. J. Saint-Martin. Paris, impr. royale, librairie de Tilliard frères, rue
lautefeuille, n.* 22, 1819,2 vol. in-S,' Prix 24 fr. en pap. fin; 48 fr. en
papier vélin.
Les Cours du Nord, ou Mémoires originaux surJes souverains de fa Suède et du
Danemarcli , traduhs de l'anglais de John Brown, par M. J. Cdhen. Paris>
impr. d'Egron, librairie d'Arthus-Bertrand , 1819,3 vol. in-S," , 70 feuilles 3/4,
avec deux vues et six portraits : 21 fr. On a joint à ces Mémoires l'Histoire de la
révolution de Suède en 1772, &c.
Histoire de la guerre entre les États-Unis d'Amérique et l'Angleterre , pendant
les années 1812*1815, par H. M. Brackenridge , traduite sur la seconde édition
par A. de Dalmas. Paris, impr. de Patris^ chez Colnet, 1820, 2 vol in^8»* y
39 feuilles 3/4 > avec une carte : 10 fr.
Notice sur les signes numériques des anciens Egyptiens , précédée du plan d'un
ouvrage ayant pour titre : Observations et Recherches nouvelles sur Us hiéroglyphes^
accompagnées d'un tableau méthodique des signes ; par M. Jomard , membre de
l'Institut. Paris, imprimerie de Bauaouin , m-^.' de 3-1 pages et une figure. Cette
Notice a été lue à l'académie des inscriptions et belles- lettres les 3 et 6 sep*
tembre 18 19. «Les Égyptiens écrivoient les nombres à la manière des Ro-
umains, la même aue celle dont usoient les Grecs quand ils employoient les
a> lettres capitales. Ils avoient des signes pour l'unité, pour 5, pour 10, pour
» lop et pour 1000. » M. Jomard s'applique à prouver par des nionumens que
les Egyptiens exprimoient l'unité par un rectangle très-étroit et allongé; 5 par
une étoile; 10 par nne sorte de fer à cheval ou de ir grec; 100 par une figure
semblable à la tige qui est jointe à la coiffure des dieux, en forme de mitre
ou de cidarisi 1000 par une feuille de nymvhaa ou lotus que supporte une
tige placée verticalement et coupée par une barre.
Histoire de la monnaie , depuis les temps de la plus haute antiquité jusqu'atr
règne de Charlemagne;par M. le marquis Garnier^ associé libre de l'académie
des inscriptions. Paris, impr, et libr. de M.** veuve Agasse, 2 vol. in-S»* de
48 feuilles; Ixxx, 243 et 402 pages. Nous nous proposons de rendre compte
de cet ouvrage.
Procli philosophi Platonici Opéra inedita^ quae supersunt omnia, nu ne prî-
mùm typis donata, ex manuscriptis codicibus Bibliothecae regiae Parisiensis,
curante V. Cousin , professore pnilosophiae in academia Parisîensi ; tom. I.**
Parisiis, ex officrnaEberhart, 1819, in-8.*
Des proscriptions ,f2iX M. fiîgnon. Paris, Brissot-Thivars, 1819, in-S/j viij
et 127 pages. Cet ouvrage est divisé en cinq liirres : c'est le premier qui
iricnt de paroître; il traite des proscriptions dans les républiques anciennes et
modernes: !.• à Athènes; 2.*» à Sparte; 3.* à Rome; 4«* ^ Venise; 5*» i
Florence; 6.* dans les Provinces- Unies.
Propâïition d'administratlfh mi7/râ/rf« Paris, impr. de Demonville, librairie
de Magimel; Ancelin et Pochard; i/z-^.% xv) et 192 pages ^ avec des tableaux.
JANVIER 1820. 59
Recueil des Eloges historiques des membres de V académie des sciences ,. lunant
les séances publiques derinstitut, par M. G. Cuvieri secrétaire perpétuel de cette
académie, ryis, J819, et à Strasbourg, chezLevrauh; 2 vol. in-S/' : 15 fr. eteh
fapier vélin , 30 fr. Nous lious proposons de rendre compte de cet ouvrage.
Aiérnoire sur l'importation en France des chèvres à duvet de Cachemire, paf
M. Tessîer, membre de l'Institut. Paris, M."" Huzard, /n-^.* II sera rendu
compte de cet ouvrage et des deux suivans, dans l'un de nos prochains cahiers.
-aperçu géognostique des terrains , par M. Henri de fionnard, ingénieur e»
cher au corps royal des mines. A Paris, chez Dcterville, in-S,^ ,z66 pages.
Projet de boisement des Hautes- Alpes; par M. Dugied, ez-prefet de ce
département. Paris, impr. royale, ih-^,* , 106 pages.
annales de la musique, ou Almanach musical de Paris , des départemens de la
France et des principales vijlesdu monde, pour l'an 1820 s deuxième année: sutiri
d'une esquisse de 1 étar actuel de la musique i Londres , d'articles biographiques
et nécrologiques sur Nicolo, Paësiello, Duport, M."*' Sophie Gail, «c; d«.
répertoire dé la musique vocale et instrumentale ( 1 8 19} , de l'indication des jour-
aaux de musique français et étrangers, inventions, livres nouveanx, gravure^i
«vec des analyses d'ouvrages ( entre autres , des Mémoires de Grétry ) , &c. &c. ;
publié par M. César Gardeton , amateur. Un fort vol. innS» Prix , 4 &• 5^ cent.,
pris à ParS, chez l'éditeur, rue Montorgueii, n.* 96.
Analyse de la philosophie anatomique ( de M. Geoflfîroy-Saint-Hilaire), où
Ton considère particulièrement l'influence qu'aura cet ouvrage sur l'état actuel
de la physiologie et de l'anatomie; par M* rlourens. Paris, chezfiéchet jeune,
/«-*/ de 28 pages.
Les quatre Ages de la vie; étrennes i tous les âges , par M. de Ségur , de l'aca-
démie française. Paris, impr. de Denugon , librairie d'Eymery , //1-/2 de £ jo
pages, avec gravures. Prix, 3 fr.
La Criticomanie ( scénique ) , ou Nouvelle Guerre aux spectacles , dernière
cause de la décadence de la religion et dps mœurs, et justification ici
lumières du xvill.^ siècle; par Marc-François Hache. Paris, impr. de Patris,
chez Delaunay, 2 vol. //f-/2 de 216 pages chacun. Prix, 6 fr.
Des Abus en iSig , ou Quelques mots sur la France, le monarque, les
ministres, la police, les caricatures, les théâtres et les journaux ; par Aris...
d'Galiia. Paris, imprimerie et librairie de Piller. Prix, i fr.
Traité de géognosie , ou Exposé des connoissances actuelles sur la constitution
physique et minérale du glooe terrestre ; par d'Aubuisson de Yoiiins. Paris,
impr. de Cellot, 2 vol. in-8.% avec 2 planches. Prix, 16 fr.
Annuaire présenté au Roi parle bureau des longitudes, pour Van 1820. Paris,
imprimerie et librairie de M.™* Courcier, in-iS de 5 feuilles. Prix, i fr.
Connoissance des temps ou des mouvemens célestes , à l'usage des astronomes et
des navigateurs, pour l'an 1822; par le Bureau des longitudes. Paris, veuve
Courcier, 1820; 25 feuilles: 6 fr.
Notice jur les canaux et particulièrement sur la concession du canal d'Essonne,
Paris, impr. de Lanoë, chez Bossange et Masson , in-S.^ de 70 pages, plus une
planche.
Tableaux , statues , bas-reliefs et camées de la galerie de Florence et du palais
PUii, dessiné^ par M. Wicar, gravés sous la direction de MM.. Lacombe et
H 2
^
*o JOURl^AL DES SAVANS,
Mnjjuelier; avec les explications de M. Mongez. Paris, 1789— 1815, gmnd
in-folio en 48 livraisons, imprknc sur papier vélin superfin. Les personnes qui
souscriront avant le 21 décembre, paieront les livraisons au prix de 14 fr. , au
lieu de 24 fr. ; on ne pourra retirer moins de deux livraisons par mois. Si Ton
préfère retirer l'ouvrage complet en une seule fois, on ne le paiera que 600 fr.
Annales du Musée, salon de 1819; par P. Landon: troisième livraison. Elle
$c compose de 1 1 planches gravées au trait , et d'explications et observations
critiques. L'ouvrage formera 2 vol. //i-i'.*'^ pour lesquels on souscrit au bureau
des'Annales du Musée, quai de Conti, n.® 15. Prix, 36 fr.
Table générale des matures, par ordre alphabétique, des 122 volumes qui
composent Ja collection complète du Magasin encyclopédique; rédigée par
J. B. Sajou , imprimeur; tome 1 V et dernier. Paris, chez Sajou > rue de la Harpe ,
n.*» II. Frix des 4 vol., 60 fr.
MM. Treuitel et Wiirtz, rue de Bourbon, n.« 17, viennent de mettre en
' ' vente YAlmanach des Darnes pour 1820, volume In-ié , imprimé par Didot Tainé
sur papier vélin et orné d'un frontispice à vignette, avec nuit gravures en taille*
douce, exécutées, d'après des tableaux des grands maîtres, par M. Bein, artiste
distingué. Prix, broché, 5 fr.; et relié, depuis 7 fr. jusqu'à 36 fr., suivant la
richesse delà reliure* Dix-neufannées de succès ont fait distinguer cet almanach
entre tous ceux qui ont la même destination et un titre a peu près fiemblable.
.Celui de 1820 contient des pièces devers de mesdames Babdis, Desbordes,
d'Houdetot., Maillard de Chambure, de Salm, Simons-Candeilles ^ de
MM. Baour-Lormian , le Prevot d'Iray , Béranger , la Chabeaussière, Wailly ,&c.
Esquisse de nosologie véténnaire,ipsLr 3. B.HuzsLfd fîls, médecin vétérinaire^
. seconde édition. Paris, M.»»* Huzard et Déterville, rizo^inS.", 242 pages.
De r Enseignement médical, dans ses rapports avec la chimie, suivi d un nou-
veau Plan d'organisation des sociétés çt écoles de médecine; par M. de Mercy.
Paris , Éberhart , 1819, in-8.% 1 30 pages.
Notices historiques, critiques et bibliographiques sur plusieurs livres de Juris-
prudence française , remarquables par leur antiauité ou parleur originalité s ^^i
M. Dupin, avocat. Paris, impr. de Lotlin, litrairie de Warée oncle, 1820,
in-S,' , 6 feuilles.
Introduction à l*étude philosophique du droit , précédée d'un discours sur les
causes de la stagnation de l'étude du droit en France; par M. A. J. Herbette,
docteur en droit. Paris, impr. de Lottin, librairie de Warée oncle, &c., i/i-f/^
Ixxij et 240 pages.
La traduction française de Y Imitation de Jésus* Christ , par M^ Gence , est sur
le point de paroître. Ce n'est point une des versions précédentes , corrigée et
retouchée; c'est une traduction nouvelle , conforme au texte'revu par M. Gence,
et qui doit aussi être publié sous fort peu de temps.
Institutiones disciplinas ecclesiasticœ , prœsertim Gallicanct , ad princivia sivt
theologiœsivejuris publia comparatœ: auctore Petro Justino DelorT,J. U. D..&C. ;
tom. 1. Paris, 1819, gr. i/i-j/y de l'i mpr.de Fiim. Didot, chez Beaucé-Russand,
rue de TAbbaye-Saint-Germain , n.*» 3.
PAYS-BAS. Prospectus des annales générales des sciences physiques y par
MM. Bory-Saint- Vincent, Drapiez et Van-Mons. Bruxelles, impr. de Wcis»
senbruch. in-8,* Ces annales paroissent chaque mois, par cahier de 8 feuilles
ayec 4 planches. Lepri^^ derabonnement est de 5Q fr. pourTann^ entière (douze
JANVIER iSia 6i
cahiers formant 4 vol ) jde 27 fr, pour stx mois; de [4 fr, pour un irimestre. On
souscrit à Bruxelles, chez Weis«enbruch; à Paris, chez Mequignon-Marvis.^
ITALIE.
Ora^ione rtcitata nelUsolenni escquie ctUbruti rrelta chiesa patriarcale di Veneita
aWAb, Gîaccmo AIor^UL V^rnise , 1 8 1 9 , in-8J
Memonedrl stgnori F, JVrsri j L. Srrristori, F. TaninhSalvatici, E, C. Ridolfi ^
drlla mceîstîà d'tntrodurrc nelie scuoU primarie Toscane il metado di Bell e
Lancaster* Firenze^ m-b\"
Orlando furïoso di Lodov. Ariosio. Edition publiée par M. Onavio Moralî,
ei conforme à celle que l*Ariosie a revue lui-même en » 532» MiUn, Pirotfa,
1/1-4.*^ XXX vj et 54i^paées, avec un portraitderArioste, gravé par AL Garavaglia*
Sroria d'/ralia antica e modernaj da L* Bossi, Genoa, Geiglcr, itiip, lom»
J, iJ, IJl, f/î-^/ (etiVi-/2 )vLes tomes suivans sont sous presse,
Biographia Cremonese , ossia Diccronario srorico délie famiglie c perK)i>e pc/
gualsïvoglia titoJo memorabili e chiare spettanti alla ciiià di Creniona; da
Vincenzo Laureiti. Miîano , Borsani, 1819, /«--f.*
Lignera dell'abate Michèle Angeh Lan^i sul cufico stpokrale monumento poriata
d'Egiito in Roma* Rome, 1819, in-S*
Litologla umana , iTc*; Lithologie humaine, ou Recherches chimiques et mé-
dicales sur les substances pierreuses qui se forment dans diverses parties du corp«
humain, spécialement dans la vessie; ouvrage posthume de L. V^. Brugnatellr,
professeur de l'université de Pavie, public par son fils. Pavie, 1819, in-folio,
avec j planches.
Si nopsi délia Enneneutica sacra f odeWarîediben interpretare la Sacra Scritiuraj
dal professore Gii£ernardo de Rossi , &c. Parme, 1819, i/i-A' A
ALLEMAGNE.
Arndij Ch. G. Ueberden Urspruagitnd die verse hledenen Verwnndschafren der
Europhischen Sprachen , ifc> / Sur whimne elles affinités des languis européennes ,
par Ch. G. d'Arndtî publié par J. L. Kltibé^. Francfort, Broeoner, in-fi* : 8 fr.
[ Ouvarcff] Ueber dass vor-Homerische Zeiraltêr, Eîn Anhang zu den Briefeti
ueber Homer und Hesiod; von Gotlfr. Hermann und Fried- Creuzer Saint-
Pétersbourg, 1819, in-â*"
L/go vcn Rheinberg, ein Trauerspiel, &c.; Hugues de Rheinberg, tragédie,
par M, (Ehlenschïoger, Gottîngue, Duerlich, j8ig, in-S,"
C JL. von Woltmanns sàmintluke Wtrke , iXc, ; Œuvres complètes de
Woltmann, Leipstck, au Musée allemand, in-S*^ Chaque livraison (60 à 64
feuilles) coûte 20 fr. Les deux premiers tomes contiennent une Vie de Taufeur,
composée par [ui-même et achevée par sa femme; une Histoire du gt^nre humain;
uïTe Histoire dti Egyptiens ; une Histoire des Israélites ; une Histoire de France,
depuis la domination its Romains jusqu'au 31 mai 1793. La seconde livrai-
son doit renfermer i'Hisfoire d'Angleterre.
A'Iûirhltp Norbergi selecta Opuscula academica j edidît Johan. Norrmann.
Londini Gothorum; pars I.** 1^17; pars 11.*, i8j8, /w-^.^
Rehe nach dem honen N or den y iTc. ^ Voyage au haut du Nord par la Suède,
la JVorwégeet la Laponie, dans les années 1810-1814 , par M. Vargas Bedemar.
Francfort, Hermann , 1819, lom. L*'; in-SJ i z rxd. 6 gr. Ce Voyage histo*
6i JOURNAL DES SAVANS,
jrique et scientifique est destiné à faire suite à ceux de MM. de Buch et Haus-
mann.
Tableau du Brésil, par le professeur Christ. Aug. Fischer. Pesth , chez
Hartleben, 1819, 2 vol. in-S.", avec 10 gravures: z rxd. 12 gr,
ANGLETERRE.
La société des Highlanders d*Ecosse a charge une commission, prise dans
•on sein, de surveiller la rédaction d*un Dictionnaire gaclic-anglais et anglais-
gaelic; et ellea fait connoîtreses vues à cet égard dzns deux prospectus qu'elle
a fait distribuer. Le plan qu'elle a adopté ne renferme pas les difierens dialectes
Jiés augaelic, comme l'irlandais, le gallois, ie dialecte de i'ile de Man, et
les différens dialectes celtiques qui peuvent s'être conservés sur le continent.
•Une SI vaste entreprise s'accorderoit difficilement avec l'esprit d'exactitude
Su'elle souhaite de mettre dans ses travaux , et le degré de perfection auquel
Ite voudroit porter celui-ci. L'objet qu'elle te propose en ce moment, est de trier
les matériaux pour un dictionnaire particulier, soit des anciennes compositions
littéraires les plus authentiques, soit des dialectes populaires des habitans
mctuels de race celtique en Ecosse. On suivra l'orthographe moderne la plus
accréditée , mais en conservant celle des variantes qui auront quelque
importance. La signification sera donnée en anglais et en latin, et l'usage de
chaque mot sera expliqué par des exemples. L'ouvrage sera terminé par deux
index, l'un anclais-gaelic, et l'autre latin-gaelic. On suppose q«'if pourra coûter
cinq guinées. Le montant des isouscriptioos, et les notes que des savans voudroient
adresser à la société sur ce sujet intéressant , seront reçus par M. Gordon,
lecréuire de la société, Frederick-street, n.* 50, à Edimbourg.
On peut dés à présent juger du plan de l'ouvrage par un spécimen d'une
feuille m-4.'^ qui a été publié par ordre de la société. C'est un ministre versé
dans la langue et les antiquités de sa patriej le révérend J. Macleod, qui est
.«barge de la rédaction de l'ouvrage.
Notice des principaux ouvragel publiés en Angleterre dans le cours de
Tannée 1 8 19 , et pour lesquels on peut s'adresser chez MM. Treuttel et Wiiriz^
à Paris, à Londres et à Strasbourg.
The annual Résister, or a View of the history, politics and literature, for
theycar 1818, /«-*.•; 16 sh.
jiistory of the Island of Newfeundland , containîng a Description of the
Island» the banks and fisheries» and trade of Newfoundiand and coast of
Labrador; by Rev. Amadeus Anspach, r/i-^/avec deux cartes; 16 sh.
First impressions on a Tour upon the Continent, in the summer of 1818,
through pans of France, Italy, Switzerland, the bordcrs of Germany, and a
partof French Flanders; by Marianne Baillie, in-8,* 15 sh.
Proceedings in Perga and the lonian islands , with a séries of correspondence
and other justificatory documents, by lient, col. de Bosset, in-S/' : 7 sh.
. A chronologieal History of north eastern Voyages of discovery , and of the
sarfy eastâm navigations of the Russians ; by capt. Burney, in^S.* : 12 sh.
Ayear's Résidence in the Unitfd States of America, by W. Cobbett ; 3.** partt
in-S.'i 6 sh.
JANVIER 1820. 6i
'AfemoirsofJohn Duke ofAfdrlborough , wîth his original correspondence;
by Rev. W. Coxe, 3 vol. in-^.'' ; 9 1. st. 9 sh.
Classical and topdgraphical Tour îhrough Creece durîng theyears 1801, iSo^
and 1806, by Ed. DodweII^2 vol. in-^,', fig. et cartes, ici. lo sh. Views in
Gfccce, from drawings, 1 .** part in-folio , texte anglais et français, avec 5 planches
coior. ai. 12 sh. L'ouvrage aura douze parties.
Tht History , civil and commercial , ofthe British West Indies, with a conti-
nuation to the présent tinne, by Bryan Edwards, 5 vol. in^8.^ ,ti 1 vol. de
pi.; 3 1. 15 sh. ^ .
Journal ofa Route across India, through Egypt , to England, in the latter end
ofthe year 1817 and beginniog of 1818, by lieut. coL Fitzclarence, i/i-^,* avec
planches col. et cartes, gr. in^éf," / 2 1. 18 sh.
Views of Society andmanners in the north of Jreland, in • séries of lecteurs ,
written in the year 1818, by J. Gamble^ //ï-^." 12 sh. . .
Thtltinerary ofCretce, containing 100 routes in Attica, Boeotia» Phoçis,
Locris , ami Thessaly ; by sir W. Gell, in-S." ; 1 4 «h.
. Alemoir and Notice explanatory ofa chart of Madagascar and the north*
easîem archivelago of Afauritius , drawn up according to the la test obser-
vations , by Ucoffroy , m-^.* ; 1 8 sh.
Façts and Observations respecting Canada and the United States of America,
aSordînga view ofthe înducements to émigration ; by C. F. Grèce, in-S,'; 7 sn»
Accâunt qf the kingdom of Népal, and ofthe territories annexée tù this
dominion by the H oust of Gorkha ; by I>.' Francis Hamilton , in-4/ aveâ
gravures; 2 sh.
Journal ofa Soldier ofthe 74.* régiment from 1808 10 181 5, iir-/2y 5 sh*
A Histofy ofEngland, from the (îrst invasion by the R-omans to the acceision
of Henry Vlll; by Rev. John Lingard, 3 vol. iV^.»/ 5 1. 5 sh.
Travels invarious countries of the East y more particularly Persia , rn i8rO|
181 1 and 1812, with Extracts from rare and valuable oriental manuscripts^
by sir W. Ouseley ; vol. I , in^^* avec atlas ; 3 I. 1 3 sh.
A geographical and statistical Description of Scotland , with tables; by D.'
James Playfair,2 vol. in-S.' ; 1 4. 4" «f^*
Lifi of lord William Russell, with some account of the times in which hç
lived ; by lord John Russel : in-^»'; t 1. 1 1 sh.
A Voyage cf discovery , made under the orders of the Admiralty, fof th€
parpose ofexploring Baffin's Bay; by captai n John Ross: seconde édition^
2 vol. in-8,'', avec cartes, i i. 1 sh. — Êxplanation of captain Sabine^ Remarks,
iii-A%2 sh. 6d.
Remarhs on captain Rossas Account ofa Voyage to Baffin*s Bay; by captatrt
Edward Sabine , m-A* , 2 sh.
A Narrative ofthe expédition to Algiers , in the year 18 16, under thé
conimand of admirai lord Exmouth, by Ab. Sâlame, in-S." , 15 sh.
The provincial Antiquités and picturesqué Scenery of Scotland , with descriptive
illustrations; by Walter Scott, n.® i ygr.in-^,'., 1 6 sh.; et avant la lettre, i l. lOsh.
The History of Seyd Said, sultan of Muscat / togeiher with an Accôuni'pf
the countries and people of the shores of* ihe Pcrsian Gulf, particularly of tHc
Wahabces; by Mansur Shaik, m-^// !3"sh.
\
I
•v
6i JOURNAL DES SAVANS.
Afemoirs of hermost excellent majesty Queen Charlotte s by John Watkîns,
2 part. m-SJ' i 16 $h.
A statistkal , hïstoncal and political Description of the colony of Nefur
South Wales,2iTià its dépendent settlements on Van Diemen*s Land^ by C.
W. Weniworth ; in-S." y 12 sh.
Letters on theEvenrs which havepassedin France s ince the restauration in iSif;
by Helen Maria Williams, in-S.' ; 7 sh,
Emmeline, a Fragment, with some other pièces, by Mary Bninton;pet.
In-S.'; 10 sh.
Afa^eppa^ by lord Byron; in^S* , y sh. Don Juan /in-,^,* ; i I. 1 1 sh.
Taies ofthe Hall, by Rev. George Crabbe: 2 vol in-S." ; i I. 4 sh.
The Antiquities ofSicily; by John Goldicutt, parts i and z^ in-folio s 2 1. lash.
Fredolfo, a tragedy ; by Rev. C. R. Maturin , in-S,' , 4 ^h.
Repertorium Bi^liographicum, or some Account ofthe most celebrated British
fibrarresygr. in-S/ fig*» 3 '•
Scnpture*s Costume, in a séries of coloured engravîngs, representing the
principal personages mentioned in the Sacred Writings, by R. W. Satchweli ;
gr.iW.% 5 i. 5 sh.
Daiiscfmy Landlori; third séries, contaîning the Bride ofLaromermoor and
a Legend of Montrose: 4 vol. in-tz, 1 1. 12 sh.
Bibliotheea Britannica, or a gênerai Index to the literature of Great Britain
and Ireland» ancient and modem ; by D.' Robert Watt, part 1 ; i/i-^.*, i 1. 1 sh.
Illustration of the Architecture and Sculpture of the Cathedral Church of
Lincoln i by Charles Wild, in-folio, fig., ; 1. ; sh.
Nota. On peut s*adresser i la librairie de Aï M , Treutte! ^r Wurti , à Paris,
me de Bourbon, n.*ty ; à Strasbourg, rue des Serruriers; et à Londres, n," jo ,
Soho^Square, pour se procurer les divers ouvrages annoncés dans le Journal des
Savans. H faut affranchir les lettres et le prix présumé des ouvrages.
TABLE.
Leonis Diaconi Caloënsis Historia. {Article de M, Raoul-Rochette.). Pag. 3 ♦
Dt Mohammedt Ebn^Batuta Tingitano, ejusqtte itineribus , Comment
tatio academica, Ù'c» (Article de M, Silvestre de Sacy. ) 15,
^quejade, monumento antico di bronjp del Museo nationale Un^
gharese, da Gaetano Cattaneo. {Article de Aï. Raoul-Rochette.) . . 25 .
Voyage classique et topographique en Grèce, exécuté pendant Us années
tSot , 180$ et i8o6,varEd. DodwelL {Article de Aïs Letronne.).. 34»
JPeux Lettres à mylord comte d'Aberdeen sur l'authenticité des inscrip*
tions de Fourmont , par AI. Raoul-Rochette. { Second article de
AI. Letronn^. ) # 47»
Dt l'auscultation médiate, ou Tr/iité du diagnostic des maladies des
poumons etdu cœur, par R. T. H. Làënnef. [Article de M. Tcssier.) . 52,
nwidkf tittérains - • • • • J î •
FIN DE LA TABLE*
Le prix de Tabonnemcnt aa Journal des Savans est de 36 francs pMP an^
et de 40 fr. par ia poste ^ hors de Parb. On s'abonne chez MM. Treuttel et
Wurt^, à Paris, rue de Bourbon, n/ //; à Strasbourg , rue des Serruriers, txh
Londres, n»* jo Seho-Square» Il faut afiîranchir les lettres et fargent.
Tout ce qui peut concerner les annonces à insérer dans ce journal,
lettres , avis, mémoires , livres nouveaux, &c. doit être adressé,
FRANC DE PORT, au bureau du Journal des Savans, i Paris, rue
deMénil-montant, n.^ ai.
^jl3 ^ c^^ààJi^ SeLECTA EX HiSTORlA HaLEBI
€ coAice ûrabko Bihliotheca regiœ Parisiettsis ediàit , latine
vertit et adrwtûtiombus iUustravit G. W, Freytag, D/ Pk,
Lutetiae Pariâiorum , è typographîa regia, //i-^;*
.PRÈS quatre ans passés h Paris et consacrés sans aucune distraction k
Tétudedes langues arabe, persane et turque , M. Freytag, appt'lé par fe
gouvernement prussien à remplir une chaire de lanLmes orientâtes dans
la nouvelle université de Bonn, a voulu justifier et les encouragement
qu il avoit rtçus et le choix dont il venoil d erre robjet , par la publicarion
d'un ouvrage propre i faire connoitre les progrès qui! avoir faits dans fa
« JOURNAL DES SAVANS,
langue arabe, et le profit qu'il avoit tiré de la riche colfectîon de manus-
crits orientaux de la Bibfiothèque du Roi. Pour remplir ce but , il a choisi
THistoire d'Alep, de Kénial-eddin (Omar fils d'Ahmed)» ouvrage
singuh'èrcment recommandable, sur-tout par les nombreux détails qu'if
nous a coîiservés relativement aux croisades. M. Freyiag, il est vrai,
n'a point choisi dans THistoire d*Alep l'époque des croisades, quoiqu'elle
eût ufiert beaucoup plus d'intérêt ; il a préféré prendre la portion de cette
histoire qui coDjmence h la conquête d*Afep par les Musulmans et se
termine au règne de SeiT-eddaula , à Tan J36 de Thégire : c'est donc
environ un espace de trois siècles que contient le fragment qu'il a fait
imprimer , ei qui pourtant n'occupe que cinquante-six pages de texte
aralie dans ce volume. En se déterminant k donner de préférence ce
morceau, M, Freytag n a point consulté sa commodité et ce qui eût pu
rendre son travail plus facile. Comme il se propose de publier par la
suite le reste de 1 ouvrage, il étoit naturel qui! nlntervertît point Tordre
des événemens. Les lecteurs cependant doivent être prévenus quils se
feroient une fausse idée du mérite de fouvragede Kémal-eddin^ s'ils en
jugeoieni par ce fragment. La ville d'Alep, pendant les trois premiers
siècles de l'hégire, na pas joué un rôle assez important pour que son
histoire à cette époque, si l'on en excepte les premières années de fa
soumission de la Syrie aux Arabes, offre des circonstances dignes de fixer
Fat ten lion. La part qu'elle a à l'histoire générale de l'empire des khalifes,
ne suffïsoit pas pour autoriser Kemal-t^ddin à entrer dans le détail des
principaux événemens de ces trois sJècles ; II se contente donc de les
rappeler sommairement^ et fait une meniion spéciale des faits qui se
sont passés, à Alep x>\x dans son territoire : il iiidique aussi la suite des
gouverneurs de cette ville sous les khalifes Abba&sides, et nomme fré-
quemment les kadhis qui y ont exerce les fonctions judiciaires. M* Frey-
tag, au surplus, a remédié à la sécheresse du récit de Kèmal-eddin et à
sa concision par des notes remplies d'érudition, et pour lesquelles if a
mis à contribution un grand nombre d'^ouvrages manuscrits. Mais nous
devons fifre connoîtr<? en détail lecontemi et la disposition de ce volume.
Dan-» une préface de cinquante- six pages, M, Freytag, après avoir
rendu Cv^rpie des circonstances qui ont donné lieu 5 son séjour à Parb,
et exprimé sa reconnois^ance envers les personnes qui ont encouragé,
ftvMrjvt' c » dirigé ses études dans cette capitale, fait connoître les motifs
qui lorf porté a s occuper d'une manière toute particulière de Touvrage
de Kéinal eddiii. Puis il traite en autant de sections, i."" du titre de cet
ouvrage , i.° de son contenu , }•* de la manière dont il est écritt 4-*' des
sources auxquelles Tau leur a puisé, ^J" de 1 auteur lui-même 1 ô."" de la
FÉVRIER 1820, 6^
description matérieHe du manuscrit , 7.** de la foi due à cet écrivain.
A l'occasion du titre de louvrage, M. Freytag corrige quelques
erreurs de Tauteur de la Bibliothèque orientale : il prouve que le titre
exact du livre est cjiaj^jb' ^ja oJjl ëU) , c'est-à-dire , /a Crème du lait
tirée de l'Histoire d Alep, et nous apprend que Fauteur l'a intitulé ainsîy
parce qu'il l'a extrait d'un plus grand ouvrage de sa composition,
rédigé par ordre alphabétique, et qui.étoit une sorte de dictionnaire
historique des lieux et des hommes célèbres appartenant à la ville d'Alep.
II est bon d'ajouter, pour les personnes qui ne savent point l'arabe , qut le
nom mêmedelavilled*Alep,en celte langue, veut dire //2/>, et que c'est là
ce qui a donné lieu à l'espèce de calembourg qu'offre le titre de ce livre»
L'histoire contenue dans ce volume commence à l'an 1 6 de l'hégire et
finit à fan 64 > : niais l'auteur a consacré les premiers feuillets aux
traditions qui ont cours parmi les habitans d'AIep sur l'origine de leur
ville , à l'exposé des noms qu'elle a portés à diverses époques, enfin à l'his-
toire des souverains à qui elle a appartenu depuis les plus anciens temps
^squ'à sa conquête par les Musulmans. M. Freytag a cru convenable de
donner dans sa préface un aperçu de tout l'ouvrage, et il a indiqué la
succession de tous les princes qui ont possédé la souveraineté d'AIep , et
des gouverneurs qui y ont exercé l'autorité pendant toute la période de
temps qu'embrasse cette histoire.
C'est principalement dans l'ouvrage même de Kéniaf-eddîn que
M. Freytagapuîsé les détails nombreux qu'il donne sur cet écrivain et sur
ses aïeux. II nous apprend que les ancêtres de Kémal-eddin , à commencer
par son quadrisaïeul , avoient rempli les fonctions de kadhr, et quelque-
fois celles d'imam et de khatib ou orateur sacré à Alep, pendant envi-
ron cent soixante ans. Son père étoit kadhi d'AIep en j 88 , époque de la
naissance de Kémal-eddin : peur lui, le titre de sahib qu'il porte souvent,
et les affaires politiques auxquelles il fut employé, autorisent à penser
qu'il eut le rang de vizir ou ministre d'état. Il fut plus d'une fois envoyé
en ambassade ^divers princes , et en dernier lieu vers le sultan d'Egypte ,
en l'année 657 , pour lui demander des secours contre lesTartares, dont
les armées menaçoient la Syrie d'une invasion générale. Lorsque les
Tartares furent devenus maîtres d'AIep et de Damas, ainsi que du reste de
la Syrie, Holagou donna, à ce qu'il paroît, à Kémal-eddin la place de
iadhi suprême de toute cette province. M^is celui-ci , revenu dans sa
patrie , ne put voir sans une extrême affliction l'état de dépopulation
et de ruine auquel elle étoit réduite , et il composa une longue élégie sur
ce sujet : il retourna ensuite au Caire, et y mourut en l'année 660.
Le manuscrit de THistoire d'AIep que possède la Bibliothèque du Rof ,
70 JOURNAL DES SAVANS,
parott avoir été copîé sur un manuscrit original de Tauteur, et pîusîeurs
notes marginales annoncent qu'il a été colhiionné avec cet original.
Après avoir discuté tout ce qui concerne l'histoire d*AIep et son auteur,
M. Freytag rend compte des soins qu il a donnés à I édition du texte, de
sa traduction latine et des notes quil y a jointes; puis il offre de courtes
indications des manuscrits dans lesquels if a puisé les détails historiques »
géographiques et autres, qui font la matière de ses noies,
A la préface succède ifnmédia tentent le texte arabe , qui occupe
cinquante-six pages. Il est imprimé très-correctement, et je n*y ai observé
que deux ou trois fautes typographiques (i) , en outre d*un très -petit
nombre qui sont corrigées dans Verrata.
La traduction latine vient ensuite, et forme quarante-trois pages. Elfe
e$t| en général, très-fidèle; et nous n*avons remarqué qu'un très-petit
nombre de passages où le traducteur ne nous ait pas paru avoir saisi le
sens de fauteur. Mais nous devons avouer que cette traduction nous
semble souvent obscure, qu'elle est péniblement écrite, que parfoîs
même les phrases ne sont pas complètes et laissent quelque chose à
désirer. Une partie de ces défauts tient a ce que le traducteur a ordinaire-
ment fondu ensemble dans sa traduction plusieurs phrases du texte
arabe, pour éviter sans doute la monotonie qui eût été le résultat d'une
traduction plus littérale: je nen citerai qu*un exemple» On lit, p. a8 :
Abu'Àhgkiirrus t copiis versus vallem Buikfian eductls , quum consûthsti^
KartnathJtœ €&pta,duce Altnothannvico rjusserva, obviûtn venlunt, et, impetu
fact^, omîtes ejus sachs , ipso quodam eunucho alebri Badro Kadamita occis o,
cseduntt ut Ahu-Alagharrus cam ml /le vtris m v/cum quemdam Hatebi fugiens
peni eva^eret f indc , quofilius eu m peditum et amicorum ûgmhie exierae^
urbem intrnnte. Dans cette phrase, on ne sait trop si servo est au datif,
comme régime de r/>v/<7/7ï ventant, ou à Tablatif, comme se rapportant
\ duce Almotkawmco ; peni est une faute, il falloit dire vîx; intrante n*a
point de sujet, et on ne sait à qui ce mut se rapporte ; qtw exierat est
obscur, et devrort signifier ou ît s'étoit rendu en sortitnt dmla ville. N'eût-
il pas mieux valu suivre de plus près le texte, et traduire : Eg^essus est
igitur Abu'Alagharrus ad vdllcm Buthnan, quumque ibi constîiissit , ipsi
supervenit Karmatkitœ exercitus, duce hujus servo Almoîkawwiko : qui,
pralio commisso, devictis copiis Abu^Aldgharri , omnes ipsi us socios occidit,
nec non illustrem quemdam eunuchum , Badrum Kadamita m dictum. Abu*
Atagharrus t mille viris ipsum comitiintiLus.evasit , ft in quemdam vicum ex
{%) Page 1 5 , iig. 9 , au lieu de Ajl^t , liiez AUut! ; page 29, lig. j , au lien
FÉVRIER 1820.
Haleti territorio icse contu/ît Cui âtïnde quum JiVms tjus , ntâgnâ turbâ
peditum et amicorum sttpatus , HaUboobviam vcntjstt, in itrùem intravit.
II ne sera pas inutile que je corrige ici quelques erreurs que je croi^
avoir reconnues dans h traduction.
L'aufeur raconte que Khakd, gouverneur de Kinnesrîn, au retour d*une.
expédition faite sur le territoire des Grecs en la 17/ année de Thégire,
partagea le riche butin qu'il avoit fait, entre les Musulmans qui avoient
eu part à son expédition , sans en excepter la portion qui devoit lui
appartenir comme général. Sa générosité connue attira ensuite auprès de
lui des hommes qui venoîent de diverses contrées solliciter des bienfaits:
parmi ceux auxquels il en accorda, éioît un Arabe illustre, chef de: la tribu
de Kenda, et nommé Asckuih ben-Kais. Khaled fui donna une grati-
fication de dix mille pièces d'argent. Le khalife Omar, à qui, dit jioire
auteur , rien n'échappoit de ce qui se passoii dans les provinces soumises
à son autorité, apprit par des lettres de l*Irak le voyage d*Aschath, ei
par des lettres de Syrie la libéralité de Khaled. li écrivît en conséquence *
à Abou-Obaïda, général des armées en Syrie, de faire comparoître
devant lui Khaled, de le dépouiller des marques de sa dignité, et dç
Finterroger pour savoir de lui si le don qu'il avoit fait à Aschath
provenoit de son propre bien, ou du butin qu'il avoit fait sur les Grecs;
«car, ajoutoit'il, s'il dit que ce don provient du butin qui! a fait, il
» se reconnoît lui-même coupable de mauvaise foi; dans le cas contraire,
» if est convaincu de prodigalité : dans lime comme dans lautre suppo-
a> sition, vous le destituerez, et vous joindrez son gouvernement à celui
a> que vous avez déjà. >> Toute la force de cet argument consiste dans le
lait énoncé précédemment; savoir, que Khaled, en partageant le butin
entre les Musulmans qui avoient combattu sous ses drapeaux, ne s*étoit
rien réservé, et avoit compris dans la masse à distribuer la portion même
à laquelle il avoit droit. En effet, s'il affirmoît que les dix mille pièces
d'argent données à Aschath provenoient du butin , il s'avouoit tacite-
ment coupable d'avoir soustrait une portion des dépouilles de l'ennemi.
Or on ne trouve point fénonciaifon du fait dont il s'agit dans la tra-
duction de M. Freyiag : ChalcJus . . . €um Jhjado^ anno 77,, . . expc-
ditîonem contra Ùrœioj suscepit, et siilyuî , prœdâ anus tus reduffs, nam
magnâ uterque prœdâ potitus est , quum în yu!gus, qunntis m ïUa expedU
twne ûpîbus potiîi isscnt, emanasset , prœdam suant dis tri huit, &c. H falloit
traduire : Anno ij in ttrrûS Gracôrum in^fssus ut KhaUdus cum Ihjado • • •
H mûi^iiis Qp*hu^ pMill ^un\ Rinrsus est itaqur Khaledus ^ incotumis ei
prœdâ ouus tus ; miUtdusquc /at^/tus ejf id quod in hic n:stivd expedhlone
prœdati étant, simulque cum his ùpibus distribua Ulud quod sibi ips!
7% JOURNAL DES SAVANS,
acqunUrnt, L'erreur vient, i." de ce que M. Freytag a prononcé ^
balûga , au lieu de ^^ /fa//aga ; 2." de ce qui[ n\i pas fait atttntronque
le verbe t^Ul, étant au pluriel/ a pt7ur sujet ^^Ul Varméi, et non les,
gcncrauK Khafed et Ijadh , auquel cas il devroii être au duel; 3.'* de ce
qu'if a cru que le pronom dans l^ se rapportoit à aajLJI Vcxpidiùon
de fété^ tandis qu*il se rapporte logiquement k tjjUt Ut qui est ici
Téquivalent de Jl^l ou /Uê , et qu'il veut dire parmi ce butin, au
nombre de ces dépùuil/es. Je ne doute point que M* Freytag ne reconnoisse
lui-même la justesse de ces observations*
Je remarque, p, 6 de la traduction, un autre passage assez important
pour Thisioire, dont le sens est altéré dans la version latine de M. Frey-
lag, non par un contre-sens fortnel, mais parle défaut de liaison dans les
idées, liaison qui néantnoins est très-sensible dans loriginal. Je me
contenterai de présenter ce passage traduit comme ildoiirètre; le lec-
teur, en comparant jna traduction avec celle de M- Freytag^ sentira le
défaut que je reproche à celle-tî. Voici ce que dit Kémal-eddin.
€«Moawia détacha Kinnesrin du gouvernement dTmesse, et Téleva
I» au rang de chef-lieu d'un gouvernenient. D'autres attrib^ient cette
i> déposition au Ithalife Yézid fils de Moawia : depuis cette époque , on
n ne parla plus que du gouvernement de Kiiinesrin. Quant à la vîHe
I» d*Alep ,ç|(eétoit immédiatement sous lautoritédes khalifes Omtniades,
» parce qu*ils y faisoient leur résidence, et que les gouverneurs de cette
M ville, du temps de ces khalifes, n'étoient guère que les chefs de h
» garde impériale^ et navoient entre les mains, n\ radministraiion su-
*» périeure des affaires, ni le cotnmandement des expéditions militaires.»
L*auteur veut dire qu'antérieurement à Moawia, les khalifes detneurant
l Médine, Alep étoit le chef-lieu du gouveroenienl de la Syrie, quon
nommoit le gouvernement d'Afep; mais que sous les Omtnîades, le gou-
Terjieur d'Alep étant sans aucune autorité réelle, le gouvernetnent de la
Syrie étoit désigné sous le nom de gouvernement de Kînnesrin.
Pour le dire en passant, on trouve dans Touvrage de Kémal-eddîn
plusieurs observations de ce genre, qui annoncent un historien exact et
réfléchi. Cest ainii qu'à Foccasion d'une entrevue du khalife Mottaki
avec Ikhschid ou Akhschid, gouverneur d'Egypte (p. jB de la tra*
ductiofi ) , il nous apprend que les khalifes n appeloîent jamais les
personnes auxquelles ils adressoient la parole, par leur surnom »j.^
(cVst-à-dire, le surnotn pris du nom du fils aîné, comme Abou-Bccr,
AbouYdkoub ), Nous pouvons aussi conclure d*une autre aventure qu'iï
raconte ( p. z6 de la traduction ) , quei pouraïuioncer au prince k mort
FÉVRIER l8zo. 71
!^fuelqu*im , on se servoit de cette formule ^J<^J^JfJ^] #j>l m\ Jas.\ qui
Uteu rlcomptnse mngmjiqutment le prince des Jideles. C*est ainsi qu*à
Maroc, lorsqu^on parleàrempereur, au lieu de dire qu'une personne est
malade ou est décédéç , on dît dans le premier cas , N, ne se plaint pas dt
monseigneur ; et dans le second , N* a emporté le mal de monseigneur.
Je reviens à la traduction de M. Freytag, sur laquelle je ne ferai plus
qu'une seule observation.
Uauleur raconte (p. 18 de Id traduction ) qu*en Tannée 290, vers fa
fin du jeûne de ramadhan, les Karmaihes assiégeant Alep, les habitans
firent, malgré les chefs de la garnison, une sortie vigoureuse, qui eut
un succès complet. Abou'Iagharr, quicommandoîr dans fa place , voyant
les habitans aux prises avec les assiégeans, fit sortir la garnison, et
contribua ainsi à la victoire. Après ce succès, le jour de la fin du jeûne,
les habitans d* Alep sortirent de la ville pour faire la prière et accomplir
les rites de la fête dans la proseuque ou J!.a>*,|jeu découvert, et qui
est communément hors de la vîlfe. <c Pendant ce temps- là, ajoute
-m rhîstorien, Abou'Iagharr observa d'un lieu élevé les Karmathes ( dans
» la crainte d'une surprise de leur part ) , mais aucun d eux ne s'avança
1* contre lui, » Le texte porte : rj-^ ^ LJkj^\jJJ\ J^ ^Vl ^1 <j|^lj
-uît 0^1 aâ^, m. Freytag, qui n'a pas saisi le sens du mot ^Jja] ex alto
prospicere , a traduit : Ipse autem tantopen super Karmathitas emineùat^
ut nemo contra eum ptôfieiscî auderet.
Ce sont là à peu près les seules critiques de quelque importance dont
la traduction de JVL Freytag nous ait paru susceptible^
Les notes, qui occupent cent dix-sept pages en petit caractère (depuis
la p*44 jusqu'à fa p. 160 ) , peuvent être considérées comme la partie
la plus iii^portante de l'ouvrage, et celle qui fait le mieux connoître le
talent ou rérudition de lediieur. Extraits relatifs à fhistoire et k la géo-*
graphie , notices biographiques , observations philologiques, remarques
sur le mètre des vers cités et la prosodie, citations de toute espèce^
pièces de poésie de différens auteurs: tels sont les objets qui remplissent
ces notes, dont il ne nous est pas possible de parler en détaiL Le mérite
de ces notes sera sur- tout apprécié par ceux qui n'ont pas accès aux
grandes collections de manuscrits, et nous ne saurions trop leur en
recommander la lecture.
C'est précisément à raison de leur importance que nous croyons
devoir proposer ici quelques corrections en petit nombre dont elles nous
ont paru avoir besoin.
Nous avons déjà eu occasion de parler dans ce journal de rîmportance
?i JOURNAL DES SAVANS,
âe la prosodie, et du secours quVife peut offrir à la critique. M-. Frey-
l-ag a donc donné un exemple utile , en indiquant avec soin la mesure
de fous les vers cirés, soit dans le texte, soit dans les notes de ce volume*
Aiais il s'est glissé dans les obsen^ations de Téditeur quelques erreurs,
et dans les vers imprimés quelques fautes, qui j ourroienl sembler meître
en défaut les règles de la prosodie, et que, par cette raison, it est nécessaire
de corriger. Ainsi c'est à tort que, dans la note 199, M. Freyr*ng a
supposé que le pied ^JLuu-^ étoit changé en ^Jy^ * Cette sub&u-
turian h*a pas lieu ; il faut seulement prononcer II , au lieu de ti , ei
on aura le pied j-Uf^ dans les mots j ci L» *
Dnns la nore 2 1 1 , p. 1 5 1 , au dixième Vf rs de h j^ece r*ip{>nrtée de
Moténaljbii il faut lire os au lieu de i>ij, qui est incompani>le avec la
mesure; ei cest ainsi qiif porie un manuscrit de Moténabbi que j';^i
sous les yeux.
Dans un autre poème du même auteur, rapporté dans la note 2^16,
if faut, page îJ^i , ligna 1 1 , lire avec le* manuscrits i^jjS^X^j au lieu
de 0^1*.
Page 1 H » dans un poème de Bohtari, il est impossible de scander
le second hémistiche du troisième vers, si on ne lit J^iaII ^I^ ^ii<
lieu de ^JUlf • ♦
Une correction plus tmporrante est celle qu'exigent les vers relatifs
au mariage du khalife Motadhed avcc la fille de Khomarôuya ou Kho-
marowiya, rapportés noie 66, p. 106.
Elfe a pour obîet le troisième des vers que M. Freytag rapporte
d'après Alasoudi. Voici comment on le lit dans rîmprinié :
Mjfi^^À^ *)Li U>j^j V) *-^ l^ jJbU ts^À^ i^^filf
M, Freytag traduit ainsi : Tlti adtst mulûtudo , quœ in ta pulchriturllntm ,
fil ijus animcy pulcherrimas hgenii doits, in e)us mttnibus hbn^litattm
fognûfçUfCeitt traduction prouve, 1 .** que M. Freytag a prononcé *l>j-^ ;
a.* qu'il a pris fjlU pour synonyme de »^ , et Ta projîoncé ^iU ;
3** enfin qu'ils prononcé l^ ^^' Or la mesure de ces vers, qui est
composée du pied ^^liu* répété six fuis, est contraire à toutes ces
suppositions; elle exige qu'on prononce tjil< ^j^* et elle exclut
fout-à'fait les mois L^ j^U , au lieu desquels il faui certainement lire
l^^j^G. Ce vers dors a pour sujet la princesse^ et signifie : Pûssidii
(i) L'imprime porte X^Asi^niais c*C5i évîdrmrncnt une fiuic typographi<itte-
FÉVRIER 1820, 7î
M ptenitudirte ùcutorum suorum venus tatem , in mente sua ingenii prier ran^
tiam , in mûnibus suis Hberaliiûtem. Je regarde 1$^ comme fe
féminin de 0^ plenus ^ et (Vinploi du féminin est jusitfié ici par 1c
sens du mot ^Ui qui tient la pl.ice du mot .^r^ai/ , lequel est féminin.
Dans la note 106, p* 66» M, Freytogesten.ore tomi>édans quelques
erreurs en fait de prosodie, en supposant, 1.° que ^V^ pouvoit
rimer avec âtjLi; 2/ que le pronom affixe t fonnoit toujours une
syllabe longue. Dans le vrai, il ny a point de rime entre le premier mot .
qui doit être prononcé ^iypjetiLJbî et, quant à Taffixe i, îl fortne
une sjflahe douteuse, que fes poètes font longue ou brève à volonté.
Outre ces remarques, relatives à la prosodie, nous en ferons quelques
autres qui ont pour objet la traduction de certains textes doilt te sens ne
nous sembîe pas avoir été bien rendu.
Dans la note 1 8 j , qui coniîem des détails historiques ?rès*précîeuXp
on trouve, en arabe et en laiîn, une lettre écrite par le chef des Kar-
mathes à fim de ses fieutenniis, O11 lit dans cette lettre : jJUi ^t UjIj^
Ujlt>£.| ^^ mI f*^^ O^ ^y^o^ iJ\j>^ L# ;j^l, ce qui signifie: Visum est
tiobis mi itère ad extra tus rostros qui itlic suri, virum cujiis ope Deus
yindictam sumtutus est de hosiibus nostris; et non, comme a traduit
M. Freytag , Visum est nobis miaere ad copias quœ in hnc reglone sunt^per
quas Deus ab intmicis nostris , , . pœnam expetie.
Cette même lettre se termine arnsî dans la traduction ^ Quim citiùs dé
rtgfone tua, et de rebvs quce ihi gcruntur, nuncium no bis ^itt^ i ne no bis time
aUquiJ ab ejus re, taus tibi , 0 DeuXp sit! in eorum beneJictiane est salus ;
liltimum , quod prœtendunt , est laus D<o, domino mundorum ; ce qui ne
présente pas un sens fort clair» Mais aVhord, au lieu de ne nobis time
ûHqxiid ab ejusri/\\ feUoit traduire «0// ctUre nobis quîdquam de rtbus
ad eam (regiontm ) p^rtinentibus , M> Frtytag a prononcé c>^ timeas
lorsqu'il falloit prononcer kJ^ celés; en second lieu, il n'a pas compris
fe sens de fa formule m o^ [^ ^^y y%.\j m^ L^ ^-^j A"' ^j'^^
(j^iUf cjj f^^ii^ Deo &c faute rf'avmr reconnu que c^est ici une
citation de l'A!coran ( surate to, v* 10 et it), où I auteur de ce livre,
parlant des heureux habitans du paradis, di:: ce Leur prière, dans ces
» lieux de délices, sera de dire : LJouarrges vous soient rendues, ô Dieu!
»Ils se salueront lés uns les autres en se souhaitant la paix, et ils
«termineront leurs prières en disant : Actions de grâces à Dieu, le
» maître des mondes ! »
Parmi un petit nombre ^observations critique*: que je pourrois faire»
7<î ""^ JOURNAL DES SAVANS,
fen choisirai encore deux, parce qu^elIes n*exigent aucun dévelop-
pement.
M, Freytag, dans fa note i J7, p- 103 , rapporte un passage d'un
géognphe arabe, au su|etd'un lieu nommé Thamyyal alokab <_>UjJt iLuï*;
mais il me paroît n'en avoir pas saisi le sens. L'écrivain arabe dit que ce
lieu a pris le nom ^Okab , parce que Khaled, lorsqu'il vint de Tlrak,
conduisant des troupes en Syrie, monta sur cette coHine^ et y pfanta
un drapeau quil avoil reçu de Mahomet et qui porioit le nom ^Okab ,
c'est-à-dire, aigle; « d'autres» ajoule-t-il , prétendent que le nojn àiOkab
» est commun à tous les drapeaux. »> On n*aperçoit pas dans la traducdon
de M. Freytag, que le drapeau donné par Mahomet à Khaled étoit
nommé Okak
Ailleurs ( nott ijo, p* ijo ) ^ il est question d'un lieu nommé Alla'-
djoun o^î. Le géographe araW dit que dans le milieu de cette ville
est une colline, sur laquelle il y a une chapelle qui porte le nom € Abra-
ham : au pied de cette colline est une fontaine. On dit que, lorsqu'A-
braham vint en ce lieu, les habitans s'étant plaints à lui qu'ils manquoient
d'eau , il frappa le rocher de son bâton et en fit sortir cette source.
L'auteur arabe ajoute : #L-^f cifju ^^ A-JUjL^j j^b-*-^ ^0^ tj-a*3U
e'est-à-dire, « par îà ils se trouvèrent hors de peine : leurs bourgs et leurs
» villages sont abreuvés de cette eau.»» M. Freytag a traduit, Ob àanc
iûusam pauperes hcofûrum in melionm s fatum redacti sunt, a pagî forum
hâc aqua fruuntur , parce qu'il a confondu f\jJ^ avec /j^J^ .
lie poème de Moténabbi, qu'on lît p, i4i , et celui de Bohtarî, qui se
trouve p. I 5 J » pourroient fournir matière à quelques légères critiques;
mais elles exigeroient trop de détails, et sont de trop pjeu d'importance*
Notre intention, au surplus, en signalant quelques méprises que nous
avons observées dans fouvrage de M. Freytag, n'est en aucune manière
de porter la plus légère atteinte au mérite de son travail. Les homme:» les
plus habiles ne sauroient se garantir d erreurs dans un travail de longue
haleine, et les plus célèbres orientalistes, tels que Pococke, Schuheas,
Reiske, n'ont pu éviter de payer ce iribui k rhumanité. De pareilles
taches ne sont rien dans un ouvrage où Ton reconnoît par- tout un
savant profondément instruit dans la langue de son original , iïiflitigable
dans les recherches d'érudition, et capable de faire un bon usage des
trésors qu'il a déjà amassés , et de ceux dont la >uite de ses études le
mettra encore en possession. Aussi, dusséje être accusé dune^urte <Je
présomption» j'oserai dh^ que je m'honore très-partfculiérenunt d'avoir
compié pendant quaue ans au nombre de mt% auditeur» le savant qui
FEVRIER 1820. 7y
z pu débuter dans la carrière de la littérature et de rérudhîon orientale
par un travail aussi recommandable sous tous les points de vue.
SILVESTRE DE SACY,
MÊMOIBE sur les ouvrages de sculpture éjui ûppartenoient au
Parthénon et à ^ueh^ues autres édifices de Vacropole à Athènes;
par M. Visconti, A Londres , 1 8 1 6 ; à Paris, chez Dufart ^
quai Voltaire, 18 18.
UENtèvEMENT fait à la Grèce, à Athènes sur-tout, et au Parthé-
non, d'un fort grand nombre d'ouvrages de sculpture, et leur importa*
tion à Londres, sont un événement du plus haut iotéréti autant pour
Tétude que pour Fhistoîre des arts* Ce qui rend cette collection plui
particulièrement précieuse, cest [e mérite réel des ouvrages, et le mé*
rite pour ainsi dire unique qu'ils ont d'avoir une date incontestable, et
d'avoir pour date la plus grande époque des arts*
Une multitude de considérations avoir depuis bien long-temps fixé l'at-
tention des amis de Fart et de rantiquité sur ces restes précieux du génie
de l'ancienne Grèce, et tous dépbroient la fatalité qui condarrînoit ces,
ouvrages à disparoftre de jour en jour, et à périr loin du centre actuel
des arts, par Tincurie des habitans et par le zèle même des étrangers,
II n'y avoit pas en effet de voyageur qui ae se fit un devoir d'im-
porter, comme une relique précieuse, quelque fragment des sculptures
du Parthénon; de sorte que I*estîme et 1 admiration des curieux étoient
devenues une cause de destruction à ajouter à toutes celles qui, d'année
en année» menaçoîent ces monumens dune ruîjie irréparable, que déjà
Chandier avoit prédite comme très- prochai ne* Ils ne pouvoient en être
préservés que par une puissance extraordinaire et hors de mesure avec
les moyens bornés des simples voyageurs.
Mylord Efgin s'est dévoué à cette entreprise , et il a fait enfin
connoître il l'Europe savante la beauté singulière des sculptures du
Parthénon; beauté dont les voyageurs eux-mêmes, qui ne (es avoient
observées que fugitivement et de loin , ne nous avoient jamais donné la
moindre idée.
Cependant, quand tous ces morceaux, plus ou moins mutilés, arri-
vèrent à Londres et y furent provisoirement exposés, dans un état de
déiordre, b la vérité, peu propre à leur concilier fadmiralion du grand
nombre , leur valeur ne fut appréciée que par quelques artistes et par le
7S JOURNAL DES SAVANS,
petit nombre de ceux à qui de sérieuses études et des pamllèles mufti-
plies avoit^m a|>pri.% â connoître *en quoi consiste le mérfie intrinsèque
des œuvres de i imitation* Lord Elgin rencontra beaucoup de froideur
et d*tndïflerence pour des objets qui (uî avoient coûté tant de dépenses»
de soins et de travaux. II vouloit les céder à son gouvernement et être
indemnité au moins de> frais qu1I avoil faits; mais il trouvoit par-tout
des hoiiunes qui ne conctvoient pas qu'on pût payer si cher des frng-
mtn^ de statues , des marbres rong'^s par le temps, des figures mutfléeSt
auxquelles il éluit même difficile de redonner un nom.
Un concours heureux de circonstances fit alors arriver en Angleterre
deux hommes, dont le goût et le sanir ne pouvoient qu'exercer la plus
grande influence sur Topinion que le public ei le gouvernement devaient
se former de la collection de lord Elgin. L*un étuit le célèbre sculpteur
Canova; laurre, le non moins ctleure antiquaire Vi!>coriti. Ces deux
hommes avoitjit, sur la plu|tart des juges, I avantage de connoîïre à
fond et d*aToir étudié, chticun dans leur genre, les points de compa-
raison qui pouvi^ient fixer le mérite absolu ou relatif des ouvrages dont
ia valeur éioit mise en que^^tion.
Le jugement de Canova fut exprimé en peu de lignes dans une lettre
écrite k myinrd comte d'EIgin, et qui fut alcrs rendue publique. L'ar-
liste y professe une haute admiration pour ces restes d*anîiquiié| où il
trouve une réunion pnrfkite de la vérité et de la beauté des formes; i(
regarde comme un des événemens heureux de sa vté d'avoir été conduit
^ Londres, n eût-ce été que pour contempler ces chefs-d'œuvre; et il
fait 5 tant en son nom qu'au nom de tous les artistes et amateurs, de
sincères remercîmens h mylord comte d'EIgin , pour avoir transporté
au sein de fEurojje civilisée ces merveilleuses sculptures. Qucste memo^
rabili t stupcnde scufture.
M, Vîscontî a cru* devoir placer cette lettre, comme le meilleur de
tous les discours prctîminaires, en léte de son ouvrage (i >
Le savant an/iquaire entre ensuite en matière par quelques obser-
vations générales, qu'on regrette de trouver trop peu éfend\Ks» sur
ce quoffrent de particulier pour Tetude et Thistoire de Tari ataique,.
des monumens pre>que seuls de leur genre entre tous ceux qui nous
sont p,jrvenus, c'est i-dtre, portant avec eux non seulement le carac-
tère d'ouvrages originaux , maïs la preuve matérielle de leur origrna-
lîlé; il ne balance pas à croire que les sculptures du Pirthénon, exé-
cutées sous la diicctjon gcnéiale de Phidias, ojH dû en parue, soit
(i) Cette lettre te trouve dans Tcdition de Londrei,
FÉVRIER j8io,
leur composition, soit leur exécution, zu ciseau de ce grand statuaire y*^
qui, bien que plus célèbre dans l'antiquité par ses producîions de-
toreutique et dt sculpture en of et ivoire, ne laissa pas de travailler-
aussi (e marbre, comme Je prouvent plusieurs passages des écrivains.:]
Selon M. Visconti, ces sculptures suffisent pour démontrer, contre'
1 opinion de Winckelmann, que ce qui constitue la perfection deij
l'art, navoit pas attendu l'époque de Praxitèle ; que si la sculpture dut
quelque nouvel agrément au ciseau de ce dernier, le génie du siècle
de Périciès avoit touché les bornes de Tarr.
Après ces courtes observations, M. Visconti passe h Fexamen deil
restes de sculptures qui ornoient les tympans des deux ilontons du
Parthénon , et il e>^aie de leur rendre la place qu'elles y occupoient, et de
parcourir leurs particularités dan> leurs rapports, soit avec Tbistoireda'
J art, soit avec 1 érudition et la philologie.
La première remarque du savant critique sur ces sculptures est relative»*
à la pratique reconniie depuis peu poir avoir cié habituelle chez les
anciens; savoir, de placer dans les tympanb de leurs friintons des iigiires-;
de plein relief, au lieu de les faire de Las-relief, selon l'us;ige moderne,.
De pareils ouvrages dés-Iors dévoient être sculptés dans Tutelier, et-
non en pince; ce qui explique déjà comment ils ont pu recevoir luie [
perfection d exécution que leur emplacement ne seinl4oit puinr exigernl
Une autre particularité remarquable dans ces ouvrages (dit M, Vis^i
conii), et cefle-ci est commune aux lias-reliefs des métopes et mèmo'J
à ctux de la frise extérieuie de la cclitJ , c est qu'un grand noïnf>re d'ac-^ 1
cessoires, armes , boucles^ agrafes, ustensiles, ornemens de coifliire, âtc.»J
éloieni de bronze, et sans doute dorés, quoique le* figures soient des
marbre blanc. Beaucoup de trous et de sillon^ pratiqués daii> les en-<
droits qui dévoient répondre à la place de ces accessoires , en conservent
des traces et même quelques restes, M. Visconti rappelle à ce sujet, en'l
1 appuyant de son honoralife suffrage, la partie d^^ notre travail du Ju'-I
piter Olyuîpien qui traite de la scufjnure putychrome, et oii nous avions
établi, jjar une mul'itude de faits et d autorités, fhahitude quVurem lei^J
anciens, et les Grecs sur-tout, dnns les plus Idéaux temps et dans les'
plus beaux ouvrages des art>, d'«.mer leur scutpture par un mélange
bien ordonné de matières et de co- leurs diverses.
On ncius pardonnera de reproduire encore ici Papprohaiian que rilListre
antiquriirea birn voulu donner à diu*< autres de nos opinions con^ign^es
dans un mémoire lu h Tacademie, çn i ^» i 2 . sur lentrée principale du Par*
thénon,etsur e véritable sujet du frunt<»n. qu*on avoit pris usqaaiors
pour èire Cc ui de la naissance de Minerve, M. Visconti h confirmé cette
8o
JOURNAL DES SAVANS,
loulile opinion, Vttruve semLIe contredire celle de Fentrée du temple
làii coté de loriem, en prescrivant, dans son chapitre de la construction
ies temples, que h statue du dieu regarde le couchant , et que fado-
iteur regîirde au contraire le levant: mais le savant antiquaire fiit ré-
fiulter de beaucoup dauioriiés la preuve que le précepte de Vitruve étoit
I applicable aux rites des Mégariens et des nations doriques, auxquelles
[les Romains senibloient appartenir; que par conséquent les Aihénrens
rdevoient être d^autant pfus jaloux de suivre Fusage contraire, qu'if tenoit
leur ancienne origine, et (es distinguoit des autres nations de la
îrèce , principalement des peuples d'origine dorique , tels que les Mé-
^gnrîens et les Lacédémoniens , contre lesquels Aihènes étoit le plus
souvent en guerre-
Quant à la seconde opinion, savoir, que le sujet du fronton occi-
dental reprcsentoit, non la naissance de Minerve, mais sa dispute avec
Neptune, les fragmens de ce fronton, comparés avec le dessin de
sa composition [donné dans son enrier par M. de Nointel , ont
convaincu M, Visconti qu'il ne pouvoit plus y avoir un doute sur la
restitution que nous en avions faite. Une nouvelle preuve est résultée
du fragment très-reconnoissable de Minerve elle-même, fragment dont
la proportion n*a pu appartenir qu*à une figure de onze à douze pieds,
par conséquent placée dans le milieu ou la partie la plus haute du fron-
ton. Ce fragment de torse porte une égide échancrée , qui se retrouve
de la même sorte sur la figure sans tête placée au milieu du fronton
occidental dans le dessin de Nointel, et que tous les voyageurs, en y
comprenant Nointel, prévenus de 1 opinion que de ce coté devoit être
!a naissance de Minerve , avoierrt prise pour une Victoire : leur té-
moignage nous avoit nous-mêmes induits en erreur. On a trouvé aussi,
siur la base du même fronton , la moitié du visage de la déesse : ce mor-
ceau ne peut également avoir fait partie d aucune autre figure; sa di-
mension le prouve. Que c'ait été une tête de Minerve, on est forcé
de le reconnoître aux yeux creusés pour recevoir des globes d'une ma-
tière plus précieuse, ainsi que Phidias Favoit encore pratiqué dajis le
colosse d'or et d'ivoire du Parthénon* Ce marbre porte aussi fa trace
d'un sillon faisant le contour de son front, et qcrt indique jusquoii
descendoit le casque de métal de la déesse.
Les restes de cette figure ont donc démontré îl M. Viscontî que ,
Minerve partageant le centre du fronton occidental , avec la figure qu'on
avoit prise pour celle de Jupiter, ce prétendu Jupiter , dont le torse
î'est conservé en partie, devoit être Neptune, et que la figure qui, dans
k fromon, selon le dessin de Noiatel, occupoit le char à deux chevaux
FÉVRIER ï820, 8i
pfacé à h suite de Minerve, ne pouvoîi pas être celle de la déesse,*
caniiiie revoient cru tous le^ voyageurs, trompés sur Tenlrée principale
du temple, et par suîie sur le sujet du fronton occideneal , mais bien
ïa Victoire,
Cène figure, très-l)ien désignée dans le dessin de Nointel, est Tobjet
du troisième paragraphe de fa dissertation de M. Viscnnti sur le fronton
occideniaL M. Visconti a cru la recotmoitre dans un4ragniênt de statue
p*)riant aujourd'hui le n.* 62 , parmi les marbres de la collection du
British àluseum : mais, lorsqu'il visita ces antiquités dans le local
provisoire ou elles étoienl assee confusément rangées, il lui fut san>
doute difKctle de confronter avec exactitude et sous tous les rapports
ce reste de statue avec le dessin de Nointel, et il adopta Topitiion que
ce devoit é\xt Ja figure de la Victoire, jadrs placée dans le char. Comme
fa figure dont il s'agit ne porte aucune indication d'ailes, il l*appela
Vicioin apuras^ sans ailes. Toutefois M. Vi^conti fait à l'égard de cette
statue une observation cjui aurait pu le détromper : il dit ( et avec raison)
que ses proportions ne sont guère moindres que celles de Neptune et de
Minerve; ce qui, vu la diminution de l'espace du fronton, n'a pu avoir
lieu que parce que la figure étoii assise, tandis que les deux preinières
étaient debout. Tourefois un simple coup-dœil sur le dessin de Nointel
démontre que la Victoire placée dans le char occupa une place beaucoup
trop éloignée du centre, et par conséquent un espace trop peu élevé
pour la grandeur de fafigureenquestton.il est d'ailleurs une circonstance
qui peut expliquer pourquoi, parmi tous les restes de figures du fronton
occidental , il ne sVni est pas trouvé qu'on jouisse appliquer à la Victoire.
On •^ait qu'indépendamment Af^s autres causes de destruction qui ont fait
disparoître en si grand nombre les statues de fun et de l'autre fronton du
tempfe, les Vénitiens, maîtres d'Athènes sous la conduite de Morosini,
tentèrent d'enlever, pour les transporter dans leur ville, et le char de la
Victoire, et les deux chevaux qui y étoient attelés , et que, dans cette
opération mal conduite, le tout se fracassa.
Du char de la Victoire M. Visconti passe à la figure qui occupoît
Tangfe droit du fronton; plusieurs statues remplissotent Jadis cet inter-
valle. Les unes ont disparu eniièrement; deux autres, queSpan et Wlieler
avoient prises pourAdrienet Sa bine, et qu'on croit êtreVulcainet Vénus,
sont encore en place, et sont restées seuls et derniers témoins de la
décoration de ces frontons. M, Visconti a ad«>pté le nom que nous
avions donné dans notre restitution h la figure couchée qui termine le
côté droit du fronton, d'après la description d*un des frontons du temple
d'OIympie, dont les deux angles inférieurs étoient occupés par les
<
Sa JOURNAL DES SAVANS,
figuras des fleuves Cladét et Alphée. Cette analogie est la seule raîsotl
qui puisse faire donner le nom A'IlySsus à la figure dont if s'agit: car j
aucun attribut ne la caractérise. Mais il nous semble que, si on la termiiioit
selon rindication des parties, et sur-tout de sa composition, il faudroit
la faire appuyer de la main droite sur un aviron, mutîf fort naturel, et
qui concourt à produire faction de ce mouvement subit que M, Vis-*«j
contî a si l/ieh observé; mouvement qui fliit paroître la figure animée. Il»
senii>le en etTet, dit-il, quelle se lève avec impétuosité, saisie de joie ks
la nouvelle de la victoire de Minerve. Effectivement, entre toutes les
beau:és quon ne peut se lasser d'adinirer dans cette figure, celle de
Tattitude est peut-être la plus admirable; et parmi toute:» les statues de
cette compo^iuon, aucune ne paraît avoir été mieux liée au sujet qut
en occupoit le centrer, et avoir pris autant de part \ l'action piincipaîe*
M, Visconti pense aunsi que les personnage:* qui occupoicnt tout le
lympan du fronioji occidental, y étoient rangés, les uns du càtsl- de
Minerve, les autres du coté de Neptune, selon que, dans les idées
mythologiques. Us étoient du parti de fune ou de fautre des divinités
combattantes. Il y a effectivement quelques indications de ce système, et
la principale se trouve dans la figure deThétis, rccon.if>îisable au dauphin
qui est sous son pied, et qui uent la prerniere après Neptune dans le
dtrssînde NoiateL Malheureu^ejnent il ne reste plus de ce côté du fronton
que deux fragmens reconn jiasables : celui de la Thétis dont on a déjà
parlé» et celui de Latone, qu'un reste des deux enfans quelle l^nuit»
fait aisément rcconnoîirr. Ce fronton occidental, dont la composition
étoît entière au remp^ de M, de Nointel, est celui dont il s est conservé
Je moins de figurer, et dont la collection de inylord Efgin offre le moins
de morce.'iux.
En passant à la description et à Texplication des restes du fronton
orienial , M Visconti observe qu'à l'époque où le jnarqoi^ de Nointel
fit faire Its dessins du Parthénon, la parue du milieu de ce fronton
nexiiioit plus. Nous croyons avoir donné la raison de cette destruction,
dans le mémoire cité plus haut. Une autre sorte de hisard a voulu que
ce froiiion, alors le plus dégrade, ait conservé im beaucoup plus grand
nombre de stames que I autre ; ce qui ast Ju , sans doute , à certaines
consfructiojis modernes qui font rendu beaucoup moins accessible.
On y a trouvé dans un assex bon élat sept grandes statues et des
fragmens de cb-vaux irès^prvcieiix.
M. Visconti en co^nmeivce lenumération par fangle qui est à la
gaucbe du spectateur» cl où se trouve fa composition sîtigulière de ce
i]ii'il appelle Hy^irim « ou le soleil levant. C'est une aorte de groupe
FÉVRIER 1820. - 8j
formé de la tête, des épauler et des bras élevés d*un homme qui semble
sortir de leau, et qui teiioi les rênes de deu^ chevaux, dont les têtes ^e
dressent de même au'des>us d une plinthe où sont figurés des flots. Le
groupe du côté opposé de%'ort représenter le soleil couchafiti et les
téies de chevaux qui sVn sont conservées regardent en bas, pour
exprimer riinmersioni comme les premières expriment Tidte d'as-
cension.
La figure suivante dans le fronton » et qui suit aussi dans fa des-
cription de M, Visconii» est celle qu'on appelle vulgairetnent Théîéi:
le savant antiquaire n*3dmet point cette dénomination. Quelques ana-
logies fondées sur la ressetiiblance dé la tête de cette statue avec celle
de fa pierre gravée par Cntas , le caractère dii nu » et pariiculière-
ment fa peau de lion» le déterminent à penser que c'est Hercule jeune.
If sent qu*on peut lui obfecter qu'Hercule fils d'Afcmène n etoit pas
encore né à Tépoque où le statuaire a dû rapporter la naissance niytho-
(o^que de Minerve : mais Fobjection e>t sans valeur, quand oji sait que
la religion des Grecs reconnoissoit un autre Hercufe né sur Jlda de
(a Crète > et de beaucoup plus ancien que le Thé!>ain,
Le groupe qui suit, et qui représente deux femmes drapées assises
sur deux sièges ornés de motihtres, paroft avoir été très-heureusemeni
expliqué ; on ne sauroit guère douter que ce ne soient les deux grandes
déesses Cérès et Proserpine posant son bras gauche sur I épaule de sa
mère.
Ce qui reste d'une figure debout, représentée courante et avec des
draperies volantes , a suffi à M* Visconti pour y reconnoitre Iris, la
messagère des dieux , qui va publier la naissance de Minerve, •
Ici s'arrête ia série des figures du côté droit du fronton oriental, dont
le milieu» ainsi qu'on l'a déjà dit , avoît été très-anciennement détruit.
L'auteur reprend î exi^Iicairon des autres figures, en partant de même de
fautre extrémité inférieure, qui éioit occupée par le soleil couchanr.
M. Visconti Tappelle le char àe la rtuk ^ cotnme if a appelé Tauire groupe
déjà décrit , Hypérlon sortant avec son char des eaux de la mer. Il y a dans
cette désignation de quoi induire en erreur le lecteur qui n a point vu
les objets : car, dans Tune et Fautre composition, le char n existe quVn
idée, ou, pour mieux dire, cojnme conséquejice nécessaire de ce qui
apparoit, et qui force de supposer le reste.
De la composition du soleil couchant il ne subsiste qu*une tête de cheval,
qui est un des chefs-d œuvre de la collection. Cette-tête, comme Toliserve
M» Visconti, a oit contribué encore <^ induire en erreur les premiers
foyageurs sur la principale entrée du Pardiénon ;J car elle leur fit croire
L X
84 JOURNAL DES SAVANS,
que, ce cheval représentant celui que Neptune avoit fait sortir de terre^
ie sujet de fa dispute entre ce dieu et Minerve étoit figuré sur le frontoa
oriental ; et ce leur fut une raison de plus de prendre cette façade du
lemple pour la façade postérieure.
On ne sauroit, ce ine seinblet mieux expliquer que ne Ta fait
M. Viiconn*, le groupe qui vient immédiatement après; il se compose
de deux figures drapées , dont Tune est négligemment couchée et
appuyée sur les genoux de Tautre ; ces deux figures sont prises dans un
seul bloc* M. Visconri ,pour motiver sa conj cmre, a besoin d'en rap-
procher une troisième, qui, dans le dessin de Nointel/se voit effec-
tivement lout prés d'elles* Il pense que ces trois déesses ^ont les Parques f
qui, selon la myshi>lugie grecque, présidoient à la naissance ain>r qu'à
la mort, et qui, compagnes d llithie, déesse des accouche m tns, chan-
tuîent les destinées des nouveau nés.
Telle est rexjihcation péntralcinent appuyée d'autorités, puses, soit
dans Ifb sources de la mythiJugie» soit dans d autres restes d'antiquité,
que Ni- Visconti a rrés-judicitusemeot donnée des quatorze morceaux
de scufpture rn ronde-bosse enlevés aux deux ttontons du Parihcnon^
obvr.ngf s qu'il croit devoir atiribuer, soit au génie, soit à la maiji mêine
de l^hidias, et qu'il se fçtîcite d'avoir vus arrach<:s k une prochaine et
inévitable destiucrron. I.e savant antiquaire n*a qu'un regrtt en exprimant
ce ^entiiijent; c'est que la noble idée qu a eue myjord £lgin , ne soit
pas venue un siècle et demi plutôt àquelque riche et puissant amateur.
Lace//ii du Parthénon éioit ornée extérieurement, dans sa partie
supérieure» d*uae ithe continue , immédiatement au-dessous du pkfond
de la gâterie du peri^fvfvs. Ces ouvrages ainsi abrités, sculptés de bas»
relief , et par conséquent achértns aux murs du iem|>le, n'avoient pu
éne aussi facileujent degradt-s que ceux des frontons; la plus grande
partie en rtoii constrvtt au temp^ de Stuart^qui en destina IVn.vemble,
La manière dont tes dalles ou Ton a sculpté les bas-reliefs, sont assein^
blées, a pcrmîs de les enlever sans aucune dégradation ; et le recueil de
ces n orceaix forme l*objei le plus considérable de la collection des
mar! res d'Elgin.
M. Viaiumi n'a pas borné rexi»licaiï* n des sujets de cette frise aux
morceaux de fa ccHtction; il a misa contrit utien et les dessins de
Nointel er ceujt de Stuart, jour donner une idée à peu prés complète de
ce grand ouvrage» qui tUt quatre <ent cinquante pieds de développement,
et au muins fuis cents bgures. Sa descripiicn se divise en quatre parties
corre^poadanies aux quatre coté& du temple , ou i içi quatre expQ-
^itjgji^
FÉVRIER î8iO.
II seroit difficile» sans faire de cet article un ouvrage fort long, quoique
fo^t abrégé, de suivre le ï.avant antitiuaire dans tous les dcraili» expîicaiifs
qu'il donne des nombreux sujets dont se compose la longue série de.
cette frise* On grand avantage quil a eu sur les précédens interprètes,
cesi d'avoir sous les yeux les morceaux originaux de la plus grande
partie de ce qui s'en est conservé; caria collection de lord Elgin en
comprend une longueur d'au moins deux cents pieds- Nous ne pouvons
que renvoyer h f ouvrage même, pour y suivre les interprétations tour*
à-tour ingéiiit^uses et savantes d'une multiivide dohjeis et de person*
nages en rapport avec les mœurs , Ie> habilleaieiis, [es armures, le^ céré-
monies religieuses, les mystères et la mythologie des Aihtniens.
M. ViscontJ a d« à la vue immédiate des monuniens de pouvoir rec-
lifier quefquei méprises dans lesquelles Smart étoit tombé, enprenanti
par exemple, Cérès pour Jupiter, et le flambeau de la déesse pour fa
foudre du maître des dieux. On lui a encore l'obligation de plus d'un
rapprochement curieux entre diverses figures de ces bas-reliefs et
quelques statues antiques qui nous sont parvlnues, et q»i, dans leurs
attitudes et leur composition générale, font reconno?tre fes origfnauîç
dont elU s furent les tradtijons ou les copies. De ce nombre paroissent
être le Mars en repos de la vi//a ludovist à Rome, la figure d* Apollo-
nius, dont if ne reste que le tor<e, celle qu*on reconiioit aujourd'hui pour
Jason, les figures colossales de Monte-Cavallo, un des Centaures da
Cai^itole sculpté par Arisiéas et Papias.
La collection des sculptures du Parihénon est formée de trois classes
d'objets; i ." Je*» statues des frontons qui, dans leur étal actuel de muti-
lation, n'offrent que trop de mauere à fespru de conjecture ; 2/ les bas-
reliefs de la frise, sujet riche et abondant pourleruditron ; la troisièniio
classe comprend les hauts fpliefs des métopes, dont if reste à parler, et
auxquels M. Visconti n'a consacré qu un petit nombre de pages. EfFec-
tivemeni , ce qu'il y a de plus remarquable dans ces ouvrage t^ç'^^r l'art
avec lequel on a su diversifier le Tné«ne sujet nécessairement composé
de deux >eules figures, savoir, d'un combattant et d'un Cei\taure, et Iç
répéter tant de fois dans des espaces uniformes. M. Visconti observe
que ces représentations de Centaures furent singulièrement du goût des
Athéjïiens. et des anciens en général, qui les ont exprimées sur une uml-
tiiude de motiumens: mais fl fait remarquer aussi qu'il ne faut pas
confondre les groupe»; de^ méiopes d* Athènes jivec l^enucoup d*autrc$
compo ïtions semblables , où des Lapfthes sont gux prist-s avec des Cen-
taures. Ce ne sont point ici les La pi thés de la talyte thessafknne, mais
hmn les Athéniens dqnt Tht^sée étuit le chef. Ces héros y sont sculpiés
t€ JOURNAL DES SAVANS,
avec les mêmes chiamydes, îes mêmes boucfiers et fes mêmes bottines
ftmbata } que portent sur les bas-ref!fefsde la frise les figures des cava»
liers alhéniens.
A I explication des sguf(>tures du Parihénon M, Vîsconti a joint celte
de plusieurs autres morceaux dont mylord Elgin a enrichi sa collt^ciion*
De ce nomfjre est un cadran solaire portant le nom de Phœihas
Pitidicn; c'est le même que Spon avoir vu à Athènes , placé dans la cour
de rêglîse de la Vierge dite Panagia Gorgopiko. M. Visconti a eu recours
\l m. Delambre, qui déjà s'étoit occupé de la gnomonîque des anciens;
et ime dissertation de ce célèbre astronome remplit presque en entier
r»rticle consacré à cet important morceau*
L'article qui suit a pour litre, Afonumenî ttrés âe qutJqufS autres éJificei
Jr Vacropole, Les ouvrages que M, Visconti y passe en revue, sont,
t.** La caryatide du temple de Pandrose: de Tinscription qui s'y est
conservée, fK>rtant la dafe de Tarchontat de Diocli^s, il conclut que \%
monument flit élevé la 22.' année de la guerre du Péloponnèse; ensuite
dti mot x^e**^ employé pour désigner les statues des vierges faisant
fonctions de caryatides, il tire la conséquence que ce genre de support
où Ton emjiloya de semblables figures, n'avoii pas néces<.airement pour
sujet des femmes captives, et que même* les caryaiide<i de Sparte
n*étoient également que les vierges lacédéinoniennes, qui célébroient à
Carya de Laconre les fêtes dr Diane :qu*enfin, comme Tavoi» déjh pensé
Lessîng, la tradition de Vitruve sur les caryatides pourroit Lien n'être
qu'un conte ;
2/ Quelques bas-rtliefs appartenant à fa frise du temple d'Agfaure,
représentant des combats entre des héros grecs et des l>arlares sujets
dont rexécution ne répond pas entièrement à la beauté de leur com*
position ;
j.** Un bas- relief provenant du théâtre de Bacchus, dont le style, qui
lient de la manière éginélique, annonce une époque antérieure ^ fa cons-
truction en pierre du théâtre, qui paroît n'avoir dû être ainsi bâiî qu'au
temps d'Alexandre;
4* La statue colossale sans fête et sans bras qui décoroit le sommet
du mojiument cborapique de Thrasyffus, Cette figure avoir toujours
passé pour être ct Me d'une femme , et Stuarl fui en avoit donné Tappa-
rence dans la restitution cju'il en fit en dessin, La dépouille d'un lion ,
<juî fiiit partie de son habîllemeni, lut avoit fait donner particulièrement
fenom de Divine : mais, dès que la siaïue ftit transpcriée ^ Londres, les
artistes et fes connoîsseurs s*aper<;iirent bientôt, à plus d*un caractère,
que la^tatMi quoique dans le costume féminin, leprésenioitun hoiumc.^
FÉVRIER 1820.
k tt M, Visconti a prouvé que ce devoir êire Bacchus , à qui le costume de
femme fut souvent donné, ain^i que h peau de lion, et dont limage
devoit être convenablement placée sur le monument d*une victoire
r remportée dans les fêtes dionysiaques,
Louvrage de M. Vii>conti se termine par un catafngue raisonné de»
inscriptionji grecques de la collection de tiiylord ElgiJi.
QUATREMÉRE DE QUINCY.
Lettres écrites de Londres À Rome , et adressées à
AL Ciinovd sur les Marbres d'Elgin , ou les Sculptures dui
temple de Minerve û Athènes ; pur M* Qu a 'ire m ère de]
Q.uincy. I^me, i8ï8, in-S,^ de 160 pages : se trouve àj
Fans chex MM. De Bure*
Dans le savant ouvrage dont on vient de lire raoaîy<;e5 M. Vis
conti a considéré, principalement sous le rapport de Tarchéologie 1
les admirai les sculptures rapportée*» par lord Ilgin, ei réunies mainte- j
nani danî» le Musée britannique : à l'aide de la sagacité^ de rérudiriofll
historique tt phifclogique qui le di^ïinguoie^t si éminemment, de cet
art des rapprochemens qu'il avoir puisé dans la comparaison des mo-j
numcns de l'ajuiquité connus jusqu'à lui, cet jllu>tre antiquaire s*esM
efforcé et est presque toujours parvenu à retrouver l^lace que chacunj
•des fragmens de b coHettion d'Eigin occiipoit dans l'ensemble des!
scufpiuresdu P;irihénon, et à indiquer Je nom et Içs attributions des j
6gures auxquelles chacun de ces fragmens appartient.
Il restoii à considérer cette cofitrction unique sous un point de vue
que M. Visconti navoit fait qu'indiquer légèrement, c'est-à-dire,
fexaminer dans ses rapports avec Ihistoire de 1 art; et ce point de vuej
est sans contredit le piu:, intéressant de tous.
Pour sVn convaincre, il suffit de songer que presque tous les monuhi
mens de la sculpture antique manquent dune date certaine : car, c»-J
cepté le Laocoon, dont Pline a parlé, il n'existe ntaintenant aucun des
.monujrrns de sculpture dont les auteurs classiques ont fait mention;
seufement des conîtciures ingénieuses » plus au moins sûres, nous ont
fait reconnaître les copies d*un peiii nombre de chefs-d'œuvre des an-
ciens statuaires; mais Tespérance d'en revoir les originaux semble à
jamais perdue. Aussi, pour avoir unt idée des différens styles propres aux
diverses époques de Tart, on a été réduit jusqu'ici à comparer le» textes
^8 JOURNAL DES SAVANS,
anciens avec les monumeiis qdoh croyoïi pouvoir Degar<ier comme
copies d'ouvrages d*une date conjiue : c'est assez dire que le caractèro
de plusieurs époques iinportanies de lart iVéïoit déterminé juàquici
que d'une manière lout-h-fiiit incertaine» et en effet, on verra tout-àt
Theure qu'on ne s'étoii pas formé une idée juste du style proj^re à lepoque
de Phidias.
Jl^s marbres d'Eîgin, détachés des sculptures du Parthénon, sont
à peu près les seuls monunitrns dont la date ne laisse aucun doute ;
ifs appartiennent certainement au siécfe de Périclès. II est vrai quoa
a quelquefois supposé que ces sculptures furent restaurées sous le règne
d*Adrîen; mais M. Visconti a rèpaussé victorieusement cette opinion
par le témoignage de Pkuarque, conteinpt rain de cet empereur (i)-
Ces admirables sculptures , jusqw*aîars rel'guées à rextrémité de f Eu-
top^, et d^^atileijrs» placées à une ékvaiiun qui ne permettait pas aux voya-
geurs d'en étudier tous les détîiils, avoient été perdues pourlart: maintenant
que, réunies dans un musée, elles peuvent éire vues et contemplées à
loisir^ ^lles éclaireront les anistes et les antiquaires sur une niuitîtude de
questions en vain agitées par les plus célèbres antiquaires ; Quel étoit le
style propre à I école de Phidias î Ne se disiinguort il que par le gran-
diose des formes! Ces formes avoient elles plus de sévérité qxie de naturel»
ou hkn rimiiation avoit-ellc atteint déjà ce charme de vérité qu'on re-
marque dans Je Laocoon, le Torse» TApollon, le Gladiateur Borghèseî
Seroit-îf enfin pos>ilj|e que I école de Phidias eût franchi tout d*un saut Fin-
tervalle qui sé})ar#du siyle de ces chtfsd œuvre , le .style naïf, sec^ roide,
des écoles qui paraissent lavoir irnmédiateinent précédée! Voilà les
questions sur lesquelles laspect de ces marbres permet de pronot cer, et
que fauteur des leiires à M. Canova nous paroFt avoir décidées ^ans retour.
L'auteur explique lui-méjne à quelle occasion ces lettres ont été
écrites* M. Canova » après avoir examiné les scul|)tures d'Elgin dans
un voyage quil fit exprès i Londres, transmît à M. Quairemere de
Quincy Topinion qu'il en avoit conçue .elle étoil si peu conformée celle
-quon s'éiuit faîte jusqu'alors du style de Phidias et de son école, que
M* Quatrcmère de Quincy , ne pouvant douternî de la sincérité ni du
goût de son illustre ami, éprouva le plus vif désir de juger par luî-mémt
de ces sculptures qui lui étoient recommandées par un si imposant
suffrage. C'est en préseece de ces précieux monumens, qu'il écrivit h
M. Canova le précis de tout ce que lui suggéroit la vue des ol)jets, dans
les rapports sous lesquels ce grand statuaire avoit désiré conncîire son
(i) VifConti| Sculptures du Parthinùn, p. jl/, id, de Paru*
FÉVRIER 1820.
lientîmeni ei ses opinions. M, Canova, convaincu que la lecture de ces
îettfes devoir être d'un haut intérêt pour ks amis des arts , vient de les
•publiera Rome, du consentement de Tauteur. Elles sont au nombre de J
sept, et traitent successivement des sculptures de la frise extérieure , de
fa cc//a, des métopes et des frontons. Cet écrit, qui se ressent peu de
la précipitation avec laquelle il a été rédigé, contient, en cent soixante
pages in-S.\ rnie foule de notions positives et neuves, et louche à un
grand nombre de questions intéressantes pour rhisloire de l'art.
Nous commencerons par la frise de la cet/a du Parthénon, dont
M. Quatremère de Quincy parle dans sa première lettre. Cette frîi»e
offre un dévelopj^ement de quatre cent cinquante pieds, et elle a dû
contenir au moins trois cents figures, tant hommes que chevaux, de
trois ou quatre pieds de proj>ortion.
L'auteur établit d'abord quel est le point de vue sous lequel il faut
considérer les sculptures de cette frise. Ce seroit, en effet, une grande
méprise que de prétendre en juger les morceaux séparés de leur en-
semble, et les apprécier ^ous le rapport de l'exécution en bas-relief, 1
comme on apprécieroit un sujet isolé, étudié, composé dans des vues
différentes. « Rien ne ressemble moins, dît-il, à un sujet et à un travail
» d'étude, qu'une frise de quatre cent-cînquaiue pieds courans de bâsre-
»'liefs en n^arbre, et qui ne fut jamais destinée à être placée sous les
iy yeux des spectateurs, pour être examinée de tous les côtés, ni exposée
» aux recherches de la critique. ?> En outre, M. Quatremère de Quincy
regarde comme certain que ces sculptures n*ont point été exécutées SkUr un
modèle en cîre ou en argîfe de même dimension que les marbres : il ne
doute point qu'elles n'aient été faites en marbre au bout de toutil ; c est ce
qu'indique le système suivi dans les épaisseurs des deux plans de figures,,
à cheval sur- tour. Par une méthode inverse de celle qu'ont suivie les
modernes, les figures du premier plan, ou les parties de ces figures
qui se détachent sur les figures du second plan, sont celles qui ont
le moins de saillie : la plus grande épaisseur est réservée au second
plan , qui , sans cette disposition , auroît été trop peu visible* « D'ailleurs ,
» si des modèles terminés avoient précédé Texécuiion de l'ouvrage en
y* marbre, cet ouvrage auroit une régularité d'exécution mécanique qu'il
n n'a point ; ce feeroii sur-tout dans le nivellement exact du fond que
» cette régularité se monireroit : on trouve, au contraire, d'assez sensibles
3^ încorreclions dans le niveau, à quelques parties des champs de cette
>» frise î plus d'une figure entre renfoncée dans le fond , à un degré rendu
M fort visible aujourd'hui par la position acttielle de l'ouvrage. « Ce sont
i2t autant de preuves que toutes ces figures furent improvisées en marbrci
po JOURNAL DES SAVANS,
travaillées à part dans l'atelier^ posées ensuite > retouchées et termînée5
en place.
riutarque nous apprend que toutes ces sculptures furent exécutées
avec une célérité étonnante; et il est vraisemblable que tous les genres
de travaux avoient été distribués en compagnie, <« Ainsi le travail de
^1 la frise aura été, sous un chef particulier, divisé en*re plusieurs sculp-
n teurs. Cette division du travail .se fait apercevoir par Tceil tant soit peu
n exercé. On y voit distinctement des maïiiçres dift'érentes d'exécution»
» et des variétés de caractère qui confirment encore qu'un modèle uni-
» forme ne fut pas soumis au travail pratique des difFérens ciseaux ; car
» les différences ne tiennent pas seulement au plus ou moins de hardiesse
» de Toutil ou d'habileté de la main ; il y en a qui appartiennent au goût
» et au savoir. Ici, on trouve de la mollesse et du lâionnement; là,
» de la lourdeur et de la négligejice : il y a aussi, selon la différence des
9i mains, plus ou moins de correction ou de fini| plus ou moins d'eflet
;» et de vivacité, »
Ces réflexions montrent que Touvrage doit être jugé selon fesprit
dans lequel il a été fait , et d*après le genre de critique qui lui convient.
En somme, il n a de point de comparaison dans Fantique, que celui de la
colonne Trajanne; «maib il lui est infiniment supérieur par la noblesse du
y» Style, lelégance des formes, la variété des compositions > la grâce de^
» costumes, le mérite du dessin, la hardiesse du ciseau, et généralement
a» par le sentiment de lexécuiion, comme par Tinveniion et le goût. «
La troisième lettre est consacrée k (a def^cription des métopes : ces
métopes sont au nombre de quatre-vingt-douze de quatre pieds en carré;
sur chaque métope étoit sculpte un groupe de deux figures qui, selon
J;i variété de leur pose, oflVent depuis quatre jusqu'à cinq pieds et plus
de dimension, ce qui forme un total de cent quatre-vingt-quatre figures
.d'une saillie qui approche de Ja ronde-bo^se* Les variétés de travail et
même de talent que M* Quatrernère de Quîncy a remarquées dans l'exé-
cution de la frise de la cel/ût existent ausèi dans ctlle des métopes;
elles sont même plus nombreuses, à en juger par les quinze que ren-
ferme le Musée britannique, et tout prouve qu ils furent exécutes dans le
s^ystéJne de division de travail suivi pour la fi ise de la ce/ta : ils auront été
confiés à un chef de travaux d'un nvérite inférieur, et exécutés par une
classe de sculpteurs .'ippelée en itaîicn sçjrpi'Uînu Aussi , quciqu en
général le style en soit grand et simple, Je desun quelquefois naïf et
HTai, et le plus souvent hardi, on peut dire quViucune des sculptures du
parihénon ne perd plus h n'être point vue eii place.
Ce qui surprend d'abord dans ces sculptures, cVsi la grande saillie
FÉVRIER tSzO. ^— ^ 91
qu'on fear a donnée. Les modernes ne se sont jamais permis de sculpter
sur fes fonds des métopes que des bas-iviiefs dont la saillie n'excède pas
celle des montans du triglyphe : ici, ce sont des groupes tellement sail-
'121s, quavec peu de travail on en fèroit d^ groupes isoKs du fond. Il
semfjle, an premier coup-d'œil, que cette excessive saillie devoitêlre dun
eflet désagréable: loutefbisi si Ton place en imagination ces groupes a leur
point de distance; si Ion fait attention, selon la remarque de M, Quatre-
mère de Quincy , que le fond des métopes avoit été tenu, ainsi que le fond
du fronton , en renfoncement sur le nu du i)arement de farchitrave , on
peut concevoir que cqs figures ne débordèrent pas autant qu on seroit
porté k le croire, D autres considérations indiquées par l*auteur donnent
à penser que le sentiment seul de f harmonie générale prescrivit & la
décomion le genre saillant de ces métopes* «Ces groupes, dit-il »de-
» voient paroîrre, h, la distance d'où on les voyoit, comjne des espèces
n de camées saiflans , auxquels cette saillie même donnoit une valeur qui
*• dispensoit d en scruter tous les détails. «
Un autre trait remarquable dans les métopes, c'est la variété de fa
composition de tous ces groupes dont le su^t est le même ; car Us:
représentent toujours, h. quelques exceptions près , un Centaure luttant
contre un Athénien: selon les usages modernes, il auroit suffi de (aire
alternativement entre elles cinq ou six compositions , pour éviter fincon-
vénieni d*unc redite monotone dans une même rangée*
AL Quatremère de Quincy pense que le plus grand nombre de ces
groupes ont été plus ou moins termines en place; mars il lui paroît
certain que tous furent ébauchée ^ travaillés et même assez avancés dans
fatelrer de Tartiire. Ce qui inidique sur-tout» ce*t la manière dotu les
quartiers de marbre sur lesquels ils sont sculptés furent enclavés dans la
construction générale* ce M. Cockereîl, dit fauteur, m*a fait voir
» comment chacun des quartiers de marbre, servajit de fond aux groupes
»> des métopes, entroit dans les rainures des couh'sses propres k le
» recevoir : or tous ces soins ne furent vraisetnblablement pris que pour
n avoir la faciliré de placer chaque pièce, après qu'elle fut exécutée ; et
n c'est à ce procédé qu*on a du aussi de déplacer sans peine les morceaux
» qu'on a enlevés. «
Toutes ces observations conduisent M* Quatremère de Quincy à;
traiter la question sur laquelle M, Canova avoit désiré obtenir de lui
une réponse: Que/U part Plùdîas peut-il avoir €ut ptrsmncthmtnt a ces
travaux ! Dîins un cahier de ce journal, nous avons présenté et réfuté
l'opinion de M. Wijkins, qui prétendoit que ni Phidias ni ses élèves ne
furent pour rien dans Texécution de ces sculptures ; nous avons montré
n 2
92 JOURNAL DES SA VANS,
combien étoît probable Topinion rfe M. Visconti, qui pensoit, au contraire,
que les architectes Icttiius et Callicrate furent chargés de la construction
de I édifice, tandis que Phidias eut la haute main sur tous les travaux de
sculpture* M. Quatremère de Quincy adopte également et développe
davantage cette opinion: il montre, Japrès les paroles de Plutarquei
que les travaux furent organisés de manière qu'un grand nombre d artistes
de tout genre purent travailler sous des chefs subordonnés eux-mêmes à
d'autres chefs plus habiles ^ dont Phidias aura été le directeur général. H
ne prétend pas néanmoins que l'idée de direction et de surveillance exclue
tout-àfait celle de projets donnés, de modèles proposés, et même
d'ouvrages retouchés et perfecrionnés ; il prend pour exemple Raphaël,
qui dut jouer en quelque sorte , sous Léon X, le même rôle que Phidias
sousPéricIès. II est constant, en effet» que ce grand peintre, chef d'une
école célèbre, et disposant d'un atelier nombreux, ne doit passer que
pour avoir été famé de la plupart des grands ouvrages élaborés dans
son atelier. Les Polydore, les Perrin del Vago, les Joies Romain,
présidoient chacun à une série d'ouvrages .composés par lui, et durent
avoir ^ous leurs ordres beaucoup de mains habiles pour les exécuter; et
cependant les loges et les fresques du Vatican étoient peu de chose en
comparaison des cinq cent vingt-quatre figures qui, selon M. Quatremère
de Quincy , ont dû former la sculpture de la ftise , des métopes et des
frontons du Panhénon, Il croit donc, et cette opinion présente tous les
caractères de la vraisemblance, que Phidias, entouré d'une nombreuse
école, avojt réparti entre des artistes plus ou moins distingués, non seule-
ment l'exécution , mais la composition dune certaine série de travaux,
dont il dut peut-être se réserver de donner les sujets ou de régler le
mode et le caractère.
Dans la quatrième lettre, fauteur aborde l'obiet le plus important
de la collection des marbres d*Elgin, savoir, les sculptures des fron-
tons du Parthénon, seuls ouvrages de ce monument auxquels il lui
semble possible et même vraisemblable que Phidias ait mis la main.
Cette lettre traite particulièrement de la disposition générale et des
attributions de quelques-unes des figures qui les composent: il modifie
ropînîon de M* Viscontîsur plusieurs points, qu'il a de nouveau indiqués
dans son analyse de l'ouvrage de ce savant antiquaire»
On sait que les sculptures qui ornoieni les frontons du Parthénon
n^étoîent point des bas- reliefs; il faut se représenter chacun de ces
frontons garnis de vingt- deux figures de ronde-bosse, sculptées sur
des plinthes séparées, et offrant une variété d*attitudes, de mouvemens,
de poses^ prescrite par Tinégale hauteur des parties du fronton. La
j
FÉVRIER 1820.
partie la plus resserrée du tympan recevoir, ou des figures couchées , oti
dautres objets qui pouvoient s'adapter à Tespace rétréci des deux
angles inférieurs. On conçoit que, dans une composition de vingt-
deux figures de ronde- bosse, disposées sur un seul plan d'à peu près
cent pieds de long, il est difficile, impossible même, de conserver
Tunité d'action et de sujet qu'on pourroit mettre dans un bas-refief
proprement dit. Aussi le sujet représenté sur le fronton occidental ,
le seul dont on connoîsse Tensemble par les dessins de Noinrel , n'est
exprimé d'une manière sensible que dans le milieu > ou Minerve et Nep-
tune, personnages principaux, sont représentés coml)attant; ou , d*un
côté, la Victoire dans un char, et, de lautre, des divinités marines, se lient
à ces deux figures : tout le reste ne paroît prendre aucune part àTaction,
M. Quajremére de Quincy termine cette lettre en examinant la
part que Phidias a pu prendre à la sculpture des frontons. En consi-
dérant ces ligures, aussi correctes dans leur ensemble, aussi achevées
dans leur exécution , aussi étudiées dans toutes leurs parties, on ne peut
douter quelles niaient été exécutées k loisir dans Tatelier : il est clair
également que Taniste porloît à ces figures le même soin qu aux statue»
faites pour demeurer isolées* Aussi Tauteur donne tout-à-fàit son
assentiment à 1 hypothèse ingénieuse de M. Cockerell, qui regarde les
figures de la famille de Nîobé comme ayant fait originairement partie
d'un fronton (i). Les sculptures des frontons du Parthéoon prouvent,
par leur perfection extraordinaire, que Scopas a bien pu ne pas dédnignor
de sculpter des statues pour le fi-onton d'un temple; et, d'autre part,
il devient tout- à fait vraisemblable que Phidias a fait plusieurs des
modèles des figures qui ornèrent les frontons, et qu'il en a suivi lexé-
cutîon en marbre, soit par lui-même, soit par des élèves dont il aura
dirigé le ciseau.
Ceci nous conduit au sujet de la cinquième lettre, qui traite du mé-
rite intrinsèque de ces figures et de leur valeur relative, comparée avec
les plus beaux de ceux que Fantiquité nous a transmis. Nous ne
pouvons qu'indiquer ici les réflexions pleines de justesse et de sagacité
que fauteur fait sur l'inconvénient de vouloir fixer d*une manière posi-
tive le style propre à une époque donnée, sur les difl'érences que les
divers degrés de mérite dans des artistes du même temps donnent aux
ouvrages produits à une même époque, en un mot sur les mécomptes
auxquels on peut être exposé par suite de cette disposition à tout con-
(1) Sur la gravure au trait où M. Cockereli a disposé dans cette hypothéie Jes
figures du groupe de Niobé, on Ht : AU* amico Bartoldï che ha suggatto la
prima idca di questa sog^etto^ l* autêrc D, D*
^4 JOURNAL DES SAVANS,
noîire, k tout classer. Nous nous hâterons d'arriver au sujet princîpal dtf
cette lettre.
On est généralement persuadé, depuis Wincke[m;inn, que la belle
eicccution dans la sculpture ne dî»te que de Praxitèle; que tout ce qui
fient H rimitartb'n de la chair dans le nu , à la mollesse et à la variété
des jjlis dans les draperies» appartient k une époque postérieure îi Phidias,
Laspect dc^s statues du fronion fait voir quon a été beaucoup trop loin
dans Initerprétation de quelques textes anciens. Tout en accordant que
les successeurs de Piiidla-s aient possédé certaines quahtés à un degré
pfus éminent, il ne s ensuit pas, comme on ravoît cru, que Técole de
Phidias en ait été dépourvue. Pour établir un parallèle ettire cette école
et les écoles postérieures, il faudroit qu'on eût un certain nombre de-
statues reconnues pour oiiginafes des écoles suivantes. On ne peut
donc, quant à présent, considérer leur mérite relatif qu en les rappro*
chant des ouvrages existans, les plus remarquables sous le rapport de
fcxécution. A cet égard, M, Quatremère de Quincy regarde les sculp-
tures des frontons comme hors de tout parallèle.
Il y reconnoît au plus haut degré les deux genres de vérités qui
constituent la perfection dans FimiraHon du corps humain: « fune, qui
!• procède du prîitcipe fondamental du dessin, qui est la science de
*> Tostéoiogie ; fautre, qui résulte de lexpres^ron des détails qui re-
>i couvrent la charpente du corps.» II ajoute plus bas; « En général^
« il m*a semblé que nous ne voyions, dans aucune autre sculpture an-
» tipCj les os prononcés avec autant de savoir et d énergie. De h , pour
- le spectateur, un effet hardi, une vivacité de formes qui communique
» à tout lapparence du mouvement. « Il prend pour exemple la tête
du cheval, placée dans un des coins du fronton. «Telle est, dit-if, la
a» puissance du principe ostéologique empreint sur cette léte, que la
w vérité qui en est 1 effet va presque jusqu'à faire peur. A cette grande
» vérité de la forme essentielle qui' vous saisit d'abord, succède Tadmira-
»> tîon des détails, des vérités de la chair, des variétés de la peau , imitées
y* fusque dans les plus légères inflexions des plis et des veines. Je n'ai
>j vu'aucuji ouvrage aussi vfvant. Ce n'est réellement plus de la sculp-
« ture; la bouche hennit, le marbre est animé: on croît le voir remuer,»
Le sentiment de fostéofogie brille également dans toutes les parties
de la statue du Thésée, de l'Hercule jeune, de Tllyssus; mais, à ce
savoir fondamental, à cette fermeté qui résulte de [expression des o^f
se joint le caractère de mollesse produit par l'expression , soit des muscles
et de la chair, soit des détails de la peau: c'est le complément de la
vérité imitative; ç*e$t ce que M. Quatremère de Quincy déclare n*avoir
FÉVRIER- 1820. 9j
yti h un si haut degré dans aucun des ouvrages antiques parvenus
Jusqu'à nous, ce Dans les figures nues des frontons, Fart, dît-il, existe,
» mais il ne se montre pas. Un sentiment de chair dans la muscula-
a» ture y décèle et y cache tout-à-la-fois l'étude myologique; il y a la
«> vie dans l'ensemble , et la vie est dans chaque partie : les formes'y
» sont correctes, mais amples et charnues; les contours y sont fermes
» et oiidoyans. A des parties larges et grandioses se joignent des détails
*> fins et légers. L'union de l'expression ostéologique , qui est le prin-
»cipe du mouvement, avec l'expression musculaire, qui complète la
» vérité, imprime au tout ensemble un caractère combiné de force et
» de soupless%, de fermeté et de mollesse qui ifàit respirer, vivre et
» remuer les figures. On croit que l'IIyssus va se lever , on croit qu'il
» se lève, on s'étonne qu'il soit encore là. Je n'ai connoissance d'au-
» cune autre sculpture antique dont on puisse dire de pareilles choses, i»
Quant aux figures drapées , M. Quatremère de Quincy trouve égale-
ment que, sous le rapport du fini, du précieux de lexécutîon, on ne
peut rien mettre non-seulement au-dessus, mais même en parallèle. Il
est certain que si, avant la possession de ces divins ouvrages, il eût
fallu dire ce qu'étoit le style des draperies dans l'école de Phidias, on
auroit été loin de supposer qu'on y connoissoit à <:e point l'art de dis-
poser les plis avec un goût aussi parfait, aussi étudié; d'accuser le nu
par des plis légers. et ondoyans; de faire jouer les étoffes selon les ca-
J^ctères et les attitudes des personnages. Cette perfection est sur-tout
remarquable dans les figures qu'on a appelées /es Parques, chefd'œuvre
inimitable de composition, de grâce, de délicatesse et de légèreté.
L'auteur les nlet beaucoup au-dessus de Ja.belle nymphe endormie, vu^
gairement nommée Cléopatre; et l'on sait que c'est, de toutes les figures
antiques connues jusqu'à nous , celle où l'art de disposer et de rendre
les plis fins dune étoflfe légère, de cacher tout*à-la-fois et d'accuser le
nu , a été porté au plus haut point de perfection,
fc^:. M. Quatremère de Quincy termine cette lettre par une comparaison de
ces figures avec ce que nous connoissons de plus beau dans le mêir^
, genre: en voici le résultat. <c La tête du cheval citée l'emporte de beau-
>î coup sur les autres tètes de chevaux antiques, pour la science anatomt-
» que, la grandeurdusiyle,laforcede l'expression, la hardiesse du travail.
» La figure de l'IIyssus, comparable, pour le genre de nature et pour
» la pose , au Gladiateur mourant , lui est fort supérieure par le large dés
» formes, la grandeur du dessin, l'expression de la chair, le mouvement
y* et la vie.
» Lefrngment du torse de Neptune, comparable , pour la pose et les
p6 JOURNAL DES SAVANS,
ï> proporûons , aux figures de Mônte-Cavallo, réunît, dans un milieu pm»
»t suivant I la sévérité des formes ei la justesse d'un dessin hardi avecl^r
*> moelleux de la chair et les variétés du naturel.
» Enfin la statue de Thésée ou d'Hercule jeune, mise en parallèle
•>avec le Torse, morceau classique entre tous, a paru à tous les con-
» noîsseurs qui l'ont vu, procéder d'un art non moins sûr, mais plus
» grandiose encore. »
Après un tel jugement, qui se trouve d'ailleurs conforme avec Topi-
nion de M* Canova, il est sans doute permis de croire et d'avancer que
les frontons du Parthéaon nous ont conservé des monumens irrécusables
du style, du caractère, du savoir et du goût de Phidias §t de son école:
il n'est pas nécessaire pour cela, ni qu'il ait fait tous les modèles d^si
statues, ni qu*ij les ait terminées lui-même; on sait comment» en sculp-
ture > fartiste peut se repï-oduire dans ses élèves, et sait se rendre
propre le travail de ceux qu il met en œuvre. L'auteur s'attache sur-tout
î montrer que, quoique Phidias fût plus connu par les ouvrages de to^
reutique, il travailloit aussi fe marbre; ce que prouve surtout le passage
d*Aristote, cité par M. Visconti, où Tépiihèie Ajât^ppiç ^ donnée par exceî*
Icnce à Phidias, me paroît ne pouvoir se rapporter qu'aux grands ouvrages
du Parthénon. M. Quatremère de Quincy , s'appuyant d'un passage de
Pline, pense que c'est sur-tout avec le concours de son élève Alcajnène^ j
qu'il a pu donner ses soins à celte grande entreprise.
Puisque les ouvrages de Phidias et de son école présentent une per*!
fectionsi grande sous le rapport de la vérité de fimiration, qu'est-côl
que les anciens ont donc voulu dire t quand ils ont attribué fa supériorité f
en ce genre aux écoles d'une époque postérieure h Phidias! Pour résoudre''
cette question en présence des monumens, M, Quatremère de Quincy
distingue ingénieusement la vérité idéale et la vérité naturelle, entre
lesquelles il y a une multitude de points intermédiaires. La première fut
propre k ce grand artiste ; la seconde, qui n*est pas plus vraie que l'autre ,
mais qui Test d'une manière plus frappante pour les yeux peu exercés , put
appartenir davantage aux successeurs de Phidias, C est par cette distinction
qu'il explique Fopinion des anciens ; et quand on suit avec soin les preuves
de son sentiment, on peut difficilement se défendre de le partager.
Pans la septiètne lettre, qui est fort courte, M. Quatremère de Quincy
s*excuse de ce que l'attention qu'il a donnée aux sculptures du Parthé-
non , fa empêché d'entretenir M- Canova de quelques autres monumens
curieux que contient le Musée britannique, et, entre autres, de la frise
du temple de Phigalie, Bien que fauteur {>Iace les sculptures de cette
frise % une grande distance de ctlles du Parihénon, il les regarde comme
FÉVRIER 1820.
infinîment însiruciives pour la criiîque du goûi et rhiitoire de Part. Selon
l*^i. elles ont été composées par un lioinnie tien plus habile que ceujc
qui les om exécutées ; ce qui éroît une chose as^ez commune dam
l'aotfqufté*
Nous de>irons que dans cette analyse* bien imparfaite, quoique
longue^ nos lecteurs aîfni (>u prendre une idée assez juste de tout ce
qu*offre d'important cei écrit remarquable, tout-à-faic digne» selon
nous, de l'auteur du Jupiter Olympitrn, Sans douLe c'est îi celai qui sut
nous dévoiler tous les mystères de la statuaire chryséltphaniine et repro-
duire en quelque sorte à .nos yeux les grands ouvrages de Phidias k
jamais perdus pour nous,^^ qu'il apjjarttnoii de décrire et de juger cei
admirables scuJf>tures qui témoignent si éloquenimtiU du génie de ce
grand artiste et de 1 nnpulsion qu il avoit su donner aux arts.
LETRONNE.
ÊMêàhikmj^ &c, ; Euschn Pamphili , dtsariensis episcopi , Chro^
nicoti biparVîtam ,' nunc primimt ex armenhco texîu in hiîinum
conversum , adtîohniûtùbus auctum ,gmdsfnigmentis exomatum ,
opéra P. Joannis-Baptisiae Aucher, Artcyranl monachi armeni
et doctoris mechiuirista, Venetifs, typîs cœnobîi PP, Arme-
norum in insula Sancti-Lazarî . MDcccxvjiip 2 \o\, in-^/
C'est maintenant à la littérature armcnienne qu'il est réservé de
réparer une panie des inertes que la littérature classique a éprouvées par
les ravages du temps et de la barbarie. Quoique racquîsition seule
rfune veriîîon complète de la Chronique d'Eu se be soit déjà une décou-
verte fort importante, nous pensons qu'on doit encore en espérer
d'autres non moins intéressaniei. Les Arméniens ont traduit Homère;*''
et une grande partie des œuvres de Philon qui ji existent plus en
grec, se retrouve dans leur bngue, ainsi qu'un Traité de Nonnus sur
la mythologie» divers traités d'Arislote, de Porphyre, et beaucoup d'ou-
vrages des pères de l'église grecque. Quand des voyageurs instruits
pourront pénétrer dans les nombreux monastères de la grande Arménie,
il est à croire que plusieurs des ouvrages cités dans les écrits arméniens
sortiront des ténèbres où ils sont plongés depuis si long-temps A
diverses époques, les savans de l'Arménie se livrèrent à la traduction
des livres grecs; mais c'est principaletnent dans les v/ et vi.* siècles
i
p« " JOURNAL DES SAVANS,
tjuTls s'en occujȏrent avec le plus d ardeur t fa nombreuse ^cole for-
mée par les patriarches Sahag et Mesrob, qui moururenï en 44- « f^'^
presque entièrement dévouée à ce genre de travail ; et parmi les pfus
laborieux interprètes, on compte le philosophe David Anhaghrh, Go-
rioun, Léonce, Eznig, Mambré Verdzanogh et réloqueni Mone de
Kboren, qui tiennent tous un rang distingué dans Thistoife rrîtêraire de
îeur patrie* Si, comme l'assure l'historien I bornas Ardzrouni, Moïse de
Khoren prolongea sa carrière jusqu'à Tftge décent vingt ans, il eur
tout h hhir dVnrichîr fa bttérature arménienne par la traduction d'un
gnmd nombre d'ouvrages utite!;. Au reste, il nous domïe lui niémt la
pteuve qu*il s*occu[>a sans relâche de ce genre de travail; car il dit,
chîip, 6^ , liv. lir, de son Histoire d'Arménie ; «Je sur» vieux, infirme,
» et sans cesse occupé à traduire* » Nous n'avons presque aucun doute
que la ver>ion afnténienne d*l usébe, dont on vient de pullier le texte
à Venise, n'appartiejnie à celle époque; et nous serions même tentés ^
À cause de Téloquence soutenue de son style, de Fattribuer à iV'ioï>e
de Khoren [uî-méme , conjecture qui seroit confirmée par Tidentîté par*
faite qui se remarque daiis les ex|>resïiotîS employées par l'auteur de
cette version et celles qui se trouvent dan» les divers ptfssages d'Eusèbo
que Alojse de Khoren a cités dans son tiîstoire. Je rapporterai, à ce sufet,
iuî exemple plus coticluant. Eusébe, dans Jes fragmens grecs que nous
possédons, cite un passage d*Abydéne relatif à Nabuchodonosor et dans
lequel ce dernier auteur invoque le témoignage de Méga^thènes. On lit
dans le ^fec i MtymSwnç Â pm^i y^^C^tMifti^^f H^Khimi iixifûêTi^v 7*^-
fi-m, x. T, X. « Alégasthènes dit que Nabuchodonosor ilii plus puissant
» qu'Hercule. 51 Dans rarménien il y a : |)*XrVtf#yo/»Vr t^ui- p^ {^u»p^'
kJIffrtfpnuirftnâip ng» AâJ-jfituriffrfu i-|f ^tt/xt My^Ê^itêââtf^M ikç, PO'
ientissîmus ait, Nabucoârosiorus ^ qui Hercule tohusthr tnit. Les mots
l4i>A«9i»ifc ^ ^H^ sont rendus en arménien par â/kh-tM^^fif MÊift-^ p^t*
tinnssimiiS aie, en faisant rapporter atlk Abydène. II est ilair que Tan-
tien traducteur a pris Miya.^vnt pour un adjectif qui ser\'oit d'épiihéie
, i N«iC«aw«/)ô<»^r : maïs, dans ce cas-ft, il faudroit supposer, comme le
rî^enie Téditeur de Venise, que dans le manuscrit qu*il avoît 5ous les
^yeux, on lîsoît Mfyaiâifnf* Cette conjecture est inadmissible j il oy a
aucun doute qu'il ne s'agisse dans Eusèbe d'un écrivain nommé Mégm^
WnrJ . qui nous est tien connu, par le témoignage de Srraijon [1) tî
fe S. Clément d'Alexandrie fi), pour avoir conqiosé une histoire de
rinde, Cest tnéme de cet ouvrage quest tiré le passage allégué par
{ 1) Lit, ii^ f. '(S,/^j 76s XV , p:69f^)fy9. — (2) Stromit* lii\ a
FÉVRIER l8zO,
99
Abydène, et îl est fort singulier qu'il soit aussi cîié par Strabon: ce
géographe die de mèine, en parlant des grandes conquêtes de Nabu-
chodonosor, qu'il avoit été bien supérieur à Hercule: N«voi»^ojîpei' A
Tir nD%t XatXJkhtç •tI«AitjjUwoit»^ût HpfltJt^é«</JtMôï', x. t. A, , et il ne s'exprima
ainsi que sur [*autorilé de Méga^thènes ; ffvvtxjfx^^aurtlAf  mnç i^ hAty^âivaç
^ X^yf T»Tw (i). Le passage JEusèbe, olîjet de cette discussion, se
retrouve dans l'Histoire d'Arménie de Moïse de Khoren (lib. if , cap. j)^
et Ion y remarque fa même fauie, qui n a pas été relevée par les frèrei
Whiston , qui traduisent pottns dit Nabuchcdon^sorus, La seufe différenco
qull y ait entre Jeur texie et le nouvel Eusèbe, c'est qu'on ny irouvo
pas le mot «vj#|- ûJl M* Aucher ira pas fait assez d'attention h cette res-
^eoîbbnce frappante et à rfautrej» encore qu^il pouvoit reconiioître, et,
trompé sans doute par le désir de faire de la traduction rfEusèbe un
des pfus anciens monumens de la littérature arménienne, il a cherché
à l'attribuer aux patriarches Sahng et Mesrob; car ce n'est qu'à eux seuls
que |>euvent convenir fes expres>fons 7' ••nwyf^Jt^ ^<iV|y^/2cAf/y
ëfhpwrtf qui se trouvent dans le titre arménien, et qui signifient» iraduU
dt i* original gnc en arménien par nos rainis iraJtiCtturs , mais dont il
n*a pas osé faire passer les équivalens daps le litre latin*
Je n'entreprendrai point de ftire une comparaison détaillée entre la
Version arménienne d'Eusèbe et les fragmens que nous possédons de
rorrginal grec ; Je ne chercherai pas non plusà rt tablir la véritable leçon»
dans plusieurs des lieux ou Ton rc!(narc{ue des différences : la version latine
jointe krédition que nous annonçons, et la traduction déjà publiée à
Milan • sont suffisantes pour que des |)ersonnes plus versées que nous
dans ce genre de travail puissent Fentreprendre. J'aurois certainement
peu de chose dVssentiel à ajouter aux observations fines et judicieuses du
savant helléniste qui a déjà rendu compte dans ce journal d'une autre
traduction d'Eusèbe ; le texte arménien les justifie toutes (2),
(i) Strab, riL XV,p, 6H et 6Sy.
(2) Il n'est qti'une seule fois où les observations de M. Raaul-Rochette
soient er» cléfatit, mais, â ce que nous pensons^ parce que rancîcn traductL-ur
arménien s*est trompé. Bérose r;îconte qa'on satrape, chargé de gouverner
rE^7pie, la Syrie et [a Phcnicie, s*étant révolté conire iNabopobs^ar, ce
prince envoya pour le soumettre son fils Nabiichodonoior, parce qu'il n*étoît
plus lui-même en état de supporter les fatrgtijij de la guerre, % lùità/uukuç tuiiiç
1*71 Ttàjujfti^îf, jVl. Raoul-Rochetle pense qu'iiest inutile de chercher un sen*
plus r;»TSonnablc, et nous sommes gc fon avisj il cinoit donc qne le traducteur
deMikn n*a pas été fidèle au teite arménien en tradaîsant ^ quum ipu per sé
N 2
100 JOURNAL DES SAVANS,
Avanï de fiiire connoître assez rapidement tout ce que la Chroricpie
tf Eusèbe contient d^imponant, je dois examiner en particulitr la traduG-
lion qui laccompagne. Quoique le livre porte la date de l'an 1818, ce
n est que dans le couratit de Tannée 1819 qu'il a paru , el Ton sait que»
l'année dernière, le D/ Zohralj, Arménien, avoir |JuLliê, cofointt nient
avec M, Mai, de Milan , une version latine du même ouvrage* Je n'entre-
prendrai pas de décider ^i Ton doit accorder uïitt pkine coaîîance au rtcit
de M. AucIilt, qui prétend que le manuscrit original apporté, à la hn
du dernier siècle, de Jérusalem à Constantinople, se irou\e maintenani
dans fa bibliothèque du collège arménien de cette ville, ou s'il faut
plutôt s en rapporrer à ce que dii le U.' Zohrah , qui as^^ure que la copie
qui a servi à sa traduction, ei partant h celle de V^enise, a été faite ,
en 1784, à Constantinople, p»r un Arménien nommé George, fils de
Jean, mort maintenant, ei quon ignore depuis ce qu'est devenu le
manuscrit original. Quoi qu'il en soit , les deux éditeurs s'accordent k
nous apprendre que ce majiuscrit étoii d'une grande antiquité , et en
parchemiji. Lempreinie d'un cachet ajipliqué sur i\m des feuilieis imé-
rieurs,etquipor.ecesniotsS(»«M'l''MKM|iiï.'i,ljn'^Uaïl(i.
prouve qu*il a appartenu k un patriarche appelé (Jregoire ( i). Le premier
apôtre de rArniénie eut plusieurs successeurs ; mais ils sont tous posté-
rieurs au XK* siècle. Il ne peut y avoir d*incertiiude qu'entre Grégoire II ,
patriarche en 1 06 5 , Grégoire III , qui le fut en i i 1 3, et Grégoire IV, en
i 17 j. M, Aucher pense que le manuscrit appartint à Grégoire III : le
D/ Zohrah croit que ce fat h Grégoire IV; ce qui nous paroît plus
vraisemblable. Quoi qu*il en soit, l'aniiqulté de la copie ne peut être
lévoquée en doute.
Quoiqu'un exemplaire manuscrit de la Chronique d*Eusèbc fût k
Venise depuis le commencement de Tan 17941 ^t quoique M. Aucher
rapporte dans sa préface une perinission dlmprirner datée du 6 mai
1795 , il ne paroît pasque-Jes religieux artnéniens de cette ville eussent
Fintention sérieuse de publier cet ouvrage , quand M. Mai, de Milan ,
Jam ad paenas txpeitrdas non vattr^t; cjkp e>NiQns cjue le nouveau iraducteur
rend, lom. 1> p. 65 , par tt quantum ipst non apius trat ad { hcst^mj punien-
dum. Il csi certain cependant qu'on ne peut pas traduire auirement, et il est
ti^anittfstc que i'interprèic arménien ikîx trompé sur le sens du verbe xaont-
5i7jf: cir ^iê0Huté^^, qu'il a employé comme son équivalent en arménien, ne
iigfiftie que çhàtur , punir, et n^ne pins ordinairement encore pprimandtr.
(l) Oo voit de plus, dans Té^io^ de Milan, les mots **/» ffi^f^/* U seigneur
Gfégpift, tn minuscule», placés à coté de la tétcda Sauveur, qui eit dans le
champ du cachet.
FÉVRIER 1820. f©t
fixa le premier sur lui rattentîon du inonde savant ^ par ce qu'iT en dit
dans la préface de I édition qu'il donna en 1816 dun traité inédit de
Philon. î^ous doutons beaucoup que nous eu>sîons de long-temps possédé
une édition du texte nrtnénien, si le D/ Zohrab nesVtoît empressé de
publier sa traduction I^itine avec M. Mai. Les injures un ptu trop viru-
Itntes répandues dans les notes et dans la préface de Tcdiiion de Venise,
sont pour nous la preuve certaine des dissensions qui s'élevèrent dans le
sein de la congrégation au sujet de cet ouvrage. Ces choses ont trop peu
d*Tniérèt pour nous, pour que nous nous y arrêtions plus long-temps:
tout ce que nous pouvons assurer* c'est que le reproche que Tédîteur de
Venise adresse à celui de Milan , d'avoir fait sa traduction sur une copte
interpolée d après TEusèbe dt Scaliger, est entièrement dénué de fonde-
ment. L'examen attentif que noui avons fait des deux vérifions, nous a
pleinement convaincu quelles ont été faites sur un texte tout-à-fait pareil.
Nous dirons plus : comme M, Aucher a eu le soin très-louabfe de repro-
duire dans son édition le texte arménien tel que son manuscrit fe pré-
sente, en mettant des italiques par- tout où il a cru quon devoît le
corriger, il nous a mi> en état i)ar-I2i de pouvoir affirmer que la seule
traduction dans laquelle Eus^he soit aliéré d'après le grec de Scaliger,
est la sienne, ainsi qu'on le verra par les exemples que nous dierons*
Quoiqu'il assure encore qu'il n'a connu que très*tard fédition de Milan,
il eyt certain que plusieurs endroits de sa traduction rappellent fe premier
travail, et que par tout où le D/ Zohrab n'a pas rendu exactement fe
sens de loriginal, on remarque pareille erreur dans lédiiion de V^enise.
Le manuscrit original ne portoitpas de litre ; M, Aucher en a composé
un, qui nous paroît contenir \int faute assez grave. Les mots ^tâMifug^
*MêtâÊÎ^êêét^ââhif^ LpifJiMiihititMtj^ ne Signifient pas chronhon biparùtum^
comme on le voit dans le titre laiin : il faudroit les traduire littéralement
pzr CAranicû btpartitam; ce qui seroit un baibarisme dans toutes les '
langues. H est impossible de citer , en arménien , un exemple de l'emploi
comme singulier du mot pluriel «ri«/ j/*w^i m/ (r««''/«<'V^, puisque son singu-
lier régulier existe et est usité. L'erreur seroit moins grossière, s'il y a voit
^êUBfishiuêliÊMéîitMhff^ LftlitfuhiliëMâj^ \ mais il vaudroît mieux mettre
0'êMi»fMâât§iâit^ué9fftftâ.(3^ kpîitluêvuLsMéf. Cette faute* qui dépare le titre
de cet ouvrage , n'est pas à beaucoup près la seule du jnéme genre qu on
doive attribuer à l'éditeur; parmi ks nombreux changemens qu'il a cru
pouvoir faire k foriginal , on retnarque celui ci. Dans fa préface d'f usèhe,
on lit ces mots f/om, I, p, ^)% il^n- {\"^'^if ^ h^A ^[^t^^"^i_
^^t^nj : ;iu lieu de "^muuluin^ qui ne présente aucune ditïiculié , 1 édi-
icz JOURNAL DES SAVANS,
teur, pour éclairdr la phrase» veut y substituer ^muiÊhttgfnj^ qui ne
change rien au seiii, et qui, quand même il n auroit pas I niconvenient de
ramener une consonnance désagréable , ce que les écrivain* élégam
évitent avec soin, seroît contraire aux règles de la graminarre. En
arménien, quand un adjectif précède son substantif, et que cet adfectit
est un participe présent ou passé, un gérondif, 6tc» , la concordance n'est
pas nécesi>ajre, il est mieux de fa négliger* Celte règle n*est pas oubliée
dans la nouvelle Grammaire arménienne du P. Gabriel Aredik'hîan,
imprimée à Venise en i8i j ,un volume #>/-^/ ; elle sV trouve appuyée
de nombreux exemples, p. i^p et fyo. L'erreur que nous relevons est
fTautant plus inconcevable, que l'auteur de cette grammaire a bien soin
fie remarquer en note que les personnes peu au fait de [^arménien littéral
prennent souvent pour des fautes des locutions semblables à celle qui est
fobfetde cette remarque ♦ et quon rencontre très-fréquemment dans les
anciens auteurs. Il paroîtra peut-être surprenant qu'un éditeur arménien
commette de telles erreurs; elles éfonneroîent moins , si l'ouvrage avoit
été publié par un Européeti ; elles sont cependant l)ien plus communes
qu'on ne le croiroit au premier abord; il est parmi les Arméniens peu
de personnes qui connoissent toutes (es délicatesses de la langue littérale,
et la plupart des livres qu'ils ont pul>liéS| fourmillent de pareilles fautes.
C'est une règle générale en arménien, que la particule que Ion met
devant un mot au génitif pour en fiiire un datif, est ^fr, quand lemotcom*
menceparune consonne, et y, quartd il commence par une voyelle. Cetta
règfe ne souffre d exception que quand la voyelle initiale est^; alors
cette lettre elle-même tient lieu de la particule. Au mépris de cet
usage, trop commun et trop connu pour que nous en citions des
exemples, M* Aucher veut lire, tom. l /?. 2, 'fr (Jwj-^m/^ aux Grecs ^
iu lieu de {jf^^hau^ qui est dans le manuscrit, et qui vaut mieux. Si une
pius longue discussion sur des objets de cette nature n*étoit pas par
trop fastidieuse pour nos lecteur?, il nous seroii facile d'ajouter ici un
grand nombre d observations du même genre; qu'il nous suffise de
dire que presque tous les changemens, additions ou suppressions que
l'éditeur de Venise a cru devoir fliire à son texte, sont inutiles ou témé*
laires. M. Aucher a-i-il eu raison après cela, dans les endroits où il se
trouvoit des lacunes, de substituer son style à celui de Moïse de Khoren
peut-être! D'après la traduction de S, Jérôme et les fragmens grecs que
le Syi^celfe nous a conservés , il a rétabli en arménien la préface
qii'Eusèbe avoit placée en tête de son Canon chronologique, et qui
manque dans le manuscrit : il y a loin de son style, je ne dirai pas à ccluî
de Moïse de Khoren 1 mais à la diction du plus médiocre des anuenj
L
FÉVRIER 1820.
te;
nuteurs arméniens ; et }e puis assurer, autant cependant qu uii étranger
peut juger de ces choses , que Tédiieur n'a pas été plus heureux daiis ses
imitations que dans ses corrections.
Entre autres exeiiiples des endroits où M. Aucher s'est p{ut6t guidé sur
fEusébe de Scaliger que sur le texte arménien qu'il avoit sous les yeux,
|e citerai ce passage qu'Eusèbe emprunte à Manéthon , au sujet des mono-
mens que Sésostris fit élever pour conserver le souvenir de ses victoin s :
Ar^Hi ubt^ut monumtnia , ijuarumcumque geniium poli tus est , ertA itjfortium
qui'tem viromm formas viril i specie, ignavomm verà mutiebriùus mtmbrif
in cippis însçulpsit ; ce qui est bien conforme au grec, mais non à l'armé-
nien, qui présente de plus le mol ^Mêif^^pêMhtu ^ que le traducteur de
Milan n'a pas négligé d'exprimer : idtm tt sua in singulas grntu dûm'ma^
ihnis monumenra unique consiituit ; apud genu$ quidtm stremtês virUia,
apud nro ïmbtUts jtminra puHtnda ignominiœ (ausâ columnis insculptns.
Les mots ignominiœ causa ne rendent pas exactement ^Mip^ugfnûyu ,
qui signifie , mal, châtiment, puni tioni mais enfin le traducteur ne la
pas négligé*
Dans le chapitre qui traite àe% rois Ptolémées , il e^ une interpolation
d*une bien plus grande importance. Eusébe , ou plutôt Porphyre , après
avoir dît que Cléopatre partagea le pouvoir pendant huit ans, dabor4
avec son frère aîné , puis avec le plus jeune, ajoute quelle re>!a ^w^ti
seule en possession du trône jusqu à la quinzième année de son règne{
puis il dit que la seizième année fut aussi appt lée la première ( 1 ) : voioi
à quelle occasion. Lysimaque, roi de Chakis , en Syrie , mourut alors, et
Antoine donna ses états à Cléopaire, qui depuis désigna d'une double
façon les années de son règne, de sorte que la vingt-deuxième, dans
laquelle elle mourut, Un aussi la septième, comme le porte fe texte armé*
ilien , (|fffi/JE-i# Atutrr hftiipitprf^fiU le. ^téu/Brtpgrptf^ft X^afrfrufisêaÊÊpâÊM
wfÊMÊÊ^if L- '^hpnprfft^t^ qui a été fidèlement rendu par ie traducteur de
Alilau , uti CUopatrœ annus suundus supra yigcsimnm idtmtssittt sepfimui.
Au lieu d^'ÇiiitwiÊffjhf^ sepritmc, f éditeur de Venise introduit dans lar*-
jnénien J^i-I^imp^ffu y viri^t- septième ,con\T^ toute vraisemblance; car s'il
est vrai que la seizième année de Cléopatre ait été aussi appelée première,
(1) Vsque ad annmn decimum'^nnnîim ^ qtti dechttus-sextus slmufque prhnus
*fippfVatllS fuit , â^y^t. ^^'u^mtuitééAtAftftptf. uiSQ 9 np i^imuiuM^^pnprf. m^nL.m'ïdr^
jfiw*., II. *tf/tj*r2«ff/ï^ , qu'il valoit mie'ix imprimer ainsi : ê/ff%^ jf^'H^urmnéé/u&^
i*tpr^ J«*ïE I f\p ^lâÊftàiiimAtihpnptiSi ê»funi.m\éi^m»^ % iL mn-m^'unprf^] Çèl îl eSt CVÎdrnt
qu'il fant couptr la phrase en deux , coi^mie le D/ Zohrab l'a fait dar^s sa tia-
ductton, . . . Ad quf/jtum-dectmtirn usquf annum. Stnius avtrm deâmus nufiot*
watus nt uiam primus.
• ot JOURNAL DES SAVANS,
i( est impossible que la vingt deuxième ait jamais été nommée vingt-'
Aeprième, C est Je grec de Scaliefer qui a causé cette singulière mé|îri'e:
on y lit iç yivi^mi it J%Ci%^f k^ »Wr autHç tp n tMftof* Il éioit bien facile
de substituer h ces denwrs mots 70 j^ KJ^ftav : un copi.sie igi^orant ou
fnatteiitîf aura pris une ybrcviation de ij pour Je nujnéral «'. Utie
pareille restitution ne valoir pas même la peine d'être remarquée ; il
jiufïit du biinple bon sens pour la faire : Terreur seule du moderne ira*
ducteuf armèriien a pu Jui donuf r quelque importance. En reproduisant
le passage grec d*£usébe, Jes éditeurs de Milan ont rétabli le texte
dans son intégrité» sans même juger à propos de faire mention de
cette correction. Je remarquerai aus.si que M, Champollion-Figeac , tout
récemment ^ a fait aussi Ja même restitution dans ses Anna/es des Lu*
gidrj (1), Parmi Jes médailles qui, du cabinet de Pellerin, sont passée»
4aiu le cabinet du Roi, iJ s'en trouve une qui nous présente un exemple
de cette double manière d'exprimer les années deCléopatre: au revers est
la légende €TOTC. katot. kai. c. eCAc (««Tifetf) (1), c est-Mire,
fafi 2i ft 6 de la nouvelle dtenc , qui correspundoit à I*année macé-
donienne comprise entre Je 3 1 octobre ji avant J. C.,et Je z 1 octobre
Ji f et non, comme le croit M. ChampoJIion» à lahiiée égyptienne
sothiaque comprise entre le j 1 août j i avant J. C, » et Je j » aoftt jo*
Deux fois » dans l'édition de Alilan , le mot t^lta^ut^ph- est rendu
inexactemeni par versifcator, terme qui n'a sans doute été cJioisi par le
traducteur que parce que les * personnages ( Arctinus de Milet et
Eurnélus de CorintJie) auxquels iJ se rapporte, étoient effectivement des
poètes : mais, comme ils avoient écrit en vers Jliistorre de Jeur patrie,
il seroit très-possible qu*Eusèbe Jes eût plutôt appelés historiens que
poètes* Le scholiastede Pindare, en faisant mention du second, i appelle
jfOfii kiStarien, min-niç rsve^ç (j) : S, Clément d*AIexandrie fait plus >
il le nomme historiographe (4). Comme, pour les deux passages armé-
Jiiens, oii on lit afttu^ëâêsf^fth- ^ (e texte grec d'Eusèbe n existe plus, iJ ne
peut pas nous donner la pleine confirmaucm de ce que nous avançons :
toujours est-il certain que ifh*H*^f^P^ '^^ P^tJt se rendre par versificator ^
et que M, AucJier a eu tort de sVn servir à riniitation du traducteur de
Mifan, Ce mot, synonyme de t^êâfêu*iuêU et de t^tâ^tséfffrif , nt: signifie
pas autre chose quhisforien: je pourrot», pour le prouver, citer plusieurs
passages de la Rhétorique ou de f Histoire de Moïse de Khoren; mais je
^^^^— *^^ ■ -^^i^^ ^^^^^ ■■ ■ ^"^^^
( I ) Tcm. IJ ^ V-39T ^JS^' "^ {^ Eckhel , Dcctr* num^ vetêr^ tom, IV, p, a^/
M ton net »£>fjnr. dtt méd- S'c. iom. i/J ,p.^j. — (i) In Oljmp, Xiit , to n. il ^
FÉVRIER 1820. loj
?f^tî^5omer à un seul, que j'eniprunieraî à Eusèbe. Après avoir
►•dit dans sa préface ( tom, I, p. 2), quil fera menlion des belles actions
Fiant des Grecs que des barbares, cet auteur ajoute quil parlera des
f généraux, des sages, des héros, des poètes» dts hlstorkns et des phi-
Vi^u^ aJpu(iM^ftpMê ^ oiftfiintfïïêêifafiêuju. L'éditeur de Venise rend
IrufMà^ftp par hisioricQS , mais parce que le traducteur de Milan a
Été ici plus fidèle que dans !es deux autres occasions.
A la page 273 (tom. Il, année 298 j), on lit que le sénat romain
iccorda annuellement à Néron une somme de dijc millions d'une
Kinonnoie quelconque , pour ses dépenses: Ncronî scnatus expcnsarurn
momine myriadum et mille pccunlarum annuatim tribuî ratum habuit, ce
lî n'auroit rien de bien étonnant; mais on lit dans rarménien des mots
J-^ui justifient la remarque, ^fr ^umJuê^ gs^iêttmptwiJifuâtfJw ^ qui signifient,
^.pâur les mQUiQïïs qui lui éioient nécessaires. Ici, c'est la traduction de
^S. Jérôme qui a trompé M. Aucher : Neroni in expensas centies centen/t
ywillia decreU senaïus annua subminïstrarunt (i), II est évident quil
inanque un mot dans le latin, pour que le sens soit raisonnable. Pourquoi
.M. Aucher n*a-t-il pas traduit les termes arméniens qui remplissent cette
iacuneî II se contente de dire en note (tom, II, p. JJ4), ^h ^wTu'iP
ruituâminwMJifuft^ft ^ vel ob ovfS, vel, juxta Hieron. in expensas , de manière
-à faire croire que le mot arménien Êê^ââtÊtwinttLjfutti pourrait avoir le
double sens de mouton et de dépense t ce qui nesi pas.
Sous Fan ai 1 2 i ftom, II , p, 281 ) , il est question d'un grand tremble-
ment de terre, qui renversa les villes d'Elee, de Myrrhine, de Pitane
•et de Cumes, que le traducteur place (comme le texte arménien, qui
:est altécé ) dans un pays de Àiénésie ^^fh^i^h'^ ^ qui nous est
inconnu. Il iâiià ce sujet une note qui ne nous apprend rien et dans la-
quelle il propose une conjecture bien mal fondée (2), qu'il emprunte en-
l-core à fédiiion de Milan (3 ) , tandis qulI étoit si facile rfe nous apprendre
qu'il s^agissoit de la Mysie |pfrtJ/fr*^,dont il falloit rétablir le nom dans
Je texte arménien , et dans laquelle se trouvent effectivement les quatre
villes mentionnées parEusèbep Nous remarquerons, au reste, que toutes
les notes qui ^ont jointes au Canon chronologique, ainsi que les aimo-
rm*
(1) Ed^ Scalig. p^ i6j* — (2) Pro Asja habha apud Hieron, in cod* Artf^*
Menesia iegut/r ^ fartasse Manbam Asiœ provindam indicans : altàs in Gr,fui(
ûlia vQx cûnjuncta ut jmy, quamv'ts dait apUd Synceilum. — (3) Codex arm.
Menesiae provinc ae» Nimirum anU interpra non sans distinxisse videtur voccs
O
f.iDiJ JOURNAL DES SAVANS,
•tarions qui sont dispersées dans fouvrage, sont pour la plupart cTuneJ
prolixité rebuianle, quelles ne nous apprennent rien de ce qu'on
I.Voudroit savoir, et qu'on est fiché d'y voir presque par-lout Tignorance
lia plus absolue de tout ce qui tiem à la connoissance de ranliquité
classique et de. la bonne littérature. Cette édition ne présente pas sur
celle de Milan d'autre avantage que de nous offrir le texte arméniea.
dXusébe ^ imprimé avec ieléganceet la netteté qui distinguent tous les
produits de la typographie arniénienne de Venise: pour la fidélité i la.
traduction est de beaucoup au-dessous de la première, qui a en outre
Liavamage de serrer de plus près le sens de Toriginal, de socte queUe
sera vraiment plus utile aux savans qui voudront comparer l'arménien
•avec les fiagmens grecs et latins que nous possédons.
Comme la Chronique d'Eusèbe adéj?i été analysée dans un preîT>ier
[article et pour un objet différent, comme efle doit encore être le sujet
[•d'un second anicte> je ne me permettrai que quelques observaUons sur
l€e qu elle me paroît contenir de plus important*
Les divers morceaux qu Eusèbe a tirés de Jiérose, d'Abydéne, de
laiion et d*autres écrivains, ou plutôt qu il a empruntés à la Clirono*
) d'Alexandre Polyhistor, sont tous curieux > mais difliciles à employer,
eotniue tous les renseignemens que les anciens nous ont transmis sur
*s royaumes d'Assyrie, de Babylone et de Médie : c*est cette partie de
[|i*ouvrage qui présente le plui de détails neufc et Intéressaiis* Je ne
Ijreux point parler de la mention de ces rois que Bérose suppose avoir
gouverné Baby/one pendant des myriades de siècles ; on sent que de
pareilles choses ne se discutent pas : mais ce qu'il dit ensuite mérite
»ius d'attention. Il prétend que , long-temps avant Sémiramîs , les
[Âlèdes firent la conqiii^te de Babylone, qu'ils occupèrent pendant deux
[cent vjtigt-quatre ans sous huit rois : ils furent remplacés par onze
If rinces dont cet historien ne nous fait pas connoître Torigine, et dont
nombre d'années ne se retrouvé malheureusement pas d;ms le nianus*
[crir arménien. A peux-ci succédèrent quarante-neuf rois chaîdéens qui
légnèrent quatre cent cinquante- huit aiu» et furent remplacés par neuf
sis arabes qui occupèrent le trône pendant deux tent quarante-cinq an$.;
ne fut qu après que régna Séiniramis. La durée de ces dynasties ne
iépasse pas I<rs limites assignées par (es Septante , et elle se renferme à
>eu près dans les mêmes bornes que fa chronologie chinoise. Ces
Nouveaux documens historiques pourroient donner fieu à plusieurs
>nsjdèraiions importantes.
Les détails qui suivent ne sont guère moîn> curieux \ Tes bornes de cet
"aflicle ne nous permettent de les indiquer que très- rapidemeaL Pltisiitti^
FÉVRIER i8ro. «07
passages des auteurs cités par Eusèbe seront fort utiles pour expliquer
divers endroits obscurs des livres des Roîs et des Prophètes : ils jetteront
aussi du jour sur le fameux Canon chronologique qui accompagne
ordinairement fAhnageste dePloîémée, monument précieux» mats dont
il me semble que personne fusqu'à présent n'a su ftire un usage conve-
nable, parce qu on n'a pas fait assez d*atleniion à la nature de sa corn*
position, ni d'après quels matériaux et pour quel objet il a été rédigée
Les récils consignés dans le nouvel Eusèbe mettent hors de doute qvie
tous les rois mentionnés dans ce canon jusqu'à Nabopolassar, père de
Nabuchodonosor , n'étoient qufe des officiers ou du moins que des
feudataires des rois a5syrTens de Niniveîcequî s*accorde fort bien fevec
ce qu on voit dans TEcriture e tavec les inductions que l'on peut tirer de
divers passages d'Hérodote.
Parmi les rois qui, selon ce canon, auroient régné à Babyfone, il en
est tin qui, dans la plupart des éditions, est nommé Bi/iù^ BiXiCi*, mai»
dont le nom varie beaucoup plus dans les autres, ainsi que dans Ie«
manuscrits. Ptoiémée fliit commencer son règne avec 1a 4^** annél
égyptienne de Nabonassar, cVst-à-dire, au i j février 702 avant J. C.f
son gouvernement fut de trois ans, Alexandre Polyhîsior fait mention-,
d'après Bérose , dun prince babylonien, que le texte arménien appelle
£^îi X^^^hpnu , qui régna également trois ans, puisque le même auteur
rapporte qu'en la troisième année de son règne (Sénécharîb, roid^Assyrie/
s'empara de Babylone, Temmena captif avec ses partisans, et mit en sa
place son propre fils. Le rapport de nom et la durée de règne montrent
qu'il s'agit du même personnage dans Ptolénîée et dans Eusèbe ; cette
concordance établie nouiî donne dautres lumières* Cet Èlib emmené
captif par le roi d'Assyrie étoit sans doute un Babylonien qui avok
tenté d'affranchir sa patrie de la dépendance d^Ninive : voici ce qui fe
prouve. L'auteur dt/à cité dit qu'après que le frère de Sénécharib eut
régné il Babylone^ ^r/Vtv s empara du pouvoir, qu'il ne garda pas plus
de trente jours, et fut tué par un certain Merodach Baladan^ qui ne
r/gna que six mois et fût tué par Elib dont nous avons parlé : on voit
qu'il s\igit d'im temps de (rouble. Après la mort du frère de Sénécharib;
les Babyloniens voulurent se rendre indépendans des Assyriens : oi\
conçoit bien alors le motif de Texpédition de Sénécharib , qui avort
peut-être son frèrt h. venger. Ce temps de trouble est fort bien repré»
sente par les deux années d'interrègne que le Canon de Ptoiémée place
avant le règne de Bilib* Ce frère de.Sénécliarib, dont Eusèbe ne noui
fait pasconnoîtrelenom, sera donc un prince dont le nom ne nous a pas été
tiansmis dune manière bien uniforme par les manuscrits du Canon 1
o a
^
to8 JOURNAL DES SAVANS,
mais qu*on est convenu d*appeler Arcéan, Apxlctrc^ II occupa le trône
avant cet interrègne > pendant I espace de cinq ans, à partir de fa trente-
neuvième année égyptienne de Nabonassar , qui commença le 1 7 février
709 avant J. C, ; ce que est une raison de croire que Sénécharib se rendit
pour la première fois maître de Babylone en l'an 710 : cette conjecture
%a bientôt se changer en certitude, C*est en la quatorzième année
d'Ezéchias roi de Juda» que Sénécharib entreprit sa grande expédition
contre la Syrie et rÉgypie, dont le livre des Rois, les Prophètes et
Hérodote, nous ont conservé le souvenir. Tous les chronologistes
5 accordent à placer la quatorzième armée d*£zéchias en fan 7 1 1 avant
J* C; cette détermination, à laquelle on pourroit donner un degré de
plus de précision 5 est suffisante pour ce qui nous occupe. Après fa défaite
inirâculeuse et la fuite du roi d*Assyrie, on sait quÉzéchias tomba
dangereusement malade; ce qui , selon le témoignage irrécusable du livre
des Rois ( I ) , d'Isaïe (2) et des Paralipomènes f j) , arriva dans la même
année. Après sa guérison, un roi de Babylone lui envoya une ambassade
de félicitation : ce prince, que les livres hz\ntS2^^[i'^\[mn Merodach Baiddûrt ^
ne peut être que le Afardocempad , qui , selon le Canon , régnoit alors à
Babylone, et dont la dernière année, comptée à la manière d'Egypte,
commença le 1 7 février 7 r o avarït J. C» C'est dans cette année même
que nous avons placé la première conquête de Babylone par Sénécharib.
Ainsi, quand Mérodach Baladnn envoya une ambassade en Judée, il est
à croire qu*il étoît déjà aux prises avec le roi d*Assyrie ou que la guerre
étoit imminente; et après les actes d'hostilité que Sénécharib avoit exercés
dans la terre dlsraël, une simple félichation n'étoît pas Tunique objet de
Tambassade babylonienne; elle avait encore sans doute un autre butf
celui d'engager Ézéchias dans une guerre contre les Assyriens.
Les détails qu*£usèb^ donne ensuite sur Texpédition que SénéchariS
entreprît contre les Grecs établis dans laCilicie» après avoir conquis
Babyione pour la seconde fois, sont aussi neufs qu'inléressans. Ils
confirment les traditions que les anciens nous ont transmises sur l'origine
grecque de Mopsueste, de Mopsucrène, de MaUoset de la plupart des
villes de Cilicie, et ils font voir que les fabfes qui se trouvent dans la
Chronique de Malala, sur les villes argiennes et athéniennes qui avoient
;iuirefois existé dans les lieux où Séleucus Nicator fit bâiir Antioche et
d autres cités macédoniennes, ne sont pas tout-à-fatt dénuées de fonde-
ment; il iâlloit même que les colonies grecques de ces régions fussent
cap, xxzii.
FÉVRIER 1820. \ 109
dflrenues bien puissantes , pour attirer les armes du roi (TAssyrte. Je penM
que les Grecs de Cypre ne furent pas étrangers à cette guerre: on sait qw
peu après la guerre de Troie , cette ile fut couverte de colonies grecques 1^
et il est bien vraisemblable que l'opulente Salamine. devint la métropole
de plusieurs villes sur le continent opposé ; il est certain au moins qua
des princes de la race d'Ajax fondèrent à OIba»dans la Cificie» une
souveraineté, qui resta très-long-temps ^u pouvoir de leurs descendins.
Cest dans Tannée attique qui commença le 1 3 mars 1 1 pa avant J. C. ai
qui se termina le 7 avril 1 1 9 1 » que la race <f Afax s'éublit dans File de
Cypre, et que Teucer jeta les fondemens de Sahmine,' qui devint h
capitale d'un état considérable! gouverné pendant neuf siècles psii des
princes de la même race.
. Avant de quitter ce qui est relatif à l'histoire d'Assyrie, je remarquerai que
le nom d'Aradiani \^«ir^itArfr,que l'interprète d'Eusèbe donne deux
fois à FEuphrate, tom. I, p. 18 et //, paroit'avoir beaucoup embarrassé
ses éditeurs» ce qui seroit moins étonnant s'ils n'étoient pas Arméniens,
puisque c'est le nom bien connu d'une grande rivière qui traverse le paya
de Daron et qui n'est pas autre chose que le bras le plus considérable de
fEuphrate, qui est appelé maintenant par les Turcs Mourad-tckai. Im
nom d'Aradiûni se rencontre fréquemment dans les auteurs armé*
niens : j'ai déjà parlé de cette rivière dans mes* Afémoires historiques ei
géographiques sur J* Arménie (i)* Je dirai plus maintenant ; je pense 'que
le nom SArad'^ani est la véritable dénomination arménienne de FÉa*
pbrate. Celle-ci, que leâ Arméniens ont adoptée sous la formé
\xÊjfÊputêm Evp hrad, ne me paroit être , diversement modifiée , que le
nom syxïtïï ou arabe du fleuve. Nous sommes accoutumés à ne donner
le nom d'Euphrate qu'à la rivière qui prend sa source dans les environs
d'Arzroum; mais celle qui est connue actuellement sous le nom de
Alourad-tchài y qui est beaucoup plus forte et dont le cours est hittt
plus long, est la seule que les Arméniens considèrent comme le véritable
Euphrate. C'est dans Fintérieur de FArm^nie qu'elle prend sa source ,
non loin de Forigine du Tigre : son nom particulier étoit Arad^ani ; oa
le retrouve dans Pline sous la forme Arsanias (2). La rivière qui vient
d'Arzroum , portoit aussi un nom particulier , qui est celui de Pyxi'»
rates (3). Je pense que ce n'est qu'après leur réunion, que la dénomi<*
nation d'Euphrate peut leur convenir.
Ce quV>n trouve sur l'Egypte , dans la Chronique arménienne d'Eusèbe ,'
n'est pas à beaucoup près aussi intéressant ; il n'y a, à proprement parler, rien
^ . ' I I mil
(i) Tom, I; p. jo, j I et 52. — (2) Plin. Mb. V, cap. 24. — {^libid^
lio JOURNAL DES SAVANS,
de neuf, le !oue est dans le Syncelle : on y remarque toutefois quefqwe;
différences et quefques variantes qui vaudroîent la peine Jètre discutées ;
par exemple, au lieu de 1 absurde leçon du Syncelle, que peu de crîtrquei
ont révoquée en douie et qui attribue une durée de soixante-quinze jours
à la septième dynasire des rois memphites, composée de cinq rois, on
Toit dans l\arinénîen que ces princes régnèrent soi\ïante*quinze ans. Dans
ies fragmens de Manéthon, qu'Çusèbe emprunte à Josèphe , fa version
arménienne nous donne (es moyens de corriger une autre erreur. II y
est dit qiieïe premier roi des pasteurs qui se rendit maître de l'Egypte t
y fonda une ville célèbre dans Tancienne théologie égyptienne sous le
nomd'Àuûrîs i et qui fut pîour ainsi dire sa place d*armes. Selon le greCf
cette ville étoit dans le nome Saïte, ir rû/xçkT t^J" SAiT»f , et à l'orient de ta
branche bubastîque du Nîi» fUi^uvnf f^v 'mpûç <tva7ûhy^v tS Bafacçr-n* TT^tt/xS:
ce qui est impossible, puisque la vilfe et le nome de Saïs étoient dans la
partie occideoïale du Delta, tandis que Bubaste étoit à l'opposé en allant
vers la Syrie. En meuant apfhfo^ ^^y tfff.£tt£fftrÊmt ^iMéwjtiê^ (r),
vtlU dunome Métkrnithe , la version arménienne nous indique la vraie
fcçon ; il faut lire \\Lp.putj1t(S.t Scthràithe , faute légère qui vient de
fe confusion très-ordînaîre des lettres |]^et |) dans fécriture majuscufe.
Un peu avant > en parlant de (a même ville, le nom du nome est exacte-
ment écrit, #r|f^ 9ê- ^ft \]tff^ptrffâm(r appitaf^ 4^*"1**^^ ^J^^bH^ *
ils fondèrent une vllU dans le nome Séthrdiu: ici le texte grec est conforma
avec la vérité, ©i n^ crrâT Si3j»ôî*nf vo/^aT twA/v xktmw*
Nous avons aussi remarqué, au sufet des diverses dynasties de rois
égyptiens connues sous îe nom de DhspoUfn t que par-rout où l'on voit
dans le texte du Svncelle tnù'srthmv , on trouve dans l'arménien
'^^f{n«*f<99^fâ»Èu^f*f , /es Dhpoliiàms , ce qui prouveroit que dans
Foriginal grec, que fe traducteur avoit sous les yeux> on lisoit ùnmTst-niv :
ce qui pourrôit bien être fa vraie feçon; car parmi les diverses médailles
des nomes d'Egypte que nous possédons, et qui pnt toutes été frappée!
ious les règnes de Trajan, d'Hadrien ou d'Antonin , celles qui appar-
tiennent au nome Diospolite ^ portent les légendes NOMOC AlonoMTHc
ou AlonOAClTHc seulement (2), Scidiger remarque aussi que • dans
(î) Le nintF«(^> est rendu dans Tarménten par leniot»/»!*', qui signifie /fAr. On
remarque dans ctife traduction plusieurs antres t*rdroïCs où Tancien interprète
a ciprîmé m»i-â«propos par dei équivalens amténiens^ des mots qu'il devoit
conserver.
(it Nous tiron?: ce rapprochement des Rtcherchej historhjues et gio graphiques
vrr lis mêJaUîti d* ^u nreftctt/res de l'É^ypti , ou^t^^c encore ^t^édit'de
AU Tôchapj de 1 uc dts îmcriptions et bellcs^lcttœs. Nous eipéroni
FÉVRIER 1820.
toiïs ks mnnuscritsde S, Jérôme on vtoViMQÏlDiopoUtanorum 1 1) 1 qalf z
eu ton de prendre pour une faute.
Je bornerai ici mes observations sur b Chronique d*Eusèbe en elle*
niêine : non pas que ce qu elle contient sur l'histoire grecque ne pût
fournir matièce à un grand uon*bre de remarques, mais elles seront
mieux placées dans un grand ouvrage que je prépare sur la chronologie
de V histoire ancienne.
Après lexamen de la Chronique d'Eusèbe , il est certain qu*if faut
beaucoup rabattre des avantages exagérés qu*on espèroh en retirer ;
mw cependant, en elle*mème, cette découverte es^i encore d'une assez
grande importance, puisqueKe donne un degré de plus de ceriiiude à
beaucoup de renseignemens que nous possédions sur I^histoîre ancienne,
que nous connoissons précisément de quelle manière s'enchaînoient les
idées d'Eusèbe , et enfin qu'elfe rend incontestable lanthen licite des
fragjuens grecs pubHés par Scaliger. Tout bien considéré, cette décou-
verte ajouté à la masse de nos connoissances un assex grand nombre de
faits et de renseignemens nouTeauXi non-seulement sur les rois
d'Assyrie, mais encore sur les successeurs d* Alexandre^ içs Séleucides
en particulier, et un long fragment de Diodore de Sicile sur les rois
d'Albe. Mais, fe le répète, n*eussions-nou5 pas tous ces détaifs et d'autre^
encore dispersés dans le cours de i'ouvrage et dans le Canon chrono*
logique, il n*en seroit pas inoins fort important pour nous de retrouvef
dans son intégrité le plus ancien auteur sur la chronologie, dont <Sn
nous ait transmis des fragmens originaux, La perte des grands ouvrages
d*ApoUodofe, d'Hratosihènes, de Castor, d'Alexandre Polyhistor, el
celfemême de Jules Africain, qui avoît altéré tous ces auteurs en les
soumettant à des systèmes qu'ils ne pouvoient pas connaître, nous
rendent Eusèbe très-précieux. Par Fétablissement du chrisiianisme, sort
Canon chronologique est devenu à peu près le seul régulateur des
ouvrages plus récens ; tous les aiuialisies grecs et latins se sont borné»
à le copier, Tabréger ou le traduire; il en fut de même parmi les chrétiens
de I*Orient, et je ne serois pas étonné qu on en retrouvât un jour une
traduction en syriaque ou en géorgien* La Chronique arménienne de
Samuel d*Ani ncst presque, pour les temps anciens, qu'une traduction
abrégée du Canon d'Eusèbe. Les modernes qui ont voutu donner une base
que ce savant 5 occupera bientôt de publier cet ouvrage in té ressajit, qui
|>a,5 moins uiile à la scitnce numismatique, qu*à la, géographie ancie
FEgypte.
(1) Clircn.p, 68^ et in Animadv. p* zj.
ne fera
nn» de
m JOURNAL DES SAVANSi
plus solide à la science chronofogîqtie, n'ont fait souvent qUé Tnarcher
5ur les traces d*Eusèbe , et plusieurs systèmes accrédités, sans en être , à
c« qu'il nous $emble, plus fondés, ne sont encore que ceux de cer
écrivain.
SAINT-MARTIN.
LAbT de vérifier les dates des faits HrSTORIQUES.W^'
ûvant y ère dtréiienne^par le moyen d'une table chronologique . . .
ûvec une dissertation sur tannée ancienne, l abrégé de rhisîoire
sainte, &c. . . , ,par un religieux Bénédictin (Do m Clément);
imprimé pour la première fois , sur les manuscrits des Bénédic-
tins, par M. de Saint-AHais. A Paris, imprimerie de
Moreau, librairie d'Arthus Bertrand, 1819; tom, I, II
m, in-S^ , xivj, 4ti9f 470 ^t 486 pages. Prix, 6 fr, par
volume, — (Les tomes IV et V sont sous presse-)
Nous n'avons pas transcrit tout le titre de cet ouvrage; ce titre est
uae labfe presque complète des diverses parties de tous les articles qui
doivent composer les cinq volumes de ce recueil. Le discours prélimi-
naire des éditeurs contient une notice sur dom Clément, I extrait d'une
dissertation de M. Ideler sur les mesures de surface er de longueur des
anciens, et une explication des diflerentes ères* Dom Clément, né en
I7i4i a coopéré à trois des grands ouvrages qui sont dus aux Bénédic-
tins, au I^cueil des historiens de France, à THistoire littéraire de* la
France et à TArt de vérifier les dates : il se irouvoii possesseur , en 1 790 ,
de toutes les notes relatives à ce dernier travail; elfes ont passé après sa
mort, en 179}, entre les mains de son neveu, M, Duboy-Laverne,
dont les héritiers les ont cédéeji aux éditeurs qui les publient aujour-
d'iîui. Celles de ces notes qui concernoienl la chronologie des siècles de
Tère vulgaire , ont été employées dans la quatrième édition de cet ou*
vrage, édition qui vient de paroitre en 18 volumes in-S* Les autres
manuscrits étoient d'une plus grande importance, en ce qu'ils fbrmoîent
uw recueil encore inconnu au public; c'est celui dont nous allons rendre
compte.
Nous ne nous arrêterons point au mémoire de M, Idcler sur les
mesures anciennes de longueur et de surface. Malgré les rapports qui
existent entre les diverses branches de la science archéologique , n^}^\
I
FÉVRIER 1820. 113
avouerons que cette métrologie nous paroît un peu étrangère à la
science des dates ^ ou n'y tenir du moins que fort accidentellement:
les éditeurs n'indiquent même aucun point de contact entre ces deux
genres de recherches. D auire^ travaux de M. Ideler appartenoient da*
vantrtge à Tart de .vérifier Jes dates avant Jésus-Christ: tels sont ses
mémoires sur rHéméroIoge de Ptolémée, sur les observations astro*
nomiques des anciens, et sur leurs ères; mémoires traduits par M. Hal-
fr»a dans la Chronologie de Ptolémée, servant de troisième volume à
sa trnduction de TAhuageste,
UexpIica»ion des ères, troisième partie du discours préliminaire, est
fort succincte; elle commence par le passage où Censo/înj en fournis*
I sant fa date de son propre livre de Dàrna^ali (an 2j8 de fère chré-
I tienne), détermine par-là toutes les dates antérieures qu'il énonce. De
Jà les éditeurs passent immédiatement à la période julienne, dont ils
Ijrecom mandent Tusage; îfs opposent à Topinion de Boivin Tautorité de
^Fétau et de Desvignofes : mais» depuis Boivin, quelques auteurs, et
particulièrement MM, Fortia d*Urban et Volney, ont pensé aussi que
|Ia période julienne devoit être remplacée par le compte des années ju-
[liennes avant Jésus-Christ; et les Bénédictins eux-mêmes n'ont pas
jugé à propos de fa faire entrer dans les tables de leur Art de vérifier
les dates de Fère chrétienne. Au fond , Scaliger Ta itnagrnée à une
.époque où l'usage de mesurer tes temps de Fhistoire ancienne par an-
nées avant Jésus-Christ ne s'éioit point encore établi» Depuis que cet
usage est devenu presque universel, il a rendu moins indispensablô
celui de ta période scaligérienne. Toutefois nous pensons avec les édi-
teurs qu'il est fort à propos de fa conserver dans les tabfes chronolo-
giques, d'abord parce quelle s'est introduite dans un très-grand nojnbre
de livres de chronologie et d^histoire, ensuite parce quelle a l'avantage
d'offrir une série unique et directe , enfin parce qu'étant le produit des
trois cycles de tp, de 28 et de i j ans, elle sert à trouver immédia-
tement, par de simples divisions, le rang que chaque année occupe
dans chacun de ces trois cycles.
Ce qui exige Pemploî ou de cette période julienne, ou de la numé-
radon par années avant Jésus- Christ, c'est Fîncertitude ou plutôt l'ab-
sence d'un point fixe servant de commencement aux annales du monde.
Les éditeurs transcrivent ici, de l'Histoire universelle des Anglais, le
tableau de cent huit opinions sur le nombre des années comprises eqtre
la création et l'ère chrétienne j Desvignoles avoit compté plus de deux
cents de ces hypothèses» Les deux calculs extrêmes donnent au monde,
avant J. C, , fun près de 70Q0 ans [6984] î Tautre» seulement 36 1 6t
lU
JOURNAL DES SAVANS,
Doin Clément s'est déterminé pour 496j» nombre qui n'avott point
éié indiqué encore ; les éditeurs avertissent qu'on trouvera les motift
de cette opinion nouvelle dans l'Abrégé chronologique de THistoire
Sainte; nous croyons devoir les indiquer dès ce moment, car ils ont
influé sur le système entier de l'ouvrage. Dom Ctément pense que^
pour le calail des temps antédiluviens, iJ faut suivre, non la version
des Septante, non le texte samaritain, mais le lexle nébreu , qui donne
1656 ans, et que, pour le second âge du monde, entre le déluge et
la vocation d'Abraham, on doit préférer au texte hébreu, comme à la
version des Septante, le texte samaritain, qui porte à 1040 ans ce
deuxième intervalle. Le total des deux âges est ainsi de 2696 ans\ et
la suite de Thistoire sacrée, jusqu'à Jésus-Chrîsf , se trouve fixée à 2269
par des observations particulières sur la chronologie des juges, des rois
et des captivités. A l'égard des deux premiers âges, dom Clément re-
produit les argumens qui ont été souvent employés contre les nombres
trop considérables énoncés dans la version grecque ; il trouve trop
foibles ceux du texte samariiaîn jusqu'au déluge ^ et ceux de l'hébreu
depuis celle catastrophe ju^qu^à la vocation d'Abraham. Nous n examî*
nerons pas jusqu'à quel point Ion peut ainsi, par de simples raisons
d^ convenance, séparer, dans un même texte, les huit premiers cha-
pitres d'un livre des huit suivans, pour déclarer ce texte altéré, quant
aux dat^'S, dans les uns; pur et intact dans les autres* Cetïe variation
est I :' : ; peut-être seroit^il permis de désirer d'en avoir quelques
jndjL j^endans des considérations qui invitent à préférer cenaîns
r.sultais.
Le reste du discours préliminaire contient, en moins de dix pages,
des notices sur les olympiades, sur les années de Rome, sur 1 ère de
Nabonassar» celle des Séleucides, de Jules-César, d'Espagne et d'Ac-
dum. Les éditeurs nous renvoient à TArt de vérifier les dates avant
Jésus-Chtist, pour tout ce qui concerne les cycles et certaines ères
anciennes, notamment, disent-ils, pour Tère de Phihppc (Aridée),
qui date de la mort d'Alexandre. Celte mort, fixée à fan *J2î avant
i rre vt^lgaire par Darthétemy et par MM. Ideirr et Champoflîon-Figeac,
est rapportée k fan J24 par la plupart des chronologfstes, dont fopi-
iMon tk été suivie \^t dom Clément. En toute hypothèse, j24 sert de
f>oint de départ il une ère philippique indiquée j^r Cetisorih, lôrsqu*il
di|t en Tannée 2)8 de n<yire ère, qii*il achève son livre en* fan 562
ée ^etle c>e Philippe Aridée, On est également convenu' de faire paï^tîf
de fnn 5 va Vei>e des S<^1eucides: c*ell*f ci est fubjct de Tu n des articles
«hi discourt p^linimaire qui nous occupe, II y est diit comme ailleurs^
FÉVRIER 1810. iij
qu'eHe s^ouvrît à loccasion des succè§ de Séleucus Nicator, et c'est ce
que répète aussi doiu Clément à la page 302 du tome second. Ce-
pendant Fréret a contesté cette origine : il n'est pas possible, disoit-U ,
que la royauté de Séleucus, qui n'est monté sur le trône qu'en 505 ,
et qui n'a été reconnu roi de Syrie qu'en 300, ait donné lieu à une
ère qui part de 3 1 2. Si nous demandons à Fréret quel autre événe-
ment en avoit pu^être l'occasion, il nous répond qu'il n'en sait rien,
«t qu'il faut ^e borner à dire que les historiens, les chronographes, les
astronomes, font usage d'une ère qui a ce point de départ.
Il nous sembîe que, sans entrer dans un trop grand nombre de discus-
sions et de détails, les éditeurs auroient pu donner plus d'étendue 2i l'ex-
plication des ères, la rendre plus précise et plus instructive, y joindre des
notions préliminaires sur les cycles égyptiens, chnldéens et grecs, peut-
être aussi un examen général ou du moins lindication des différentes
sources de la chronologie ancienne. Les Bénédictins, dans la disserta-
tion qui précède leur Art de vérifier les dates deif)uis l'ère vulgaire, ont
réuni presque tous les élémens de la chronologie deS dix-huit derniers
siècles; ils n'ont écarté que les notions qui n'auroient été applicables
qu'aux temps antérieurs, dont ils ne dévoient pas s'occuper encore; ell^
étoient naturellement réservées à ^ouvrage très-important dont on vient
d'entreprendre la publication. A la vérité, quelques-unes de ces notion;
se trouvent éparses dans certaines parties de ce recueil ; mais il y auroit eu
de l'avantage à les réunir méthodiquement dans une instruction générale.
Le discours préliminaire est suivi d*une table qui remplit cent qua-
rante-cinq pages, et qui n'est d'abord divisée qu'en sept colonnes;
période julienne, années du monde, années avant J. C, cycle de dix-
neuf ans, indiction, cycle solaire» lettres dominicales: mais le nombre
de ces colonnes s*élève jusqu'à quinze par l'adjonction successive des
olympiades > des ans de Rome, de Père de Nabonassar, de celle des Sé^
leucides, de Tère césaréenne, de celles de Jules-César, d'Espagne et
d'Actium. Quelques personnes pensent qu'on auroit pu retrancher l'indic-
tion, le cycle solaire ou de vingt-huit ans, et les lettres dominicales, at-
tendu que ces périodes, instituées après l'ère vulgaire, ne sont employées
que dans les annales du moyen âge : mais nous croyons que , puisqu'on
plaçoit dans' cette table, et même dans la première colonne, la période
de Scaliger, il étoit utile en effet d'y joindre le$ trois cycles qui en spnt
les élémens; savoir, celui de dix-neuf ans^ celui de vingt- huit, et Vh%
diction quindécennale. Quant aux, lettres doininicales , elles ne peuvent
servir ^e dans les occasions bien rares où il y auroit lieu de rechercher
les quantièmes hebdomadaires de certains évéMmens«
p' a
r
JOURNAL DES SAVANS,
Dorn Cfément ayant supposé une durée de quatre mîHe neuf cent
soixaji te* trois ans avant Tère chrétienne, la période julienne, qui ne
rcmontoit qu'à quatre mille sept cent treize, ne lui a pas suffi; il a
été obligé de recourir à une période antérieure dont il n*emj)loie que
les deux cent cinquante derniers termes, depuis 773 1 jusqu'à 7980, Il
commence donc par Tan 7751 d*une période julienne anticipée, lequel
se trouve être le premier du monde, le troisîèjne du cycle solaire, fe
dix-septième du cycle de dix-neuf ans, le sixième d'une indictîon, avec
la lettre dominicale D. Ainsi établie, la table se continue d'elle-même
par la succession directe ou rétroactive des nombres et par le renou-
vellement dts cycles. Après Tan du monde 250, dernier de la période
nnticipée, la période julienne usuelle commence avec Tan du monde 2 j 1,
471 j avant J. C. A partir de i'an ^109 de cette même période, des
astériî^ques distinguent les années sabbathiques et les années de jubilé.
On a quelquefois agité la question de savoir si Tannée jubilaire éloit
chaque cinquantième ou chaque quarante-neuvième, La table est rédigée
selon cette seconde opinion, qui est, en effet, celle de Scaliger et de
Pétau, et la plus accréditée, quoiqu'elle ait été coml>attue par Ricciolf.
Cependant dom Clément, dans TAbrégé de THisioire sainte {page jpz
du tome I ) , dit que Tannée de jubilé revenoii tous les cinquante ans,
et n'entre d'ailleurs dans aucun examen de ce point de chronologie.
A la table dont nous venons de parler succède la chronologie de»
éclipses de lune et de soleil durant les dix mille dernières années avant
notre ère. Ce travail de Pîngré, pubh'é dans le tome XLII des Mémoires
de facadémie des inscriptions et belles-lettres, est universellement
connu» On y joint ici une suite chronologique des éclipses les plus
fameuses, c'est-à-dire, de celles dont les historiens ont parlé* Cette
notice, extraite des ouvrages de Calvisius, de Pétnu , de Desvignoles,
avoit été déjà insérée dans les Tablettes chronologiques de Lenglet du
Fresnoy : les éditeurs n'y ont ajouté quun fort petit nombre de re-
marques; ils ne donnent, par exemple, aucun éclaircissement nouveau
iur I éclipse prédite par Thaïes et qui arriva pendant le combat des
Lydiens et des Mèdes, Lenglet du Fresnoy se borne à dire que c*est
Tune de celles qui eurent lieu en 607,60}, 601, ^97» 58) et 581
avant J, G, ; maïs elle a été Tobjet de quelques observations de M. de
Volney, qui la croit plus ancienne et qui la rapporte à Tannée 62 j.
Ceci rient à plusieurs questions assez graves de chronologie qui pou-
voient être, sinon résolues, du moins indiquées dans TArt de vérifier
fes dates.
Le tome L'* continue par ttie dissertation jur la forme de Tannée
FEVRIER 1820.
Î17
(ancienne; cest une analyse du sixième livre de la Chronologie de THis-
toîre sainte par Desvignoles. Le résultat seroît que Tannée étoit de
trois cent soixante- cinq fours avant le déluge ; qu'on n*a pas cessé de fa
croire telfe après cette catastrophe; que Tannée civile des Egyptiens
n'avoir pas plus d'étendue » quoique leurs astronomes calculassent sur
une année tropique de trois cent soixante-cinq jours un quart; que les
cinq fours épagoinènes au-delà de douze mois de trente fours chacun ne
furent civilement établis qu*au commencement du cycle soihiaque^ qui
s'ouvrit l'an 1 522 ou i J^J avant notre ère- Au moins, k partir de cette
époque fil devient un peu moins difficile de rechercher et de comparer
les calendriers des divers peuples de Taniiquité, et nous nous attendions
à ea trouver ici quelques tableaux. C*est un préliminaire qui n a point
été négligé dans TArt de vérifier les dates depuis Tère chrétienne, et
dont on a encore plus besoin pour les siècles antérieurs : ce n'est pas
qu'on puisse espérer, à cet égard, des résultats toujours précis et
constans ; mais il îtnporte de recueillir ceux qui méritent quelque
confiance ou du moins quelque examen.
Nous avons déjîk parlé des réflexions de do m Cfément sur les deux
premiers âges du monde; elles forment une sorte d'introduction à son
Abrégé chronologique de l'illïiuiic mainte. Cet abrégé, qui ne se termine
qu*k h page 152 du tome second, est divisé par sept époques, qui sont
la création , le déluge, la vocation d'Abraham, Tarrîvép de Jacob en
Egypte en Tannée avant J. C, 2076, la sortie d'Egypte en j64î,
Tavénement de Saul en 1080, ef la destruction du Temple en 586, Ces
dates, celles de tous les autres événemens, de tous les commencemens
et fins de judicatures, de règnes, de pontificats, sont en généra/ puisées,
pour le premier âge, dans le texte hébreu; pour le second, dans le
texte samaritain; depuis la sortie d*Egypte jusqu'à la captivité de Baby-
lone, dans Touvfage de Desvignoles; pour les derniers siècles, dans
le P. Pétau * Uaufeur n'aborde aucune question chronologique; ses
remarques et celles de ses éditeurs sont étrangères à Tordre successif
des faits : mais ce somjna! re des annales sacrées est rédigé avec soin ; il a
sur les autres abrégés de la même histoire Tavantage de dater tous les
événemens mémorables et d'offrir un système plus complet. Peut-être
les éditeurs en auroient-ils rendu Tusage plus commode, s'ils avoieni
^ajouté aux dates de dom Clément celles d'Ussérius, qui ont été em-
ployées dans un très-grand nombre de livres et auxquelles on est accou-
tumé. Les annales sacrées ont ici pour appendices, des listes chro-
nologiques des grands prêtres, des rois d'Élymaïde , de Characène , de
Comagène, deChakidène, et des gouverneurs de Syrie
H» JOURNAL DES SAVAN$.
Dans un second arficle, nous ferons connoîlre les parties de cet oo^ '
vragequi concernent Thistoire profane.
DAUNOU.
Pbojet DE BOISEMENT. DES BaSSES-Alpes , présenté û son
Exe. le Ministre Secrétaire d'étot de (intérieur , par M. P. H*
Dugîed, ex'préfei de ce dépurtemeut , chevalier de tordre royal
de la Légion d'honneur; i vol. i//*^/ de pô pages, Paris/]
de imprimerie royale, i8ip.
€«Aune époque prohablement ancienne, les terres improductives du
w département des Basses-Alpes étoient couvertes de forêts; alors la
» température de la haute Provence, ses eaux, ses vallées , dévoient être
n autres qu'elles ne sont aujourd'hui. La destruction de ces forêts a sans
j» doute été long-temps Taffàire des siècles : tant quelle a été opérée par
M eux, elle a été lente, et l'effet n'en a été senti qu'imperceptiblement, sî
i» je puis m*exprimer ainsi; c*est quand les homjnes y ont eu mis la main ,
n que le mal a fait de rapides progrè» j aub^i apprend -on , si Ion entend
•• les vieillards du pays, que, depuis trente années sur- tout, on a vu dis-
I» paroîtrepïus de champs, plus de prairies, que peut-être iJ rien avoit
w été emporté par les torrens dans le cours des dtux siècles antérieurs,
» Il est temps de remédier à cet état de choses , if est temps de recréer
M le passé; le Gouvernement y est intéressé, aussi bien que le départe*
ivment.» C*est ainsi que s'exprime l'auteur, avant de traiter les
questions qui! va examiner, et d exposer son projet. Ces questions
se réduisent à trois ; savoir : en quoi consistent les désastres qu*i( fkui
réparer, quelles en sont les causes , comment elles ont agi avec une
effroyable progression.
Dans les pays de montagnes, ce sont les vallées qui font la priiîci-
paie richesse ; celles du département des Basses- Alpes sont maintenant à
moitié privées de terre productive, si Ion en excepte la vallée deBar-
celonnette, qui en conserve encore. Les montagnes y sont presque
foutes déboisées et même ne sont point couvertes de pâturages; on ny
voit que des rochers, entre les fissures desquels se trouvent quelques
buis et genêts, qu'on arrache tous les jours pour faire des fumiers : ces
arbustes seront bientôt épuisés ; de manière que, Tagriculture n ayant plus
de moyens, la population sera forcée de quitter un sol incapable de
la nourrir.
FÉVRIER 1820. tt9
Dcur fautes énormes ont été faites, de nos jours, par des adminis-
trations ignorantes; sous le prétexte d'augmenter h masse des terres
susceptihfes de donner des récoltes, on a encouragé les défricheniens et
lesdesséchemens, sans en excepter les localités où de telles opérations
sont pfus nuisibles que profitables. Nous ne parlerons pas ici de des-
séchemens, mais seulement de défrichemens, qui sont les causes de la
déplorable situation des montagnes. Le premier mal est la deMructioa
des bois : les arbres qui éioienl sur ces lieux élevés , aîtiroient et
retenoient les nuages» qui sy dissipoient en rosées; Teau qu'ils conte-
noient, ainsi échappée, pénétroit dans la terre pour former les sources^
qui s'entre tenoient perpétuellement : maintenant il se passe plusieurs
mois, des années quelquefois , sans qu'il tombe de la pluie sur les Alpes;
s'il en tombe, c'est par orages, toujours plus chargés deau sur les mon-
tagnes que dans les plaines, d'où naissent des torrens dévastateurs, La
terre ensuite ♦ remuée par les cultures, na pu résister aux efforts de cette
puissance, qui fa entraînée plus facilement que n'auroient fait des pluies
ordinaires; on le conçoit sans pefne, la plupart de ces montagnes étant
hiclinées à l'horizon de soixante-cinq , soixante-dix ou soixante-quinze
degrés*
M. Dugred annonce qu'il faudra un demi-siècle pour réparer le
mal; peut-être même» et probablement, en employant les moyens qu'il
indique, ce terme ne suffira pas ; mais il croit que ce motif ne doit pas
empêcher ladoption et I exécution de son projet. En effet» ceux qui
administrent bien les empires , ne refusent pas de travailler pour les jouis^
sances de la postérité.
« Que Ion ne s'imagine pas, dit-iK que le département des Basses-
la» Alpes recueillera seul les fruits de Topt ration ; les trois département
► fur/nés de rancienne Provence y participeront presque également:
' ceci pourroit surprendre au premier coup-dœil; mais, si Ion considère
a» rinfluen.ce que le vaste platôau des Alpes, avec ses hauts sommets,
» ses profondes vallées , ses neiges et ses glaces éternelles, doit exercer
w sur Taimosphère, à une distance qu'il nest pas donné aux hommes
» de calcufer, on sera persuadé quiîne partie de la France subit cette
influence. C'est sajis doute au déboisement des derniers gradins de ce
1 3» plateau » du côté de la Provence, que cette contrée si renommée, si
'a> riche, doit d'avoir vu ses oUviers , ses fruits à noyau, et sur-tout ses
» amandiers , geler depuis vingt cinq à trente ans. Peut-être aussi, ces
» vents inconnus, ces tardives gelées i qui ont désolé les vignobles de
» la Franche- Con» lé /de la Bourgogne et d'autres provinces, depuis le
» même temps, doivent-ils être attriljués à la même cause»»
110 - JOURNAL DES SAVANS»
Cauteur ne se dissimule pas que la réparation qu'il conseille ne soît
très-coûteuse; mais if se rassure en disaqt que ce que le Gouvernement
dépenseroitdtm côté, Tagricultiire le gagneroil d'un autre au centuple.
Sans doute Tagricufiure gagneroit, c'est-à-dire, la masse des productions^
augmenieroitde tout ce quon reiireroitde ces terrains, arides auparavani.
Le Couvernement , sous le rapport financier, accroîtroît son revenu par
les contributions de cesn&vaits; il nous semble qu'il plnceroîi ainsi des
fonds à un bon intérêt, qu'il favoriseroit la population en créant plus
de subsistances* Et pourquoi ne prendroit-if pas au reboisement des
montagnes le même intérêt qu'il a pris à fa fixation des dunes de la
GascogneL On sait que, par Teftet des vents, ces dunes se déplacent
insensiblement, de manière à envahir peu à peu une assez grande étendue
de pays* Un plan pour en arrêter les progrès a été proposé par
M. Bremoniier, qui en a commencé avec succès l'exécution; ce plan
consiste à semer des graines d*arbres, de pins maritimes sur- tout, afin
que leurs racines retiennent les sables mouvans: Hmmensîté du travail
na pas effrayé; chaque année des fonds sont employés à cet objet.
Pour prévenir la dépopulation delà partie haute du département des
Basses- Alpes, et lui rendre son ancienne prospérité, fauteur indique
trois mesures, qui doivent concourir ensemble ; savoir; i ,* d^empêcher
tout nouveau défrichement sur le penchant des montagnes, et de redonner
aux terres déji réunies leur adhérence primitive; !•* de boiser le sommet
et les flancs des montagnes; j.** d encaisser les torrens, en les contenant
par des digues. Il traite de ces trois mesures dans autant de chapitres;
i( cite une expérience qui fait voir que ! on pourroit compter sur leffet de
la première. Le boisement des sommets des montagnes et de leurs
flancs, qui quelquefois sont abrupts, c'est-à-dire, escarpés, est sans
doute difficile, parce qirils sont dépourvus de terre végétale , ainsi que
Ja plupart des landes , où Ion parvient avec le temps à en former,
comme on fe voit dans certaijis cantons du Brabant et de ta Brefagne. Il
y a des espèces d arbres et d arbrissaux qui croissent dans les fentes
•mêmes des rochers à nu, « La longueur du temps ne doit poîni faire
*» repousser celte idée , un demi^siécle peut élever une forêt; il n'a fallu
#j qu'une graine apportée par le vent, quelquefois par un oiseau, pour
»• opérer celte heureuse métamorphose. Qu est-il arrivé! La semence a
»• germé, et la jeune pîante s est engraissée de ses propres débris. De
» même une forêt, après avoir vécu par ses feuilles quand elle eu
»étoit parée, sVn nourrit encore lorsqu'elles sont tombées à ses pieds,»
M. Dugied conseille d'abord de semer les terrains qui peuvent pro-
duire davantage: des ho^^ on passera aux médiocres, et de ceux-ci aux
FEVRIER kBio. ^^ 121
hfiauvaîs. Caîculaiu ensuite ce qu'il y en a rfîmproductifi dans le départe-
ment, if ntn supposçque cent cinquante mille hectares, dont il voudroii
qu'on ensemençât en bois deux à trois mille par chaque année* Les
principaux obstacles qu'éprouvera lopération, selon Fauteur, naîtront
de (a division des propriétés, du peu de contributions que paient
actuellement les friches, et du foible profit qu*on croira retirer de leur
wiise en valeur : il s'attache à détruire ou à atténuer ces obstacles, en
disant d*abord qu'il ncn est pas des terres incultes comme de celles qui
sont cultivées; les premières sont moins divisées; il n'est pas rare de voir
une montagne entière appartenir à un seuf particulier* L'augmentauon
de f impôt, dans son système, n'excédera pas cinquante centimes par
hectare ;fe bois qur croîtra, n*eût-tf aucun prix comme bots , en aura
toujours comme parcours , ce qui dédommagera bien amplement; enfin
le bois est cher dans le département, et Ion trouvera moyen de tirer parti
de celui qui aura été semé ; rindusirie, à laquelle on peut s en rapporter ,
saura l'exiraire brut ou iravaitlé ; d'ailleurs on ne propose pas d en couvrir
les parties trop élevées ou dont les accès sont trop difficiles. M, Dugied
voudroît que, pour faciliter ce genre d*amélioration, le gouvernement
donnât des primes; qu'il fournît les graines des arbres qui conviennent
au sol et à la température; qu'if exemptât de contributions, pendant un
certain nombre d'années, les terrains ensemencés, et qujis fussent confiés
tl recommandés à la garde des ageas forestiers*
L'encaissement des torrens ne paroît devoir commencer, d'après
M. Dugied j que quinze à vingt ans après l'existence des nouvelles
forêts, époque où les montagnes auront recouvré toute l'attraction dei
nuages dont elles jouissoient avant le déboisement. Celte suspension
n^enipêche pas qu'on ne s'occupe des digues qui paroîtroient nécessaires:
Tauieur entre dans quelques détails sur fa manière de les construire, sur
la rapidité avec laquelle se tforment les attérissemens. Pour citer un
exemple des avantages qu'on obtiendroit de certaines ^/^fj, il indique
ceux quon retireroit, si l'on pouvoit contenir la Durance entre Sîsteron
et Mirabeau; ce travail rendroit à l'agriculture dix miflions de toises
carrées , avec une dépense de quatre à cinq millions.
La partie fa plus déficate à traiter du projet, est celle qui concerne
les moyens pécuniaires d'exécution; M. Dugied sent bien qu'if fau-
droît des sommes considérables; mais il croit qu'on y subviendroît, si
les communes environnantes y contrîbuoîent ensemble pour une moîtié,
et le Gouvernement pour lautre, k titre d'avances. Il voudroît que
tout le travail de pfusieurs vaflées , ou au moins de toute une vallée ^ fiit ,
fait en une campagne , afin que les ouvrages inférieurs, s'appuyant sur les
^A^ai JOURN^AL DES SAVANS,
[^upcrieurs , ne risquassent point d'être tournés. Afin de donner un aperçu
de la dépense, il prend une vallée de cinq fieucs, et suppose qu'un
I dixième, ou trois mille mètres, des digues à faire, sera construit en
pierres; six dixièmes* ou dix-huit mille mètres, en gat ions et fascines;
trots dixièmes, ouneuf mïUe mètrfs,en plantations: la portion h payer
[f>ar le Gouvernement, dans l'hyputhêse qu'il fournira la moitié, sera
[fie deux cent soix-inte-un mille francs* Si Ion travaiKoit cinq vallées à la-
[fois , la dépense seroît quiiuujile. 11 a dû établir un terme moyen pour
^s évaluations ï car it y a ïelle vallée qui exigeroic beaucoup et telle
lire moins de travaux à faire. Malgré Tapparence d'exactitude dans les
ht nous nous garderions bien de les garantir; dans des entreprises
if vastes, il y a tant d'obstacles imprévus, tant d'événemens qui
frangent les combinaisons, qu'on ne peut rien statuer de positif.
L'utilité de Topération proposée n'est pas douteuse on connoît Ie$
bons effets des digues le long d'une partie de tios grandes rivières; celle
qui défrnd contre Jfs inondations de la Loire rn pays très-éttndu, est un
bel exemple, qui peut être imiié, soit en grand, soit en petit
M. Dugied n*eùt rempli quîmparfaitement sa tâche, s*ii n*avoit fait
entendre comment le département des Basses- Alpes pourroit remfjourser
les avances du Gouvernement . qui seroit venu à son aide; c'est à quoi il
s'attache dans le dernier chapitre. I( croit trouver ce remboursement dans
l'augmeniaiion de contributions dont seroient susceptibles les terrains
améliorés, et daJis le partage ou La vente de la moitié des attérisseniens.
Des tableaux placés i la fin de fouvrage présentent les avat>ces à
faire par le Goiwernement pour favoriser les travaux , et le nombre
4*annces qu exigeroit Tamortissement de ces avances.
Ce projet nous paroît très-intéressant: il seroit à désirer pour le bien
de la Provence, qu il pût être exécuté ; on doit savoir gré à fauteur d'en
avoir conçu l'idée*
TESSIER.
NOUVELLES LITTÉRAIRES.
INSTITUT ROYAL DE FRANCE,
UACADÉMIt des inicriptîon^ et belles^ciires a clu M. (fHauterîvf à fa
place d'académicien libre, vacarnc par (e décès de M. Fauns de Saint-Vincen**
Uacadémîe des sciences a perdu Vwn de ses ' v. M* Pal!sôt*dc Beau*
vbh, aux futic railles duquel M. de Jijssiciî a prc !e 22 janvier ,Ir discowTS
suivant ; « Lorsqu'un homme Citiauble^ qui a rcnd^i d«5 sçrvicei dans quelc^ues
i-;.
FÉVRIER 1820. — - t2>
» parties des connoissances humaines, succombe au milieu de «es utiles occu-
«patrons, son éloge doit consister dans Texposé fidèle des travaux auxquels II
»#^s'est fîvré pendant le cours d*une vie active, et ce simple exposé suffit pour faire
* mieux senrir sa perte. M* Paiisot, baron de Beauvots, don! ia mon excite au-
>' jourd'huj nos regrets, s*csl distingue depuis long-temps par des recherches
«suivies et%iuhipliées sur les vt?gétaux de diverses familles et sur quelques
>» classes d'animaux. Pourvu, avant la révolution, d*une charge de recevei'ir
«général des domaines, iï îrouvoit le temps de satisfaire son goût particulier en
»» faisant des obsen-^aiions sur l'organisation des plantes dont la frucnfication est
»»peu connue, observations qu'il consigna dans plusieurs mémoires estimés. Pat
» lutte de cette passion pour la science, lorsque sa place fut supprimée avec
« toutes celles du même ordre, laissant à d*autres le soin de surveiller ses intérêts
« financiers, il profita d'une occasion pour passer en Afrique, dans le royaume
»d'Oware, voisin du Bénin, qui jusqu'alors n'a voiijé té visité par aucun naru*
>* ralisie. Jl ne fut point arrêté dans ce lieu par les dangers inéviiables d'un climat
^ chaud et humide, funeste â beaucoup de ses compagnons de voyage ; et il put y
«rassemblera ia hiice une grande quantité de planies et d'insectes, qu'il eut le
>ï bonheur de faire parvenir en Europe, Mais bientôt, accablé de fatigues et
>' respirant un mauvais air sur un rivage fangeux, il tomba malade à son tour,
»et ne dut son salut qu'à une prompte fuite, en s'embarquant sur un vaisseau
«destiné pour Saint-Domingue. Reçu avec distinction dans cette colonie, et
«admis même dans son conseil, il profita de quelque temps de calme pour
ïj parcourir le territoire voisin et faire de nouvelles colkctîons. Les troubles
ï> survenus dans Tîte forcèrent les liibitans de solliciter les secours des Etats-
Si Unis, et AI. deBeauvois fut choisi pour cette mission honorable, qui n'eut
»pas tout le succès qu'on espcroit. Il ne revint à Saini-Domingueque pour être
3> témoin du complément d'une révolution qui le força à repartir sur-le-champ ^
jîSans pouvoir même emporter ses collections, qui furent perdues pour lui.
» Revenu à Philadelphie, privé de toiu secours, ne pouvant en recevoir de
» France > où ses biens étoieni à-peu-prés séquestrés a cause de son absence^ il
ï» ne put subsister dans ce lieu quVn mettant a profit quelques talens acquis pour
i>sa simple satisfaction. Cependant, avec ses folbles moyens, et un peu secondé
«par l'ambassadeur de France, il put faire quelques excursions qui lui pro-
^j curèrent de nouvelles récoltes en plantes et animaux; et il les rapporta en
>3 Europe. A peine rentré dans sa patrie, quoique détourné par des démarches
a* indispensables pour rentrer en possession de ses biens, il entreprit cependant
« de donner la Flore d'Oware, et de faire connoître les insectes du même pays.
«Ces deux ouvrages, publiés en grand format, avec des planches coloriées,
3> sont déjà très-avancés. Il s*occupoil, en même temps, d'autres recherches
ïï sur différentes familles de plantes, sur lesqTieïîes il a publié des ouvrages pat^
« liculïers , estimés des naturalistes. Beaucoup d'autres matériaux étoient encore
* rassemblés pour de nouvelles publications; car tout son temps étoit consacré
li aux recherches d'histoire naturelle. Ses premiers essais avoient été accueillis
w par l'ancienne académie, et les plus récens ont été appréciés par l'institut, qui
«Tavoit admis au nombre de ses membres. Ayant été l'ami de M. de Beativois,
»son correspondant, !c dépositaire de se$ collections en son abs^ence , le témoin
» de ses travaux avant son voyage et depuis son retour, j'ai dû réunir ici les
«princïpaujt titres qui doivent rappeler >ur lui des souvenirs honorables. Toils
Q i
1^4 JOURNAL DES SAVANS,
«ceux qui Tont connu diront combien son commerce fut sûr et agréable-
>' Penonne ne fut plus ferme dans ses affections* Sa mémoire sera loujour»
«chère à les confrères, à s^s amis, ainsi qu*â Tépouse sensible qui lui furviti
>* Cl dont*iI sVtudioit constamment a faire le bonheur, «
LIVRES NOUVEAUX.
FRANCE.
Suf^plément au Clossairt de la langue romane, contenant réfymoîogte et la
signification des mots dans l'ancienne langue d» s Fran^jais; par J, B. de
Koqucfort (avec une dissertation sur le g^nie de la langue française par M. Auguis,
et un mémoire sur l'origine des Fran^^Mis), Paris, imjvr, de Dupont, chez
Chaîsériau et Hécart , 1^20, in-8/, 2J feuilles 1/4. Prix, 7 fr, , et papier vélin ,
14 fr. rzCe supplément sert de tome 111 au Glossaire de M. de Roquefort,
publié en i8otf*
Le Théâtre des Grecs par le P. Brurnoy , seconde (troisième J édition, revae^
corrigée et augmentée cie fragmens de poètes grecs tragic|ues et comiques , par
M. Raoul-Rocheite; i y vol. in-S." Paris, veuve Cussac. Ceïte édition, ornée
de gravures, parohra en 18 livraisons, 3 de gravures, et 15 de texte. Prix,
J fr. par livraison, 10 fr, carré vélin; 1 j fr» grand raisin veitn. On souscrit
en payant d'avance une livraison.
Théâtre des Latins, textes, et traductions françaises de Plaute, par M, J. B.
Levée; de Térence, par Lemonnier; de Sénéqtie, par Coupé; avec des disser-
tations et observations critiques, par MM. Amaury Duval et Alex» Duvalp
membres de rinstit-it, 14 vol. w-8,* i savoir: Plaute, 8 vol.; Térence, 3 vol,;
Sénéque, 2 vol ; frai^niens d'Ennius, de Pacuvius , &c., i vol. On souscrit cher
Chassénau , au dépôt bibliographique, rue de Choiseul, n.* 3; et chez
MM. Treutrel er Wurtz. Prix, 6 fr, yo cent, par volume; et pour les non-sous^
cripteurs, 7 (r. 70 cent.
Clù\f'ts t tragédie en cinq actes» par M. Népomucéne Lemercîer, de rfnstîtut;
précédée de considérerions histpriques. Paris, Baudouin frères, 1820, in-S** ,
xlvij et 99 pages. Prix , 2 fr. yo cent*
Anmbiil, tragédieen trois actes, parM. Firmin Didot; suivie de notes. Paris,
Firm. Didot, 1820, vij et 94 P^g^^*» ( Voy*^ Journal des Savans août 1817,
page 476-484 }•
Les Comt'diens , comédie en cinq actes et en vers, précédée d'un prologue
(o prose , par M. Casimir de Lavigne; rrpréseniée sur le second théâtre français.
Je 6 janvier 1820, Paris, imprimerie de Fain; chez Barba; i/r-^/^ 5 feuilles,
a fr. 50 cent.; et en papier vélin, y fr,
Œuvres de lord Byrûn ,\t^A\x\its de l'anglais. Paris, imprimerie de Ladvocab
6 vol. ittii, 30 fr. =^ Le texte anglais de ces mêmes (Euvrcs a été aussi publié
à Paris, chez Galignani, rue Vivienne; 6 vol m-/2,
(70) Lettres inédifes de Boisuet. Versailles, Le Bel; et à Paris, chez Iç
Normant, PiU»*t , Brunot-Labbe, <5cc* in-B.^ 4 feuilles : i fr. %o cent.
Été mens méthodiques de géographie, disposés d'après un ordre nouveau; par
J.Ch. Baiileul, ancien député. Paris, Ant. Baiileul, i8^u:), m-j2^ 14 ^^tiilles j/4
rt une carte*
Vojf^ige phtoresfue de Cûnstûmincple et des rives du Bosphore, d'après Ici
FÉVRIER 1820.
I2J
dessins de M- Melling» architecte de l*eo)pereiir Sélim 111, et dessinateur de
la siiitane Hadidgé, sa sœur; publié par MM. Trtruiiel et Wiirtz; treizième
et dernière livraison^ in-folio de 9 feuilles, plus > planches ; imprimerie de
P. Didot aine; à Paris, cht-z les cditcurf. Prix, pour les souscripteurs, 100 fr;
pour les ^on•^ousc^tpleu^s, 120 fr.; figures avant la lettre, 150 fr. Cette
derniértf livrcjîson contient le titre » avec le chiflie de Stliia III, imprime en or,
— Préface des éditeurs; — Description du plan de Constannnopie; — Des-
cription de la carte topographique du Bosphore; — Dcîkcrïpnon du plan
indicatif des vues qui composent Touvrage, avec ia table gén. H. île des planches,
Lc5 cinq planches sont : 1 , Titre gravé pour Ja colleciion des planches; 11, le
Porrriiii de Sétim 111 ; II i, PUn de Constaniinople et de ses faubourgs; IV,
Carte lopographique du Bosphore; V, Plan indicatif des vues qiû composent le
Voyage de Cunstantinople et des rives du Bosphore. Avec cette livraison, se
distribue une feuille /Vr-4,* contenant une li^te provisoire de MM» Jessouscrip*
leurs, au nombre d'environ deux cent quatre-vingts. La souscription reste ouverte
jusqu'au 29 février :8ao. Les souscripïeors en retard sont inviicà â retirer leurs
livraisons avant cette époque, passé laqu&lle îl en st^ra dispo5é« et ils n*auront
plus la faculté de se compléter. Dans le courant de mars 1820, sera publiée la
liste définitive des souscripteurs, sort nouveaux, st)ii anciens, qui auront retiré
tt>utes les livraisons. 11 existe quelques exemplaires de la collection des eaux
fortes des quarante-huit vues pittoresques de M. Mt^lling* Un seul exemplaire
du texte de Touvrage a été tiré sur vélin d'Angslxïurg. 1= L'ouvrage entier
forme deux voL gr. in-foi. atlantique, Tun de texte, l'autre de planches. Prix
de souscription, i 300 fr.; et fig. avant la lettre, 1950 fr,
Voyagt dans l*intérteur de V Afrique, aux sources du Sénégal et de la Gambie,
fait en 18 1 8 par G. Moîlien ; avec cartes et vues dessinées et gravées par
AmbrojseTardieu. Paris, imprimerie de M.*"*^ Courcier; chez Amhroise Tar-
dieu, Mongie, Bossange, &c. î 2 voK in-S,* ^ 12 fr. Le second volume est ter*
miné par un mémoire de 4(1, tyriés sur les découvertes lecenus dans fin'
teneur de l*Afriqae. ^
Ai émoi f€ pour servir à um nouvelle histoire de Louis XI t , le père du peuple
(par M. R.). Paris, Firmin Didot, Mongie et Delaunay, 1819, i/i-/,%
442 pages.
Situation de la France, par J, Ch, Barlleul, ancien député. Les trois pre*
miers cahiers, formant 2H8 pages m-^/^ chez Ant, BaiiïeuL Prix de ces trois
cahiers et des deux qui doivent suivre, 6 fr.; cl par la poste, 7 fr* jo cent,
Notices historiques , statistiques et littcraires sur la vdle de Strasbourg, par'
J. Fréd* Hermann, Strasbourg, Levrault, 1819, 2 voL i/î-i?/
De la Corse j et des mofurs de ses habituas j par M. Ag^^stinû Paris, Dufart,
1819, in-S.*
Exposé des faits qui oni précédé et suivi la cession de Parga , ouvrage écrit
en grec par un Parganioie, et traduit en français par un de ses compatriotes;
publié par Al, Amaury Duva) , membre de rlnstiiut. Pari.*, imprimerie de
Pupont, au dépôt bibliographique, rue de de Choiseul, n.** 3 , et chez Brissot-
Thivars, cher Corréard, 1820, in-S." , 7J pages: 2 fr. jo cent.
Des ProscriptiotfS ; par M, Bignon, Livres II et îll, pag. r 29-390, ter-
mînani le premier volume. Pari^: , imprimerie de Dupont, tibraiiit; de Brissgl-
Thivars^ i8ao, in S,'
ti6
JOUHNAL DES SAVANS,
Procli philosophi Ptatonkf Optra ,* è codd. mss, Biblioih. régime Parisif nui
fiunc pHmiim eoidit^ lectianis vanetate, vcrstone latinâ, commentaTils illiis*
tra\ h Victor Couiîin , protcssor philosophiae in academia Farisiensi, Tomuf
primL*5, contincns tria opuscula , de libertate, providentia et mala. Pariiiis,
Eherharf, idiOt in-S.*, 2j Feuilles 3/4.
Éléimns d*êcononik politique , suivis de quelques \Mt% sur rapplicaiion des
pnntîpes de cette science aux règles adminisiraiives (par M. d'Uatitcrive);
Paris, Fantiti, in^S,*
a apport du jury centrul sur tes p réduits dt l'industrie française ; rédige par
M. L. Cosiaz. Paris, imprimerie royale, 1819, in-S/, xxiv et 492 pages.
Anna /es du Ai usée et d*' ri^cole moderne des teaux-arts ^ salon de 1819; par
C. P. Landcrn. Cinquième livraison, pages 81-96, avec les planches n^** 49"^^»
in-S*' Quni de Contî, n,** 5, — La sijtiénie livraison vient de parohre.
An maire de l'école françat se dt peinture j 00 fetcres sur le salon de 1 8 r 9, par
M» Kerairy, avec cinq eiiampes en taiile-douce, d'après les tableaux de
AIM* Girod et. Hersent, Picot, Horace Vernet, Wateleî , et sur les dessin*
Ibumis parles mêmes auteurs, gravés par MM. S. Massard et A. Leclerc. Paris,
impr, de Baudouin, chez Maradan, 1819, /w-/2^ la feuilles 1/6:5 ^^*
Alénwire sur la nature des maladies endémiques à Carthagènc et dans le midi de
l'Espagne^ et particulièrement sur lafihre jaune; par M. Mimault. Paris» J. J.
Blaire, quai des Augustins, n,** 6j , in-S'*", 1 fr» 50 cent,, et 1 tr. 75 cent* par
la poste*
Théorie du mestnérisme. A Parb ,impr. de M."** Agasse, chez Chaumerot, an
Palais- royal, galerie de bois, et rue Saint-Dominique, n.*» 4$ » in-^/, 148 pages*
Prix , ^ fr-, et par la poste, 3 fr* 50 cent.
Notices hisîorif/ues j critiques et bibliographiques sur plusieurs livres de juris-*
prudence française , remarquables par leur antiquité ou leur ongîoalité, pour
faire suite à la Bibliothèque choisie dcf livres de d^^it; par M. Du pin » avocat*
Paris, Warée oncle, 1820, inS,*^ 88 pages. ^
Programme du cours de droit public , positif et etdmlmstratif, à la faculté de
droit de Paris , pour Vannée iSi^^i 820 i par M. le baron de Gérando, conseiller
dVtai, membre de Tlnstitut, professeur à la taculté de droit de Paris, (3cc,
Paris, Baudouin frères, in^S." , 66 pages, avec un tableau synoptique des
matières du droit public ei administratif français, rédigé par M* Épailly.
Délimitation de Jésus*Cfirist / traduction nouvelle (par M. Gcnce), faite
d'après une édition latine revue sur lestextes les plus authentiques, et principale-.
ment sur le plus ancien manuscrit de l'Imitation, en quatre livres, inédit, et
conservé à la Bibliothèque du Koi; édition stéréotype d Herhan ; chez Treuitrl
et WïKt7_, à Paris, Strasbourg et Londres, 1820, m-/2, 2, xiv et 4'^ P^Sc»» f
compris la table des matières : 2 fr. , et papier vélin, 4 *r*
L*luûtation de Jésus-Christ i traduction de M, Genoude, augmentée d'une
préface et de réWeAions par M. l'abbé de la Mennais^ Paris, imprimerie de
Didoi aine, 1820, in-ji, 9 feoîlles. •
Thmwit à Kempis de Imitatione Chrfsti libri IV, nova ediiio, emendans-,
fima, 5cc. Avenione, Seguin, 1820, in*jâ, J feuilles 1/2: J fr, — in-j2, av^c
t*ne tradnctron frtn^ai^c, 8 feuilles î 2 fr,
AJémoires delà société royale d'Arras pour lUticouragemtttt dt9 uîcncti , du
FÉVRIER 1820. 127
lettres et des arts. Torat II; première et seconde livraisons. Arras, im^prfmerie
de Bosquet, librairie de Topino, in-S.', 70 page». On souscrit, à raison dte
iz francs pour douze livraisons^ chezEymery ei le Normant, à Paris. •
Archives de la littérature et des arts; par MM. Quatremére de Quincy,
Vandtrbourg, Raoul- Rochctte, de Feletz, Ch. Nodier, O'Mahony , Ancelot,
Destains, Cohen, &c. Paris , janvier 1820, première livraison, in^S," , 48 pages.
On souscrit, rue du Hasard^Richelieu , n.*^ 15, à raison de 10 fr. pour 9 livrai*
sons; de 19 fr. pour 18 ; de 37 pour 36. II doit paroitre 9 livraisons ou numéros
par trimestre : chaque numéro séparé ( 48 pages ) coûtera i fr. 50 cent, aux non*
JOUScripcetirs* La seconde et la troisième livraison viennent d'être publiées.
PAYS-BAS.
E. J. C, Reuvensj Oratio deLaudîbus archœologiœ. Logduni- Batavorum",
Luchtmans,/n-^/
Aîengel-en TooneUpo'é^ ; Poésies mêlées etvièces de théâtre de S. Ips. Wiselius.
Amsterdam, Garteman et Vanderhey, 3 vol. i/i-A*
ITALIE.
Délia gente Arria e di un nuovo denaro di Marco Arrîo seconcfo, disserta*
ziooe di Bartolomeo Borghesi , pubblicata dal dottore Giov. Labus. MiJanOj
Pîrotta, rw-A", xvj et 1 16 pages.
M. Marsând, professeur a Padoue, annonce une édition nouvelle des poésies
de Pétrarque. Le texte sera revu sur des manuscrits et sur les meilleures éditions.
On y joindra des sommaires^ des notes historiques et critiques , des mémoires
sur la vie de Pétrarque, une notice de toutes les éditions et traductions de tes
poésies, les portraits de Pétrarque et de Lapre> des vues et autres gravures , un
Jacsimile de la note écrite de la main de Pétrarque sur le manuscrit de Virgile
de la bibliothèque ambrosienne; 2 vol. in-^.", qui ne seront tirés qu'à 450
exemplaires, tous sur papier vélin. Prix, i 50 livres d'Italie. L'ouvrage paroitr4
au mois d avril prochain. = On peut s'adresser, pour se le procurer ^ à
MM. De Bure ùères, à Paris.
ANGLETERRE.
Traduction anglaise, des Commentaires df Proclin sur le Timêe de Platorh
<c Proposais for printing by subscription, in two volumes royal quarto, the
a> Cpmmentaries of Proçlus on the Tiraaeus of Plato , translatée! from the
a>greek by Thomas Taylor. In the translation of this admirable work , whicH
a> is most deservedly intitled A Treasu^ of ail ancient philosoph/, upwards
y* of cleven hundred ntcessary emendations of the text will be given by the
a> translator. 250 copies only will be printed. Price to subscribers» five
» guîneas; 10 non-su bscriptprs the price will be raised. Subscribers' names will
«bereceivedby the translator, n.* 9, Manor Place, W^Iworthj and at Mr. Val-
»py'$, Tooke's Court, Chancery Lane, London.»
ALLEMAGNE.
Commentatio ad historiam religionum veterum illustrandam vertinens , de
Doctrina Cr.ostica, Scripsit £rn, Ant. Lcwald, D. phil. HeidelLcrgae, 18x8,
in- S.'
12» » — "- JOURNA.L DES SWANS.
HùViJi physiœ j coiitctae ex symbolis vîrorum doctorum Linl»iî, Rndolpliî
et alïorum; cé\ ciifavit Nccs ah Esenbeck. Bocîiaî, Marcus, 1819, in-8**,
cum tabulb aeneis 28*
Suppft'tnente zu liem chemtsclten Wortembuchi, dfc, $ Supplément au Dtc^
tionnaire chimique de MM* H. Klaproth et Fr. Wolfj lome 1 V^ ( T -Z), av^c
une lablc des matières pour les neuf voUimes. Berlin, Voss, 1819 , mr^»"^ fig.
CliiuJu Gûleni Je opùmo dôcendt génère UMlus grt^d et latine; cura Câroli
Cot[L Ktihnji. Lipsiae; Fleischer, 1819, în-S." CVsi un spécimen d*une nou-
velle édition des médecins grecs, entreprise par M* Kiihn, et qiir contiendra
les textes avec les variantes, tes versions latines corrigées, et des noies choisies.
Blblwtheca medkwœ publkoe , in qua scripta ad medicinam forensera et
politicâm facientiaV ab iltarum scieniiarum initiis ad nostra usque tempor*
digesta sunt a F. L. Wildberg. BeroUni, Flitiner, 1819, X vol. in-^." : z rxd*
Af. H. E, Meieri Hhtlriœ Jurîs attici de bonis damnatorum lïbrl duo*
Bcrolini^ Mayer, 1B19, i/i-&"^ 260 pages: 6 fr.
Nota . On peut s'adresser à la librairie de MAI, Treuttel et Wilrtz , à Paris ,
n/e dit Bourbon^ n.* tj ; à Strasbourg, rue des Serruriers; et à Londres, nf jo^
Soho-Stjuare , pour se procurer les divers ouvrages annoncés dans le Journal des
Savans. Il faut affranchir les lettres et le prix présumé des ouvrages*
TABLE.
Sekcta ex Historia ffalebi è codîce arabica Bibliothecœ regiœ Pari-
siensis edidit, ifc» G. W. Freytag, {Article de Aî, Siivestre de
Sacy. ) Pag. 67.
Afétnoire sur les ouvrages de sculpture nui appartenoiênt au Parthénoru
{ Article de Al, Qtintreniére de QwH^cy. ),...... 77»
Lettres écrites de Londres À Borne , et adressées à M, Canova, sur
les Af arbres d*tlgin , par M* Quatremère de Qulncy* [Article de
Af, Letronne. ) 87^
Eusfbii Pamphiit Cœsariensis episcopi Chronicon bipartitum, nunc
primitm ex armeniaco textu in laiinum conversum, adnotationibus
au et u m , grœcis fragment is exornatum , overâ P, Joannis'Baptistm
Aucher, (Artide de M* Saint-Martin. ) , 97.
L'An de vérifier les dates des faits historiques avant l'ère cltrf*
tienne, ^par le moyen d'une table chronologique , i^c*; par dom
Clément, [Article de M. Daunou* ) , . . . . lia.
Pro^tt de boisement dti Basses- Alpes , présenté à sort Exe, le winistn
de l'intérieur , pjr M, P, //. Dugied, {Article de Ai. Tessier). llR#
filouvtlUs lideraires t i ^^t
FIN DE LA TAJILE.
A PARIS,
DE L'IMPRIMERIE ROYALE.
Le prix de rabonnement au Journal des Savans est de 36 francs par an,
et de 40 fr. par la poste, hors de Piiris. On s'abonne chez MM. Treuttel et
Wurt^, à Paru, rue de Bourbon, n/ t^f à Strasbourg, rue des Serruriers, txh
Londres, n.' jo Soho-Square. JI faut affiranchir les lettres et l'argent.
Tout ce ijuipeuts-CMifriieP lés^ émotttesa insérer âéns ce Journal,
lettres , avis, mémoifês r li*f^s nùuvéotx, &c. doH être adressé,
FRANC DE PORT, 00 lm9êâû ^ Joutmtdes Sàf^atUfà Faris, rue
de Ménil-montrat, hJ^ iu
■■■■■■ ■ l-l Ml. ■ ■ .,1% Il ■■ ■ > i'*X
JOURNAL
DES SAVANS.
MARS 1820.
Codex Nasar^eus , Liber Adaaii appellatus , syriacê
transcriptiis , loco vocalium , uhi vicem lilterarum gutturalium
gerunt, fus substHuiis, laîinèque redJitus, a Mat th. Norberg,
SSé Theoi, dùcî. Ihjg. orienL et grmœ hng* professore, &c^
Londini Goihorum ; tom. I, 1815, 330 pag. in-^*;
toiTi, II, 181 6, 320 pag.; tom. III, 1816, 320 pag.
Lixidion Codicis NiUéirai^cui Dber Adami nomen ,ediJii Mat th.
Norberg, &c, Land. Goth< 18 16, 274 pag. //j-^/
Onomûstkon Codicis Nasûtai , cui Liber Adami fwmen , edidit
Matth. Norberg, ^f. Lond. Goth, 1817, 1 64 pag. in-^/
TROISIÈME EXTRAIT-
1 OUR faire connoiire systématiquement et dans tout son ensemble la
R 2
1
i
JOURNAL DES SAVANS,
îoctrîne des Chrériens de S. Jean, li ne suffiroit pas d'avoir une con-
Soissmce certaine et complète de leur langue, et d'avoir étudié atten-
lîvemeai et ies relations des voyageurs, et le Livre d'Adam; ii fau-
droit encore avoir lu et comparé avec ce livre tout ce que nous pos*
sédoiis d'ouvrages appartenant à leur secte ; enfin il seroii bon d avoir
comparé les résultats de cène étude avec ce que Thistoire nous a con-
servé relativement aux différentes sectes des Gnostîques et aux Mani-
chéens, et avec les irnvaux des savans qui ont iait une étude critique
de ce> documens historiques et se sont efforcés de jeter du jour sur
rorigine de ces sectes, sur leurs dogmes, leurs pratiques et les rap-
ports qu'elfes ont entre elles. Ne connoissant encore que très-impar-
faitement le langage dans lequel sont écrils les livres des Sabéens , et
ne remplissant pas, comme il le faudroit, les autres condi lions requises
pour un travail aussi grand et hérissé rfune multitude innombrable de
difficultés, if nous seroit impossible d'embrasser ce sujet dans son entier*
[ M. Norberg, de qui l'on auroît pu attendre quelque chose de semblable,
I s'est contenté de tracer une légère esquisse de ce travail, dans la
[préface du Codex Nitsamus. Pour nous, Jious irons un peu plus loin
{que ce savant ^ et nous présenterons ici [analyse de Tune des pièces
[principales de la première partie du Livre d'Adam. En resserrant en
quelques pages ce qui en occupe plus de cinquante dans le texte
publié par M. Norberg, nous éviterons presque toutes les difficultés
qui arréteroient un traducteur > et nous serons à peu près assurés de
ne pas substituer nos idées à celles de Fauteur, A cette analyse nous
joindrons plusieurs traits détachés que nous avons observés en lisant
rapidement la traduction de M* Norberg, et la comparant parfois avec
son texte et avec celui des manuscrits. Nous ne nous interdirons point
h liberté de fiire en passant , sur la traduction de M, Norberg,
quelques rf marcTues qui confirmeront lopinion que nous avoiîs énoncée
dans noLiie article précédent. Le lecteur excusera Itf tissu d'absurdités
que nous allons dérouler dtvani lui. Il faut du courage pour supporter
la lecture de ces rêveries; mais c'est un courage sans lï^quel on doit
renoiictr ii étudier rhîstoîre des égaremens de l'esprit humain.
La pièce que je vais analyser est ia cinquième de la première partie
du Livre d'Adam ; elle se trouve dans le tome 1 " du Codex Nûsarœus ,
eiy occupe, tant pour le texte que pour la traduction, cent six pages,
depuis la page ip jusqu'à la page 257, Elle commence par la for-
mule : «Au nom de la Vie, grande, merveilleuse, excellente, qui
»est au-dessus de toutes choses. Que la santé, la pureté et la rémis-
> sion des péchés soient accordés à moi Adain-Zouhroun^ fils de
MARS 1820. -^
*»Scharat, &c. » Dans h traduction de cette formule, je m'écarte de
M, Norberg , qui a rendu ainsi les premiers mots : In nomine Vitgt
summœ, mvïssimœ ^ exallinûssimœ , &€* ( tom, I , p. 1 } 1 ). Je ^ais que
le P. Ignace de Jé>iis et Kœmpfer oni donné à M* Norberg Texertii le
de traduire le mot JL^â^ par mvissimi/s ; mais ce mot» ni en hébreu,
ni en syriaque» ni en chatdécni n*a cette signification; t( veut dire cons-
tamment ûliermSy exiraneus , et, par une conséquence de cette première
idée, û viro alicnus» Paf une autre conséquence très naturelle, les dé-
rivé^ de cette même racine prennent en éthiopien le %tn% de mimndus ,
admirabills i et c'est aussi, fe pense, en cette signification que doit
être pris le mot sabéen* Je m aperçois , après avoir fait cette observation ,
que M* Lorsbach a également rejeté le sens adopté par M* Norberg,
et a traduit les mots JU^#^GU JL^*3q^ JU^u^ ^% ip-rryniit^
|^yf>w I « par ceux-ci ; In nomine Vitœ ignordtœ, ûbscQndïtœ à sœculis
{StauMins Biytrœgi, ^ur Phlhs. und Gfsck. toin. III, p. 44» "Ot. et
p, 4s )* M, Norberg, qui a constamment rendu ce mot par novissi'*
mus dans fa version, et qui, dans son Lexique, fa traduit par ûficnus,
exUrnus, mvissimus {p. 138), et a rendu ainsi le passage suivant,
\^^s^ ^ 01JLM 7;.aiâ0f (^;^aj otlo^^? JLi^oi 1;^^^(0
Vif novissimus , cujus Sirma novissimus eorum çua novissima sunt mundi,
change d*avis dans son Onùmastkm ( p. 49 ) t ^t traduit ainsi ce même
texte : Vir admhabilis , eu) us eilam serma admirabî/hr ih quœ mundi
ûdmirûbiîia sunL II rapporte au même endroit cette formule par la*
t JLmm» ^f 1^ rVrflii'^
JLlUAs^ Iho^^mJ «•; JL^é;^! ^ JL^*<3aJ> et il la traduit comme il
Ta toujours fait dans sa version : In nomine Vitff samnm, novissima
iriûfumnim lucis, excelleniissimœ ; mais îî ajoute : Vu Ut verà hic JL^OJ
novissimus î'^fim qmd admirabilis* Quiï utr/ique mt'w huic vocahaio œihio^
pki Ci^mpetii, Aîtigi^aqu^ uffiusqm affinités. Michaélis, qui, dans son
édition du Dictionnaire historique de Castell, a adopté le sens de
novissimus f a cru ju^nfier cette signification par cette observation, que
dans Its livres de^ 5abéens on trouve souvent ce mot en opposition
avec JUte^^iO p'-rmier; mais, bien loin que, dans les passages qu'il a evt%
en vue, il y ait aucune opposition entre ces deux mots, ifs y sont au
(1) Je %m ici f orthographe de M* Norberg.
i}4 JOURNAL DES SAVANS,
contraire réunii comme deux attributs ou épithètes de la Vie* Ces pas-
sages sont ceux que M. Norberg, dans son mémoire De nligîone tt
lingua Saba:orum, a traduits ainsi ; In mmine Vitœ summœ, prhnœi nô^
vissima crcaturarum iucis , excellentloris altitudim omnium optrum , et
dont le texte est ^ JU»'3aJ JUooijo JU^f JU^m* «*9 t^— ^nr>
L^f^o) yCL^^^oD JLe^^ ^f JL';^>^ (fOdNNi Lf |-^% Ce
texte seul prouveroil que \^^\^^a ne saurort %\^mfitT novissimus. Je dois
encore ajouter que c*esi sans aucune autorité que M. Norberg traduit
jL^fiEiiK , mot qui devroit être écrit |j?^J^ , par cnatura : ce mot signi-
fie mundi ou sœcula ; mais je suis très-convaincu que, dans (e langage
sabéeuy il répond trés-souvent aux y£i?wj^ des Gnostîques, Le mot grec
«jMf est précisément la même chose que l'hébreu aSy et le syriaque
I^^CSa». ^ et fltîii'K répond à Thébreu a*oSy et au syriaque JL^S^à^,'
C'est de là aussi que vient celte expression si commune dans l'Aicoranj
en parlant de Dieu, <^liJt<_>j, que Ton rend ordinairement par k
mûitre ifes mondes, Mosheim a défini ainsi les ^ons : Naturœ , murnl'-
tatis pûrtîdpes , et supra tcmporis vkissitudines et injurias positif [De
tek Christ, ante Constant, M, Comment, p, 29); et il a fait voir com-
ment le mût ttmf est devenu la dénomination de ces substances ima-
ginaires, créées par la philosophie orientale [îbid, p. jo), D*après ces
observations • la formule que Je viens de citer me paroît devoir être
traduite ainsi : In nomine (à la lettre, in nùminîbus) Vitœ mugnœ, prima ,
mirabilis prœ omnibus ^^Eonibus lucis, txceUmtis ^ quœ est super omnia
opéra (c'est-à-dire > omnes res). i^^o) , ou plutôt { ^^ç^ , est le même
que Miaiy ou Mis^y en chaldéen ; nouveau rapport entre la langue
chaldaïque et celle des Sabéens, que je crois devoir faire remarquer»
On trouvera peut-être que je me suis beaucoup trop appesanti sur
un seul mot; ie lai fait à dessein^ pour que ce seul exemple fasse con-
noître combien il est difficile d'arriver à un résultat satisfaisant quand
on essaie de traduire les livres des Sabéens, et jne dispense de multiplier
les preuves de cette vérité. Je reviens à l'analyse que j'ai promise> et
dans laquelle j'éviterai toutes les observations de détaiL
Il existe deux principes éternels de toutes choses » et apparemment
indépendans fun de l'autre, et desquels chacun ne doit quà lui-même
son existence ; le premier est nommé flra vl^A et le second Jyar ^K
Dans ce démit r nom , l'on ne sauroit méconnoître le mot grec iip, qui a
MARS 1820. ÎJ5
pisïl'en synjtque sous fa forme f t ( ^J<^^* t^t en chaldéea, oii il s écrit -tn»
Avcr , et 011 il signifie également air et espace [ 1 ). C'est nicontestableinent
le wXiifmfjut des Gnostiques. Il suit de [à, presque aussi certainement ^ que
le premier principe ou /7m répond au Bv6iç de la philosophie orientale
et des sectes gno^tiques { Mosheim, De reù. Christ, ante ConsL M. Com-
ment, p. 29 ), M* Norberg a substitué ^fra %é^'^ ftrho , qu'il traduit par
olucris, s ci lice t piœnix, sans aucune auiorîïé, comme je Fai dit. Je
conjectUTe que c*est le mot chaldéen k"^'^ fosse , dont le sens a quelque,
rapport avec le grec ^Mç^ei qui n*est, suivant Kimchi, cité par Buxtorf»
qu'une corruption de Thébreu n'i^fin. La première production du FîraA
a été ïe Mand jbJlâO) le Seigneur de gloire , nommé aussi le roi de la
lumière, et Youra^ (e Seigneur de la splendeur et de la fumière. J'ai déjà
dit que mana peut être le mot arabe sj\juè sens , sigfiijication , substance
spirituelle, ci qui ne tombe pas sous les sens. Peut être ausbi est-ce tout
simplement le mot chafdéen jnq ou n:o vase ; car ce mot est d'un grandi
usage parmi les kabbalistes , qui nomment ainsi les Sefirott comme onlj
peut le voir dans le traité de kabbale du rabbin Abraham Cohen lrira,i
intitulé ûnnSKn*!* et publié dans le recueil connu sous le nom de
Kûbbald denudûta ( tom, II , part» }.*, voL 4? P» 1 89 et suîv, )• Le Mana
a produit d'autres Mana , tous antérieurs aux productions du Pira, Le Fira
produisit ensuite des millions de Fira et des myriades de Schékinta. En
hébreu schekinak n3'jr j et en chaldéen t^rr^ls^ sckekinta, signifie la ma-
jesté divine, rendue présente et habitant avec les homihes ; ce mot a
passé dans TAlcoran. Chez les Kabbalistes , la schékinta joue un grand rôle
{ Kabk denud, tom, I , part. I , p. 7 i 1 et suiv. ). Chacun de ces Fira de
seconde classe a pareillement produit des millions de Tira (2) et des
myriades innombrables dtScbtkinta. Tous ces êtres se tiennent debout et
louent le Mana, le Seigneur de gloire, qui fait sa demeure dans ÏAyar^
Je Seigneur de (a vie, qui est dans le Jourdain, dans les eaux blanches
produites par le /Mana* De ce grand Jourdain ont été produits des Jour-
dains infinis et innombrables. Du Jourdain, maître des eaux vivantes, a
été produite la Vie , et ces eaux se sont répandues dans la terre de VAyar
qu'habitoit la Vie; ensuite la Vie, se formant à la ressemblance du A fana
{1} Ce mot a aussi 5a place dans le système des Kabbalistes; mais je n'ose
tirer de là aucune conséquence, n'ayant jamais essayé de pénétrer dans les
profondeurs de cette science, Fira pourroit aussi être comparé au iKfi ou
rriKcn ^es Kabbalistes.
(2) J'ai parlé de ce mot , que M. Norfacrg écrit |> f ] , et qu'il rend par
porta, dans ranlcie précédent.
r
JOURNAL DES SAVANS,
I auquel elle devoît son existence, fit une prière, et, par Teffet de cette
prière, elle produisit un Outra, qui est le soutien de la Vie et qu'on nomme
, la sfcondf Vie* Le mot IfLo^ t que M. Norherg écrit I iioi , et qu'il tra*
duit p2T pro'Stûnies , parce quil k dérive de la racine -^ns semble plutôt
venir de la racine injy , et signifier ^/?ii/fff//W , divitiœ; ce qui correspond assex
bien k ce qui est dit de ce génie, qu'il est le soutien de la vie ^f J>arir>1^
jtt— • Une quantité innoniLralile d'autres Outra fut amsi produite; car,
le premier Jourdain s'étant jépandu sur fa terre de la lumière, la seconde
Vie s'y ^tû'j^Jt^ P^'* ^'^*^ ^PP^'^^ fexfsience des Outra, des Sçhikinta^
et un autre Jourdain dans lequel les Outra fixèrent leur demeure* Trois
de ces Outra , jaloux du pouvoir et des créations de la première Vict
demandent à la seconde Vie de leur communiquer une portion de la lu-
mière > de la splendeur et de la puissance qu elle possède, afin qu'ils pro-
duisent de nouvelles Scàékmia, et qu'ils donnent Texisience h un monde
qui leur appartiendra en propre ainsi qu'à la seconde Vie, et où ils feront
leur demeure, avec les Outra, en sorte que le nom de la première Vie
sera mis en oubli. La seconde Vie approuva ce projet ; mais il déplut à la
première Vie, qui en conséquence adressa ses prières au grand Mana
qui habite dans le grand Fira, Le Mana, voulant exaucer ses prières,
appela un grand génie, connu, entre beaucoup d'autres noms , sous
ceux de HtMl'iiva, c'est-à-dire, Abel l'éclatant» et de Manda-di-hai ,
c'est-à-dire, la connoissance ou \z gnose de la vie. Elfe lui exposa les
projets ambitieux des Outra, lui demandant s'il approuvoit la conduite
ie ces êtres, de ces génies de la lumière, qui, abandonnant la lumière,
se précîpitoieni dans les ténèbres , dans la grande mer de SomJ ( on sait
que c'est le nom que les Hébreux donnent à la mer Rouge) , dans cette
mer où ne se trouvent point Tes eaux vives, et d'où est bannie toute
clarté. Le Mana engage fe Manda-dï-hai à se rendre dans ce monde
inférieur, avant que les Outra y aient exécuté des œuvres désagréables
au Mana, à la lumière, et au Mandadi-hm : celui-ci accepte cette
mission. Le Mana lui communique féclat et la lumière, le revêt d un
habit magnifique, lui souhaite toute sorte de bénédictions, lui donne des
provisions pour sa route i et le congédie après l'avoir établi le père
des Outra,
Le Manda-di'kai se rend d*abDrd au domicile de la première Vie;
elle lui fait observer rentreprise des Oi/ir^7 , et fexhorte à s'acquitierde
îa mission qu'il a reçue. Du séjour de la Vie , il s'approche de fabime
ténébreux qu'habitoient les rebelles. Cette vue lui fait horreur; if
retourne vers ia première Vie , qu'il appelle son père , et l'interroge sur
MARS
rorigîne des ténèbres, des génies rebelles , ee du m^U La Vie fui exposi
rorigine des choses dans un ordre difficile à ctrî^cilier avec ce qu*on a W
iu commencement de ce traité ; mais, au l^eu de lui expliquer la prodi
tfon des ténèbres, elle le renvoie au lieu qu1ial>itent les grands, c'esl-à^
dire, les ^ons ou subsmnces les pins élevées. Le Afan^a-di-kai se
auprès dVux, et il en reçoit des instructions trés-obscures, qu'on lui recoiT
màjide de communiquer aux êtres amis de !a justice, aux hommes fidèk
et partisans de la vérité, cVst-à-dire, sans doute, aux Mandaïres.
Après beaucoup de discours sur Torigine des ténèbres , sur leur sépa*
ratibn d'avec la lumière, leur nature et leur durée» ditcours dont i\ eS
bien difficile de tirer aucun résultat positif» si ce n est que les êtres sont
bons ou mauvais j^ar leur nature, et que les ténèbres et la lusnrère sont
des principes distincts et entièrement séparés \\m de l'autre, qui ne
sauroient changer de natilre et se confondre» le Alanda-d^-hiii se
rend enfin « dans lé séjour des ténèbres, dans la demeure des
«méchans, dans le lieu où résident tons les corrupteurs, dans {espace
1» habité par les dragons > ver» le gril du feu dévorant, vers le
1» gril du brasier dont les flammes s'élèvent jusqu'au firmament, i
II y trouve h^ Bot/ntf ces rebelles habitans des ténèbres. Sa venut jette
k trouble parmi les Bourû^ dont le chef, nommé Our, c'est k dire, vraî-
semhlablement yftu , le roi des ténèbres , et louta , peut-être parce que sa
forme gigantesque permet de Fassimiler à une maniagnc, enflamîné par
les discours de sa mère » génie de la planète Vénus , nommée aussi tE^yrît,
r Esprit saint, t\ Namrôus , s'apprête à comlattre le Afiin^fû-di^fifii nvec
le secours des autres génies rebelles, nommés aussi Touri, c'est-à-dire»
montagnes* Mais, au seul aspect de fenvoyé de la Vie, les cohortes
infernales prennent la fuite et se dispersent. Our se hâte d*engIoutîr la
terre; néanmoins, bîentùt vaincu et lié par le Afanda-di-hait il rend tout
ce quH avoir dévoré. Fait prisonnier, il est renfermé dans une tour envi-
ronnée de ?^ept murailles, munie de vingt-quatre portes, et gardée avec
grand soin. Otir, humilié, reconnojt alors la supériorité de Tenvoyé cé-
leste, et sollicite son pardon en déplorant son sort.
Ensuite le Manda-dï-hài é^m^^nà^ ^x, obtiejit que Gabriel soit envoyé
pour créer un nouveau monde, à Ja place de celui que vouloient avoir
pour leur domaine les génies rebelles. Il est alors révélé au JPfandii-di-
haï que la doctrine des sept planètes , celle des douze signes du zodiaque,
et enfin celle des cinq étoiles (des hyades, suivant M, Norberg), se
îMccéderont dans le monde ; après quoi une nouvelle doctrine» une
doctrine de vie, prendra la place de toutes les autres ; un fils chéri
viendra, qui desséchera rabimei formera le monde, Téclaîrera , et
n
»j8 JOURNAL DES SAVANS,
donnera fa vie aux corps en les animant d'un souffle ; trois Outra consefr-
veront ce souffle, deux autres produiront dans le monde un Jourdain;
et, le monde étant aini>i peuplé j éclairé et enrichi de tout ce qu'il
y a de boa, Our demeurera enfermé sous la garde de ses propres enfans»
Ces prédictions, communiquées à Our par le .ManJû-dt-hai ,{t font
entrer en fureur: il s'agite dans sa prison et ébranle les fondemeiisde
la terre. Le Manda- di hai enchaîne ses pensées dans son cœur, et se*
paroles dans sa bouche; il le frappe d'un coup de massue, fui ouvre le
crâne» lui arrache des géinibseinens semblahles à ceux d'un homme,
et lui fait verser des pleurs cojnme ceux que verse un enftint. II lui laisse
ï manger et à boire; puis, ayant po^é à IVntrte du monde une porte,
dressé un trône pour les bons, préposé deux Outra à fa garde du Jour-
dain, placé sur le trône Rnb-yvû,ei mis le sceptre dans sa main» il
retourne au séjour des grands, au séjour de la première Vie, qui le
récompense par une augmentation de gloire et d*honneur.
Ici commence un nouveau récit; c'est la tréation du monde que nous
habitons. La première Vie, en accueillant (e Manda-di-hai, de retour
vers elle, lui avoit ditî« Lève-toi ^ Afdfidû'di-hûr, Outra plein Jâc*
» tiviïéi dérive une écoulement de Feau de la vif, et conduis-le vers ce
» monde- Ri : appelle les trois Outra qui veillent à la garde du trésor de
» la vie ; ils prendront ce ti*ésor ( ou peut-être cet écoulemeni dérivé
jtt des eaux de (a vie ) , ils le conduiront dans ce monde-là, ils le cou-
» vriront d'un dehors méprisable ; ils fe revêtiront d une enveloppe
» charnelle, d'un vêtement de néajit; ils le rendront afiié à toute sorte
a> de défauts et d^impeifections, et par eux sera produit un mouvement
n et une agitation çà et là. » Au lîiilieu de ces expressions obscures et
énigmaïiques , il s*agit, comme il est aisé de le pressentir, de ruoion de-
là substance spirituelle et divine, vivante par son essence et animée, à
h substance matérielle, passive et inerte de sa nature. Voyons comment
va s*opérer cette nouvelle créaiion.
Les Ouïra ayant demaiidé à la seconde Vie la permisîrton. de créer on
mojide, elle leur fit part de son éclat, de sa lumière, et de ce quelle
avoit reçu de la première Vie. Muni» de ces dons, ils descendirent au
séjour des ténèbres, et produisirent un Oufra appelé Fétahil , et d'autres
êtres nommés la enfans de ta paix. Ftialùl, à finstigation de Tun de
ses 6fs, nommé Bikak ^ha, et de Gabriel, conçoit le projet de créer un
monde, et dy produire des Outra, à l'iinitation des erifans de la paix; if
descend donc dans les abîmes, dans les eaux profondes où ii n y avoit
point de monde créé , pour mettre k exécution ce projet. Arrivé dans cet
abîme, ton éclat se ternit : il s'étomie et s'indigne de ce changemenC,
MARS 1820. 15^
qui inspire au contraire au génie rebelle nommé l'Efprii, mère d'Our,
ce che^ des rebelles qui èioient plongés et détenus dans Tabiine, de
nouveHes fureurs, et Tespoir de reconquérir, à l'aide d'une nouvelle
géiîératjon d'êtres de sa nature, le domaine dont le Mandû-dl-fiai avoit
dépouillé les mauvais A^énies. L'Esprit soMicire son fils de consentir à une
union incestueuse qui doit lui procurer la liberté. Pendant que Féfahif,
plongeant sa main dans l'abîme, essaie décondenser la matière dont '\\
est formé pour en faire un monde , et réussit à peine à y produire un léger
commencement de condensation, le rebelle Our s'unk trois fuis avec
TE^prit. Trois fois TEsprit engendre; il met au jour d'abord les sept
planètes, puis les douze signes du zodiaque, puis enfin les cinq hyades;
mais, aucune de ces générations ne répondantà ses vœux, TEsprit tombe
dans le découragement, Fétahif, de son côté, désespérant du succès
de son entreprise , alloit y renoncer , lorsque, mieuîc avisé , il va trouver
fa Vie. et lui adresse sa demande , pour qucHç le revête d*un vêtement
du feu vivant. La Vie lui accorde sa detnande: revêtu de feu, il redescend
dansfabîme; et la chaleur de ce feu, desséchant l'abîme» y excite un
nuage de poussière qui se condense et dont se forme la terre. En même
temps se forme (e firmament , occupé par un génie nommé Ddfid-ârjr^
GquJû, Mais, Fétahil voulant joitidre par un mur la terre avec le fir-
inament ,et ayant presque terminé son ouvrage , tous les génies rebelles;
les sept planètes, les douze signes et les cinq hyades, se précipitent vers
la voûte du ciel, «Qui êtes vous, méchansîw leur demande Fétahil.
L'Esprit lui répond que ces génies n^ont abandonné leur demeure et ne
sont venus là que pour lut prêter leur assistance et concourir \ Feré-
cutîon de ses ouvrages. Trompé par ce discours, Fétahil dit aux sept
planètes : « Vous serez mes enfans, si vous faites le bien ^ et vous seres
» compiées au nombre de mes sujets. » Mais à peine il a pronoticé ces
paroles, que l'édifice qui! construisait, lui échappa; le monde tombe
au pouvoir des rebelles, comme cela étoit avant [extension du firma-
ment et la cotidensarion de la terre. Les rebelles sont nommés ici |^^ j,
mot emprunté .à ce que je pense, de la Bible, où d^Vw et Sbi3 sont rendus
^zigigdnus.yi, Norberg ayant égard au sens de la racioe^^Aj, Fa rendu
pM npostatœ. Fétahîl, confus, retourne au séjour de la Vie, et raconte à
ÏOuira qui lui avoii donné lêtre, ce qui lui est arrivé > et Fempire que
les génies rebelles et les générations produites par I Esprit veulent exercer
sur le monde. Si je comprends bien ce qui suit , Fétahil propose d'aban-
donner à TEsprit et aux astres qu'il a engendrés i Fempire de la terre et
de la mer ou de I abîme, tandis que les génies qui appartiennent à I2
Vie comerveront Fempire du ciel tau moyea duquel ils seront maîtres df
i
-w»-W . _
I •
r
^4o JOURNAL DES SAVANS,
fiiniver? , où les mauvais génies domineront , mais dans îa dépendance
et sous les ordres des génies célestes* La durée des années sera déier»
minée par [es douze signes* Depuis la condensation de la terre jusqu'à
la production du monde d^Adani, il se passera trois cent soixante milfe
ans ; et depuis la formation d'Adam et du inonde jusqu'à la fin des
piondes { i ) , il y aura quatrecent quatre-vingt mille ans. Ces années son!
toutes d'une égale durée , étant déterminées par TEsprit de mensonge»
par lessept planètes et hs douze signes. Fétahif redescend dans le niondci
et annonce qu*il vient pour créer le^/x chéri Jbâ^h^l i i^ dont il a été
parlé plus haut, c'est-à-dire , Adam , el le dresser sur ses pieds, afin qu'il
célèbre le> puissances célestes , et qu il frappe la bête dévorante et
féroce. II dit^itiix génies des sept planètes: « Faisons Adatn , pour qu'il
n règne dans le monde, « Ces mauvais génies se dirent les uns aux
auires: ce Faisons Adam avec Kve, car il sera à nous. 33 Réunissant leurs
cffirts, ils créèrent Adam; mais ils ne purent ni lui donner une ajne, ni
le dresser sur ses pieds, Fétahil retourna alors vers le père des Outra
(cesi-à dire, Ahaiour, nommé aussi la trois'ùme Vie); celui-ci lui donna
un vêtement pur et lumineux, emprunté au grand Afana, qui illumine
tous les climats, La Vie (ou Abûtour] produisit aussi les trois Outra
excetlens, Hthit^ Schttil et Anousch, auxquels elfe ordonna de veillera
la conservation de lame destinée à animer Adam « mais que Fétahil ne
sauroït unir au corps. En effet, Fétabil, étant retourné vers Adam,
accompagné des trois Outra , ne put unir Tame au corps. Alors, dit le
Manda-di-hiU fQ^\ parle toujours dans cette pièce, je pris de la main
de Fétahil ce qu'il portoit pour Adam, Je disposai ses os en étendant ma
m;ûn sur lui { c*est'à dire , je dressai son corps sur ses pieds ) , er Je ranimaf
du souffle des grands: son cerveau fit alors ses fonctions, le principe
lumineux île (a Vie parla en lui , et ses yeux furent ouverts. Le Aïanda^
di'hah ^y-^nt ainsi complété h formation d'Adarn, défend aux mauvais
génies de rien attenter contre lui, les oblige à reconnoiire leur famej puis
it instruit Adam, qui ofire son hommage aux grands, rux puissances
célestes, renonce aux génies quiavoient formé son corps, et recbnnoît
pour fauteur de son être le Alûna^ noniiné plusieurs fois ici Adacas-^iva
(t) m, Norbcfg a traduit l--^^^^"^^ ^Q^O^^Î^ par ad mcundMa generh
humarti , çt, dans son Lexique, iUUt ; Usi^ue ad quanùtat^n crintitr^rum, id est,
imunatula genens humani, J*ai peme à con^;evoir l'identité de ces d^ux
idées ; le sens me semble éire, donec compltiinîur omnes mundi ou crmiitrûtp
Ailleurs (totn, lll ^ p* 68), la même idée est exprimée par J^tsf^^ L J^BU^^»
ce que M* Norbcrg a rendu par ad crtaturarum ^ntm*
i
MARS 1820. i4r
(a*| i^û^W, dénominaiioii dont le sens m'est inconnu. Adam mérite
par-là fa faveur des Ontra 4e la Vie, qui lui donnent une maison* un
jardin planié , on Jourdahi, et le droit d entrer après la fin de sa vie dans
le séjour éclatant qu'habite son auteur, Adacas-^iva.
Les mauvais génies, iadignés d'avoir ainsi perdu Tempire qu'ils espé-
rotent exercer sur Adam, forment une conspiration contre lui pour le
séduire et le corrompre, tandis que le Afanda-àî-hài et les bons Outra ^
pour affermir Adam et propager sa race , lui donnent Ere pour compagne.
Cependant les génies rebelles, rassemblés sur le C^rmel, y tiennent
conseil, et imaginent des enchantemens et des sortilèges de toute sorte,
au moyen desquels, et en excitant toutes les passions sensuelles par les
attraits de la volupté , ils espèrent troubler le monde. Le Manàa-dl-hai
n'abandonne point le père du genre hujnain,dontla famille se multiplie,;
if le consoJe au milieu des attaques que lui livrent les génies malfaisans,
et le fortifie contre leurs attentats et contre le désordre produit par leurs
malignes influences dans toute la nature. Cependant un fils d'Adam,
nommé aiTssi Adam , embrasse le parlî des mauvais génies, s'abandonne
aux plaisirs par euK inventés pour séduire Tespèce humaine; et peu s'en
fimt qu'il jTe commette un crime en s'unîssantà TEsprit, k ce mauvais
génie femelfe, mère ^Our, et source de tout maf , qui se présente à
sa rencontre sous la figure d'Eve, sa femme et sa soeurs mais le /Manda-
di hdi %e montre à lui et lui découvre le piège, et Adam fils d'Adam
rougit de sa faute. Le /Ifûndû-dî-hai pi^nd alors une forme corporelle,
se manifeste aux puissances des ténèbres, frappe et enchaîne TEsprit,
inflige un châtintent 5 chaque planète, et revient trouver Adam. Il foi
donne de nouveaux conï^eils, et lui reconmiande de se garder des sept
planètes et de ceux qui les adorent. li Im révèle que , quoique les sept
planètes, s^étant partagé le zodiaque, aient introduit la mort dans le monde ,
cependant les -âmes des fidèles et des justes, hommes ou femmes >
monteront habiter le séjour de la lumière; au contraire, celles des sept
pinnètes (et peut-être de leurs adorateurs) demeureront liées et fixées
a leur place , jusqu'à ce qu^elles meurent et s'anéantissent. II annonce en
détail la perte des difi^érenies sectes ou nations qui appartiennent à
chacun de^ génies malins, telles que les sectateurs du Messie, les Juifs
'et les descendons d'Israël, qui reconnoisseni pour leur chef Adonaï
( ou le soleil ) ; les Yazoukéens ( ou mages ) , qui rendent un culte au feu,
symfjole du Messie, &c. Plus loin , il fui apprend comment la durée du
temps a été partagée entre (es douze signes du zridîaque. Le bélier a reçu
en partage douze mille ans; le taureau, onze mille au»; iesgémt^iuXy
>4^ JOURNAL DES SAVANS,
dix mille ans; et ainsi de suite en décroissant, jusqu'aiix poissons, qnî
n'ont en partage que mille ans. Chacun des ^uze signes, en prononçant
une parole secrète, a produit dans le monde quelques espèces d^niinaux
ou de végétaux j ou de jibénomènes nuisibles et destructeurs, le tout
dans fintention de causer du duininage à la fiimille de la Vie , c'est-à-
dire, ao genre humain; mais, par la disposition du AfanJa-di-hai , toutes
ces produciîons ont tourné au service ou à la nourriture de h famille
de fa Vie.
Cet écrit se termine par quelques avis et quelques invocations.
Telle est l'analyse de cette pièce, l'une des plus longues du Livre
d'Adam, el que j ai choisie parce qu ede présente lenseinlîîe (du sys'èaie
co^mogonique des Mandaïles* Plusieurs des trarts qui composent cette
légère esquisse, pourroîent facilement recevoir des développemens, par
la comparaison de cette pièce avec des passages extraits de quelques
autres; peut-être ^u^si se présenteroii-if des contradictions rétfles ou
apparentes qui oflTrîrofenî des problèmes difficiles à résoudre* Mais et
n*est pjs ici le lieu d*apprQfundir aucune partie de ce systèrhe ; et d*ail-
leiirs j aï déjà observé que, dès que l'on veut entrer dans les dérails de
cette doctrine f on se trouve arrêté par une multitude de difficultés , dont
les unes sont insolubles» et les autres ne peuvent être résolues qu'après
beaucoup de lâtonnemens , et toujours d'une manière conftrcturale.
Je vai> maintenant réunir ici les observations les plus remarquabtes
que j'ai eu occasion de fane en lisant les trois volumes du Livre d'Adam*
Les chrétiens, et ledivfn fondateur du christianisme, sont en général
lobfet des invectives de Tau leur ou des auteurs du Livre d'Adam. Jésus-
Christ est appelé Néhu Meschika f ^-y*^ q^^ ; ce nom est aussi cetut
de la planète Mercure, On X\\( tom.I^p, loj } qull sera caché plusieurs
mois dans (esein de- la viergç sa mère; qu*il en sortira ensuite avec un
corf>s,du sang et le flux menstruel; quil sera élevé dans son sein et
iucera >on lait; que ses adorateurs seront par lui revêtus d'une tunique
bapdsmale ( \^^x \ M, Norberg a traduit tunka cûpr'ma : je crois que
JLâh^. est pour À^n^^« > de la racine ^ê^. nugere, immergertf àapfiiûre] ;
qu il It^ur fera une tonsure sur la tète, et qu'il les couvrira d'un vêtement
icmbi ible aux ténèbres, c e^t-à-dire, je pense, d'un froc ou d'un capuce
noir; qu'ils célcbreroni leurv fêtes le premier jour de la semaine. Il leur
dira : « Je suis le vrai Dieu, mon père m'a envoyé ici ; je suis le premier
a» et le dernier apo:re ou envoyé; je suis le père, je suis l'esprit de sain-
13 tête ; je suis sorti de h ville de Nazareth. •> Il aura un char (peut-être
^
MARS 1820.
•4}
RïmpFêmem une mmtun., c*cst-à-dire^ lancsse sur laquelle Jésus-Christ
1 est eaiiré à Jérusalem ' ; il affectera humilité sur humilité, et il viendra à
* Jérusalem, H rendra par ses prestiges la vie et la parole aux morts; il bap*
risera dans des eaux impures (ou pluiôf> sujettes il s'évaporer J, au nom
I du Père , du Fils et du Saint-Esprit, ei il abandonnera le baptême vivant
t dont Adam a été baptisé dans le Jourdain des eau» vives. De son teoips
[sera Jean fils d'Aba-Sûba [Zacharie] ei diAmscktbat [Elisabeth], que
I sa mère concevra à P;tge de cent ans , Zacharie son père étant aussi très*
( avancé en âge, Jean Lapiisera dans le Jourdiitii, quarante-deux ans avant
que Nébôu se re^ èle d'un corps : Jésus le Messie viendra recevoir le
baptême de Jean; mais il altérera sa doctrine et changera son baptême.
Après la mort de Jean , douze itnposteurs parcourront le monde pendant
trente ans, et une doctrine mensongère paroîtraen ce tetnps-Ià parmi les
peuples. Le bon génie Anousth surviendra alors, et dévoilera Fimposture
du Messie, qui n'est que lune des sept planètes; il le livrera aux Juifs
et crucifiera son corps. Ses adorateurs se disperseront de côté et d'autre \
pour lui, cVst-à dire ^ fe génie planétaire Ntbëu^ if se cachera dans la
montagne de Aioura ( peut-être de Alotia ). Ailleurs on trouve un long
récit du baptême' que le Mânda-di-hcû reçoit de Jean-Baptiste dans le
Jourdain ( t}m. IJ ,p. fj-Jf )* Une pièce singulière ( tom. ^^ * p' i'^j)
contient le récit du voyage d'un génie qui visite tous les lieux où sont
détenus les génies rebelles et leurs partisans* Il vient à la prison oïl est
renfermé Jésus le Messie, avec tous szs sectateurs : ces anies malheureuses
font eflort pour boire d'une eau à laquelle leurs lèvres ne peuvent
atteindre* JMles se plaignent au Messie du sort malheureux qu elles
éprouvent » tandis que durant leur vie elles ont revêtu ceux qui étoient
nus, et exercé toute sorte dœuvres de charité. J*omets la suite de ce
dialogue, cjiti est fort remarquable, et où il y a des allusions- manifestes
à divers pa-sages des Evangiles* Dans une' autre pièce ( îom. l,p. J^f ) »
il y a d*auties allusions ^ quelques passages des psaumes. « La Vie s'est
a> manife>ïée à Tunivers ; i'éclat et la lumière de la Vie se sont levés; la
» mer Fa vu et a retourné en arrière j le Jourdain a rétrognidé ; les mon-
» I agiles ont bondi comme des cerfs et des biches dans le désert; les
1» collines ont [.:^rlé comme les filles des nuages ( cest-h-dire, les lon-
nnerrts, et non les oiieatix , comme Ta cru M. Norberg ) , avec un
3> son magnifique; les montagnes ont ouvert leur bouche, et chanté des
» hymnes de louanges, et les cèdres du Liban se sont brisés j la terre, tne
39 voyant, a été ébranlée, et a tremblé; le roi de la mer, à mon aspect,
» a retourné en arrière, O mer , qui as-tu donc vu, pour retourner ainsi
*» en arrière ! Jourdain, qui as-tu donc vu, pour rétrograder ainsi dans ta
fU JOURNAL DES SAVANS,
» marche l &c. &c* ^^ Jtru<îalem est fréquemment représentée comme un
séjour d'abomination et d erreur; sa fi)ncia[ion est attriLute (tQm.lIt
p. 2j/7'jat ) aux sept planètes, qui ont rtuni leurs commujis efforts
pour la produire, Cetïe union est exprimée alîégoriquement par le
commerce incestueux des iept génies plaiiélaires avec leur mère, c*est*
à- dire 9 avec TEsprÎL^Après avoir formé Jérusalem , ils y ont laissé la
débauche, la fornicatrou et la corruption; et ils ont dit ; « Quiconque
a> habitera Jérusalem , ne prononcera pas le nom de Ditni. >? La ruine
de Jérusalem es; racontée dans cette même pièce j et il est remarquable
que cette destructions pour signe ou pour cause un aigfp hîanc qui vient
se rc|)oser sur cette ville tjiet aigle est sans doute lejubléine des armées
rotnaines.
Je ne puis passer sous «ifence une des pièces du tome II , qui est assez
courte* mais qui ofire beaucoup de choses remarcjuables, et sernit assuré-
ment une des plus curieuses de tout le recueil > si fon parvenoit h la bien
entendre. Cette pièce coniient une liste des sectes qui appartiennent à
chacune des planètes, et présente sur chacune de ces sectes des particu-
larités dont la critique peut, ]e croîs , profiter pour Thistoire des hérésies;
mais elle fourmille de diflîcullés de toute espèce. Parmi fes sectes dont il y
est parlé, plusieurs parnissenl appartenir au christianisme, parce quelles
baptisent au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit , et qu'tiies hono-.
rent la croix; mais on leur attribue toute sorte d'impudîcirés et de pra*-
tiques abonjînables : lus noms mêtnes de ces sectes sont desénig/nes pour
moi* Je remarquerai seulement qu'en parlant d'une secte appelée Zaudiki
et Mardcmohi , secte qui pourroit être celle des Manichéens, l'auteur
lui impute une abotninatiun dont eflectîvemeni les Manichéens ont été
accusés* Voici ce passage, suivant la traduciion de M, Norl;erg , l\ laquelle
je changerai peu de chose : Dkam etidm vobis , mei discif^uii , de a fia
Porta (c*est-à-dire, de atia hœrcsi ou re/fghnf); hœc est Ai es si œ, et ^ui-
dem hominum qui Zandici et Afardemoni appdlati ^ fteJi fuso semine ,
suiique sùcûs diitrituto, sibi invieem vlrt (t Jlmina cçncumbunt, Quod ei
iemen sumtam , vinoqur mistum , animabus btbendum pmbtnt, dicaUês: Hùc
puritm est^ Invoeant hi vfntam ^ ignem , aqudm ; s^ltm quoque et lunam
hymnis célébrant (voyez Beausobre, l* Histoire du Afanichéîsme , fîv, ix^
cbap» 7, tom* II, p. 725 , et Mosheim, de Rébus christ, anie Consi^
Af. Commtnt, p. 895 ). De pareilles impudicités sont reprt*chées par
Tauteur de cette pièce à plusieurs des sectes qu il caractérise. On remarque
dans cet écrit une étymôfogie singulière du nom des Juifs JUrfCOUw^ »
^e fauteur dérive de la racine y^^^f ficher* Quelque ridicule que soit
^
w
MARS 1820. lis
çctre étyrro^ogîe, ce passage auroit dû prouver h M. NorLerg qu'il
neiitfoiipo ut dans la pensée des textes qu il traduisoît en dérivant ce
Il m de JL^».-*i^ avorton, et substituant par-tout aborthi à Judm, On
rtln irque encore dnns cette pièce la défense faite aux Sabéens de rendra
iîii culte à aucune image.
Je ne ferai plus quun très-petit nombre d'observations.
Le innrraore esï fi>rtement recommandé aux Mandiiïtes, et [e célibat
inspire beaucoup d'horreur aux auteurs du Livre d'Adam, qui, au reste,
fie ménagent jamais la pudeur dans les tableaux qu'ils offrent à leurs
lecteurs. Ainsi ( tom.I^p, ^^7 ) on recommande aux Manda'ûes de
n avoir aucune société avec ces femmes qui renoncent k l'union conjugale,
avec ces jeunes gens qui nont aucune liaison avec les femmes; on les
renvoie à (exenif^fe des poissons tl des oiseaux , qu on voit toujours
deux à deux.
Dans ia m«?me pièce, on feur permet de manger la chaîr des animaux
terrestres, des oiseaux et d^fs poissons. AîactaU , lavait, txpurgaU^
tmundau, co/juîte, etjusis precibuî tdiu.
Dans uji petit morceau qui a la lune pour objet, if est dit que, si un
homme a commerce avec sa femme pendant le jour oii fa lune est invi-
siMe et en conjonction avec le soldl, et que la femme conçoive, elle
mettra <iu monde des enftns sourds, lépreux 5 privés de pieds et de
mains (tom. II, p, 261 ).
Il est ordonné aux Nasaréens d'oindre, aux approches de la morf|
leurs turps d'une huife pure; faute de quoi leurs amts ne pourront pas
monter au séjour de la fumiére, et seront détenues en prison sous fa
garde de Féiahif, jusqu'à ce qu'elles aient reçu soixante- un coups
(îom II, p, 2S1 ). [Il est question ailleurs (p. ijj) de ces soixante-im
coups dont on sejjréjcrve par soixame-une prières* ) Arrivées au séjour
de la fumièie, les âmes verront une multitude de vignes 1 et boiront de
la liqueur qu'elles produisent (ibid,).
Les Nasaréens doivent prier trois fois par Jour, après le lever du soIeiF,
à la septième heure, et au coucher do soreil ( tom. II* p* 7p ) ; ils doivent
payer une certaine contribution , prêcher la doctrine de ta Vie, et donner
des vétemens aux pauvres (p. 77 )> i'^ doivenr encore ( th'tJ, p, 2ajf
€t suiy, ) se réunir dans le temple au lever du soleil, le premier jour do
la semaine; y faire leurs adorations en observant un ordre régulier; y
conduire leurs femmes, leurs fils et leurs filles; faire baptiser leurs enfans
dans le Jourdain le premier jour de la semaine, les marquer du signe de
la Vie; avoir pitié des pauvrei et de^ indigens; enfin étendre la
M* JOURNAL DES SAVÂNS,
connoîssancf âe îa vraie r lîgîoïi, et s'insiruirc réciproquement les uns
les .tutres* Il leur est défendu de tiinn^er des viandes apiirètêes pour les
sccin'f'U'^ des riu5>e* refîgionS} ou dej* vicijines immolées en Thonneur
des sepi ^Janetcs; de Loire du vin dans une taverne, d avoir commerce
avec une t\ nifne d.ms le temps de >es purgi^tions (iom, II ,p* 2^g et 27^/-
Ils répond 'lit des fautes de (^urs «nfans jusqu'îà ce que ceux-ci aient
atteint IMge de quinze ans//;. 2^0 J, Enfui les Nasaréens justes, pieux
Cl fidèles , ne demeureront pas éternellement sur la terre; ils ne seront
point fugés comme les autres hommes; ils ne seront point condamnés
et précipités dans la grande mer de Souf [la mer Rouge], ou seront
jetés et où périront TEsprit, le Messie, les douze signes et les sept
planètes. Quant aux Nasaréens ijifidèles, lorsque leurs âmes se pré-
senteront à la porte du lieu où réside Abatour, ta troisième Vie, ell*isen
seront exclues ; elfes ne verront pas le séjour de fa lumière ; elles seront
privées de tous les avantages qui leur avoient été accordés sur la terre et
dont elles n'auront pas profité; leur baptême remontera au lieu d'où il
étoit descendu, et se retirera dans le trésor secret de Youra le grand
trésorier; elfes seront précipitées au plus profond du lieu ténébreux
ftom 11^ p, 27y),
Je termine cet extrait par une observation générale sur le style de ce
livre; autant qu'il tsi permis den juger, il n offre rien de noble, de
sublime, de majestueur. Au lieu du parallélisme qui caractérise le style
relevé des narrons de l'Orient , on ne trouve ici qu une fastidieuse répé-
tition des inémes phrases ou portions de phrase, répétition qui allonge
le discours sans lui prêter ni grâce nî énergie. Limaginatîon y joue un
grnnd rôle; mais c*est une iinagination désordonnée, dont les tableaux
n ont ni ensemble^ ni proportions, ni juste distriljution des parties, et
n'offrent presque toujours que des scènes affreuses ou dégoûtantes. En
un mol, la peine que coûte l'étude d*un tel recueil est bien mal récom-
pensée par les résultats qu elle produit.
SILVESTRE DE SACY.
J,A Jébusalem délivrée» traduite en vers fratiçûh par
P. L. M, Baour-Lormian : 3 vol. /Vi?/ , avec figures, Paris ,
, Delaunay, libraire, Palais royal, 181^,
^ PREMIER EXTRAIT,
L'un ^i mérite; que ï^a peut le plu^ facilement apprécier dans la
MARS iSzo, tif
JjÉrusalem DELIVREE, c'est la belle et sage ordonnance du poème.
U est vrai que la plus grande partie des détails a été empruntée aua
poètes antérieurs ; mais le Tasse a distribué ces détails avec une intel*
Iigence si rare, avec un art si heureux, quà moins d*être très-versé
dans I étude des ancienit on ne distingue pas ce qui est emprunt » de co
qui appartient au Tasse lui-même; et Ton peut dire qu*imiter de la sorte i
c est encore créer,
Non-seulejnent ce poète offre dans son épopée de fréquentes imita'-
lions, mais même il s'asservit quelquefois k la simple traduction; de
sorte qoe^ pour rendre avec plus de succès les vers traliens dans une
autre langue, il n'est pas inutile de les conférer avec les originaux qui
ont servi de inodèie au Tasse lui même.
On connoh assez généralement les nombreux emprunts que la
poète fil k Homère et à Virgile; il en fit aussi plusieurs à Lucrèce, à
Ovide , à Stace, à Silius Italicus, à Claudien , à Boêce , à rAriosie et à
Pétrarque, &c. «Sec: maïs ses imitations des poètes latins modernes, et
sur-tout de Vida, sont moins connues.
En rendafit compte de la nouvelle traduction, j'offrîrar d'abord un
choix spécial des passages importans des poètes latins modernes quo
le Tasse a imités ou traduits, et le lecteur pourra ainsi reconnoître à la
fois les mérites divers des auteurs originaux , du Tasse , qui a reproduit
leurs beautés, et de M Baour Lormian , qui donne la Jérusalem
DÉLIVRÉE en vers français. Si, dans ces citations, le talent du poète
français se présente avec avantîïge» on ne m'accusera pas d*avoir préféré
les morceaux qui dévoient le faire mieux ressortir.
Ensuite fex^irninerai plus partîcuJièrejnent le genre de mérite qui
distingue spécialement la traduction française.
On a fait au Tasse Thonneur de croire que Milton avoît emprunté
de lui ridée du Pandemonion, et on ne peut guère se refusera
adopter cette opinion : mais le Tasse lui-même avoit imité, dVm auteur
qui lui étojt familier, le tableau qui a précédé celui du poète anglais; en
voici les preuves.
Cfmnt IV, stance il:
Quinci hflvendo per tutto il pensier voTto
^ Arecar ne' ChrUdanî uïtima dogita;
Che sia commanda îl popol suo raccolto
(Conctiio horrendo) eniro la regîa soglia*
Ces vers sont évidemment imités de la ChristiadE de Vida^ Uvre I.",
pu on lit :
Diniquî cura animo udît, hœc saepi una resurgit,
T Z
^^^Pl^^™^ JOURNAL DES SAVANS, ^
■
^^^^H Protmus acciri dhos ad ttgiafratres i
^^^1
^^^^^v^ Limina {concilium homndumj , it gertus omm suorum,
^^^1
^^^^^K*
^^^H
^^^^B Le Tasse , lïvtt i v , stance lU :
^^^1
^^^^^& Chiama 1* habitator gli de V ombre eternc
^^^1
^^^^^H^ Il rauco suon de la tariarea tromba;
^^^1
^^^^^^ Tremati le spatiose atre caverne,
^^^H
^^^^1
^^^^^^ £ Taer cieco a quel romor rimboniba.
^^^^1
^^H Vidai
•
^^^1
^^^^^^B Ecce îgîtur dedlt ingens huccina sîgnmn ,
\
^^1
^^^^^K Qiio siibko ïntonuk cœâs domus aha cavirnts
^^^1
^^^^^L| l/fidîijue opaca, ingens / anira înronuere proft/nda,
*
^^H
^^^^^K Atque procul gravido tremefacta est corport tellut.
^^^1
^^^^^ Le Tassci livre u, stance iv :
^^H
^^H Tosto gli dei d* abUso in varie torme
^^1
^^H Concorron d^ogni întorno a t' ahe porte*
^^H
^^H O come Jtrane, o corne horribir formel
"■
^^^B
^^1 Quanc' é neglî occhi lot terrore e morte!
^^
Stampano akuni il suoi di ferine orme.
E 'n fronte humana ban chiome d'angui aitorte;
E lor s'agira dietro i mm en sa coda
• '
Che quasi sferza lî lipiega e snoda.
Vida, i^/U.'
Coniînuo rutt adporMtgens ûmnîs, it ûdiunt
Luctftigi ccetus, varia atque bkôrpora monstrû^
-
Puh tenus hommum faciès ^ verum hîsplda in anguem
Disinh ingenti sbiuata volumint cauda.
LeTasse, stance V;
♦ '^
'^' Qui mille îminondc arpie, vedrcsti c mille
^ Ceniauri, e ifingi, e pallidc gorgoni^
!
Moite c moite latrar voraci SciïJc,
E fischiar hidre, e sibilar pitoni.
* ! E vomîtar chimère atre favîlle;
^ ' E Poliiemi horrendi e Gerioni ,
1
' •
£ i novi mottri e non più intesi o vistt
Dïvcrsi aspetii in un confiisi c mitti.
Vidai ikid.i
1
^
Ccrgortas hi sphmgasque ohcœno iûrpûfi reddanf;
^
t
1 Çîntaurçs^uî fijdrusfit ilH , iffimimsum çlâmarai s
t
•
^ i
MARS 1810. i^^P 147*
Ctntum atti Scyllas ac fird'ificas Hai-p/iai,
Et qutW muha hommes simulacra horrmtiajitigunt*
Quoique ces deinîers vers de Vida soient empruntés du sixième livre dô
Virgile, et quoique Satmnzar, dans son poème DE ParTU VirginiS^
en eût reproduit les images, il n'est pas moins vraisemblable que le
Tasse a pris à cet égard pour son modèle Vida, qiii lui rourni^soit le reste
de sa belle descripiion.
Siance vii» au sujet de Satan :
Rossegian gli occlii e di venciio înfetto.
Corne înfausta comeia il guardo splende;
E in guisa di voraggine profonda
S' âpre la bocca^ d* atro sangue immonda.
Vida, ibîd.:
Ai centumgctnmvs flammanti vertke supra esi
Arbiter ipse Eret't, centenaque brachta jactat
Cinthnanus ^ totidemque éructât faucïbus œstus:
Omnes luctificum fumumque , aîrosqtte procaci
On ocul'isque îgnes et vastis naribus effiant.
Qu'on me permette dmterrompre cts rapprochemens en citant les
ters de la traduction française qui correspondent à ceux du Tasse :
La troupe du Tartare en ses cavernes lombres
Rassemble tous les rois des éternelles opibres:
A ses rauqucs accens Tair ténébreux répond;
L'enfer en retentit -dans son antre profond.
Avec moins de fracas la foudre tombe et roule
Sur un vaste rocher dont le sommes s'ccroulc;
La terre tremble moins sur ses axes brûlans.
Quand un soufre embrasé bouillonne dans ses flancs,
Des démons ct*pendant les diverses cobortes
Du palais infernal ont assiégé lei portes;
\ Ils entrent. . . . oîiî quels traits horribles, odieux î
L'épouvante et la mort respirent dans leurs yeux»
L'un^ dragon tortueux, sur sa croupe se traîne;
L'autre d'un pied fourchu bat et creuse l'arène; . 1 ;
D'autres ceignent leurs fronts d*hômicides lerpeniir
Là Ats milliers de sphinx ci de Pythons rampini.
De Chimères en feu, de Gorgones livides.
D'aboyantes Scyllas, de Célénos avides.
De triples Géryons, roulent des yeux hagards;
Des Typhons aux centbras^ des hydres au;t centdaîdi,
iiji
JOURNAL DES SAVANS,
Touïi
; fantastique*!
P
henx mensongers, ces monstres 1
Dont la fable effraya les nations antiques»
Pressés et confondus, sous mille aspects affreux.
Peuplent rinimensité du palais ténébreux.
Mats tout le noir sénat sur deux lignes embrasse
Le trône flamboyant où leur chef prend sa place.
La hauteur de son front, que la foudre a frappé,
Sui-passe les sommets d'Atlas et de Calpé.
Sa main droite soutient un sceptre lourd , énorme;
L'honible majesté de son aspect difforme
Enirttient son orgueil , et redouble Teffroi
Qu'inspire à tout l'enfer rcpouvantable roî#
Ainsi qu'une comète à Tardente crinière.
Ses yeux roulent chargés d*une sombre lumiêrCî
El tels qu'on voit sortir de TEtna caverneuic
Des foudres, des torreus, des rochers lumineux,
Tels de sa bouche immense, immonde , ensanglantée^
S'échappent les torrens d'une flamme empestée*
11 parle ^ et de Tenfer les échos.mugissans
Dans Tombre ont prolonge ses lugubres accent.
Le discours que Satan adresse au sénat infernal, est pareUlement
Imité de Vida.
Le Tasse, livre iv, stance ix :
Tartarei numî, di «eder più degnî
Là lovra il sol, ond* c V origin vostra;
Cbe meco gîà da' e più «ubiimi regni
Spinse il gran caso in questa horribil chrostrt;
Gli aniichi alrnii lospetti c i fieri sdegnî
Noii son troppo , e V atta impresa nostra;
Hor colui regge a suo voler le stellcj
E noî siam giudîcate aime rubelle*
Tûrtani jfTocern , cœïo gens ortd serenù
( Qu0s olhn hue supfTi mecum mckmentîa régis
jCthere dejectos fiagranti fulmine âdegit ,
Dûm regno cavet, ac scepirîs multa invidas Hïi
Pennetuiij refugitque parem ) , quât prœVa îotê
Cgerimus emlo, quitus oUm dintque vtrinque
Sit certarum odïis , nctum, et meminisse rtecesst tsU
lUi asiris pûtUur, fOru et plus occupât aquâ
MARS iSio. •- tfi.
'^theris, dcpœnas inïnûca i gaUi tu^iâ
Crudcks.
Sttncex:
£d in vece dël é\ sereno e puro
De r aureo sol » degli ttellati girf
IV hà qui rinchhisi in questb abisso oseurOt
Ne vuoi ch* al primo honor per noi s* aspiri.
E poscia ( ahi quanto a ricordarlo è dure!
Questo è quel che più inaspra i nûei martiri)
Ne* bei seggi celesti hà 1* huoih chiamato
V huom YÎle e di vil fango in^terra nato.
Vida:
Prostdertbus,prùluce$ereàa,
Nobis iwta situ ioea , sole tarentia teeta
Reddidit, ae teneiris jussit torqutre sut imh
Jmmîtes animas hominum , illœiabik tegnum !
Haud sufftrœ asptrart poli datur ampltis aula f
Ingens ingenti tlaudit ne^ obice tettuê , - ■•'
in parfemque komlni nostri data regia coeli M»
J'observerai que ce dernier vers î dont Te Tasse t embelli Pidée, appar-
tient plus au sujet de la Christiade, qu'à celui de la JÉRUSALEAi
DÉLIVRÉE , ainsi que- toute la stance suivante*
Le Ta^se, stance XI :
Ne cio gli parve assai , ma In preda a morte ^
Sol per farne più danno il figlio diede.
£i venne e ruppe le tartaree porte,
E porre os& ne i regni nostri il piede,
Etrarne T aime à noi dovute in sorte,
E riportàme al ciel si ricchè prede»
Vincitor trionfando, e in nostro scfîemo \'
V insegne iyi spiçgar ^el vinto ! nferno»
Vîdà:
JVec satis : arma iterùm motitur, et altéra noUi '
Bella cietp regnisque etiam nos pellit ab imis.
Jdpropterjuvenem œtherea dimisit ab arce ■
Seu naturfi , sive alitibus defratribus unum,
Jamque aderit ^fretusque arrnis cœlestîbus illi
Sedibus exitium vehet his, et régna recludet
Infera , concesiasque animas nostro exhnet orbe.
Fors quoque nos, nisi non segnes occurritnys, if son
•I JOURNAL DES SAVANS.
'Arcta in vtrtcla daèit, vwcto$(jue inducet Olympo
Victor, ovans ; superi illudent toto ^there captis*
' yoîci les vers correspondaiis de la irnductîon de M, Baour de Lotmian:
Fières divinités, vous qu'une main fatale
Déshérite à jamais de la clarté natale*
Alonarqties exiles de IVnipire des cieux «
Vous que dans ces cachots un vainqueur funeux
De son bras foudroyant prccipi ta lui-même.
Illustres comp^ignons de ma chute suprême»
Pourquoi vous rappeler tant d'ioiustes rnupris^
£t ce fameux combat digae d\in autre prix!
Sur un irône brillant dVioiles iaimorulles
Dieu triomphe, ei c'est nous, nous qu'il traite en rebelles!
Au lieu de ces palais, de ces berceaux vermeils
Où rayc.nntnt la flamme et l'or pur des soleils.
Rots de la nuit, plongés dans un gouffre funeste,
1-e deuil, le désespoir, voilà ce qui nous reste.
Ce n*étoii point assez, ci ce despote heureux. •*..».
(Ah! de tous mes affronts c'est le plus douloureui),
Elevant jusqu a lui l'hcmme né de la fange.
Promit à son néant le desito d'un archange. ]
Pour mieux punir encor nos antiques défis ^
Au glaive du irép^is il a livré son fils. « i
Vous l'avez vu ce fils , dans sa marche guerrière,
De nos sombres États renverser la barrière,
A ces gouffres de flamme arracher sans effort *
Les capïifs à nos lois dévoués par le sort.
Vous Tavez vu , chargé d une si belle proie.
Nous laisser pour adieux ion insolente joie.
Et, des enfers vaincus sortant avec dédain,
Remonter dans le ciel, nos drapeaux à la main*
Le Tasse a fait divers autres emprunts à fauteur de la ChrI5TIA0I;
j'en indiquerai quelques uns,
Chant j V , stance xxxïl :
Corne per acqua o per cristalli tnticro
Trapassa il raggto, e no i divide o parte;
Per e^itro il chiuso manto osa il pensicro
Si penetrar ne la viciaia parte.
Vîdaavoit dit dans une hymne adressée au Christ:
Quali vitrum radiis penitùs sel transit adactis.
1
^^^^^^^^^^^ MARS iSio^^^^^^^^^îJ ^
■
^^M
^^^^^^ lUœSùque dcmùs subit interiom métallo ,
^^^^H
^^H
^^^^P Inthnaque Hlustrans penetraUa lumine vaut.
^^^^H
^^H
^K Mais il faut avouer que le Dante > Pétrarque et Bocace , avoient tm*
^^H
^^H
^P ployé cette comparaison avant Vida, qui lui-même à'en est servi encore
* ^^H
^^^1
^m ik h fin de la Christiade»
V
^^H
^B Voici la traduction des sers, du Tasse:
' ^Ê
^^^1
^H Et comme un rayon pur, tremblant sur les ruisseaux.
fl^l
^^H
^H Pénétre leur cristal sans diviser ies eaux ,
^^H
^^^1
^H Sur tant d^attraits ainsi la tunique abaissée
^^H
^^H
^H Ctiarme et n'arrête point Tanioureuse pensée,
^^B
^^^1
^B Qui se glisse, contemple et dévore à loisir
^Ê
^^H
^H Mille appas devinés par le brûlant désir.
^^^
^^H
^H La comparaison suivante avoit aussi été fournie par Vida.
^^^
^^^1
^B Le Tasse, chant ix , s tance XLvi :
^^H
^^H
^V Cosi scendendo dal natio suo monte
H
^^^
j Non empie humileil PoT augusta sponda;
^^H
^^^
Ma scmpre più, quanto é più lunge al fonte j
^H
^"
Di nove forie insuperbito abonda j
^^^Ê
Sovra i rotti confini aka la frontc
^^H
Dî lauro, e vincitor d* intorno inondi;
^^H
E con più corna Adria rispinge, e parc
^^1
Che guerra porii e non tributo al mare*
^^H
Dans le premier livre de la Christiade on iit ;
^^H
™
Pln'tfirû veluîi VtsuU de venice primùm
It Padus,exiguo sulcarts sata ptrtguîa rivai
H me mûgîs a (que mugis labctido viribus au dus
i Surgit, latlfluoque sonans se gurghe pandit
Victor : opes amnes yarii auxiliaribus undîs
Hlnc addunt ; atqut indt sua nec se caplt alveo
^m
Turbidus, haud uno dum rumpat m œquora cornu.
■
On peut voir, dans rimitation de ces beaux vers, comment l'homme de
H
génie sait, par un seul trait, enchérir sur un heureux modèle : le Tasse
r
a fourni l'idée qui termine sa comparaison empruntée; mais cette idée
F
offre un perfectionnement très-remarquable :
Epare
' Che guerra porti e non tribuio al mare.
Traduction française ;
Tel rÉridan modeste, en essayant si course,
L
A mesure qu'il roule éloigné de sa source ,
S'accroît, et i'enrkhit du tribut des ruisseaux : *^
â
1
V
\
ïii • JOURNAL DES SAVANS,
Bientôt, enorgueilli du faste de ses eaux.
Il brise de sts bords l'importune barrière.
Développe son lit, dresse une tête altière, , ^ji^i
£t>de ses bras nombreux, sans cesse repoussant
Tout obstacle jaloux de son cours grandisiint.
Semble verser au sein des mers Adriatique*
Plutôt des flots guerriers que des flots pacifiques.
Le Tasse a imité du même auteur la comparaison suivanttt
Chant XVII, stance XXXV :
Corne air hor che *1 rinato unico augello
] suo) Eihîopi a visîrar s'invîa
Vario e vago di pi m ma, e rlcco e bello
Di monilfdi corona aurea natia;
Stupisce il mondo, e va dietro e a ilatt
MeravigiTando essercito d* alati.
Vida Favoit employée dans son hymne au Christ :
Qualh u b'i , ex ut us $en ium ^ nit îdusque j uvtn ta ,
Punicels surgit phmmx hfunttt flinnn ,
J unique suos adlt j^thhpes, Jndosqucrevhit»
Circa Hlum volucres varïtE cùmhantur euniem.
Et varto indulgent caniu , plausuque stquuntur»
Ilparoît que Vida tenott beaucoup à cette comparaison, puisqu'il l'a
aussi placée dans h CunisrikiyEt livre dernier.
M» Baour-Lormîaii a traduit ainsi ;
El tel que, sVcKappant de son bûcher de fleurs,
Le phvnix ranimé fait briller le» couleurs
Pont la riche inconstance embellit son plumage,
Charme Técho du ciel de son divin ramage.
Et, roi du peuple ailé> qui fadmire et le suit,
Comme un asfc nouveau, dans l'air voyage et luit*
Qui n*a souvent admiré ces beaux vers de la stance XX du livre XV
de la JÉRUSALEM DELIVREE î
Ciace r aita Cartago, e a pena i segni
Pe r alte sue ruine il lido serba ;
Aloiono le citià, moiono i regnî;
Copre i fasti e le pompe arena cd herba ;
E Thoom d' esser monal par chc si sdcgni!
O noîira mente cuprJa c superbal
Sannazar , dams son élégie sur la destruction de Pouzzoles , avoit dit ;
MARS 1810. "^^^ ' ' Mî
Et querhmtr cho si nostm data nmpora vkœ
Diffuglufttf Orbes mors violenta rapît.
Fata trahunt hommes; fatîs urgitttibus ^ vrbes
Et qutdcumque vides auferet ipsa dits.
Je n'ai pas besoin de faire remarquer combien le Tasse a ajouté ea
îjTirtgeset en expressions à ces vers de Sannazar, et sur-tout l'art avec
lequel il rejette à la fin fa réflexion, ei l'homme semble se plaindre d* être
soumis aux lois de la mort! Mais il fiut dire aussi que Sannazar, dans son
poème DE Partu Vjrginis, livre II, avoit rendu la même idée d'une
manière qui avoit pu indiquer celle que le Tasse a préférée,
Obruiiur fproprtis non agnoscenda ruitnsj
Et querlmur, gcnus tnfelh, kumana la tare
Memlra œvo^ cùm régna palam morîanturet urbes*
M* Baour-Lormîan a traduit :
C'est là que fut Carthagef
Mais Carthage n'çst plus; quelque foibie débris
La recommande à peine au voyageur surpris:
Ses pompeux ni on urne ns ont disparu sous l*herbe#
Ainsi tombent la ville et Tempire superbe,
Hc'îas! et cependant l*homme, né pour souffrir.
Quand tout meurt à ses yeux, s'indigne de mourirt
O démencel
Les diverses citations que i*aî faites des vers de M. Baour*Lorinîan,
luffiroient sans doute pour donner une haute idée du mérhe de sa
traduction» elle est un grand et beau monumeot élevé à Thonneur des
deux littératures. Je consacrerai un second article à examiner, ainsi que
je i'ai annoncé , les détails de cette traduction, à en apprécier le caractère,
sur- tout si M. Baour-Lormian publie bientôt, comme on rannoiice, una
nouvelle édition avec des corrections importantes.
RAYNOUARD.
Mémoire sur timpoitatlon en France des Chèvres a duvet de,
Cachemire, par M. fessier. Paris, 181^, ///-^/
Toutes les personnes qui prennent intérêt aux progrès de l'industi îo
parmi nous, ont vu avec un vrai plaisir le succès d'une opération qui
tend à introduire en France la race des chèvres dont le duvet sert \
febriquei ces étoAes si fameuses dans tout l'Orient sous le nom de schalsi
jjd JOURNAL DES SAVANS,
et si connues en Europe sous la dénomination, très-impropre à tous
égards, de cachemires. Les premiers rapports qui se répandirent dans le
public à ce sujet, oflroient des circonstances si difficiles à concilier et
des notions géographiques si évidemment inexactes, qu*on ne dut pas
s'étonner de voir fe scepticisme s'en emparer et révoquer en doute
la possibilité de ropératîon, uniquement parce qu'elfe étoit mal racontée;
f opinion où Ton éioitqu*onne pouvoit se procurer la véritable race des
♦chèvres à duvet sans pénétrer dans le Kaschemire, ou même jusque dans
le Tibet, cette opinion ne pouvoit s'accorder avec ïa rapidité d*une
course de quelques mois et le prompt retour du voyageur qui I avoir
entreprise. Celte difficulté, et d'autres encore, faisoient naître des doutes
et délirer des éclairci:>semens , quand AL Ternaur donna une notice
historique abrégée de ce qui avoit été entrepris et mis à exécution :
cette notice ei»t insérée dans le n*"* 17 j du Bulletbi de la société
d'encouragement»
Depuis cette époque, l'arrivée des chèvres sur fe sol de la France, et
la vue du précieux duvet qu'elles portent, ont rendu toute discu^ision
superflue; mais, comme celte opération n'intéresse pas moins Thistoire
naturelle et fa géographie que le commerce et l'industrie, on en verra
peut-être avec pbisir un exposé succinct: nous le tirons principalement
du Mémoire qui a été lu à racadémie des sciences et |H)blié par
M Tessier, chargé parle ministre de l'intérieur de s'occuper des soins
relatifs à Tarrivée des chèvres à duvet, à leur placement, et à I amé-
lioration de leur état .sanitaire.
On est resté lojig' te jnps dans l'incertitude sur I*esppce d'anîrnal qui
produisoii le duvet dont It^s schals sont fal>riqué>* Dans la vue deili.siiper
celte incertitude, M, Ternaux, il y a quelques années , donna ordre à un
voyageur qu'il avoit en Russie^ de se trouver à la foire de Makarief, lieu
du rendez-vous de tous les comn^erçans de l'Asie, pour y prendre des
renseignemens précis* En effet* un Arménien fit voir à ce v^^yageur un
échantillon de duvet, et promît de (ui en procurer itne certaine quaniilé
à la foire prochaine, II ren»plii ^a prome^^se, et a|>porta soixante \h xts de
duvet, qui furent envoyées à M* Ternaux, renfennées dans un coussin
à lusage d'un courrier russe qui se rendoit à Pari:»: cette précaution étoit
nécessaire» parce que l'exportation du do^et éioit alors défendue par la
cour de Russie, D'un autre côté, le capitaine Charles Baudin» parti pour
Calcutta en 1 8 1 4 9 en rapporta , l'année suivante , quelques petits ballots
de duvet provenant dîiectement du Tibet, Les récils de divers voya-
geurs s'accordoient à établir que la race de> chèvres qui porfent le duvet
^etoit répandue dans diverses contrées de Ja Fer se, de l'Inde et de la
MARS 1820. iî7
Tartane; et une tradition, sur Texacthude de laquelle il est pennis de
conserver quelques doutes , portoii que , dans une de ses expédiitoos , le
fameux Tamas Koulikhan avoit ramené iroîs cents de ces animaux,
qui avoîent muliiplié dans le Kaboul , le Kandahar , la grande Boukharie^
et jusque dans la province de Kerman.
Ces indications, quoique vagues, suffisoient pour faire présumer
qu'on pourroir, sans entreprendre fe difficile et péulleux voyage du Tibet,
se procurer la race des chèvres à duvet, et peui-êrre la naturaliser en
France. Le Kerman, quoique situé sous le trentième degré de latitude,
est, k cauie de son élévation, une province plus froide que certaines
parties de la France. A la vérité, en prenant ces animaux ailleurs qu^au
Tibet, on n'avoit pas une certitude entière d'obtenir leur race exemple
de mélange, et leur duvet au degré de beauté désirable. Les schals qu'on
faJbrique dans Je Kerman sont, suivant un voyageur judicieux (1), fort
au-dessous de ceux de Kascheniîre, pour la beauté et fa finesse : mais
ces différences pouvoient tenir autant à flmperfection des procédés de
fabrication qu'au mélange des races; et dès qu'on pouvoit vérifier la
chose sans aller jusqu au Tibet, on ne pouvoit nier qu'elle n'en valût
la peine,
M. Amédée Jaubert, professeur de turc à Técole spéciale de langues
orientales, se chargea de cette intéressante commission. Il partit de
Paris au mois d'avril 1818, muni de toutes les recominandations qui
pouvoient faciliter son entreprise: celle de M* le duc de Richelieu, alors
ministre des affaires étrangères, devoit sur- tout lui être utile en Russie;
et Ton peut dire que ie succès qu*il a obtenu tient en grande partie à
celte circonstance heureuse , qui a levé pour lui tous les obstacles et
aplani toutes les difficultés.
Le récit du voyage de M, Jaubert est tiré, comme en avertit
M* Tessier, d*une lettre écrite à M, de Kozodawiew, ministre de fin*
lérieur en Russie, On y voit que le voyageur français se rendit d';*bord,
par Odessa» Tatigarog et Astrakhan, au camp du général Yermolof,
au pied du Caucase, Dans cette route , il n'avoit négligé aucune occasion
de prendre des informations près des marchands de la Boukharie^
des Kirgis et des Arméniens qui fréquentent ces contrées. Ce fut d eux
qu'il apprit qu'if trouveroit chez les Kirgis des bords de TOural une
race de chèvres qui étoient presque toujours d'une blancheur éclatante,
et qui portoient, tous les ans, au mois de juin , une toison d'une finesse
remarquable. Les échantillons qu on lui donna le convainquirent de
^
(i) M, Ptiprc, Vûjfûge en Perse ^ tçm* //, p.j/fs
i
t
r|8 JOURNAL DES SAVANS,
la conformité de ce duvet avec celui qui venoît en France par la Rqssîe.
II trouva en effet, k quelques centaines de werstes du Wolga^ dans
les stèpes qui séparent Astrakhan d'Oreniboug, des flocons épars de
duvet, qu! lui firent présumer favorablement de Tissue de son opé-
ration. Le nom de c^^» Tctet, que portent tes chèvres à duvet chez les
nations de ces contrées, suivant M. Jaubert, furent pour lui une nou-
veHe marque quji ne réussiroit pas mieux en allant plu> loin. II fii donc
là ses acquisitions , et il acheta chez les Kirgis Kara-Agadji, ou de
TArbre noir, et chez fcs Khaisak, en tout douze cent quatre vingt-neuf
bétes. II reprît alors la route d'Europe, en faisant passer te Wol^a à son
troupeau à Tsaritzîn, La saison devenoît rigoureuse, et la niortniité
faisoit des progrès parmi les chèvres. La mer d'Asof étant alors obstruée
par les gfaces, on ne put, comme on en avoit eu le projet» faire em-
barquer le troupeau àTangarog; il fallut le conduire le long des côtes
jusqu'à Théodosie, oîi il arriva le 24 décembre , après une perte de
deux cent quatre vingt-huit chèvres: là on le partagea en deux envois,
dont lun , de cinq cent soixante-six bêtes, arriva à MarseiHe vers la mi-
avril, sur un bâtîinent russe; l'autre fut un peu plus tard amené au lazaret
de Toulon, par M. Jaubert lui-même,
Ceslàfepoque du débarquement delà première troupe que le récît
de M. Tessier prend le caractère de celui d'un homme de Tart et d*iin
témoin oculaire. L*équîpage du vaisseau et les chèvres elles-mêmes ,
devant être soumis aux lois de la quarantaine, passèrent d;ms le lazaret
de Marseille» ou il fut décidé qu'ils resteroient trente fours. Ce fut pour
les animaux un repos bien peu conforme aux besoins qu'ils avoient d'un
a;r très-libre , d'une nourriture abondante, et de soins particuliers. Les
ressources offertes par les intendans de la santé, les soins dun vété-
rinaire qui s enferma dans le lazaret pour y être autant de temps que les
chèvres, ne purent empêcher qu'il nen pérît quelques-unes chaque
[our. M. Tessier, qui arriva à MarseiHe le 6 mai, eut dabord à s occuper
des chèvres malades: on avoit annoncé que fa troupe étoit attaquée du
tournis et de la gale. M. Tessier révoque en doute l'existence de la
première de ces maladies, et paroît disposé à auribuer les symptômes
qui favoîent simulée à de simples mouvemens spasmodiques: quant à la
seconde, elfe étoit grave et générale, occupoît souvent toute la peau de
f animal, sWcompngnoît dun prurit insupportable » et se compliquoit
quelquefois d'affection vertiiineuse. Cette inaladie.qui ne laîssoit paroître
que par places le long poil et le duvet, f^rça d enlever tout-à fait fun et
fautre. On ne s'y décida pourtant qu à la dernière extrémité, et en pen-
dant que le duvet repuuijeroit aussi bien , coupé par le ciseau du tondeur,
MARS 1820.
ijp
que détruk par la maladie. Ua mélange d'axonge de porc, de fleur de
soufre et de tantharides > suffit pour guérir eniierement celte aiTectiotif
qui ne semble pas avoir éié exiraordinairemenl rebtlle.
La maladie la plus funeste aux chèvres pendant la traversée , et qui
en enleva beaucoup encore dans le lazaret, étoit une sorte de phthisie
tubercyfeuse, dont M* Tessicr attribue la cause, avec beaucoup dte
raison, à Tair promptement vicié et imparfaitement renouvelé que les
animaux avoient respiré dans les deux mois de la traversée* Ils étoient
entassés dans unecaleoîi ils ne recevoient d'air quà travers les écoutilles,
et chaque individu n'avait pour se mouvoir qu un espace moins coiibidé-
rabk que la longueur de son corps: dans ces circonstances, on doit
être peu surpris d'avoir vu se déclarer une affection qui éloit presque
toujours fatale aux individus qu'elle auaquoit*«Nous en avons sauvé
to très-peu, dit M. Tessier, et de celles seulement qui étuie:it foîble-
3' mçnt afî'ectées ; c'est en joignant à leurs aliraens de la fleur de
:» soufre.»
Le terme de h quarantaine étant expiré, et les ir.divîdus Tes plus
malades étant mis l\ Marseille dans une infirmerie qui avoil été pré-
parte pour eux, il fallut choisir un local pour placer les cent chèvres
que fe Gouvernement devoit prendre dans Ls deux troupes* M, Tessier
pensa que la bergerie royale, dans les environs de Perpignan, ofîriroît
toutes les ressources nécessaires, et que le Roussî!Ion, par son climat
et sa namre montueuse, devoit convenir aux chèvies du Tibet, Pour
y faire parvenir son troupeau, il préféni la route de mer, qui devoit
être moins fatigante et moins embarrassée* Les chèvres arrivèrent sans
sccïdent à leur destination ; et d*après une lettre du régisseur de fa
Lergerie royale, sous la date du 30 août, on apprend quelles y étojent
en bon état, que leur long poil revenoît, et qu'on apercevoit déjà le
duvet. Le surplus des chèvres est dans le département du Var, sur les
moutagnes qui couronnent au nord la rade de Toulon : i( en est resté
itn certain nombre dans Je département des Bouches-du-Rhône. En
résultat, des douze cent quatre-vingt-neuf chèvres achetées chez les
Kirgis, toute déduction unie des pertes qui ont eu lieu soit dans la
rouje par letref soit dans la traversée, ou pendant le séjour aux lazarets,
ou depuis ce temps, il en existe encore quatre cents, En songeant aux
difficultés que présentoît cette importation, on doit, comme [e re-
marque AL 7>ssfer, moins s'étonner des pênes qui ont été faites, que
se féliLÎter de ce qu'elles n'ont pas été plus nombreuses encore,
M* Tessier n'exagère pas Favantage qu'on pourra retirer de cette
opération. Pour l'apprécier avec exactitude, ilfauli dit*il, que Ton con-
i6o
JOURNAL DES SAVANS,
norsse la quantîié de duvet qu'elles donneront, le plus ou moins de fà-
cilité qu'elles auront à s*accliinnter, le genre de vie et [espèce d*ali-
mens qui leur conviendront le mieux^ Dans tous les cas, il ne pense pas
qu'il y ait lieu de concevoir des craintes sur le sort futur de la race nou-
vellement importée. Cexemple des mérinos, et celui des chèvres d'An-
gora» qu'on a entretenues tant que leur poil a été employé aux étoffes,
fui paroissent garantir la inultipitcatîon des chèvTes k duvet. CeUes-»
ci s accommodent des alimens dont vivent les chèvres indigènes; elles
ont des habitudes semblables» et Fauteur ne doute pas qu'on ne puisse
les élever dans [es plaines et même en domesticité. Suivant son obser-
vation j les métis donneront un duvet moins beau sans doute que celui
de la race pure, mais propre cependant à faire des étoffes d'une cer-
taine valeur : un fait irès-curieux autorise cette supposition. Depuis
rîm porta tton, M. Tessier a trouvé, sur des chèvres commune^, un
duvet très-fin» analogue à celui des individus de race tariare, et auque[
il ne manquait que dt la longueur et de rextensîbiilté,
La description que fauteur fait des chèvres à duvet, d'après les nom-
breux individus qu'il a examinés, se rapporte exactement k celle qu'a
donnée Samuel Turner (i); elfe convient aussi, à peu de différence
près, à cinq individus qui ont été récemment achetés de M, Dontop,
propriétaire dans le nord de l'Ecosse, pour le compte du Gouverne-
ment français, et placés à fécole royale d*Alfort. Elfe s'applique enfin
assez bien à un bouc qui avoit été tiré du jardin de la compagnie des
Indes à Calcutta, et envoyé au Muséum d*histoîre naturelle de Paris
par M, du Vaucèles. J'ajouterai encore qu'elle s'accorde avec celle que
les Chinois font de leurs chèvres à ventre jaune, qu*ils nomment fan,
et qu'ils désignent par un caractère composé du nom de la chèvre et
de celui du Tibet. Cette chèvre paroît s'être multipliée dans plusieurs
parties de (a Chine et des pays voisins. Toutefois c'est du Bengale que
les Chinois tirent les schals, quifs nomment sa-ha-la {z]\ mais rien
n'annonce qu'ils mettent à cette étoffe le haut prix qu'on y attache en
Europe, depuis Fépoque de l'expédition d'Egypte.
M* Tessier a joint à son Mémoire un postscriptum rjui n'est pas moins
intéressant; il contient, sur la fabrication des schals, des détaih qu'on a
recueillis à Constantinopfe de la bouche d'un Arménien nommé Khodja-
Yousùuf, et qui ont été confirmés par d^ux négocians» fun de Khiva,
(j) Ambassade au Tibet et au Boutan , tom, lî , p, //j. — Voyez aussi
Textratt du Voyage Ac Bogie , danj le petit volume de MM» Parraiid et
5illccocq,;^ /co, — (2}Kouaiigiu ki,/. XXJY^p* /2*
MARS iSiO, i6i
Tautre de Boukhara* L*Annéiiien fut envoyé, i[ y a dix hait ans, par
une maison de Constaniinople, pour faire fabriquer des schals sur des
dessins nouveaux donc il étoit porteur; et il a habÎLé Iong*letnps dans
le Kaschemfre, à Lahor et à Ptfïschawer- C'est dans ces contrées qui!
a recueilli les notions suivantes. \ ° Uanimal dont le poil sert à k fabri-
cation des schafsj est une chèv^re dj Tibet, et non le chameau à une
bosse, comme on Ta cru a^sez long- temps, nî le mouton, comme
favoit positivement asiuré M. Bogie (i). 2»° Cette chèvre ressemble à
une chèvre ordinaire, ayant des cornes droites, de couIeLir plus ou
muin> blanche, ou d*un brun très-clair; un poîl grossier recouvre le
duvet laineux qui s'ejuploie uniquement et sans mélange dans Us fa-
briques. KhDdja-Yousouf a vu k Kaschemîre vingt-cinq ou trente de ces
chèvres, qu on y garde seulement par curiosité. 3.** Ce sont des femmes
ou des enfans qui en extraient le jarre et les parties hétérogènes. Les
flocons de dUvet sont cardés, sur des tapis de mousseline d^s Indes «
par de Jeunes filles, qui ne se servent que de leurs doigts pour allonger
la (aî:]e san^ la briser, et la nettoyer des impuretés qui la salissent : dans
cet étal, elfe est livrée aux teinturiers et aux fileuses. 4*** Le métier sur
lequel on travaille est simpTe et horizontal; Touvrier travaille sur l'en-
vers; un enfrmt placé aU'des>ous, et ayant le dessin devant lui , Tas^ertit,
^ chnque cuup de navette, des couleurs quil doit employer, et dont les
bobines sont chargi'es, 5.'* Un 5cha[ de la plus grande beauté coûte
cinq à six cents roupies [ 12 à 1 joc francs]. 6.*' Le pluâ beau duvet
vient de* cantons de L;isa et de Ladalt; mais on en lire aus*»i beaucoup
de Kaschgar et de BoLhara, qui tit importé dans le Tibet et le Ka^che-
niire, et rendu ensuite sous fa forme de schals fabriqués. On apporte
le duvet à Kaschemîre en balle et mélangé avec le poil le plus grossier.
On peut comparer ces détails avec ceux qui ont été recueillis par un
voyag€ur fr^inçais en Perse, et qui ont été indiqués dans Textrait que
iiuus avons donné de son Voyage (2).
J. P, ABEL-RÉMUSAT.
L'Art de vérifier les da tes des faits kistùriques , des
inscriptions, des chroniijues et autres anciens monuniens avant
ïère chrétienne t &c.; par un Religieux de la congrégation de
(l) VKiyi'i Touvrage cité précédemment* — (2) Journal des Savans, octobre
1819. Voyt-^ aussi Textrait du Voy<»gc au Kaboul, avril 1818*
idi JOURNAL DES SAVANS,
Sami-MauT (dom Clément ), &€. A Paris, chez Moreaii et
clier Anhus-Bertrand, i8ip; tom^I, 11^ III, in-SJ*
SECOND EXTRAIT.
Aî^RÈS Fabrégé chronologique de Thistoire sainte, et les tableauic
accessoires qui le complètent, dom Clément commence les annales
profiuies par celles de FKgypte. On trouve d'abord ici une table des deux
* cycles soïhiaques ou caniculaires qui se sont écoulés, Tiin depuis Fan
26s j avant J.C. fusquVn 1 326 , Tau tre depuis 152J jusqu'à Fan 15 j
de Fère vulgaire, avec Findicatîon des [ours de Tannée julienne oii chaque
année égyptienne a commencé* Cette lahie est conforme au système
de Fréret, en ce qu'elle suppose que le cycle de quatorze cent soixanie-
nne années égyptiennes, équivalentes à quatorze cent soixante ans ju-
liens, a été connu, établi en Egypte dès le XXVJll/ siècle avant notre
ère; elle est confonne au sentiment de Des vîgn oies, en ce qu elfe termine
le second cycle sothiaque à Fan i 3 î de J. C. , et non pas à Fan 138,
comme Fréret le conclut d'un texte de Censorîn. Desvîgnoles pense que
Censorin a mal calculé; quau lieu de descendre à Fan 1 jS, il devoit
s'arrêter à 135: niais Fhypoihèse dun premier cycle sothiaque employé
par les Égyptiens entre les années 27H5 et 1325 avant J. C, se con-
cilie mal ici avec ce qu on a dit de Fannée ancienne dans le tome l^ de
fouvrage-qui nous occupe. En effet, nous y avons fiiit remarquer une
dissertation extraite du sixième livre de Desvignoles, et qui tend à
éiallir que les Égyptiens n'avoi -nt eu que des années de trois cent
soixante jours jusqu^au moim-nt où , Fan \ 522 ou t 525 avanï J, C, ils
y ajoutèrent cinq jours ép:tgomènes, et imaginèrent le cycle sothiaque,
dont la quatorze cent soixante-unième année devoit compenser tous
les quarit* de jour négligés dans k^s piécédentesi et réiafilir fa coïn-
cidence de Fannée ciiile et de Fatin e tropique. S'ils avoient connu ce
cycle dès Fan 2785 ava t Fère chréienne, comment auroient* ils tardé
quatorze cent s axante ans à compter les cinq jours ép:igomeiie>î Com-
iTient auroient-its adapté le cycle taniculaire à des années de trois cent
soixante jours!
Au milieu de tous les systèmes relatifs à Fhistoire chronologique des
anciens temps dtr IXgypte, dom Clément s'esi attaché , au moin^dejHiîs
Mœris , Ji celui d'Héiodote, tel qu'il a été exposé par M, Larcher. Ainsi
Maris meurt et Sésostrib lui succède Fan 1356 avant J* C. ; et de ce
point commence une série de règnes et dt- dates, avec des sotnruaires et
même plusif ur^ détails hrsioiiques principalement puisés dans Hérodote.
>Jous $omme^ loin de blâmer le choijt de ce système ; mai^ nou* ignorons
r
MARS 1820. i<îj
s'il n'eiltpas été utile d*indîquer [es autres hypothèses, ne fût-ce que
pour faciliter fa lecture des livres d^histoire où eKes sonÈ suivies. Il n*est
nen dit ici ni du travail de Marsham sur la chronologie égyptiennCf
ni des recherches de Fréret, ni de beaucoup d'autres conjectures* Fréret
croit Sésostris pFus ancien; Bossuei au contraire avoit adopté l'opinion
de ceux qui le confondent avec Sesac» vainqueur de Roboam vers Tan
97* avant notre ère; et les auteurs anglais de ('Histoire universelle ont
trouvé tant d'obscurité dans cette chronologie ^qu ils n'ont voulu marquer
de dates qu^ partir de ravénement de Psamménque, Faïi 670,
Si nous pouvions parcourir les détails des abrégés chronologiques de
rhistoîre des Tyriens, des Syriens, des Assyriens, des Mèdes et des
Perses; nous bornerions aussi nos observations critiques h regretter que
doin Clément n'ait pas joint aux" dates qu'il préfère, Tindication de celles
que d'autres chroaologistes ont adoptées. Par exemple, il place entre les
années 1 96S et 1 8 j6 avant J, C, les règnes de Ninus, de Séniiramis et
de Ninias, et nous avouerons que l'opinion qui les retarde de six h sept
siècles , opinion suivie par Bossuet , et soutenue par M. de Volney,
nous sembïeroit plus probable ♦ plus conforme, comme Ta dit Bossuet,
à la supputation d'Hérodote. Il seroit permis aussi de retrancher de la
fiste des rois de Médie le Cyaxare II que doni Clément, à Texeinplo
de plusieurs chronologistes , a placé entre Astyage et Cyrus. Ce
Cyaxare II, appelé aussi Dû nus le MciUt n'est, selon Fréret, qu*un roi
de Babylone surnommé le Mcdt à cause de son origine ; il nous semble
qaen le maintenant parmi ïes rois des Mèdes, il convenoit au moins
d'avertir que celte opinion avoit été contredite.
Il s'est glissé quelques inadvertances dans fa chronologie des rois de
Babylone. Par exemple, on a placé sous f année 2218 (avant 1ère
chrétienne, Aiardocentis , en ajoutant que ce prince est, au jugement
if habiles critiques, le même que le Afardocimpadde Ptolémée et le AiéroJach-
Baldddn du prophète Istn\ Après avoir appliqué à ce monarque un texte
de Jérémie, on continue immédiatement par ces mots: Afardocentis
mourut Vàn 2t6j AVANT Jesus-Christ. C*est la conc'Usion de far-*
tic le : cependant , quelques pages plus loin , sous le titre de second
royaume de Babylone ,ei dans une nouvelle série de rois, on établit»
sous Tannée 711 (toujours avant J, C. ), Âlardokempad^ le même (on
ne peut guère en douter) que Mérodach-Bahidan quU ayant appris la
guéris on miraculeuse d'E'^échlas ^ lui envoya des amtassadeurr, &c. On
auroit évité cette confusion, si Ton avoit commencé par exposer les
différens systèmes relatifs à la chronologie assyrenne* Dans ftiat oîi
Ion a laissé ces notices, il est naturel que Je Iccteuf demande si Ion
I
â
1
\6Ji JOURNAL DES SAVANS,
admet, oui ou non, deux Mardocejnpad, et comment celui qiiî e<;t mort
fan 2î6j avant Tère vulgaire seroit un conieiiiporain d'haïe, et Turij
des successeurs de Nabona^sar dans le Canon de Ptoléoiée.
Des parties moins cultivées de rhisioire et de la chronologie ancienne]
sont ici éclairées par une suite de petits abrégés chronologiques, qui en'l
gér'éral nous ont paru rédiges avec assez de soin, et qui concernent
les rois des Parihes, d*Arménic, de la Médie Airopatène, de Bactrîe»
dTmesseï d*A(banîe, de Cofchîde, dlbérie, dWdiabène, de Cap-
padoce, , . . de Carie, de Rhodes, de Thrace, 6wC* Ne pouvant appeler
Fatientionde nos lecteurs sur tant de détails j nous nous hâtons d'arriver
à rhîstoire d*Athènes et de Lacédémone. Un précis de I année atlîqué
contient l'indication de quelques-uns des cycles qui avoîent précédé celui
de Méton , Fexplication de ce cycle rectifié et quadruplé par Cafippe, et
h nomenclature des mois athéniens* Doiu Clément n'avertit point des
doutes qui se sont élevés depuis long-temps sur Tordre des deux mois
mxmactérion et pyanepsion (i), H transcrit ensuite fa version latine et
une traduction française de la chronique de Paros, «ans y joindre ni le'
texte grec I ni aucune remarque critique; il renvoie aux mémoires de
Gibert et de Fréref, Suit une table des archojites d'Athènes avec indi-
cation de ceux dont les Marbres de Paros font mention; c'est la table que
Lydiat a disposée, et qui n*esi exempte ni dniterversîons ni de lacunes.
En expliquant ensuite la forme de Tannée olympique, on fait dire à
Pindare, dans sa troisième ode, que les olyiiipîades arrivoient tantôt
après quaranie- neuf mois, tantôt après cinquante. Ce nest pas Pindare,
mais son scholiaste, qui fait cfeîte remarque : Eyvdstf Ji i ayir, TniTi/isr Sf^
7it^^3u>f}(t tffU /Mivm , m7» A d^ mfTiitQfJA. Du reste, cette notice distingue
avec précision les différentes espèces d'années olympiques, !es communes
ou de (rois cent cinquante-quatre jours, les embolismiques de trois cent
quatre-vingt-quatre, celles de trois cent quatre-vingt-sept tous les seize
jins, celles de trois cent cînquante-sept tous les cent soixante ans. Cène
distinction est marquée soigneusement dans une table des cent quatre*-
vingt quatorze olympiades depuis Tan '/yô avant J, C, jusqu'à fère
vulgaire. L'une des colonnes de celle table détermine les jours juliens
ou Ion suppose que chaque année olympique a cojnmeiicé; une autre
colonne contient les noms des vainqueurs, des archontes» &c., et la
mention des événemens les plus célèbres. Ces préliminaires conduisent
(i) V(/ri, sur la question de savoir lequel de cei deux nioif précédoit
Taiitre » un Mémoire de Al. Butcman, traduit par M. Halma dans Is Chrono-
lôgie de Piolémée { tonu Ul dt VAima^f^tt). ^ t^^ "J'
MARS TsIôT
t6f
i une chronDrogie hislorîqtie de la république d^Aihènes et du royaume
de Macédoine ; car on a jugt à propos de réunir et de confoiidre ces deux
articles, qui auroient pu être iiéparés selon la méihode. suivie dans tout le
reste de i'ouvrage. On remonte ici à Tannée i ^82 avant J. C* , qu'on
désigne comrrie fépoque de l'arrivée de Cécrops et de rétablissement
de sa colonie dans l'Aitique* Cette date et les suivajues, jusqu'à la fin
du règne de Codrus, ne seroient pas à l'abri de toute contestation;
la mort de Codrus amène les archontes perpétuels, puis les décennaux,
enHn Its annuels , dont nous retrouvons ici {p. 2^j-tjS du tome III ) une
liste nouvelle, semblable, à quelques rectifications près, à celle qui a
été (piigt I sç , &c,) empruntée de Lydî;it, Quant aux faits historiques
jecueillis dans cet abrège, ils sont universellement connus j Fexposé en
est clair et correct, mais sans aucune observation critique. Nous en
devons dire autanî du sommaire des annales macédoniennes, dans les-
quelles nous ne rencontrons guère d'autre article clironolugique qu'une
liste des rois collatéraux de Sparte ; savoir, de ceux de la famille des
Lagîdes et de ceux de la fanuile des Proclides ou Eurytionides. Les
vingt*huit années de la guerre du Péloponnèse ne .sont pas distinguées
par les faits qui leur appartientienl ; il ny a d ailleurs aucune notice
des royaumes d'Argos, de Sicyone, de Coriiithe, de Thèbes, àc, :
rhJstoirede la Grèce ne commence qu*à Cécrops ; il n'est point parlé
d'Jnachus, Nousprésumons que dom Clémentseproposoit de compléter
cette importante partie de la -chronologie ancienne, mais qu'il n'avoit
encore pu ra^sembl^r que les matériaux qui vienntnt d'être indiqués»
Le reirte du tome 111 est rempli par des précis chronologiques à^%
Mstoires de Sicile, de- Carthage, de Mauritanie et de Numidie. Les
annafes de la Sicile n'ayant été repiises, dans FArt de vérifier les dates
après J, C. y qu'il Faji 1016, elles sont ici conduites jusqu'à cetïe époque
et même }usqu'à Fan ÏO72, La fondation de Canhage par Didon est
rapportée au Jx/ siècle avant notre ère; c'est en effet Fopinion la plus
vraisemblable. Dom Clément établit la chronologie des suflètes, autant
qu'il est possible de la recueillir dans l'histoire; et it sVppllque à dater
avec exactitude les événemens des trois guerres puniques. Il n'existe sur
Fhisîoîre de la Mauritanie avant Bocchus » que des traditions faijuleuses
ou incohérentes ; Bqcchus régnoit Fan 106 avant J, C. , et le dernier
de ses successeurs fut Edétnon, détrôné par les RomaiTis Fan 4t de
Fère vulgaire» Mais Fhi.stoife de Numidie remente à quatre cent quatre-
vingt neuf ans avant cette ère; toutefois elle ne prend quelque consis-
tance que depuis Narva » contcmporaîil d'Annil aK Massinîssa et Jugurtha
remplissent la plus grande partie de cet article. Enfin les neuf dernières
^
r
f6€ JOURNAL DES SAVANS,
ptiges du tome III renferment une chronologie historique des souveniîns
dt^ TAmbie depuis Isniaél Jusqu'à Mahomet, avec dî^^Tincrion des rois
d*Iamanou leiiicn^ et des rois d*! ledjaz. Les éditeurs avtriissent qu'ils ont
jnûsé plusieurs de ces dates dans le Mé:TToire de M, Silvestre de Sacy
sur divers événemens de Thi^tuire des Arabes avant Thégire ^i ),
On annonce que les tomes tV et V présenteront un travail neuf sur
la chronologie de Rome; c'est le plus împorcant et presque le seul
artîvfe qui reste à iriiiter. Toutefc>is le titre général de l'ouvrage annonce
de plus un abrège de I hisroire de la Chine ju^^qu'ii i'ére vulgaire. Nous
rendrons compte de ces dtux volumes , aus^ftôt qu'ils auront été publiés.
A beauco'jp d*égards» cet ouvrage nous semble recommandable ;
quelques-unes des notices quii rassemble inanquoient dans les livres
de chronologie ancienne ; et quoiqu*ii ne soit pas complet, il embrasse
plus de détails que les recueils dont jti>qujci Ton a fart usage. Nous
n'oserions pourtant pa^ le placer sur une même ligne avec TArt de
vérifier le^ dat'-s depuis fère chrétienne, ouvrage qui , malgré les imper-
fections e! les inexattimdes lout-à*fait îjievirables en de pareilles
matières, tiendra louj^airs un ratïg fort distingué dans cette branche
importante des connaissances historiques. Pour les temps postérieurs à
J. C. tffparoit que dom Clément et ses confrères navoîent fait que
rassembler des matériîiux, etqulls nuni laissé que de .^îm[>les esquisses;
les éditeurs en ont tiré tout le parti possible. II convient d'observer
d ailleurs que l'élude des temps antiques exige des recherches fort difîi-
rentes, par leur nature même, de celles qui ont pour objet le moyen âge
et les siècles modernes. Les sources ne sont pas des chartes » des
chroniques, des relauons contemporaines; il faut recutîllir et comparer
les textes des historiens classiques, tout ce qui reste de monumens
de (antiquité, les débris de plusieurs anciennes annales, plu< ou moins
fidèlement conservés par les chronographes ecclésiastiques- C*étoît une
carrière nouvelle que le^ Bénédictins auroient sans doute heureusement
parcourue, s'ils av oient eu le temps de sy livrer. Mais un point qui nous
semble important, est de bien se rendre compte de ce qu'on entend
parce titre d\îrt Je vérifier Us dates : nom nvons peine à croire qu'un tel
enseignement puisse consister en de simples tablettes rédigées d'après
certaines opinions ou hypothèses particulières; nous croyons qu il ne doit
pas seulement offrir des résultats, qu'il doit encore mettre sur la voie des
recherches et en faire connoître les méthodes.
DAUNOU.
(i) Académie deî inscriptions et belles-lcttrci, tcm, XLJ/L
^
MARS 1820.
n«7
I
(TINEIlAnY or Greece, conîûimng one Inmdred routes in Attica ,
Bœotia , Phocis , Locris and Thessaly , hy sir W, Gell, London ,
1818, ///-(S'/ de 3 i<î pages.
Le fong séjour de M. W* Gelldans la Grèce lui a fourni Tes moyens de
composer une sorte de manuel du voyageur, qui embrasse presque toutes
les routes les plus importâmes de la Grèce. Dès 1 S 1 7 , tl a publié son
Itinéraire de la Morte [In-S^ 2 48 pages) : il publie en ce moment un
travail semblable et non moins intéressant sur la Grèce proprement
dite. Ces deux ouvrages sont rédigés sur le même plan.
Le premier renfeune six chapirres, iniimlés Achdie , Elide, Aîesséme,
Arcadie , Argùlidf ^ Laconie , et donne les détails de 116 routes diflé-^
rentes,
L'Itinéraire de la Grèce contient sept chapitres, Afégarïde , Attlqta,
Bcùlie, PhocidCi Locride, Thessalie^ Eiolte et Acûrname ; et cent routes:
en tout, deux cent seize routes qui traversent la Grèce et la Moréc
dans presque tous les sens*
Les intervalles des lieux, par chacune de cts routes, sont marqués
en heures et minutes de marche, quelquefois même en yard^ [ j pieds
anglais]; et Fauteur a indiqué avec soin tout ce qu Viles peuvent offrir
d'intéressant sous le rapport des antiquités, du sol et des productions du
pays.
Nous n'entreprendrons point de suivre M. Gelf d^iw^ Its détails de
chacune de ces routes; son Itinéraire est une sorte de livre de pos^e
rédigé avec tant de concision, qu*on ne sauroit en présenter un extrait»
Nous croyons que le seul moyen de donner à nos lecteurs une idée
exacte de futilité que peut offrir cet ouvrage, c'est den traduire un
court fragment. Nous choisirons la route d'Eleusis à Mégare.
On voit pju-teurs vestiges de l*ancit.'nne Eleusis sur le fîanc
septtfntrional delà ninniagne; et un puîîs, enioiiré d'un si grand
nombre d'anciens blocs , qu*on peut siippoî^fr «ivec probabilité
que cVst ie puits de Callichoriis* — De la une route tourne à
droite vers Thebes, par Blachi, ancien château, Saran la Pota-
moi et GypKto-Castro.
9. On tourne à gauche, à rextrt^mité de la maniagne d'Kletisîs,
appelé peur-ctre anciennement Ertntcs , à dix-neuf ct-nc soixante-
six yards d'E'eysis, Observez à droite un furnuit/s, un m n me-
lon ei un canal qui se dirige vers une moni ^gne appiiôr Afa'-
gofda j dans la plaine 1 hriasicnne, d'où le Crphrs*us CHoIoit au're-
iois par ce canal dans la plaine, au suJ d'Éleufis. Sur [a mon-
tagne de Magoula, i! y a 4ç$ carrières et une losr carrée, Dans
lUurci hMm.
Il*
idS JOURNAL DES SAVANS,
les bMis50ns à g^iuche, on petit voir une caverne qui esr pe^t-
etrc celle du brigand Procruste/
A droite ^ à quelque distance, grand village de Mantra.
A gauclic, un puits* et une source, probablement celle qu'on
nommoit auîrefuiî Anihlot ou la Hcurie, où Ceres fui accueillie
par Megauirc. Il y a quelques blocs près de la source; à droite,
vejiiges de maisom : cVsi pcnt-ctre la plaine Rharienne.
5- Vestige5 d'antîqwilés : a gauche, îumulus, près du* rîvage,
ij. Ruines ou foncUtiorit , a droite; la mer tout prés , à gauche:
la palestre de Ccrcyon rtoit dans ce voisinage»
2* Contmencement de la montée du mont Kerata : vestiges de
Tancicnne route,
IJ. Tour au haut de In montée: à gaucbe» fabrique de térében-
thine,
42. Après une descente rapide parmi des boîi de pins , plaine de
Mè^arc : oliviers sauvages, qui produi^eni une huile amcrc, bonne
4 brûler; à drv>ite, Uf e église,
8, Aprè> avoir dèpasst^ beaucoup de blocs antiques, on \ijù , u atu.: ,
im tumuhis i à droite de la route, e.t une cirerne et t'ue carrière,
prés de laquelle sont des fondations en pierres coquillièrcs.
10* A gauche» de l'aT^re cote du canal, on voit le monasur** de
Phaneromenos dans IMe de Salamine ; on s'y r'rnd au moven d*«ii
bateau de passage : au-dessus du monasicre, ve^irge^ d'anci^ni
murs.
15. Petit lac; éminences boiiées à gauche.
I, Pu if s; église.
j. Vue de M égare.
3. Les dernières éniinences, avec une église à gauche et une autre
â droite ; à un dtmï-mille^^distance» nu' i ai rie.
j. Commencement de la chaîne d'cminences de la ville de MJ-
gare : on traverse un torrent; a gauche, église sur une montagne,
12, Vestiges à droite,
7. Vue de Nisée; port de Mégare i gauche: torrent.
2* Une rouie tourne à gauche, vers une montagne où sont des
ruines.
4* Moulin > à gauche, sur une dei éminencei de Mégare; tojut
prés, murs a polygones irréguliers*
Distance totale d*Eleusis à Mégare, 3 heures 10 minutes.
Ce fragment fera juger du reste. Par- tout cet Itméraire est rédigé
avec la même concision; et, d'après le soin scrujnileux avec lequel les
distances sont marquées, on sent qu1l peut servir à éclaircir la géogra-
phie de beaucoup de points de la Grèce.
MARS 1820.
ifi^
La concision à laquelle h\. W. Gell s est astreint, ne [empêche pas
fTentrer dans quelques détails qui dimiiiuent de temps en temps la séche-
resse de son ouvrage : nous citerons particulièrcînent les descriptions
é^ Eleusis ; celle d'Athènes, qui est un résumé bien fait de ce qu'on a dit
sur fa topographie de cette ville; la description de Thçbes, de Lébadée,
de Defphes : celle-ci présente même un fait assez curieux pour rhistoire
des mesures anciennes, Spon avoit remarqué que le stade qui existe à
Delphes est plus court que celui d*Athènes [i]\ c'est pourquoi on avoit
cru pouvoir donnera un stade plus court querojyinpique dans le rapport
de huit à dix, le nom de pytluque. Une observation de M, Gell détruit le
motif de cette dénomination; car, selon lui, le plus grand côté du stade
de Defphes est de six cent quinze pieds angfaîs, valant environ cent
quaïre-vingt-huît mètres; ce qui équivaut à très-peu près à fa longueur
du stade olympique
L'Itinéraire de fa Grèce, comme celui de la Morée, est accompagné
d*une carte dessinée et gravée avec beaucoup de soin. Nous avons été
toutefois assez surpris de voir qu*en certains endroits elle nesl point d*ac-
cord avec le texte* Par exemple, M. Gelf, dans ritinéraîre de FAttique,
compte, entre Athènes et Décéfie, dix-neuf mille yards [ 891 j toises],
tandis que sa cane donne en droite ligne quatorze milles angfais 011
vingt-quatre mîfle six cents yards, précisément un cinquième de plus.
En comparant son Iiinéraire avec une carte de la portion de l*Atlique
comprise entre Athènes et Mégare, que M. Gell a dressée pour la so-
ciété de^ Diletiantî , nous nous sonimes assurés tjue toutes fes dis-
tances au nord d'Athènes y ont été resserrées dans la même proportion*
Nous ne savons comment expliquer pourquoi cette carte est si diffé-
rente de celfe qu'a dressée M. Fauvel d*après des observations exactes,
eu l'assujettissant ^ un si grand nombre de rayons , qu'il nous paroît îm-
possil)le d'en déranger les bases. Il est tout naturel que, dans son livre p
M. GefI suive sa propre carte; mais il est assez singulier que , dans la
carte jointe à ce même livre , il suive la carte de M. Fauvel, Cette con-
tradiction est étrange, et prouveroit que M, Gell n'est pas bien sûr luî-
niéme de la justesse de son iravaiL
En terminant son Itinéraire de la Grèce, M, W. Gelf regrette de
ne pouvoir donner de semblables détails sur TEpire, et en général sur
les contrées à l'ouest de la Phocide. II espère que quelque voyageur
anglais partira de la colonie de Corfou, et fera connoître bientôt ces
^ ■ , ■ i ■ ^.g^^^^^^m » mm — __^ ^ , ^ ,i ,^
(1) Cf. Barbie du BùcBge^ Analyse da cartes pour k Voyage du Jeune Ana-
eharsis m p- j*
i^a JOURNAL DES SAVANS,
contrées intéressâmes, où. sont cachées les ruints de Tantique Dodone,
]| nous est bien agrcaMe de pouvoir annoncer que les voeux de M, W.
Gell et ceux du monde savant ne tarderont pas à être accomplis par
la publication du Voyage en Epire de notre compniriote M. le docteur
Poucquevîlie j consul général à Jannina. On imprime en ce moment
le quatrième et dernier volume de riinportant ouvrage de cet excellent
observateur, dont les taleiis et le zèle sont déjà si avantageusement
connus.
LETRONNE.
Deux Lettres À Mylord Comte dAberdeen sur
t authenticité des hiscriptiotis de Fourmonî; par M. Raoui-
Rochette, membre de f Institut royal de France, Conservateur
du Cabinet des médailles et antiques de la Bibliothèque du
Roi, l'un des Rédacteurs du Journal des Savans , &c. Paris,
1 8 ip , î mprîmerie royale I in-^.^de 1 4o pages , avec figures.
TROISIÈME EXTRAIT,
Dans la seconde lettre, l'auteur s'attache d'à bord' h défendre Fautheû-
ticité du bouclier votif sur lequel est inscrite la généalogie de Téléclus
que M, R, F. Knight prétend avoir été copiée dans Meursius, H est vrai
que les élémens principaux de celte inscription existent dans les écrits de
Meursius et deCragius ; mais , au fond , cela peut ne prouver autre chose
sinon que ces érudits ont suivi des auteurs anciens qui ne se sont point
trompés: «et ici, dit M, Raoul-Rochette, remarquez le double argument
a> de M. R, P* Knight ; ou les inscriptions de Fourjnont s'éloigneni de
y> la tradition reçue , et alors elles sont forgées par Tignorance ; ou bien
77 elles s'accordent avec elle , et alors elles sont forgées d après elle. ^
Le mot BAFOX [chef] dans cette inscription , est, selon M. Knight,
tiré de Meursius, qui, lui-même ^ Fa pris dans un passage corrompu
d'Hésychhis : il donne pour raison que le digamma, auquel les Lacédé-
moniens substiiuoient le B, ne se mettant que devant les voyelles
aspirées, est déplacé devant «^pç. Cette opinion est étrange, et M* Raoul-
Rochetîe en fait voir la fausseté, en prouvant que le tfigêmma a été mis
indifféremiirent devant toute voyelle, de même que le B en Lacoïiie ;
ainsi tCflfc^r,/3i/ic^7y, i8*%»', ôéppw, /Sirrof, pour mouv, iÎ'xcct, ^j^rr, îppw,
*r<i| (i). CeBavoit très-probablement une prononciation approchant
(i) Salmas, ad Constct, in a^ro Htrod. p. Si, ed, CreniL
\
M.
I820*
ïu Vj et je remarquerai, d'.iprè^ Clarke, quen Thessaiie ïës habîtarirl
mettent encore un B avec son du V, devant des voyelles aspirées ou
non aspirées : ainsi ifs écrivent Botçuç^ pour 03puç (i), précisément'
comme les Lacédémoniens auroient écrit ce nom. Quant au passage j
dHésychius, M. Raoul-Rochette pense qu'il n'y a d'altération que dans]
un seul mot. Le texte porte Bct)fiç n^ ^etffiMvç jè^ çptuitamçy A^m^nç, « Oaj
>> ne sauroit admettre (observe l'auteur avec beaucoup de raison ) que le i
j> même mot signifie à*Ia-foî$ roi et soldat : il est donc probable que Ie|
» mot ^tfTitoTWf renferme quelque altération." Cette observation est très-j
juste, et M, "Raoul-Rochette navott plus qu'un pas à faire pour rétablir J
la vraie leçon. Il est cbir en effet qu*Hésychius, au lieu de 950^776^77^^,1
qui ne fait point de sens, avoit écrit 9»flt7»;^'ç, et que les copistes ooi;*
confondu ces deux mots ; ce qui leur est fort ordinaire. C*est ainsi qu>ji
comparant un passage cité par Amjnonîus avec le texte actuel de Thu-
cydide, on trouve que les copistes ont confondu les adjecdfs çp6tw)4Hfiç
et çpa.vmvïtiç (2} : dans Lysias , ils ont évidemment mis spttvûà-mçy au lieu
de çpam^puç (j):au contraire, dans Chariton, ils ont mis çpa-myiùç à
la pface de ^ùmm-m^ (4) : enfin ils confondent souvent ces deux mots
entre eux , et avec ^a-Àç et çp^^mibv {j). Cette confusion si fréquente
vient de ce que tous ces mots se trouvent dans tes manuscrits écrits par
abréviation, à peu près de la même manière; aussi, quand les copistes
vouloient les écrire en toutes lettres , ils les prenoient souvent Tun pour
I'»autre< £n restituant le mot çp^m-pç à Hésychius, on ôte au texte de ce
lexicographe tout ce qui! pouvoit avoir de suspect , et il ne reste plus
aucun motif pour en récuser l'autorité.
D'autres inscriptions au moins aussi curieuses que celles d'AmycIes,
sont les tables contenant les noms des rois, des officiers civils et
militaires de Lacédéiuone , trouvées en Messénie : Fourmont pensoit
qu'elfes avoient rapport aux événemens d une des guerres de Messénie«
M. Knight trouve par conséquent extraordiâiaire qu'il n'y soit fait nulle
mention de guerre , et qu'on n'y trouve qu une liste insignifiante de rois
et de magistrats. Cet argument, qui me paroît très -solide en lui-même,
repose uniquement sur fopinion que Fourmont avoit conçue de l'objet
de ces monuinens. Or, sans aller plus loin , il est clair que cette opinion*
là même prouve qu'if ne les a point fabriqués: « car, dit M. Raou!-
» Rochette, s*il eût voulu forger des inscriptions militaires pour rappeler
(r) Ciaîke'ji TravtL ^ têm, JV^ p* 2.^6, — {2.) Ducker ad Thucyd* IV ^ ff6*
— {]) Schoni ad Lysiam , p, j2f J tom. V, Oratt, Gn — (4) D'Orviïle ad Cha-
riton, p. ^^6, éd. Lipstensis, — [j] Variœ Ucûones Hcrodiani^ ad lib. 1 , 1 2,
8; 111,6, 23; V, 6, xz, &c<
Y 2
Ski • 'li'l
(
'J
171 JOURNAL DES SAVANS,
» les événemens cTune guerre , auroir i{ eu la mnladresse de n'y mettre
yj rîen qui répondît h son idéeî auroit-il donné une liste complète des
» gérontes [sénateurs] et des éphores! auroit*iI inscrit les juges
>' [B«<ftaioi], les conservateurs des Ivh [Hof^afpùhenaç], les devins royaux
»[ni&oi],Ies censeurs de la conduite (ou de ia mise) des femmes
3> [ Ap^<jv^«< J , les édiles [è^mXeû^t], (e greffier [ rpût/4^ût7iuV ] , tous
a> personnages dont les fonctions civiles exigeoient la résidence à la
» vill-e, et étoient incompatibles avec le séjour des camps î « M. Raoul-
Rochette \etn qu'on écarte Fopinion de Fourmont , qui lui paroîi n'avoir
aucun fondement, et qu'on ne voie dans ces inscriptions que des listes
de magistrats Spartiates, telles qu'en offi-ent une foule d^inscriptions
grecques de tout pays et de tout âge. Cette manière de considérer ces listes
est ingénieuse; elfe détruit beaucoup de difficultés, sans toutefois les faire
disparoîire toutes : car on ne voit pas trop bien pourquoi le nom du roî
Spartiate Théopompe , fils deNicandre, qui termina la première guerre
de Messénie, existe sur des inscriptions lacédénioniennes trouvées en
Messénie, si ces inscriptions n*ont point de rapport à cette première
guerre; c'est une difficulté sur laquelle nous appellerons de nouveau
Tattention et la sagacité de M, Raoul-Rochetie. Quoi qu'il en soit, il
répond victorieusement aux autres objections de M. Knight, comme,
par exemple, quand M. Knight soutient que ce n'éioit point Tusage des
Lacédémonteos de mettre des noms propres sur leurs monumens; quand
il regarde comme des preuves d'imposture les noms des magistrats
APMOITHPEX, ANIOKAPATHP{i), OU bien lemploi de YioM pour la-
psi/on, dans les mots N0M04>1AAK£S, EYPIKPateo, ou enfin le nom
AAKEAAIMON [pour A AJuJhuuAriêif ) , placé dans une roue à dix rayons, et
que Fourmont pr^noit pour /t sceau de rEfat : M. Raoul-Rochette prouve
très-bien au contraire que les Lacédémoniens écrivoient leurs nom^i de
cette manière sur les monuinens , comme on en voit des exemples sur
«ne médaille de Cohnh en Messénie, qiti ne fut publiée que vingt ans
après la mort de Fourmont, et sur les médailles de quelques villes
étrusques, 11 est donc clair que Fourmont s'est trompé : mais cette erreur
(i) Voyt\, sur ce mot, notre premier article, cabier de décembre, p. 716*
(2) Dans une discussion intéressante, où M. RaouJ-Rochette prouve cjue le
nom delà ville d'Oastus en Crète doit sV*crirc Axus , il explique comment^ des
motî eîJwc, «frer, les Latins ont fait vicus , vinurn; en disant que la diplithongue
•I éioî! remplacée quelquefois par un upsilon , et cet upsilon par un iûta. On
pourroït attribuer ausji ce changement a la presque identité de pronontiation
entre la voyelle iota et la diphthonguc o: nous en avons une preuve palpable
dans la coiifusion des mots Aetf^f cl Ai^ç dont parle Thucydide {il, j^J*
MARS 1820.
'7J]
P
même devient une preuve de sa sincérité; « car, dit Tauteur, sll eûtl
» fabriqué ces inscriptions, et deviné, plusieurs années avant qu'on en]
» découvrît desnionumens, la manière dont les Lacédéinoiiiens écrivoienlj
» leur nom sur leurs inscriptions 9 il n'eût point pris cette forme poutl
« un sceau dt VÉtat ( i )• >*
La seconde lettre au lord Aberdeen est terminée par une discussion oû^
fauteur étal>Iit très-bien, et pardesrapprochemens qui luisent propres,
que fusage des voyelles doubles, eten particulierde Xomcga, est antérieur^
dajijs la Grèce, à l*archontatd'EucIide; ce qui toutefois ne s'applique point
aux inscriptions d'Athènes, où Fusage des lettres ^simples se conserva
jusqu'à cette époque.
Dans rapj)endice à ses lettres, M. Raoul-Rochette a rejeté plusieurs
éclaircissemens qui auroient entravé sa marche, et plusieurs inscriptions
curieuses dont il se sert comme pièces justificatives. Dans une de ces
inscriptions , Fourmoot a traduit Tm^xm^^xiV'nç par les mots habitantes
prata, traduction ridicule; et comme il en est de même presque toutes
fes fois que Fourmont s'avise d'interpréter ses propres monumens,
M. Raoul-Rochetteen tire la conséquence indubitable que ce voyageur
étoit fort ignorant dans la langue grecque, et lout-à-fait incapable de
forger des inscriptions. Il n'a été question, dans les lettres de M. Raoul-
Rachette , que des monumens les plus anciens, « Le reste de la collection
» de Fourmont j dit-il, n*a pas besoin d apologie ; car la plupart des ins-
>5 criptîons publiées par Chandier, quelques-unes de celtes de Muratori,
« toutes les înscriplions lacédémoiliennes contenues dans les Nova Frao-^
» mentade Cyriaqwed'Ancône, enfin le plus grand nombre des monumens
j> apportés par feu M. fe comte de Choiseul-Goufikr, plus récetnment
5>parM, Pouqueville, se retrouvent absolument dans ce même état,
31 parmi les m.nnuscritsde Fourmont (2), « Il hut convenir qu'une pareille
coïncidence, bien établie, fournira une forte preuve de la bonne for de
Fourmont ; car n^st-il pas bien improbable qu'un homme qu'on trouve
si fidèle dans la transcription d'une foule de monumens, en ait impu-
demment forgé quatre ou cinq, sur-tout quand on est forcé d'admettre
qu'il n'auroît point compris son profère ouvrage î
En attendant que nous puissions jouir du travail complet que nous
I
(j ) Fourmont, Janj les Mémoires de l'Acad. îom. XV ^j^j^^-jf^^,
[x] On peut ajouter ie témoignage de M. Dodwelb Je lis dans son Vojagf ,
tçm* î y p, jzzi ff L'inscription que nous vîmes à Ménîdi {dans rAtiirjue) a été
» exactement copiée p:ir Fourmont, « 11 fait tmc icmblable observation dans un
e litre endroit {iotti. Il ^ p,j6^J*
\i74 JOURNAL DES SAVANS.
! promet M, Raoul-Rochette, ses observations sur les anciennes inscnpiions
de Laconie, en même temps quelles offrent une multitude de recherches
curieuses d'histoire et de paléographie, et qu'elles donnent une haute idée
de ses connoissances en antiquités , présentent dès 5 présent l'avantage de
détruire la plupart des objections élevées par AL R. P.Knight, de montrer
que lopinion qu'on s*étoJt faite de ces curieux monumens n*e&t au fond
qu'un préjugé , et de disposer très-favorablement les esprits judicieux et
impartiaux pour la défense en forme que i*auteur de ces lettres f^it
espérer au monde savant.
LETRONNE,
BlDRAG TU DEN DaNSêlE HISTORIE 00 TU KUNDSKAB DM
Dan MARKS Al LU RE polîtiske forlwU afîidenUwAske manu s*
ffipt Jûmlinger , veJ, />/ P. O. Brondsted, à\.; i hefte,
I 8 17 ; Il hefte , 1 8 1 8, Bjôbei\havn. — Pièces relatives a
f histoire du Danemank et a la cotmoissance de ses anciens
rapporis politiques, d'après differens mûnuscrits étrangers ; par
le docteur Brondsted» professeur à runiversité de Copenhague,
chevalier du Danehrog , membre des académies de Berlin ,
Turin , Florence , Corfou , et de la société' littéraire Scandinave,
Copenhague; premier cahier, 1817 j deuxième cahier,
1818, imprimes aux dépens de 1 auteur, chez le directeur
Jean*FrédcriC Schuitz , imprimeur du Roi et de l'uni*
versilé.
Les auteurs de la collection des Hîstoriisns de France avoîent promis
la publication du roman de Rou ou Rollon , fun des pîus anciens et des
plus curieux monumens de notre langue et de notre littérature; mais ils
s'excusèrent ensuite. M. de Bréquigny, dans les deux articles sur ce
roman insérés au tome V des Notices des manuscrits de la Bibliothèque
du Roi, exprima le désir quon (e publiât en entier, et déclara ne point
approuver les motifs par lesquels les auteurs de la collection des Histo-
riens de France avoient cru justifier leur résolution ultérieure de ne^ pas
y insérer cet ouvrage.
M. le docteur Brondsted, ayant passé quelque temps k Paris, en
prit une copie sur le manuscrit de M. de Sainte-Pabye, déposé à fa
bibliothèque deJVlONSIEUR à fArsetial, et il a pu!>tié à Copenhague lef
MARS 1820. 17s
fragiiiens les plus considérabies qui ont rapport à Thistoire du Dane-
inarck, doù éEoienl partis d'abord Hasting, et ensiifte R'ollon, dont les
succès, si tristement fameux dans notre histoire, finirent par rétablis-
sement des Normands dans l'ancienne Neustrie, qui fut cédée à RoOon,
M, Brondsted expose dans une préface les moyens qui lui ont procuré
la copie du texte qu il publie, et dont il donne en hiême temps la tra-
duction en vers danois. H seroit inutile de rappeler ici divers détails lit-
téraires que le savant étranger a recueillis et pu tecueillir dans le tome V
des Notices des manuscrits de laBîbliothècjue du Roi, dans la collecfîon
des Historiens de France, dans le douzième vofume de T Archéologie bri-
tannique, et dans plusieurs volumes des Mémoires de Facadémie des
inscriptions, où il est question du roman du Rou, et de son auteur
Robert Wace, qui fécrivit vers 1 160. La notice de M. fabbé de la
Rue et f'Hîstoire littéraire de France (" tam, XIII, p, p8 €t suiv.) ont
présenté quelques passages de louvrage de ce poète, qui ont permis
de fixer diverses époques de sa vie. On pourroit peut-être y ajouter le
passage suivant, oii Wace indique une circonstance de laquelle on peut
tirer quelque nouvel éclaircissenTent.
II dit, en rappelant rexpédition de Guillaume le Conquérant contre
F Angleterre,
Mes ceu oi dire a mon père;
Bien m'en souvient, mes vaïïet ère,
Quer sept cent oefs quatre maint furent,
Quant de Saint -Valéry «Vcmàri^fit,
Que nefsj que baiteawx, que esq\)iez.*
En rendant compte de la publication que fait \m savan^étranger d'une
partie d« ce roman, | avertis que Robert Wace n'a le plus souvent fait
que copier Dudon de Saint-Quentin e! Guillaume de Junîîéges. La
partie publiée jusqu'à présent finit îi la mort de Rollon. En faiîiant
l'analyse de cette première partie du Toman dii Rou, j'aurai soin de
rapporter de préférence des passages qui n'ont été cités ni par M. de
Bréquigny, ni par M, de la Rue,
L'auteur commence par des réflexions sur l'utilité des écrits qui
transmettent à la postérité les ftîts iniportans et les nobles actions qui
appartiennent à Tbistoire. If vante ies auteurs.
Qui firent livres et escrîz
Des nobles fez et ' dts bons diz
Q«e 11 barons et li seignor
Feîrent de temps àncîanor.
Tornez fussent eo'oubUance
4
Î76 JOURNAL DES SAVANS,
Se ne fust tant de remembrance ♦ * souveiûr,
Que it escriture nos fait
Qui les estoires nos retrait-
Mainte cité a |a esté
£n mainte riche poosté
Dont fios or rien ne sceusson
Se les escriz n'en eusson,
1[ cite à ce sujet plusieurs villes; il parle de Nabuchodonosor,
d'Alexandre , de Cé^r ;
Et cil reffiissent oublié,
S' il escrit nVassenr esté.
Toute rien se lorne en déclin,
Tout chiet, tout meurt , tout met a fin:
Hons meurt» fer use, fustpoTrist,
Cheval irebusche, drap vieiilist.
Toute ovre * faite o ** mains perrist.
* œuvre. "^^ av«c.
* Iaki,
Bien entent et connoiz et sai
Qucr tuii morront et clerc et lai *
Et moult iara lor renommée.
Après la mort, corte durée
Si par clerc n'en est mis en livre,
Ne peut par el * durer ne vivre. ^ autre.
H parle ensuite des changemeos des noms des pays et des villes, et
il explique d où les Normands ont tiré leur nom,
Quanque a vers septentrion
Que nos char et cieL apelon
Cest air, cest ciel ou terre ou mer
Tuit seulent gent NoRT apeler. , . .
Mant en engleiz et en norroiz
Senefie homme en franchoiz;
Ajoustez enscmbfe Nort etMANT,
Cest HoNZ de Nort en romanz* ^
NoRMANz doivent être apelé ;
Normandie qu'rlz ont peuplé
Por ceux que NoRMANZ la peuplèrent
Qui en la terre conversèrent»
Ils avoient fait diverses irruptions en France avant leur établissement
dans la Neustrie» dont le nom fut changé en celui de Normandie.
Ici Tauteur, remontant à rhi:>toire d*Hastainz, qui le premier, avec
Bier son compagnon , fils du Roi , fil en France un établissement , suppose
MARS 1810.
que Danaus , à la tête de quelques fugitifs de Traie, arriva dam le
qui reçut de lui le nom de DannemarcHE :
Se firent DANOIS apefer
Por lor lignage remembrer.
Après la descrîpuon des mœurs et de la religion des Danois, il rapporte
cette coutume :
Quant homme avoît plusors cnfanz
Et il les avoit norrii granz ,
L'un des fils retenoh par sort
Qui est son her ^ après sa morti * héritier.
Et cil sor qui le sort tornoit
En autre terre s'en alott.
Ce fut cette coutume qui força Hastainzà s'expatrier; tf aborda d'abord
en France avec une troupe considérable, y fit beaucoup de ravages;
et quand il crut que la France avoit été assez ruinée , il conçut le projet
d'aller pilier Rome.
Quant Franct fu toute essilie *, ^ ravagée»
Eor Hotte toute appareillie,
De Rome oi Hastainz parler,
Rome oi forment loer,
Qu*en tout le monde a icel jor
N'avott ctié de sa valor;
Et Hastainz dit qu'a Rome iroit,
Bier de Rome roi feroii.
Par Rome tout li monde aroit
Et par Rome tout conquerroit,
La flotte JHabtainz arrive au-devant du port de fa ville de Lune , qu'il
prend pour celte de Rome; les habilans de Lune s'enfuient épouvantés:
cependant la vilie paroît bien forufiee; if imagine une ruse singulière;
il fait dire à févêque,
Que de mal fere n'a talent;
Trop a ma ï fait > si sVp repent;
N'est mie venu por mal fere,
Mez tormente oirt et vent contraire (i).
Feignant d'être attaqué d'une maladie dangereuse, il offre de se hm
dire tien, espérant, dit*il, de guérir;
Quant moût a fait de mal en Francei
S* en veut faire sa pénitence.
J[i) Dudo Sancti-Quiniini,/. tff.
Z
1?^ JOURNAL DES SAVANS,
L'évéque consent h le baptiser :
Lx evcsquc tchdpnsay
Lî evesqne \e cresmtfla (i).
Après h cérémonie, Husiainz continue de feindre sa maladie:
M^x si je niuîr, por Uieu vous c^uicr
, Que me faites appareiller
^ Mon scpulchrc en cç moustîtr,
Jesir y voil, le lieu ai chier.
Peu de jours après on annonça la mort d*HastaInz ;
Ont Hâstainz en bière aporié
A la poite de la cité.
Le cortège est introduit dans IV-gljse; ou chante Toffice des morts. Au
moment de J enterrer ,
Hâstainz de là Mère sâillî,
L*e5pée iraiie^ fist un cri.
Au pre nierai n * coup r|tïM dona * premier.
AI evesque le chief coupa (a).
I^s Danois qui avoient formé le cortège mon trèrem alors leurs armes
jusqu*alors cachées, tuèrent , inassacrèrent toutes les personnes qui
sofirirent à eux, et s'einjjarèfeiit de laville; mais, quand ils recojinurent
que ce netoit pas celle de Rome, ils entrèrent en fureur et sacca-
gèrent tout.
Murs et mou5tiers agravantereni * (3)
Les ruines cncor i parèrent * ;
Ceu voient bien h pèlerin
Qui von! a Kome le chemin.
Hastainz retourna en France. Le Roi
L( donna Chartres et Chartraîn.
Apref cette introduction hi torique, lauteuf en vît-nr à Rou; fa
mesure dei vers change* Il dit que dans le Dnneinarck les aînés vouloîent
chasser leurs pères , et que cenx-cî vouioient que les aînés s'expa-
triassent pour aller chercher fortune» en at)andonnant Théritage [>aterne[
aux frères plus jeunes* Le Roi (ordonna ainsi j les aînés eurent recours
à deux frères, Rou et Garin (4), fils d*un puissant seigneur danois qui
(1) Suscfpiiuf ^e sacrù Siinao baptismate ûb tpisccpo . . . Sacre chrlsmdteolfoqm
delikutiis. [ UudoSancii-QMfniint,;?. 6^,\ — (1) 7 une Ansttgnus Jrr^tro dfSfluit ^
enst^fn^fue fuigfntem v igind^jferipuit, fn^ttstî/unams pr*psufetn Hhrum manu renefi-
tem f}ugulat prœsuUtn { Dudo Sanctf-Quinci?. 6^ f Willelmus Gcmeuc. p. 12q)%
-^ (5) Difuuntur a/unJafnends mttnia ( Wiilelnius Gcmcup, 2a/}. —(4) l^»4a^
Sancii-Quiniinij p. ^qj Wiileiniui Qçmtiiç. p* Ziji
♦ dL-rruisirent*
* paroisscnt.
MARS 1820. ^- "179
vrvoît indépendant. Après divers coin! ats , Rou fut Hdxxn k s^einbarquer *
ses vaisseaux abordèrent en Ecosse > où il demeura quelque temps •
espérant se venger du rot et recouvrer son patranoîne : mais une iiui^
un songe Faveriît de passer chez les Anglais» il s*y délennîne; il est
obligé de convbattre, il obtient la victoire et fnît de nombreux pri-
sonniers. H délibère s*ii retournera en Danemarck poOf se venger, ou
&*il se jtttera sur la France ; il a alors une vision pendant la nuiî. •
Ce li esioit avis quer sur mont seoît
Si haut qu'en foute France nul si haut n*t avott.
Une fontaine en son encotichenel * avoît * sommet.
Donteve belle et clere nette et satenne * coroh» * saine.
Rou estoit de Hepre tout lainz et tout veriiz,
En JVve se barngnoft, si en sempres * gariz (t). * austitôt,
II se fait expliquer cette vision, et on lui répond quVlie annonçoit
qu'il seroit guéri de la lèpre du paganisme par l'eau salutaire du baptême.
Rou s'embarqua pour la France, y aborda, et descendit au pays des
Vaefreîz ; il vainquit d'abord Rembaud duc de Frise, et ensuite Régnier
au long cou , qu'il fit enfin prisonnier. Sa femme imercéda auprès de Rou ,
lui offrit des présens, dont il n'accepta qu'une panîe. Rou accorda k
liberté de Régnier, qui promît que
Jamez escu ne lance vers lui neporteroîi;
Se il ledelrvroit, en sa merci seroit (2);
Ses honz deviendroit liges et bien le sirviroît;
Et s'il le commandoit, avoeuc lui s'en îroit;
• Por sage et por gentil et por pfoux le tenoit*
Roa It a responda que grand prou y auroit.
Ce fut alors que Roa vint en Neusîrie :
Hastainz vint as Normanz, si demanda qu'il sont!
De qnel contrée qu'il viennent î que querentî et ou vont!» , •
saif.
Et tu, qui es, dit Hou» qui soiz * nostrt langage!
Es Danois ou Frandioiz!
Hastainz se fair connçttre à Rou. Après des pourparlers inutiles , Rou
commença les hostilités; Hristainz, ayant vendu sun comté de Charîresà
Thibaut, quitta la France, et Rou fut toujours vainqueur. Durant le
siège de Chartres, févêque et !e peuple en procession se mélérenr à une
sortie; ÎIsportoient, entre autres reliques, celle C|ui passoit pour avoir été
la chemi-^e de fa Vierge; à cet aspect les Normands prirent la fuite.
(i) Durfo Sancii'Qinnnni,;?, 72; Willehii. Gemetîc, /?. 22^. — (2) Dudg
Sincti-Quimini, |7,7^; Vj^iHeim, Gemetic./?- 227^.
Z 2
ito JOURNAL DES SAVANS,
Cependant les dévastations des Normands devenant toujours pFa$
intolérables, les Français demandèrent à leur roi de faire h paix avec
rétranger,
Li evesqiie de France et H bon ordené * ^ prctrei.
L\ baron et li conte, li vicl et li pui&né»
Virent le gentil règne a grant honte atorné,
,5 Au roiz Chaïlon-Ic-Simple en ont merci crié, . , •
Face pais as Nornianz; trop a cest mal duré.
Le roî répondit que c'étoit aux Français eux-mêmes à iai faciliter les
moyens de chasser les Normands :
Je ne puiz par moi sool Rou ne Normanz cachier;
Je ne suis qu'un souI homme a boire et a mangier,,..
Que peut faire un soûl homme et que peut exploitier.
Si li homme li faillent qui li doivent aidier !
Le roi ajoute: Si Rou veut se faire chrétien,
Et pais voille tenir ei me voillc avoir chicr^
Giile une moie fille li dorrai a moi lier
Et la terre marine.... (i)
Lî archevesques franches fu moult tenu por $àge^
Envoyé fu a Rou a porter ce message*
L'archevêque prêcha Rou, et le persuada : la paix fut faite; voufatit
laiser le pied du roi en sa qualité d'homme lige, Rou, pour le porter
il sa bouche, le prit et 1 élevasi haut , que le roi en fui renvtrrsé par terre.
Rou fut baptisé et nommé Robert ;û reçut la Neustrie, et épousa h^
fille du roi : les autres Normands se tirent aussi chrétiens.
Rou leur distribua des terres et des récomptnses;
A touz en I^Jormendie retenus et ficutfez.
II éiaLlit une police sévère :
Rou fist de grant justice» moult fist de soi parler.
Deux chevaliers français qui
Alcrent à Roen déduire et déporter»
ayant été reçus secrètement par la duchesse, épouse de Rou, celui-ci
ies fil saisir» et»
Voyant tout le marchié, lor fin le chief couper (2).
La duchesse iVn dut dire et de duel desverr *; * perdre I*csprif.
De troiz jours ne de quatre ne vout de rien goustir;
Li roiz meismei Charles s'tn voui a Hou mêler,
(i^^ Dudo Sancti*Quintfni, p. Sz; Willelmus Gemetic- f* zji,^D^d9
Sancti^QuiQiini, /y. Sa/ WilielmusOeui^iic./?. ^^.
MARS 1820. i8t
\cz 1! haronz les firent d*ambe part accorderx
Après la inort de Iadiiches>€, dont il n'eut point d'enfans^ Rou épous»
Pupe, qui fut mère de Guillaunie dit LONGUE-ESPÉE.
Kou le fiit 50D heir au conseil de sa gent.
Tant a chescun donne promis et croisscment.
Hommes son filz devindrent moult amiablement;
Chescun 6bt a Guillaume hommage et serement.
Rou survéquît cinq ans : . *
A Roen jtit malade, à Roen fenij
Comme bon cresiien de ccsi mortel siècle iisi,
Aloult parfu bien cootes»
En transcrivant les vers que fai cilés, j'ai indic[oé souvent au Las dt$
papes les passages correspondans des écrits de Dudon de Saint- Quentin
et de Guillaume de Jtîmiéges,et j*en ai même rapporté quelques-uns 1
je regretreque M, de Bréquigny , et sur-iout M. Brondsted, n'aient pas
pris ce soin. Outre que le texte français est éclafrci parle rapprochejnent
du texte kiin, il est bun de rejnarquer quand et pourquoi lauteur du
roman de Rou en diffère.
Ainsi il dît au sujet dera[>andon quifutraîtàRolIon de la Normandie;
Rou dtvint homs li foiz et ses mains [ï livra &€•...
Sa fille et Normandie, voyant touz, li donna.,,
Voîci comment Dudon de Saint-Qucntin et Guillaume de Jumléges
parlent de la cession de la Normandie ;
<* Le Roi Charles et Robert duc des Français, les comtes et les grands,
» les évèques et les abbés, assurèrent, par serment de h fui caiholique, à
» Rofloni SE vie, ses membres et les honorifiques de son iief sur la terre
30 dénommée [i), »
Ce passage, très-important pour rhistoïTe de notre droit publie, et
qui n*a point été cité dans le recueil dtf\ Hisiorirns de France, quoi*
qui! soit rapporté en mêmes termes |Kir les deux auteurs» prouve qu'à
celte époque fin rerven lion des personnes qui reprtseni oient le corps
de la nation ^étoft nécessaire non-seulrmeni pour déiiiemhrer une portiort
de la France, mars encore pour accepter et garantir fbomiiiage que
&jsoit celui qui recevoit ce déjuembremint.
Je me borne à cette observation ; j'en pourroîs faire d'autres assez
importantes. Je finis en joignant mon voeu à celui de M. de Bréquigny
{1} KûTùlus Tfx, dusiqtte Francorum Robrrtus, com\ es ei pmcrrts, pnrsutes
ft uthûtrs f juravrwnt sûfritmeniû Ctiiholidr Jjéfeî pûîtlâù R( îtprjt vltûm suum e$
meînbra tî hononrm toitus regnt super urtam dtnQminûtam (Hisi. iNorm» Scrif-
fores j/7« i^U ZJi )r
I
H JOURNAL DES SAVANS^,
pour la pubHcaifon entière du roninn de Rou» et de semblables monu-
mens; elle seroîi non-seulement utile à l'histoire littéraire mais encore
k 1 histoire politique de la France,
RAYNOUARU
Nof^ sur une Inscription grecque récemment apportée de Délos
à A'Idrseil/e,
Un amateur instruîr, qui se livre avec beaucoup de zèle h h recherche
et à Tétudc des monumtns archéotugtques, M. Lajard, m*a fait passer
iei^CfflqiTes de deux dessinai fàîïs sous se$ yeujt, avec /e plus grand soin»
cfnprès un monument placé dans le cabinet de M, fe directeur des
douanes royales à Marseilte, Nos lecteurs verront sans doute avec intérêt
ce tTionumenty que }'ai accom|>3gné de quelques observations, dans It
vue de le fecomtuander â leur artention.
J empri<nterai, pour la description du monument original, Fes termes
nièmes dont se sert Al. Lajard dans la lettre qu'il ma fkh Thonneur
de m*adres5er :
«Ce monument, qui mafheoreusement a beaucoup souffert de*
m aileîntes du temps et de la barbarie, e&r en marbre; sa hauteur actuelle
10 est de seize pouces, mesurée perpendicti Virement depuis l'angle infé-
3> rieur jusqu'à la paralféle de Tangle supérieur; il est tronqué aux deuic
» extrémités} mais vraisembialJement ri manque peu de chose au bout
1» d*cn bas, tandis qu'à celui d*en haut il manque évidemment un grand
• nombre de lignes. Le monument dans son intégrité devoit avoir la
» figure d*un prisme tri.ingulaire irrégu fier. Les deux faces qui portent
I* les inscriptions sont légèrement concaves; Tarête qui les sépare est
i> émoussée et a fait place à des plaîes-bandes d'un pouce de largeur. La
» troisième face, qiiiétoit probablement concave comme Its deux autres»
1» est plane maintenant, et absolument brute, excepté à Tangfe supérieur,
*> où un petit espace à droite est resté pofi, et porte une fin de b'gne
î» consi.^tanf en trois lettres, .... POX : il e^t donc évident que le inonu-
» ment portoit une inscription sur chacune de ses trois faces. « Tel
est , suivant M. Lajard, leiat actuel de ce monument; et telle est aussi
i idée qu'on peut, d'après cefa, se farre de sa forme primitive»
Llnsiription n/ i est la plus étendue, la mieux conservée, et en
même temps celle dont rol>jet offre le plus d'intérêt. On y distingue
les nofus de quelques mois attiques, suivis de ceux des citoyens athéniens
dont les magistratures répondoient à chacun de ces mois. Ce seul énoncé
N/
1 j\.i\ .
nAAAHNElS 11
ÏAAPOS ASKAHniAAC
fîOSEIAEaNA KÂAPi
MAPAOnNIOS AFilNOOEl
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Page 183
N.° 2.
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MARS 1820.
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fiuffit pour faire connoître la nature et la destination du monutrieni ; il
étoit trés-proLablement destiné îi trnnsmettreà la postérité le souvenir
des magistrats particuJîèreir.e^nt chargés de leducanun de la jeunesse,
sous les noms de cosmitfs et hypocosmeus ^ pidoîïtbcs ^ sophronistes,
gymnasiûrques^ et autres, dont il est fait souvent mention dans les
imcrip lions antiques. C'est une conjectuie que j exprime avec d^tutnnir
plus de confiance, qu'en mpprochani ce monument d'une inscription
publiée ] «ar Spon ( 0 ^^ reproduite par le P. Corsinr (i) , nous retrouvons
sur \\m et Tauire des noms de mois et de citoyens d* Athènes, rangés de
ia fiiétne manière et dans le même ordre , et que les magistratures des coS'
mit s et ûts ^ymnasiarqucs nommés en tête de rinscription de Spon sojit
à peu près les seules qui puissent se trouver dans ta partie actuellement
détruite de la nôtre, attendu qu'elles se renouveloieni tous les mois.
Si notre inscription étoit entière, nous devrions donc y trouver les
noms des douze mois attiques, placés dans feur ordre véritable, qui
est encore aujourd'hui un sujet de discussion parmi les savans, Mal-
heuriu^ejnent . elle est nuiiilèe au cotnmencejnent et à la fin , et,
ce qui augmente encore nos regrets, les mois dont les noms manquent
au commencement , savoir , mœmûctérwn et pyanepSfon * sont précf*
sénieni du nomi re de ceux sur l'ordre desquels il s'est élevé le plus
d'opinion:^ contradictoires. Néanmoins, ce marbre peut être utile, en ce
qu'il confirme sur plusieurs points les opinion-^ les plus accréditées', trois
mois y sont J>ien distinctement nummés , posiJcort , garni lion, anihes-
térwn, que tous les critiques s*accordent k placer aux sixième, septième
et huitième rangs dirns la îtsie dfs mois attiques « cutnme ils le sont ici , et
par conséquent contre Toploron de Puiter, suivie par les auteurs du
Dictionnaire d'antîquiiés de TEncyclopédie méthodique. Les nom\ des
trois suivanSi quoique mutilés, sont encore fitciles à reconnohre ; savoir,
itapht lolion, munychiùn et thargalion , qui se ]>lacent ainsi aux nru ïemf ,
dixième et on^itme rangs, conformément au calcul des PP. Péiau (3)
et Cursitîi (4) , et contre le sentiment de quelques modernes.
La priorité à accorder à n'acm.TLiérion ou à pyanepsîon pour remplir
les quatrième et cinquième pièces dans le cercle de Tannée athénienne,
e>t donc encore une question que noîre tnari^re laisse indéciNe. Un sa*
vant professeur allemand, M. Hutmann, a com;^o^é tout récemmc-nr sur
cette question un inémoire dont M* Hainja a iii%éré la traduction à la
(1) ApttJ Spon j m Poput. Attk. iirt. 4. — (2) fast Arnc* disserar. XI, n. 21 ,-
tom H,p, i7i._(5) Boctrin. (mpgr. lib. I j c, b , &c, — (4) Fasu Aiftc, du U ,,
ïU JOURNAL DES SAVANS,
iuîte des recherches de M. Ideler , qui complèteni sa chronologie de
Ptofcinée. M. Buttnajin, après avoir recueilli et comparé les té-
moignages des andens, avoue que ceux qui sont en faveur de (a
priorj ié de rnarrnacîériun , lui semblent avoir le plus de poids i telle êtoil
1 opinion de Pctau ei de Cor^ini. Cependant î! montre en.^uite que deu:^
Wicriptions recueillies |jar S|)un intervertissent cet ordre, en plaçant
macmactérion après pyanepsion ; que la même di>positiori de ces deux
Uioîs résulte de deux autres mumiinens de siècles trés-diflerens, pu-
bliés Tun par Sefdtn parmi les Marfire^ d'Oxford, [autre par Chand-
1er; ei, affres avoir balancé ces diverses sortes de preuves, M- But-
m^nn se dx^lermine, avec beaucoup de raison, ce me semble, en fa-
veur de fopinion que les marbres autorisent, et c'est celle qu*avuît pri-
mitivemetH énoncée Scalrger.
Toutefois, je ne sais si notre inscription ne pourroit pas offrir quefque
proIja'*iIiré nouvelle à Tappui de (opinion de Corsini. On peut, à la suite
iju mot rîAAAHNETX, ligne première, remarquer deux traits verticaux ou
|ambages, que j>fusieujs personnes ont cru être les restes du II, lettre
initiale du jnot Dyanepsion, Cette conjecture ne meparoft pas d*accord
avec la place qu occupent les noms des mois, lesquels commencent
toujours une ligne nouvelle , même lorsque la ligne j>récédente offroil
un espace suffisant pour les inscrire; mars au-dessus de ce mof
riAAAHNETS, dans la partie mutilée de finscription, il reste trois
caractères à moitié détruits, que je crois pouvoir rétablir ainsi, TAN:
et la place qu'ils occupent au commencement de la ligne, et l'espace
vide qui la précède et qui ne toit propre à contenir quune seule lettre,
tout me fait présumer que ^'est h le comjnencement du mot nTANE-
'i'inNA. C'est à nos lecteurs à juger si cette conjecture est mieux fondée
que faufre, et si rautorité de ce monument, ajoutée aux autres preuves
déduites p;ir Corsinîp peut balancer celle des inscriptions de Sjjon.
Jinsiste damant plus sur ce parallèle, que, comme je l'ai déjà
remarqué, ToLjet de ces inscriptions et de la nôtre est absolujnent le
Oiénte. J'ajoute quelles sont aussi du même âge, c^està-dire, du siècle
des Anionins : c'est te que prouvent la forme des caractères , et I emploi
fréquent des prénoms romains OoTrAi^c Arxjuf , signe de flatterie envers
remperear ^tlius Adrien , dont on retrouve tant de traces dans les nionu-
qitns de son régne. Notre inscription nous offre de plus une particularité
qui sembleroit prouver quelle fut gravée du vivant de cet empereur;
et cette particularité est en même temps un fait neuf et curieux.
On lit, lignes 4 et J ; AraNOSET, . . 4. . NOEiaNENEAETXINl :,
passage que je resihue ainsi ; Ay»tf$ii-nii Ârmo^m çf ÛMvmi^ cest-à-dire|
MARS iSiO-
Àgûrtûtkhé Jrr/euJc d'Ami nous céléhrés à EUasis, On sait qu'Adrien assista
rail [32 de 1ère vulgaire, à Athènes, aux fêtes d'Eleusis, et nous
apprenons de plus, par le témoignage dtrs Marbres, que plusieurs
fêtes fondées par cet empereur ou honorées de son nom, A<fftaL9iU^ se
céféfjroient à Home, à Ephcse , à Athènes , et en d'autres lieux de fa
Grèce. Le goût des Grecs pour ces sortes de spectacles, et sur-tout le
besoin de varier les témoignages de leur adulation pour les empereurs» à
mesure que ces maîtres du monde se succédoient sur le trône, multi-
plièrent presque à Finfini les fêtes qui porioieul leurs noms; et nous
pourrions ajouter aux catalogues déjà si étendus dressés par Castellanus,
par Meursiiis, par Jonston, et par d'autres encore, dont M. Larcher
est ie plus récent, les fêtes d! Auguste, de JVeron, de Nerva, de Tnijan,
d'Adrlefx^ de Commode» de Sévère , &c. Pour ne parler ici qi^e d'Adrien , il
paroît que ce prince surpassa tous [es empereurs par son zèle à propager
dans toute l'étendue du monde romain de [)areines cérémonies, II
célébroit des jeux et fbndoit des théâtres dans toutes les villes où il pas-
soit »au témoignage de Xiphilin : ÉTi^Uti^ 3tflt7^ ^ cfy^voiTn^mif^uQiuvQç t^c
wcAhç, Spartien dit à peu près daii^ les mêmes termes ; In omnibus peni
urbibus et aliquid œdifcavil f et ludos edidiL II n'est guère probable que,
dans celte célébration de jeux, Adrien ait Oublié Antinous, lobjet cons-
tant d'une affection dont tant de monuniens déposent encore aujourd'hui ;
aussi Pausanias nous apprend^il qu Adrien avoît fondé en Fhonneur de
son ami, à Mantinée d'Arcadie , une fête quinquennale et des jeux
appelés de son nom Antmùëns* Le culte d'Antinoiis avoit passé dans
VAcfiaie et k Corinthe^ ainsi que nous l'apprennent les monnoies avec
Finscription , OCTIAIOC MAPKEAAOC lEPerc TOT ANTINOOT (1);
et ce que n*a point remarqué Eckhef , qui rapporte ces médailles, c'est
que la même inscription se retrouve absolument dans les mêmes termes
dans (e supplément au Trmr de JVÏuratori (2). L'affection particulière dont
Adrien honora la ville et le territoire d'Athènes, me fait présumer qu'il
voulut y bisser aussi un monument semblable de son attachement pour
Antinous ï et c'est à fatde de celte conjecture que je croîs avoir rempli
de la manière la plus probable la lacune de notre inscription. Le silence
que gardent les auteurs sur les jeux antinoéns d Eleusis, tient sans doute
à ce que la célébration de ces jeux ne survécut pas au prince qui les
av oit institués; et d'ailleurs il exîstoit chez les Grecs tant de fêtes de
cette nature, dont les Marbres seuls ont conservé le souvenir, que ce
silence de l'histoire ne doit point nous embarrasser. Je remarquerai de
( j ) Eckhd, Doemn, num, tam, VI| p. Î32. — (a) Totn* i V, p- mcmxc, n. 6.
Aa
I
r
^t!S6 " JOURNAL DES SAVANS,
Iîlit5»à Tappuî de la conjecture que j'ai énoncée, que^ parmi les nom-
•|j reuses médailles frappée^ en I*honneur d*Aniinoùs , il en est deux dont
le type et rinscription paroissent se rapporter à fobjet des Jeux célébrés]
à FJeiîsts: ce sonicelles où Antînoiis esl représenté sous les attributs et]
avec le rirre d'Iacckus, et de nouvel lace h us, an tin 002 IAKXOX, et]
NEQ lARXa (1), Or, on sait que le mythe d'Iacthus étoii particulier ,
aux niyitères d'Ekusis ; et Tune des médailles que j'ai citées, appar-
tient h la vif le d*Adramytte, colonie d'Athènes,
Dans l*avant-dernière ligne de rinscription , il est fait mention rfun
autre agonothète, ArnNO... et les lettres HN, qui se lisent immédiate*
Inent au dessous, appartiennent sans doute au mot qui désignt)it les.
jeux souii*is à la juridiction de ce magiàtrati mais il est impossible
d'asseoir aucune conjecture sur de pareils fnigmens.
L*jnscrîj>tion n/ 2 ne porte que des noms propres ^ encore fort
nnuilés, et qui, considérés sous le rapport paléographique , offrent assez
peu d'intérêt. En comparant ce monument avec une inscription de
1 Spon, faquefle est certainement du même âge, et où l'on retrouve la
Inéme disposition , on doit supposer que ces noms sont ceux des disciples ^
nflw/^i/7tf/, qui suîvoient leurs exercices sous les gymna^iarques nommés
dans rinscription précédente. Ces discipfesétoient în.scrits suivant Tordre
de leurs trilms respectives ; et iti , comme dans le marbre que j ai examiné
en premier lieu , nous devons regretter que ce monument nous soit par-
vejiu ainsi muîifé ; car il aurait pu servir à décider une question presque
aussi importante et non moins vivement débattue que celle de I ordre
ée% mois atliéniens, je veux direrurdre dans lequel étoient placées les
tribus d'Athènes. A ne consulter que les témoignages des anciens, qui
sont si contradictoires, sur un point qui sembloii devoir être si facile à vé-
rifier, il n'est pas surprenant que Spun ait cru et assuré (2/ qu'il n'y eul
famaîs d'ordre constant à cet égard. Le P. Cor.Mni , en écartant
quelques témoignages incommodes , et en combinant fort heureu>emenE
d'autres textes avec des débris d'in>cripîions, a cru pouvoir établir, au
contraire, que fa classification des trflius athéniennes fut iixée dune
manière învarialïle, sauf ft-s intercalaiîons qui furent faites dans cette
liste, h de> époques plus récentes, dr quelques trîljU!» nouvelles (3), Peut-
être seroît-il plus exact de dire que l'ordre Itgal et haljîtuel fut quelque-
fois interverti par des circonstances et pour des raisons que nous ne
(l) Eckhel, Doarh, fwm. tom, VI, p. çjo et J J5. — (2) Itinérairr, tom. IJ^
DiiH^riation sur les pcniplts de l'Atiique , p, 49. — (3) fasti Aiàà , lora* 1 ,
Dtssert. IV, p. 152- i8y»
MARS 1820.
187
sommes pas à méiiie de connoître; car l'hîstoîre des anciens ne nous
est parvenue que par lambenux, et Ton doit être en général très*
circonspect à former des systèmes Japrès des matériaux aussi incohérens.
Mais, sans tn'engager dans une question qui exigeroii, pour être appro-
fondie de nouveau , des documens qui nous manquent, j observerai que
notre monument confirme sur un point (opinion de Corsini, qui place
la uHm Œnadi- après la tribu Adriamdc, Le nom OlNEIAOS se lit en
entier à ïa onzième ligne de rinscription , et les lettres NIAOS, par
lesquelles cette inscription commence, ne peuvent a]:>pi'ir tenir qu'au mot
AAPIANliiOS; caria tribu PandÎQmdc ^ d.M nom de laquelle on pourroit
aussi la rapporter, est placée beaucoup plus haut, au troisième rang, par
des témoignages assez unanimes et dignes de h plus grande con-
fiance ( t ), J'ajoute que, jusqu'à ce jour , on ne connoissoit que deux ins-
criptions où se trouvât le nom de \2L\nh\x AJrlanhic : ce sont celles que
Spon a recueillies et que jai citées au commencement de cette note:
notre inscripiioji vient à fappui ; et cette conformité est une preuve de
plus que tous ces monumens sont de la même époque , comme ils se
rapportent au même objet.
Les lettres m, à lavant- dernière ligne de rinscription, sont placées
de manière à indiquer quelles appartiennent au nom de la tribu qui
suivoît la tribu (En a de ; et, d après Cfla, je ne vois que le jnot
H'ippothoonî'tde auquel puissent convenir ces deux élémens. Le change-
ment de Vioia en upsilon ne suffiroit pas pour infirmer cette conjecture:
rien n'est plus fréquent, sur les marbres antiques, que I emploi de Tune
de ces voyelles au lieu de l'autre, et, sajis en chercher des preuves
ailleurs que sur ie monument qui nous occupe, je ferai remarquer que ,
dans rinscription n/ r , la fin du mot Afunychîon est ainsi écrite :
NIXinNA, pour NTXinNA^quî est la leçon ordinaire des manuscrits et
des marbres. Mais une difficulté plus sérieuse, est celle qui résulte de
Tordre adopté par Corsini, d après lequel la tribu Hippotkôontide ne
suivoit pas immédiatement la tribu Œnéide. Pollux (2) est le seul
auteur, à ma connoissance, qui contredise for/nellement cet ordre de
Corsini, en nommant de suite (Enéide et Hippothooniide; el je laisse à
nos lecteurs à décider, &i la restitution que je propose , peut être consi-
dérée comme une preuve nouvelle à l'appui du témoignage de Pollux.
RAOUL-ROCHETTE-
(i) Voy* Corsints Dissertât, citée, p» //tf,— (2) JiiL Pollux, Onomastkon ,
lib* Vlil, €, ^ j segm, 10^ -jio,
Aa 2,
1
xîi
JOURNAL DES SAVANS,
NOUVELLES LITTÉRAIRES.
t
LIVRES NOUVEAUX.
FRANCE.
M. Auguste Deîalain, imprinieur-Iibraîre , me des Mathnnns-Saîrït-Jacqnes,
n.* 5 , annonce qu'il va publier une collection complète dts classiques latins,
avec les traductions françaises le plus généralement cstiniéts, format in-tj : le
prix de chaque volume sera de J fr. pour le* souscripteurs, La première livraison ^
qï)i vient de paroître, coniicnl les lenres de Pline, suivies du Panégyrique de
Trajan , en latin et en français ^ traduction de Sacy , avec la vie du uaducteur
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par Tauieur des Lettres péruviennes: suivie de 50 letties inédites, en vers et en
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les manuscrits de France et d'Angleterre, avec une notice sur la vie et les ou-
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MARS 182OV
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impn de Fain, libr- de Desoer, rn-^/ de 52 pages. Prix, 2 fr*
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arabe par M. le baron Silvestre de bacy. Paris, impr. royale; chez De Bure
frères, et Treuttel et Wiirlz, w-8,'' 11 en sera rendu compte dans l*un de nos
prochains cahiers.
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Paris, impr* de Crapelet, chez Rey et Gravier i 3 vol» in- S.''
fit s foire abrégée des Jésuites et des Al is^ionn aires pères de la Foi , où il est
prouvé que ces religieux et toutes corporations ecclésiastiques régies par
rinstitfli de la Société de Jésus, ne sont toîerables chez aucune nation policée j
lui vie d'obiervations faites au Roi et aux deux Chambres sur cet important sujet,
Paris, impr. de Fain, chez Delaunay, 2 voL In-S." de 500 pages chacun* Prix
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animaux, comparées en divers points avec celles des afathnides et des crus-
tacées ( par M, Laireille). Paris, impr. de Lanoé; chez Déterville, in-S.'^ de
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Petit Cours d*ûgricuhure; par M. de l'Epinois^ correspondant de la Société
Foyaie et centrale d'agriculture et du Conseil d'agriculture établi prés de son
Exe, le ministre de riniérieur. Paris, chez Audot, i/r-^.*
Rapport à lu Société royale et centrale d'agriculture ^ par M. Héricart de ThoTy,
membre de la société, au nom delà commission des engrais, le 5 janvier 1B20,
sur un nouvel engrais proposé sous le nom é*urate par MM, Donat et
compagnie, avec cette épigraphe t /^ja tes antiquii. Paris, impr. et librairie
de M.'"'^ Huzard, in-S/
Afémoire sur la conservation des Mes fpBT M» d'Artigues; lu à la séance de [a
Société royale et centrale d*agriculii re le 15 octobre 1819, et imprimé par
ses ordres, Paris, impr. et libr. de M.*"^ Huzard, in-S/ d'une feuille, plut
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méthodique des théories ei des e^tperieices les plus utiles pour diriger te choix,
Tinvention, la construction et l'emploi de toutes les espécts de machines; par
Borgnis. Paris, impr. dei-ain, chez Bachelier, in-^f/ de 4j feuilles, plus 44
planches. Prix , 30 fr.
Collection complae des pièces de musique religieuse qui s'exécutent à Rome dans
la chaprîîe pontifical*' pendtini lu semaine sainte; recueillies et publiées par
M. Choron. Ce recueil, dont le formi^i sera grand in- 8*% paroitra à la fin de
mars, chez M. Choron, boulevari Mont-Parnasse, n,* 41, Prix, io fr.
ITALIE.
Bihîioteca italiana, o s*a Chrnale di kneratura , scjen^t ed artl ^ compilato da
yûri ktUTdti, 1 omo XVil, anno quinio ; gennajn, ffhhrajo e mar^o i8zOâ
Aiilano, pri;S>o ia direzione del iiiornale, in-F, L'abonnement à ce journal, quf
a déjà plusieurs anaées dVxisience, est de i^ tir. pour Milan, et de Jq fr, pour
t
^^o JOURNAL DES SAVANS,
Wftfspgtr, Le cahier que nous annonçons renferme un tableau rapide, mais
compile, de IViat des lettres et des sciences en Italie dans le cours de l'année
li^r^. Ce travail ircs-recommandable de M. Giuseppe Aceihi présente des
analyses instructives, de* critiques judicieuses , un irês-grand nomore d'indica-
liuns bibliographiques.
Di Aîarco Polo c Jegti al tri viagg raton venfiiani pîù ïUustrt , disserta zionç
* dell* ak Placido Zurta » con apipp^dice sulle antîche niappe idro-geografïche
Javorate in Veriezia. Venezia, j8iîi et 1819, 2 voL in-^/
Dclla vira dt Torquato Tasso Ittridut^ di Giov* Zuccala. Miiano^ tipogr, di
Commercio , in-S.^ de 368 pages,
Jacobi Alorellij biblîùthtcce regiœ D, Marci Vinetiarum prœjecn 3 EpistoliM
! 4^;»/fw, Patavii, 1819, m- «S*," de 117 pages.
! EUtnenti fihsofici ptr h studio raggionato di lingua^àï Maria no Gigli. MilanO|
^Fusi, 1819, ïn-S/
Le odi di Anacreonte i di Sûfo recate in versi italtani da Giovanni Caselli,
Firenze, tîpogratia Piaiti, 1819, grand in-fU, papier vélin, de 191 pages.
Commento su i prlmi cuiijue canti dAF J nfirno di Dante , e quaiiro leitere del
I C L. Magaloiii. Milano, siamperia rcale^ 1819, //i-*?." de 108 pages.
Rime inediteéi Gwsto de' CotitL Fircnze, stamperia dell' Ancora , 1819, în-S*^
La Batta^lia delk Vecc/tie con Giovani ^ canti due, di Franc. Sacchetti,
pubblicaii per la prima volia ed illustrati da B. Aniati. Bologne, 1819,///-^,'*
Sonetti di Glus, liartoli f raccohi e mcssi in I»ice da Picr. Aies. Paravia. Pa-
dova, itpografia Bettoni, i8i8, in-^.'* de 80 pages.
Epigrammi di nwderni du ton con a le uni an tic ht ïnediti, Faenza , 1819, in- 8.^
Tito ^ 0 sia Gerusalemme distrutta , poewa epico (del conte Daniele Florio).
Venezia , 1819, presso la tipografia di Moisopolt, in-S^^
Tragfdic di F. Buffd {nmvo del!a Calabria); voK !-• Livorno, 1819, tn-S*
// Conte di Carmagnola ^ tragedln di A. AIan:^onr. Milano, presso Ferrario
Vincenzo, 1820, in-^/ de 14^ pages.
Commedie del Sig, JVora, Torino» 1818, coi t pi di Domenîco Pane, 4 vol.
h'S/ D'autres éditions des comédies de M. Nota, que ks Iraiiens placent au
premier rang de leurs pocics comiques de ^épo^Jue actuelle, ont été publiées à
JVliian et à Li\ourne.
Bianca di Salerno , commedia del sig. Finoii, Lodi » 18 r9, in-ti.
Vedute principali di Alilano e de' suoi intorni. Milano, presso Artârra, Le
sixième fascicule a paru.
Promenade autour de A'îllan , au mots de mat iS/p ; par C. G. Milan, Deste*
fanis, 1819, W'S,'
Viaggh da Napoli a Monte Casino té alla celebrp cascata d'acq'ia ne!l' isola
dî Sora, dell' ab, Domenico Romanelli. Napoli, 1819, presso Angeio
Tranni, in-B,*
M, Luigi Rossi vient de publier à Milan, chez le libraire Fosi, les premiers
volumes oc sa traduction italienne de rHistoirc universelle de M. le comte *
de Ségur*
Storia antica e moderna d*haUa del cav. Luigi Rossi, con carte geografiche e
tavole incise in rame- Milano, presso Bianchi , 1819, in- 8,*
Memorie storiche delta ciità di Cremona , raccolte e compendîate da Lorenzo
Mairini. Crcmonai 1819, chez les frères de l'auteur, in-^/ de 123 pages.
MARS 1820.
151
DeW ânticù corsa de' fumi Po, Oglio et Adda , negU agri cremoncse, par-
migiano e basso mantovano. Memoria sîorrco-critica dall' abaie Giov.
Komani, Casalniaggiore, Bizzari, in-S^' de B8 pages.
Biografia cTtmonese^ o sia Dizionarîo storico délie famiglie e persone per
quaUtvoglia t'tolo memorabili e chiare speuanii alla citià di Cremona dai tempi
più renioti fino alT età nostra, di Viocenzo LanctMti. Milano, ibip, tipografia
Borsant, /V^/ de 4*6 pages* Le second et dernier volume de cet ouvrage doit
incessamment paroitrc.
JVuôi'd Descri-iîotit de' mùmtmenti antkhîedoggettt d'arte contenuil nd Vatkano
t mi Cdmpidoglio, colle nuove scoperte fane aile fabbriclie piii miere^sanri
nel Foro romano e sue adjacenze , &€,, compUaia per mo de* coin viaggiaiori
daH' avvocato Carlo Fea. Koma, Bourlié, 1819, in-ti de 2^9 pages.
// Costume amko e ntoderno ^ o Sioria del governo, délia mîlrzia» délia reli-
gîone, délie arti » stirnze ed usanze di tuui î popoir antichi e mf»derni, pro-
rata coi monumetiri delJ' antfcKita, e rappreseotaia cogii analogbi disegiif, dal
doit. G. Ferrario. Milano, tipogralîa dell* ediiore, 1817 e secjuenti^ in-^."
Del AUrito e délie Rkompense, trattaio storico filosofico del Meich, Gioja.
Filadelfia (Milano), 1818 et jHjç, 2 vol in-^/
Elément! d't fisica genêt aie di Andréa iVlazzoni. Milano, 1819, presse Piroita^
in- 8.' C*esï la troisième édition de cet ouvrage.
De Alluvwnlbus et Ptihdibuî et Pascuis ad al'wm statum translatis ; dtsser-
tauo Jos. Alïert;hini. Rome, chez Olivier, 1819, m-^/
Sûggi geoiogkt dtgli siûii di Parma e Ptacen^a; dal giudîce G. Cortesi, Pia-
cenza , 1819, hi-^>% avec 7 planches.
/Vw<3Fo Z>/^/t';î*/r/V> ^/ /j(7/<2/i/fi2 di Pellegrino Bertani Mantoua, 1817 à 1819,
Maniova, j vol. in-S,"
Eîtmeiitl di tridirmiJika dî Enrico Gîambonî , professore nelf université
di Feriigia. Honia, irpogralia de Komanis, 2 vol. in*8/
Elément! di geometrJû piiina ^ d\ trigonometria retùlinea, e principj di seziont
coniche di Grov. Gorini. Pavïa, 1819, itt-^/
Ali'mvrte e Leitere inédite fnrra 0 dîspirse di Gâlileo Gûlilei^ ordinate ed
illustrate con annotazioni del cav. G. B. Veniurij parte prima, d'ail* anno
1^87 fino aHa 6ne del j6i6* Modena, /fl-^.*
EltmetiUdt astronomia^ con le applicazioni alla geografia, nautîca , gnomo-
ïiica e crGnalogia, di Giov. Saniini; vol I. Padova, 1819,//!-.^/ de284 pages,
avec deux planches.
Efemeridi astrotwtniche di Milano, ifc^ Milano, 1819, staniperra reale,
jVtSV de 240 pages,
Catechismo ûgrarwj corcmaio dall* acadeniia di agricohora dî Verona,di Cîro
Pollini. V^erona, ïSrç, jN-i?/ de 464 pages.
Aleduina legûle second o lo spiirio délie leggî civil i e pénal t nei govcrin
d'Italia, drl prot^ Gîacomo Barcelktiii- Pr^a, 1818,2 vol. in 8."
ALuïie Ossenui^ioni neiid nati/m dfllajHlri inttrrmi îeitti , e >ulle qualiià me-
dicinali délia china secondo i principi délie moderne leorie, del dott. V. Otu-
viani. Bobgna , i8i9,prcsso A. NribiJi, iii-8/
Storta raggionatû di umi grûvidrua ntHd uthafaloppiana désira. Pisa, 1819^
presso Rainieri Prosperi, m-8.^ , avec planches.
i
Ij:
JOURNAL DES SAVANS.
Liîologm urnana, o sia Ricerche chimiche e mediche sulli sostanze *petroseche
[• si formano in diverse parii del corpo iimano, di L* V. Brugnaulli. Pavia, 1819,
presfo Biz2oni, in-foL, avec planches.
Ele/nenti di fdrmacolo^ia îtraptunca comparanva, dcl doit. L* Chiavenni,
I Napoli, 1819, tipografia del Giomale encidopedico» tn^S/
Atù deW L /?. acadtm'ia délia Crusca, tomo I. Fîrenze, tipografia Ptatti,
^fif-^/ de 500 pages.
ANGLETERRE.
AfontaltOfOrîhc Heart unvtïkd ; AfontaltOj ou le Cœur dévoilé, poème en
deux chants ; par Th. Mac*Carihy, Londres, iHi^^ Reynolds, m-*^.' Prix, 6 sh.
The HistoryofBritanmcus ifc* ; Histoire de Britannicus et de sa Sipur Octavie,
.tirée de l'histoire romaine, par miss Sandham» Londres, Harris, 1819, in-iz.
Prix, 3 ih.
Popular Travels and Voyages Ùc. ; Voyages par terre et par mer en différentes
£^ arties de l'Europe, de VAsie, de l'Afrique et de l'Amérique; par F, Thurtle.
.ondres, Longmant 2 vol. in-n, avec figures* Prix, 1 l 4 sh*
Nota* On peut s'adresser à la librairie de MM. TreutleU/ Wurtz> h Paris ,
rue de Bourbon ^ w**/// à Strasbourg ^ rue des Serruriers; et à Londres j n,'' jOg
Soho'Square , pour se procurer les divers ouvrages annoncés dans le Journal det
Savans, Il faut affranchir les lettres et le prix présumé des ouvrages.
TABLE.
Codex Nasareus , Liber Adami appiUatus , syriacè transcriptus , ifc,
( Troisième Article de Aï. Silvestre de Sacy* ) Pag. l j r .
La Jérusalem délivrée^ traduite en vers français par Af. Baour-Lortnian,
( Article de Aî. Raynouard. ) 146,
Alémoire sur l'importation en France des chèvres a duvet de Cache-
mire, par Aî* Tessier, (ArdcU de AI. Abeï-Rémusat. ) t JJ»
L*Art de vérifier Its dates des faits historiques , Ifc, avant Vhe chré^
tienne, i7c, ; par dom Clément, {Second article de Af, Daunou. )., 161 •
'Itinerary 0/ Greece , contai ning one hundred routes in Atiica , iXc* ^
by sir W, GelL {Article de Aï, Letronne. ) • . . / 167 .
Deux Lettres à mylord comte d'Aberdeen sur Vauthentiàté des tns-
criptîons de Fourmont^ par Al. Raoul- Rochette. { Troisième article
de Aï, Leironne. ) *..... 1 70,
Pièces relatives à l'histoire du Danemarck et à la connoissance de
ses anciens rapports politiques , ifc, / par le docteur Brondsted,
{ Article de AI, Raynouard, ) 1 74 •
Note sur une inscription grecque récemment apportée di Délos à
Marseille, ( Article de M. RaotiI'Rocheiie. ) , iSi»
Nouvelles latératres • ,..,...• iSS.
FIN J>I LA TABLE,
-1
W
A PARIS,
DE L'IMPRIMERIE ROYALE.
i8:£0.
{
H
Le prix de Tabonnement au Journal des Savans est de 36 francs par an,
et de 40 fr. par ia poste , hors de Paris» On s'abonne chez MM. Treutul et
V^ûrt^, à Parts, rue de Bourbon, n,* 77/ à Strasbourg, rue des Serruriers, et à
Londres , n,* jo Soho-Squart, 11 frut affranchir les lettres et Targent.
Tout ce qfti fiutcwjÊfrniriles annonces à insérer 4<ins ce journal,
lettres , ans , mémoires , livres nouveaux, &c. doit être adressé ^
FRANC XPûRT /àuburem du Journal des Savans, à Paris, rue
de Ménil-montant, n.*" 22.
Supplément au Glossaire de la langue romane , &c.;
parJ.B. de Roqueforc- Paris, Chasseriau etHccart, libraires,
au Dépôt bibliographique, rue de Choiseui, n**" j , 1820;
I vol. in-S/ Prix, 7 fr, , et 14 fr. papier vélin, et 8 (r.
50 cent, franc de port.
1V1« DE Roquefort publia en ï8o8 un Glossaire de la langue
romane, qui fut accueilli avec tout llntérêt que méritoit un ouvrage de
celte importance et de cette utilité : depuis il a cotitinué de se consa-
crer à Tétude de notre ancienne littérature, ainsi qu'à celle des rnœur> et *
des usages du jnoyen 5ge, Il ajoute aujourd'hui un nouveau volume aux* '
Bb 2,
i
ij< JOURNAL DES SAVANS,
deux qui composoient son Glossafre^ce Supplément ne peut manquer
d'être reçu aussi flivurablement. L'ouvrage précédent ayant instruit les
littérateurs à apprécier Lelui-ci, son utili'é sera encore mieux sentie,
puisqu'il exphque une partie des mots qu'on regrettoitdenepas trouver
dam le premier travail. Au reste, i( sen faut de I eaucoup, et mes
observations en fourniront bientôt des preuves, que des recherches
ufrérieures ne puissent procurer encore de nouveaux supplémens, A
mesure quon lira et qu'on publiera nos vieux manuscrits, les lexi-
cographes trouveront de quoi enrichir la nomenclature connue au-
;uurd*buj.
Le Dictionnaire de Boret, un grand nombre de vocabulaires parti-
culiers imprimés avec plusieurs ouvrages de notre ancienne littérature,
dont les éditeurs expliquaient les mots les plus diflficiles, le Dictionnaire
du vieux langage français, et (e Supplément, publiés par Lacombe,
étoient trop insuffisans pour Tintelligence de nos anciens auteurs.
Barbazan avoit coinposé un glossaire en quatre volumes în-fblio /mais cet
ouvrage , dont le manuscrit se trouve aujourd'hui à la bibliothèque de
Monsieur kTArsenal, quoique annoncé au public, ne fut pas imprimé»
A'L de Sainte-Pal.nye avoit entrepris un glossaire de notre ancienne
langue, et ce grand travail fut la principale occupation de sa vie. On
trouve dans le Journal des Savans de décembre 1791 , pag* 72j-7}2>
une lettre de M. de Bréquigny adressée à AL Mercier, abbé de Saint-
Léger, pour lui faire connoître Tesprît qui avoit dirigé M. de Sainte-
Palaye. Il paroft que son vaste et précieux ouvrage avoit d abord été
exécuté sur un }jlan quî fut abandonné, d'après les représentations et
les conseils de AL de Hréquigny lui -même, et qu'on adopta un plan
dont rexécutjon dtfvint plus difficile en raison de la plus grande utilité
qu*on s>n promettoit. Il a été seulement publié de ce nouveau travail
les mois de la lettre A jusqu'à A S ; ils forment un volume in-fùlh, qui est
très recherché , et qu'on trouve rarement dans le commerce, la plus
grande partit? des exemplaires de ce vofumt: ayant été vendue à la rame
comme ouvrage incomplet. Les tnatéri*iux préparés par M. de Sainte-
Palaye pour son glossaire entier ont passé h la Bibliothèque du Roi; ils
sont rangés par ordre alphabétique, et forment plus de soixante vo-
lumes in-Jo/fù,
Al. de Roquefort n*a pas adopté le plan de M, de Sainte-Palaye, dom
fexécutioji Feùt fuené trop loin j maïs, en préférant une forme de travail
plus im|4e, il a donné un ouvrage presque aussi utile qu'auroit pu I être
Celui de \L de Saiï le-Fa'ayc : il a famiiiari.^é les lecteurs français avec les
m^^ts de lu langue ancienne ; et il éloit important de connoître d'abord
AVRIL 1820. 197
Les moPs, avant de rechercher leurs nuances, leurs différentes acceptions^
ieufa variations succe.s>ives , que M. de Sainte Palaye se prnposoit d*ex-
pliqtier. Ce qui est étonnant dans le plan de M. de Sainte- Palaye, et
dans la longue exécution qu*il aeutf , c'est que oi lui ni ses coopératturs
n aient reconnu ni même prtrsumé qu*i( existoit dans Tandenne langue
française un système grainmatical très* régulier* J*ai déjà essayé dans ce
journal d'en fournir des preuves; et je saisirai les occa;>ions cjui se présen-
teront d'en domier de jiouvelles , en attendant que je puhUe la grammaire
de l'ancien idiome français roman, ou de la langue des trouvères.
M. de Sainte- Palaye, et !es personnes qui, après lui, ont travaillé sur
cette langue, ont sans doute cédé au préjugé qui supposoit qu elle n'avoit
aucune règle» aucune syntaxe; et alors on ne s'est plus occupé que
des mots.
Ce préjugé date de loin. Marot s'étoit expliqué sur la langue de ses
prédécesseurs avec une assurance qui faisoit croire, d*après Tautorité de
ce poète, qu'il n'existoit jadis aucune forme grammaticale fixe, aucun
principe fondamental. L'abbé Fleury diioit , en parlant de fancienne
langue : «Toutefois je ne vois point qu'on y ait ap|>liqué Téuide de la
» grammaire : if semble que Ion craignoit de la profaner- . • . Je n'y
n trouve point de distinction du pluriel et du singulier, ni de construction
>» uniforme, en un mot aucune régularité. » f Cinquième Discours sur
tHisioïre eccfésiûstiquc. )
Des personnes qui s'occupolent spécialement de Tétude de nos
anciens manuîicrits , partageoient ce préjugé » bien que Tobservaiion et
la comparaison de ces prétendues irrégularités eussent pu les conduire
à un résultat absolument différent*
Je me l>ornerai à rapporter ici ce que ies savans auteurs de la
collectîuji des Historiens de France rapportent au lomeV, p. 2 19, à
Foccasion des manuscrits des chroniques de Saint-Denis* Voici comme on
sVxprime : « L'orthographe du manuscrit du Roi et de celui de Sainte-
>î Geneviève est particulière ; les substantifs , les adjectifs , les participes
y* passifs, ont au singulier une S ou un z à la fin, et ils n'en ont pas au
î» pluritl. Par exemple, Li PRIKCEJ EST VENUJ ET A ESTÉ SACREZ
>3 ROlJ, pour U prince est venu et a été sacré rets Ll EVESQUE ET Ll PLUS
» NOBLE BARON SE SONT ASSEMBLE. pOUr /fS iVCîque^ il Ici plliS ItoMfS
n b iron^ se sont assemblés. Cependant , lorsqu'on emploie les articles LE ,
» LE';, DES, AUX, on suit notre orthographe d'à présent.
^> Le manuscrit deSaint-Gerinain-des-Prés et le premier de M, Tabbé
» Je Roihelin^quî sont plus récens que les deux dont je viens de parler,
» ue sont pas uniformes i>our Turthographe j on y emploie tantôt
19» JOURNAL DES SAVANS,
« rancienne, tantôt la nouvelle. Le second manuscrit de M. Tabbé de
w Rothe(in est encore plus récent ; on y suit notre orthographe d'au-
«jourd'huî; on n'y aperçoit pfus Tarticfe Lt : fai même remarqué que le
« copiste, en suivant I exemplaire quH avort sous les yeux , avoit écrit Li
*5 PRINCE, mais qu il avoit tiré une ligne sur ces deux mots pour mettre
« tout de suite les princts. >>
On voit combien nos érudîts ont été embarrassés» parce qu'ils
îgnoroientla règle grammaïicale qui, par la présence ou Tabsence de
Ts final, indique quand (es substantifs ou les mots employés substantive-
ment sont sujets ou régimes , et quand ils sont au singulier ou au pluriel.
Si Je n'avoîs eu qu*li donner mon opinion sur le Suppléjnent que public
M. de Roquefort» il m*auroit suffi d'annoncer qu'il est digne du premier
travail ; et l'on n exigeroit pas sans doute que j'en donnasse la preuve en
citant des articles de glossaire , parce que ces articles ne peuvent être
appréciés qu'en les comparant avec d'autres articles analogues ; ce qui
exigeroit des développemens trop con5Îdéral>tes : mais je croirai prouver
plus évidemment combien j'estime le travail de M, de Roquefort et
combien je m'intéresse à son succès, si je rassemble quelques obser-
vations qui ne seront peut-être pas inutiles à ramélioration dont le
travail d'un glossaire» et sur* tout d'un glossaire pareil, est toujours
susceptible.
J*indiquerai quelques mots qui doivent y entrer : non que je les
cherche dans les auteurs que M* de Roquefort n'a pas cités; au contraire
je prendrai ordinairement mes autorités dans les citations mêmes qui
donnent un prix particulier au Supplément publié aujourd'hui, et je
présenterai d'autres observations qui peuvent également concourir à la
perfection de l'ouvrage entier.
Au mot ESTiERE, gouvernail du bâtiment, on trouve fa citation
suivante:
Puisqu'il l\>t lancîé en la mer,
Al estierc vait guvemer,
Tant guveme la nef e tint,
Le BASNE prist, a terre \int. ( Marte de Frana.)
Ce mot BASNE n*est expliqué ni dans le Glossaire, ni dans le
StTppfémeni.
Au mot NAISCEMENT , on lit :
Tfnons donc pour vrai fondement
De Jhestt Crtsi ïe naiscertient,
Le baptême, la passion.
Le dcscens, le suscitement*
I
AVRIL 1820. 199
Ce mot susciTEMENT, qui sîgniBe RÉSURRECTION, mériioit une
► place dans le Supplément » puisqu'il ne se trouve pas dans fe Gfossaire,
Les matériaux qui peuvent servir h augmenter et à perfectiomier fe
Glossaire de M. de Roquefort, sont si abondans, que j*eji imuveroîs
beaucoup dans les nombreuses citations qui enrichissent son travail. Je
vais citer quelques-uns des mots que je regrette le plus de ne trouver ni
daiis le Glossaire , ni dans le Supplément,
Allée signifioit anciennement ur>e galerie en bois par laquelle on
passoit pour aller à un lieu voisin. Voici un passage des Gestes de Louis
fe Débonnaire qui le prouve : « Li empereres isside Teglise pour aler
>î ou palàs p.ir unes ALEES de fust ou il li convenoit passer. Si estoieiit
» viez et porries de fumor de Fiaue qui sus chaoit. Quant lî empereres
» fust desus et grant torbe de ses princes et de sa.gent, ces ALÉES fon-
» dirent tout à un fais , ♦ . ovec lui chairent k terre plus de XX que
» contes , que barons* » f Recueil dis Hist. de France, t, VI, p. 141*)
Au mot Almaire du Supplément de M. de Roquefort, on lit :
<c Ou dixsepiieme feuillet , seconde page de ung registre estans es
^ almaires des ALLEES ou galleries au devant de Phuis du comptoir du
« procureur de la ville, <Scc, j>
Et il n'y a pas d*expIicatioa du mot ALLÉE dans laccçption de
GALERIE.
Dans son premier travail, M< de Roquefort avoit eu soin d'avertir aux
mots me , te, se , qu ils étoient quelquefois employés pour ma, ta , sa ; et
Von en trouve beaucoup d'exemples dans le Supplément, parce que la
iinale A des mots de la langue des troubadours étoit presque toujours
rendue par un E muet dans 1 ancien français.
A cette observation, très-nécessaire pour Finteiligence de cet idiome ,
il faut en joindre une autre du mêjne genre , pour laquelle le Supplément
de M, de Roquefort fournit plusieurs autorités; c*est que l'article LA, fé-
tiiinin actuel, est souvent rendu dans 1 ancien français par LE , ainsi qu on
peut s'en convaincre aux mots:
Bercel; de le vî/Ie. . • ; pnr le ville. CahorSIN ; ûs cmsîumts de le
ville, . . ; cûm borgois de le ville ... ; le nmtS, Pierre. Espéré ; ^ h potence.
Esta MENT ; rfrie besogne de paix. FossElT; sereîr le josseit de le ville.., ;
il nient de le rivière. Kalendier \ qunés le lune prime ^ . • ; sainler de le
yaine dau pous , , . , H est vigi/le fe nuit S, Andrien et le nuit de NoeL
Le que relatif me fournira Foccasion d'une autre remarque gram-
matrcale; et ce sera dans les citations contenues dans le Supplément du
Glossaire, que je prendrai mes autorités.
Notre langue actuelle n'admet Fempl<^i du que relatif que comme
100
JOURNAL DES SAVANS,
régime^ qtiand il se rapporte à un substantif antérieur; mais fanden
français Temployoît comme sujet. Cette forme de h langue des trou-
badours s est conservée dans fespagnol et dans fïtalien ; elle est, à mon
avis , l'un des caractères auxquels on peut reconnoître ia plus grande
ancienneté du style des vieux auteurs français : ils disent concurremment
QUI et QUE. En voici des exemples que me fournit le travail même de
M, de Roquefort.
V.» Cosiier: Gérard QUE assez loin des gens estoit» &c.
V.' Engrutemeni : Une gent sunt, devez savcr,
Ke sans vin ne purrunt manger;
E autre gent su ni sanz dotance
Ke de vin beivre uni grevance, ( Emetgnttmnt d'Arhtou*)
V/ PeiUfe : Et les deux petits reinz od le peticle QUE est sur
eux &c, { Traduction de la Bible, te Lêvïtique,)
V." Censir : « La fumée de 1 encens QUE munte » signefie la corn*
I» punctiun des queors que surt des oreisuns.^» (Apocalypse historié.)
Cet emploi du relatif que mérite une place dans le Glossaire.
Dans son Glossaire, au mot NE, M, de Roquefort avoit dit qo'i[ avoit
été employé quelquefois dans le sens d*ET : mais il n'avoil cité aucune
autorité ; et il faut convenir que les exemples de cette acception ne sont
pas très-communs dans les auteurs français, tandis qu'ils le sont dans les
ouvrages écrits dans la langue des troubadours. Comme, dans le
Supplément, M. de Roquefort cite souvent des exemples pris dans le
roman de la Rose et dans les anciens Fabliaux et Contes publiés par
M, Méon, je crois convenable de faire connoître celte acception de
NE, qui se trouve dans les pièces de cette collection et dans ce romani
ainsi que dans d'autres ouvrages :
Des que Diex fist Adan NE Eve,
Ne fu afcres si deffVz. { FabL et Com. tom, IV, p. 137.)
Pristrenl lor famés et for enfanzetque il en porent traire del feu NE
escamper. [Viltekardouln^ p. 82,)
Or t'ai dit commetit N* en quel guise
Aïïiant doit faire mon scrvise, ( Roman de la Ro$i, v< 2J89* )
Dites moi où ne en quel pays
Est Flora, la belle Romaine. ( Villon, p. 23,)
Comme M. de Roquefort cherche à rendre son ouvrage toujours
plus digne du succès qu'il a obtenu , je lui soumettrai un moyen de
raméliorer qu'il me paroît n'avoir pas employé jusqu'à présent; c'est
<f indiquer par des exemples les acceptions que les mots actuels avoîent
AVRIL i8ao.
201
jadis etqu*îl5 n'ont pas conservées : ainsi (e verbe mourir étoit employé
açiivenient, du moini daii^ Ie> temp> composés, comme on le voit par
les citations que je vais rapporrer :
Jesque il ONT mort luz les niadles dcl p^ys. (Ane, tr^nL des Livrer
d€5 Rois, )
Lonc respîct m'oNT Mcar. {Le RqI de Navarn, ch. aj.)
Car Lîcurgus de si court le pressa»
Que de sa darde a travers Itf pt^rça,
El TayANT mort, il prit SCS belles armes. (SalET, Trad, de l^IUade.\
Hercules assîst lesmeïes de sa conque^re es fius de Toceanne mer,
€t il FUT MORT par une femme d'une chemise empoisonnée* ( Alain
Ch%rtier. I
Lerrpfoi du verbe MOURIR dans ce sens actif se trouve dans la fangue
des troubadours t et dans fiialien et le portugais,
Le verbe pariir au contraire ne s'empfoyoit pas absoîument comme
âuiourd'hui ; pour exprimer Faction de quitter une personne , un lieu , on
disoit SE FARriR DE, cest-à-dire, se séparer de.
Theseui,,. SE partit pour aller coml>attre le taureau de Mara-
thon, ( Amyot t Trad. dt Plutarque. )
Le Ruî Me vartit dudit pays et vint \ Limoges, (Œuvres d^'ALAlN
CnKwnl'l^. p, i^t*)
M. de Roquefort est en état Rajouter à son ouvrage de pareils perfec-
lionnemens , qui le rendroîent encore plus utile.
M de Roquefort^ au mot kalenurier » a inséré une sorte d*almanacti
du XI II * siècle, qui, entre autres choses remarqnablts, fournît la preuve
que très andennement fa langue des trouvères, pour exprimer les [«♦urs
de la semaine, plaçoit fe mot DI de rf/es , au devant des mots LUN^
MAR » &c, La nomenclature des jours d<- la semaine se trouve soit à ce
mot de iCALENDRiER et au moi de SEPMaine, soit aux mors mémeÀ de
DI1.UN ou DELUN, DIMAR OU DEMARs, DIMECRE OU DEMECRES,
DJJOU» DIVEISRË OU DEVENRES , DISAPT,du Glossiire et du Supplé-
ment : la langue des troubadours disoit dttun, d'vnar^ de; et cette
forme est encore en usage dans la l^rugue provenç^^le.
M* de Roquefort n*a point borné son travail à la sitnple explicarion
des mots; quelquefois il a donné des détails curieux stir les choses.
Plusieurs mofs offrent de courtes et inîéressnntes dis^'errrïtions, qui
prouvent combien l'auteur est versé dans la cojTnois^ante des opinions,
des usages et des mœurs du moyen âge J'indîqutrai plus paiticufîere-
ment les mots AGUriAN, ARGOT, BESAr^T, CBAPEL, FIERTE,
KALENDRIER, PSALTERIO^', SIWG» &C
ce
aoA JOURNAL DES SAVANS»
Deux dissertairons , Tune sur F origine des Frûnfais, l'autre sur h génie
di /a /anguifntnf aise, que lédhçm a placées à la tète du Supplément ,
mérheroieni un examen particulier ; mais elles ne sont pas de M, de
Roquefort, et je crois devoir me borner à son propre travail : par lYru-
ditton qu'il renferme et rutrlité dont il peut ê(re, ce trav.iîl me paroît
digne d'éire recommandé à toutes les personnes qui désirent prendre
connoissance non -seulement de noire ancienne langue, mais encore de
notre ancienne littérature; Je Dictionnaire de M* de Roquefort et le
Supplément qu'il donne aujourd'hui , en présentent des morceaux
remarquables. Je ne doute pas que la publication prochaine des Fables
de Alarie de France, par M. de Roquefort, n obtienne laccuei! que
méritent le zèle et les connoissances de Tauteur qui fait ce présent à
notre littérature.
RAYNOUARD.
Mémoires /iistûr/ques et géogbaphiuvessub l Arménie,
suivis du texte arménien de f Histoire des Princes Orpeli tws ,
par Etienne Orpélîan , archevêque de Simwie , et de celui des
Géographies attribuées à Maïse de Kho ren et au dodeurV^xi^n^
avec plusieurs autres pièces relatives a f histoire d'Arméni ;
le tout accompagné d'une traduction française et de notes ex-
plicatives ; par M* J. Saint'Martin : tome IL Paris, de
l'imprimerie royale, 1 8 1 5? , 518 pages in-^/ (t ).
En rendant compte, dans ce Journal, du premier volume des Mé-
moires historiques et géographiques sur TArménie (i\ nous avons fait
connoître le plan adopîé par M. Saint-Martin dans la disposition de ce
lecueil. Par suite de ce plan, le travail général relatif à la géogra()We
et à I histoire de fAnnénie a trouvé place dans le premier volume-
Celui que nous annonçons aujourdhui, a été consacra plus spéciale-
ment h l'Histoire de 1% famille des Orpélians, écrite en arménien, vers
la fin du Xm/ siècle, par Etienne, archevêque de Siounie, qui appar-
lenoîi kii-rnème k cette iamille; mais ce n'est pas le seul morceau que
(1) Cet ouvrage se tranve à Paris, chez MM. Tilliard frères, libraires de
S* M. ic Uoi de Prusse, nie HaïUefcuîile, n* 21.
(2) Vcyei le Journal dç$ Sav^ns^ 181!*^ p, 487 497*
1
AVRIL 1810-
renfirrine ce second volume, et nous croyons devoir, en commençanli*
f^rc connoitre les diverses piéce;^ dont if se compose*
On trouve d\ibord deux dissertatîotîs de M-Saint-Martin: la première^
S4ir la vie et les écrits d*fitiennt» OrpéJiau; la seconde, sur rorigino
de la fanitUc des Orpélians et de plusieurs autres colonies cMnoi&e&^
éfalilies. en Annéaie et en Géorgie. Aces dissertations succède l'His-
toire des Orpélians en arménien, avec la traduction française en regard,
puis les notes relatives à chacun des neuf chapitres dont se compose
«tte Histoire : f Histoire des. Orpélians ♦ avec les notes et les deux dîs-
sertntîons préliminaires, occupe trois cents pages. Après cela se trouve
tm mémoire de fauteur sur I époque à laquelle a été composée la G^o^
graphie attribuée à Moï^e de Khoren; vient-ensuîie celte Géographie^
dont (e texte est accompagné, comme celui de THistoire des Orpélians,
d*une traduction française en regard, et suivie de notes. M* Saittt*
Martin reproduit après cela deux pièces assez peu importantes, qui
avoient éré publiées k h suite du texte arménien de la Géographie attrH
buée à Moïse de Khoren, dans ('édition de Marseille i6îîj; mais i(
ne les dontie quen français, La première est intitulée, Itinhtiirc ik
Tovln^ capitale th l'Arménie , jurqu* à plusUurs autres vUleî du, mime payé
et de qmlques autres régions ; la seconde est nne Notice sur ht quatre
fleuves dif Para Ht et sur quarante- d^ux autres fleuves grands et célebren
La Géographie du docteur Va tan» déjà publiée en arménien à Cons»
tantînople, en J728, vient ensuite; et M. Saint-Martin y a joint une
traduction française et des notes. Le reste du volume est rempli, i,* par
une ordonnance de Mihr-Ner»èh» gouverneur de l'Arménie pour lé
rot de Perse» adressée aux grands de l'Arménie, en français seulemetu;
2/ par une lettre des princes de rArttiénie orientale au Pape, datée
du tç avril 1699, aussi en français seul«»ment, avec un. petit nombre
de notes : on trouve enfin quelqu**?; additions et corrections; une table
alphabétique des noms géograf^hiques contenus dan?^ les deux volumes
de ces Mémoires, et une taiile des niémoîres cjue renferme le second
volume.
La famille des Orpélians, si Ton en croit les hfstorieris arméniens
et géorgiens, étoit originaire de la Chine* ou, comme ils s'expri^nent,
du royaume de Dfrnasdan j^^wâMêâm^hê ^ et alliée à une famille im*
pérîale de cette contrée située il l'extrémité orientale de I Asie. Chassés
de leur patrie par urie révolution politique, ces fuginft en cherchèrent
une nouvelle; et, après s'être portés vers 1 occident, ils entrèrent dans
la Géorgie par le défilé du Caucase, nommé Porte de Dari^t, Ifs étoient
•n.grand nombre, braves et intrépides, et conduits par un dief entre»
ce a
ao4 JOURNAL DES SAVANS,
prenant, cioué d'une force et d'une habileté extraordinaires. A certc
époque , les Géorgiens géniissoieiu sous ia tyrannie des rois de PersCr
de (a dynastie des Cayaniens* C'étoiti à ce qu'il paroit, Caïcaous qui
occupoji le trune de Perse. Les émigrés chinois offrirent aux Géor-
giens de se joindre à eux contre leurs oppresseurs, si Ton vouloir leur
accoider dans Ja Géorgie un lieu où ils pussent se fixer. Leur demande-
fut accueillie avec empressement. « On leur donna pour habitation et
» peur lieu de sûreté le fort imprenable dOrfcfh (^r^l-P-i qui avoit
>> été fondé par Kbartios ; ils eurent encore beaucoup de cantons, de
«grands bourgs et de forteresses, pour en jouir héréditairement. Ces
» étrangers habiièrent d'un commuïi accord à Orpeih; et c'est du noni
39 de cetre forteresse que, par la suite de$ temps» ils furent appelés^
» Orpoulk*h Ç^ppnë^Êjp ^ c'est-à-dire, en arménic^n, Orpitatsik'h O***
»^it|3«ry^^, parce que c'étoit la coutume de la nation géorgienne
» de désigner les familles nobles par un nom qui étok dérivé de celui
» du lieu où elles habitoient. »
Ce seul passage donne lieu k plus d'une question* i •'' Le pays de
Djtnasdan ou Djinastan , « situé, comme le dit Etienne Orpélian, vers
a>rorient, au-delà du pays des Khalandriens, voisins des Khazars ei
» des Huns, et quis*étend en longueur jusqu'au mont Imaiis », est-il,
comme le nom semble l'indiquer, la Chine L 2.** Etienne Orpélîan, qui
écrivoit à h fin du xiil/ siècle de fère chréiienn^t peut-il être une
autorité suflfisanie pour garantir l'origine qu il donne à sa famille î
}/ Son récit ne peut- il pas être justement mis au nombre des fables,
lorsqu'on fait attention que de ces temps si reculés et fort antérieurs à
la conquête de la Perse par Alexandre, il passe immédiatement au
milieu du XI / siècle de l'ère chrétienne!
Quaiil à fa première difiiculté, relati\e à la position qu'Etienne donne
au Djénasdan, M. Saint-Martin a cherché à rafloiblir> en supposant que
les mots, (t fi/i s'éttnd en lorjgutur jud^u'ûu wo^tt Imaus , ne se trouvaient
pas dans le manuscrit original , et ©m été ajoutés par lediieur de iV adras ;
mais il faut convenir que ceci est avonté sans aucune preuve. En adjiict*-
lant cependant cetie conjecture et écarlant aiusi une îpès*grav-e difliculté ,
il peut paroître encore douteux que leDjénasdan soit b Chine, puisque,
suivant Eiitnne Orpéliun, le Djtnasdan est situé à l'orient au-delà des
IChalandriens, nation voi^ine des Khazars et des Huns, et qui, suivant
un écrivain arménien ciié par M. Saint Martin lui-même, devoit habite»
vers les bords du Vciga. C'est piincipalement pour répondre à ces
diifiiuhts , tt pour faite voir que rien ne s'oj pose à ce qu*on admette la
lQdi:ion arménienne rtUtive à lorigine chinoise des Orpéliaui, que
J
A V prît igiof. ^HP ^*^^
Siîht-Martm à composé sa dissertation sur forigirre fle Fa ïâmîlfe des
tOrpélrans ei de plusieurs autres colonies chinoises éublies en Ajménie
let en Géorgie* Comme cette dtssertarinn est, entre les difftrens morceaux
Tque renferme ce volume, celui qui peut parorlre d'un intérêt plus général
jet fixer ratienlîon du plus grand nombre des lecteurs , nous nous y
Irrêterons de préférence.
« La famille des Orpélians » dit M. Saînt^Martin en commençant cette
-«dissertation, tiroit son origfne d'un vaste pays shué à Textrémiié
» orîenrale de FAsie, qui est nommé par tes Arméniens ^^IhiÉgMMfMêwtMt^
» Djértasdun , et qui est certarnemment le même que Ta Chine. Le notrt
» de Tchm ^j^ ou gw;^^ ( lisez ^^Uw^^ ) Tciîntstan chez Fes Persans ,
» celui de ^j^ Sîn chez les Arabes et de y)Kfni»j Tslnesian chez les
» Syriens, aussi bien que celui de D/énûsJûn chezl es ArniénieiTs, ont
» toujours désigné un pays grand, puissant et civifisé, qui, du côté
3ô do nord, éioit au-delà des déserts et des peuples barbares quî
» avoisrnent la Pt^rse et i*Inde,et qui, du côté du midi, éloit au-delà
3* des mers les plus reculées de Tlnde. » M- Saint-Manin > ptjur mieux
faire sentir encore l'identité des noms dmirrés par diverses nations de
l'Asie à la Chine, auroit peut-être dû rappeler , en faveur des lecteurs
qui ne connoissent pas les langues de rOrieni, que les syllabes ïjfart
sont une terminaison propre à la langue persane , qui indique le pays
occupé par une nation, ou le lieu où une chose se trouve réunie erf
abondance. C*est ainsi qu'on dit Turkestan , Aîogoiistan , tiuuioustan,
Franghhian , pour fe pays des Turcs, des Mogols, des Hindous ou
Indiens, des Francs ou chrétiens Européens. M, Saint-Manin conîfjîue
ain>i : « Nous avons dans Maioudy , excellent auteur arabe qui écrJvoîr
» au commencement du x/ siècle, le récit de plusieurs voyages etiirepris
» dans rintétieur de la Chine, par la route de terre et par celle de mer;
» on y trouve aussi le détail des guerres civiles qui accompagnèrent la:
» fin de la dynastie des Thang, Les guerres entreprisses dans l'intérieur
» de la Tartarie par cette puissante dynastie avoieni donné aux Arabes
» les moyens de bien connoître les Chinois, dont l'empire étoit alors
^ limitrophe de celui des khalifes. Tous les princes turcs deîaTransoxane
» étoient feudataires des monarques chinois. Les historiens de ce peuple
a» nous attestent que les piinces persans qui, après fa destruction de iai
>> dynastie des Sassanides, se maintinrent contre les Arabes, dans les
5» montagnes du Oilein , du Gilan et duTabarisLan» au sud de la mer
» Caspienne, et qui résidoiem à Sari, envoyèrent de fréquentes ambas-
» sades en Chine. Les historiens arabes, persans ei chinois i nous.
Ao6 JOURNAL DES SAVANS,
3» apprennent également que le dernier des ChQ.vo0s, lezdedjerd IH ^
9» réduiià rextrémité par les armes des Musulmans , tourna ses regards
«vers la Chine, pour en obtenir des secours qui pu^^ent fe rétablir sur
» !e trône de sç^ pères (j)* Après qu*il eut siiccunibé a MéroM» dans,
»Ie Khorasaxi, son tîlsi» J'irouz» chercha un asile h I;i. cour des Tbang.
» Après sa mort, plusieurs chef^ persans, cantonnes dans le Sedjestan,
i^.d^ns le Ganchestun ^ dans le Zabélistan, dans le Niiurouz de Kahouf ,
!• dans le Tokharestan, et dans diverses autres contrées du voîi>magc^i
» y restprcm indépendans des Arabes; et» connue ceuic du Dîleju, ik
ï> entretinrent des relations poliiiqutîs avec les Chinois. La duiuinatrpn
3» de ce« derniers étoit si bien établie dans la Transox,ane et les régions
» timjtiophes« que les Arabes leur donnoient ( l'auteur veut dire ^/on-
y* natffff a ces cùntréts) le nom de J'/w.-, * * : les Arméniens firent de
as même; ils donnèrent le nom de TV^^Jï D}c»k'h [ou Chinois] aux
» Turks d^ la Transoxane. w Après quelques faith que ) omets à dessein,
M. Saint-Martin ajoute: ««Les Arméniens donnèrent aussi le nom d©
I» Chinois aux Kha?5ars ei aux peuples qui habitoient au nord du Cau-
i^ca^e» dans ies vastes steppes qui s étendent fu&quau Volga, . . Ces
^ nations étoient sans doute soumises à la doiinnation ou au moins à
»(a suprtroaiie chinoise, et cetoit de là que leur venoit le nom de
]• Chinais, qui n^auroit pu kur convenir sous aucun autre rapport. Lei?
^> Arméniens savoieiiti aussi bien que les Aral es» que lempire de ce^
3o Chinois^ qui s'étendoit dans leur voisinage, se prolongeoit d'un autro
»j coté |M^i|*â 'a mer orientale « et que sa métropole étoit fort loin à
» lextrémiré de l'Asie.» M, Saint- N'ariin justifie ce qu'il a avancé sur
la grande extension donnée par les Araljes et les Arméniens \i Tt mpire
de la Chine vers le x.^ siècle « p:ir des passages de Masoudi, dXbn-
Haukal, et de la GéogMphîe arménienne, mal à-propos attribuée h
MoiVe de Khoren, et dont l'auteur lui paroîi cûntem[>orain de ces
deux écrivains musulmans.
On nt; saurait donc rais^^nnabiement douter que, dans le ni/ et le
IV/ siècle de fhégire, il n y eût une miilriiudc; de points de contact entre
Tempire chinois, cesi-à dire, les pays occidentaux qui reconnoii^soieni
plus ou moins immédiatement la suprématie du souverain de la Chine,
elles pays musubiians voisins de rOxuset limitrophes de la mer Cas-
piennei etque spus les noms de Sin, TcAin» Tchinisian et Djénasdan^
(i) M. Sainr-M^rtin cite dam une note, à l'occasion de la fuite de lezdedjerd,
tm passage d'Aboulfarage , où il s'est glissé utte faute typographique iréf-
|rive: pn y lit «^m au lieu de iJM*
AVUÏL 1810. ao7
on î)e désignât tout ce qui étoit compris soiis la doinînaiion chinoise,
Mïijsïl y ^ encore bien loin de îk à Têpoque attribuée à l'émigration, de
In feinilîe de laquelle les Orpélians tirent leur origine. Cette iradiîion
acquerroJt toutefois plus de vraisemblance, si Thisioire nous apprcnoit
que de semblables émigrations de faniiHes chinoises dans les pays *itués
à l'ouest de TOxus et même de la mer Caspienne, ont eu heu k d autres
époques moins reculées que les temps qui ont précédé Alexandre, mais,
îinîérieures de plusieurs siècles à celui oîi vîvoîent Masoudi et Ebn»
Haukal : or c'est précisément ce qu'établit ensuite M. Saint-Mariin.
En effet, nous apprenons de Moïse de Khoren que c'étoit aussi du
Djénasdnn que lîroît son origine la famille des Mamigonéans ou Mami-
goniens, qui, vers le milieu du JJI.* siècle de l'ère chrétienne, chassée de^
sa patrie par des dissensions domestiques, èloil venue «chercher m
asile, d'abord dans les états d'Ardeschir, premier roi sassanide, puis dani^
TArménie,, Moïse de Khoren n'étoît éloigné que de deux siècles etij
demi, ou de iroîs siècles au plus, de ces événemens; et il n'y a aucune^]
raison de révoquer en doute son témoignage, confirmé d*ajneurs par
celui de plusieurs autres historiens. Quelques autres faits d'ujjc moindrô.
importance ajoutent encore ^ ces preuves des relations qui existoiem ,^
vers cette même époque, entre les royaumes de Perje et d'Arménie et
fempiredela Chine, et donnent lieu à M. Saint-Martin de conclure J
qu'il est permis de présumer que des relations semblables avoient existé. [
long- temps auparavant entre ces diverses contrées. Ici notre au leur vl
rassemble divers faits, extraits des histoires chinoises, et qui tendent àJ
étnllir, contre ropinîon, ou plutôt contre le préjugé commun, que les^
Chinois, moins d'un siècle et demi après J. C. , connurent Fempirc'
rotnain, nommé par eux Tûthsln ou grande Chine; que Feinpiredes
Parihes h\xt étoit aussi parfaitement connu ; que, par une suite nécessaire^ |
de ce contact entre les Chinais d'un côté et de l'autre des nations sou-
mises i} In puissance de> Grecs et des Romains, ces peuples n'ont pu mar«^
quej de cornoître aiïssî les Chinois; enfin, que s'ils ne nous ont transmis
à cet égard que des notions vagues, c'est que, faute de connoissances
positives et d'îtintraires bien laits, ils ne pouvoitnt convenablement
coordonntr Its notions qui leur étoient parvenues. «Je suis persuadé,
>5 m:jfgré cela, rfjonte-t-îl, que ks Sinût des géographes anciens, qui ont
M doniié Ireu \i tnnt de discussions parmi les modernes, ne sont pas
>î autns que les Chinois eux-mêmes, i> Ici M, Saiiu-Martin ne néglige
rien [ our concilier ce résultat important de ses recherches avec Topinioa
du restaurateur de la géographie systématique des Grecs, qui a placé les
Siim des anciens, et ceux de Ptolémceen particulier, dans la presqu'île
io8 JOURNAL DES SAVANS,
orîenlale de f*Ijide. Sam entrer dans la discussion de ce point de géo-
graphie, nous croyons pouvoir affirmer que les lumières qui chaque jour
ie répandent, grâce aux travaux d'un petit nombre de savans , sur
fhisioire et les aniiquîtés de la Chine, nous présentent cet empire, et
res rapjx>rts avec Toccident et le nord dl FAsie, sous un puînt de vue
bîen différent de celui sous fequel on envîsageoit ces mêmes objets il
y a un demi siètfej et ces ré>u}tat5î historiques valent bien sans doute
(es hypothèses ingénieuses et séduisantes, 51 l'on veut, mais arbiîraijes et
ha^^ardées, que t.int d'écrivains superficiels ont répétées aveuglément
après I*hiîitorien deTnstronomîe.
M. Saint-Marrin d^^duit, er des discussions précédentes, et de quelques
autres auîoriîés dont il les fortifie, que fes Sinœ des anciens doivent,
comme 1: s peuples de Sh ou de Tthir; des Orientaux» s'étendre de la
mer orientale à la mer Caspienne. Il en déduit encore cette autre con-
séquence, que. depuis le commencement de Tère chrétienne au moins i;
les Chinois ont été connue des anciens sous le nom de Stn/^, et qu'ifs
Tont toujours été depuî<; cette époque, sous des dénotninations k peu
pré* pareilles et évidemment d'une même origine* Nou» croyons louie-,
fijîs ne pas nous éloigner de la pensée de fauteur, en faisant observer
que réfendue de la doiiiination chinoise jusqu'à l'Oxus, et même, si Ion
ft-ut, Ju^qu*au nord-ouest de la mer Caspienne, pour certaines époques
reculées, étant adtnise, les noms de Sin, Tchin, Tikinhtan, Djénasf/nn,
ort renfermé beaucoup de nations diverses , tout-à-fait étrangères aux
Chinois par leur ortgjne, leurs langues, leurs idées religieuses, leurs
Ibrmes de gouvernement, et qu'un peut fort bien supposer que sous ces
nom> il faut parfoiîi entendre des nations turques, tariares, niogoles, &c.
Ain^i, parce c|ue les hîaoriens nous diveni que les Orpélians et les Ma-
niigoiiieiîs venoient du Djéna^dan , on ne |>cut pa;» en concfure que ces
fîimilles fussent réellement d'origine chinoise; et si Ton répond que les
historiens as urent qu'elles appartenoient à la fauiifle impériale de la
Chine, au / jtnpagQur , il est permis de penser ou que les hi'^toriens ont
embelli leurs récits de ces circonstances, ou que ces émigrés eux-mêmes
ont cherché à relever leur origine, et en ont imposé aux habiinns de
leur nouvelle patrie. Je ne sais si je ni*al>use, nais les noms d'Arpog,
Pegfi'i^kh et Alamhn, qui figurent dans Thisfoire de l'émigration des
Mamigonîeïis, me semblent I ien éloignés d'avoiri s'il est permis de
prier amsf, une physionomie chinoise. Ajoutons que Vakhiang, dans
son Hîsîoîre delà Géorgie, des Orpélians et de leurs compagnons d'émi-
gration, ne les nomme jamais que I ouramanî ; ce qui indique seulement
qu'ils venoient d'un pays situé au-delà de TOrus.
V
ÀVRTL 1810. ^^H ^^9
Quoi qu*iren soît de cette observation , revenons aux Orpélians, et
voyons comment M. Saint-Martin^ après avoir établi feur origine
chinoise, s*efforce de prouver que rien ne s'oppose ï ce qu*on admette
aussi f époque reculée de leur établissement dans la Géorgie, époque qu'il
se contente pourtant de désigner d'une manière vague comme antérieure
à Alexandre, quoique, suivant les historiens arméniens et géorgiens,
elle remonte au règne de Caïkhosrou, ou à celui de Caïcaous, cest*k-
dire, à six ou sept règjies avant f expédition du conquérant macédonien.
L'olîjecïion que se fait lui-même notre auteur, est assez grave pour que
nous transcrivions ici ses propres expressions, « La seule raison valable
5» qui puisse, dit-il, empêcher de croire que rétahfissement des Orpé-
» lians en Géorgie soit antérieure la conquête d'Alexandre, c'est que
3> fenom de Càine n existoit point à cette époque* Nous atlons examiner
» si etfe est fondée: car, quelque opinion que nous adoptions sur fanti-
>9 quité des Orpélians , il faut qu'ils soient venus de ta Chine dans un
1» temps où elle portoit ce nom^ ou un à peu près setnblable; car, ainsi
» que les Mamîgonîens, ils ont toujours été appelés Chinois dans leur
»> nouvelle patrie, et on les nomme encore ainsi dans ta Géorgie (i). »
C'est de (a dynastie des Thsin^ qui a occupé le trône impérial depuis
fan 249 jusqu'à Tan 206 avant J, C*, que la Chine a pris ce nom, sous
lequel elle a continué , même après rextinction de cette fatnîlle, à être
connue chez les peuples barbares. Avec quefque rapidité que Ton suppose
qu# cette d^ts^jiuîâiauurAi ac >uii repondite parn^i les nations ovwlfciei liâtes/
on ne peut guère admettre qu^efle y ait tté d'un usage commun amé-
rieurement à fan 2 jo avant J. C, M. Saint-Martin prouve, ou du moins
établit avec beaucoup de vraisemblance » que la Chine étoit effective-
ment connue des étrangers sous ce notn plus de deux cents ans avant
J, C. ; tnais comme cela ne suffit pas pour fustifier ia haute antiquité
attribuée à leniigratton des Orpélinns, il pense écarter Tolijection en
faisant observer que, « quand les princes de la famille de Thsin montèrent
»> sur le trône impériaf, ils po^^sédoient déjà un royaume puissant, qui
i> s^étoit formé parla destruction successive de plusieurs autres états. * ,
» Comme elle possédoit toutes les provinces occidentales de la Chine,
(i) «Ce nom (te i^om d^Orpéiliins), dit ailleurs M* Sarnî-Martin^ n'a pas
«fait oublier ceux qni rappellem leur origine ; on [es nomme encore, selon la
î* différence des Ungoes , en géorgien, Djénévmd , et en arménien, Djênasti ^
«c'est-à-dire, Chinois. On les appelle encore actuellement, dans lepaysj Ojtn^
npakounûni; ce qui signifie, desandans du pakour de D}tn, On a déjà vu que
»le titre d^ pakour ëtoit celui que prenoknt les souverains du Djénasdart. n
Pag- îî « î4-
;iJo JOURNAL DES SAVANS,
?ï son nom psrticulier, qui étoît déjà célèbre, avoit pu se rfpindre dès
?> long-temps chez les nations scythiques, avec fesqutiles eile devaU
» nécessairement avoir des rapports- » J'avoue que cette solution nem^
satisfait guère ; dans mon ignorance de la littéraiure chinoise et de
Ceffe des nations qui avoisinent la Chine , je suis bien lente de penser
<jue (empire chinois a été appelé par les nations occideniaies du nom
de Thsin, parce que ces nations n^n ont acquis une connoiwance un
peu distîjicte que lorsque le trône étoît occupé par la dynastie des Thsin,
c'est-à-dire* un peu plus de deux siècles avant J. C,, et qui! faut
beaucoup rabattre de la haute antiquité attribuée à Témigration des
Orpélians et à leur établissement à Fouest de la mer Caspienne (i).
Quand on connoîl labsence totale de critique des écrivains orientaux
tnfait d'histoire ancienne, on est bien disposé à ne pas leur faire grâcÉ
dVn anachronisme de deux siècles dans Thi^toire de ces temps reculés,
II est possible que de nouvelles découvertes dans le champ de la litté-
rature chinoise et tartare me convainquent sous peu d'avoir traité un peu
trop légèrement les titres de noblesse des Orpélians : û cela arrive,
^applaudirai moi-même à ma défaite*
Je m arrêterai quelques instans sur une pièce curieuse contenue dans
ce second volume. Je veux parler de I ordonnance de Mihr Ners^,
gouverneur de TArménie pour le roi de Perse lerdédjerd H. Mihr
Nersèh avoir reçu du roi (ordre de contraindre les Arméniens et d'autres
nstkrrt» ^rvofiTcs ^^Dandonner m %oi direttenatr crirtîTrtJT«»3CT ta religion
de Zoroastre ; après avoir lenié d'ébranler les prîiK:es et les seigneurs
les plus puissans par les promesses et les menaces, il eut recoori à la
violence et aux supplices ; en même temps il adressa aux princes et aux
évéques une exposition de la doctrine de Zoroastre. M. Saint- Martin
avoit promis ( iom. I , p. ^ij) de donner dam le second volume ie
lexîe et la traduction de cette pièce » qui nous a été conservée par
un écrivain contemporain : on ne trouve cependant ici que la traduction
de cette ordonnance; mais le traducteur avertit que ^W n'en a point
donné le texte, cest qu'il se propose de le publier dans peu, avec la
réponse des évèques et des princes de f Arménie. Quoique cette pièce
soit fort courte, elle se divise natureilemeni en deux parties: la première
est un exposé très^sticcinct de la doctrUie de Zoroasijre ; \% seconde , une
^ • - •. — ' ■"-■ ~^
(ij 11 est bon de se rappeler t\nt^ depuis Haïk yusqu a la fondation de la
fïuisfance des Arsacidtf , c cst-i-dirc, penîaût un întervalLc de du*hiin siècles,
es Arménien» ignorent, a pru de chottc près, rbistoire de kurpays; ils rgnoreqft
sur-tout le» cvcncitttii^ qui 001 tu lieu depuif ia mort d'Alexandre |«*qu*ai*
régne d'Arsa ce. ; ^ * ' » ♦^-1
J
Ajl^ ^^^ m. i
AVRIL i92ô. ' ■■ ^fi
téfutatfen tfel dogmes principaut du chrisuanisme, Ott pfuiAt imt
invectrve contre la docirrue des chrétiens. Cette seconde pAfiie n'offrb
presque aucun intérêt î mais on regrette que îa première ne p**éseniè
pas de pf us grands détails. Une chose digne de remarque, tVit cpi^JI
n'y est nullement question du culte du feu et des élémens. Voici ce
qu elle contient de plus remarquable : ce Lorsque les cieux et la terre
» n'existoîent point encore, le grand dieu Zervan fatsoit une prrèi*e
>* depuis mille ans, et disoît : Peut-être qu'il me naîtra un fils appelé
>» Ormiji ,^\ fera les cieux et la (erre. Il conçut alors deux énfans dans
» son ventre > l'un pour faire la prière ( les lischts] , et Tautre pour dire
»* /jfi/r-f/rr ( cVst-à-dire , pour donner des doutes sur la divinité, et pro-
>» pager firréligton et Fîncrédulité ). Quand il connut qu'ils étoieni tous
^ deux dans son ventre » il dit : Celui qui viendra le plutôt , je lui donnerai
3> 1 empire. Celui qui avoit été conçu dans rincrédulité, lui fendit le
» ventre, et sortit dehors. Zervan lui dit : Qui es- lu ï Ton fils Ormizt ,
» répondit-if. Mon fils est éclatant de lutniére et répand une douce
55 odeur, lui répliqua Zervan, tandis que tu es ténébreux et ami du
» mal : et comme celui-ci pleura très-ainèreinent, son père lui donna
» l'empire pour mille ans, et le nomma Arehmen. II engendra ensuite
>' un autre fils, qu'il nomma Ormizt , et il ôta Fempire à Arehmen , et le
» donna à celui-ci, en lui disant : Aujourd'hui je l'adresse ma prière,
» adresse-inoi aussi la tienne, Ormizt créa alors le ciei et la terre; mais
31 Arehinert I «19 c^nlralic, viéa le uidl. L*<^3 crw^otaj-oc ALr«»nt partagées
» de fa même façon : les anges viennent JOrmizt , et les dews ^
» d'Arebmen : tous les biens qui viennent des creux et d'ici-bas pro-
» cèdent également d'Ormizt, et tous les maux qui se répandent là et
yi ici, sont de même d* Arehmen. » Il est difficile de décider jusqu'à quel
}>oint cet exposé de la doctrine fondamentale du magisme est d'accord
avec ïes idées de Zoroastre sur le premier être» fauteur des deux
principes, Zervan, ou le temps sans bornes; mais toutefois c*est un
document précieux pour f histoire de f ancienne religion des Perses,
Pout rendre toute justice au travail de M, Saint*Martin, ce seront
sur-tout, après la dissertation dont nous avons donné l'analyse, ses
notes sur rHfstoire des Orpélians quil faudroit fîiire connoître; mais 'à
peine pourrons-nous indiquer quelque portion des notnbreu ses recherches
historiques qu'elles contiennent. Dans celles du chapitre Ils on trouve
recuefllre une multitude de renseignemens curieux sur les efforts que
firent en commun les Grecs > les Géorgiens et les Arméniens, dans le
onzième siècle, pour opposer quelque résistance aux progrès des Turcs
Seldjoûkides, Libarid, nomtné par les Grecs Lipariûs , prince Orpé-
Dd %
rS*"^^ JOURNAL DES SAVANS,
jan, fo»îc un grand rôle dans cette guerre: tomljé au pouvoir des
b^nfidefesy après avoir fait des prodiges de valeur, il obtint la liberté par
Jes seins de Tenipereur Constantin Monomaque. Si ion en croit Ebn-
lalatbir, Tempercur ne se contenta pas d'envoyer de grands présens au
If^ullan Thogril-beg, qui a.oit rendu Libarid sans rançon , mais encore
il fit construire à Conslaniinople une mosquée dans bqueUe on fit la
-prière publique au nom de Thogril-beg. Grégoire Bar-Ht-brxusdit aussi
que Constantin répara la grande mosquée que les Musulmans avoient
à ConstantinopJe, lorna de lampes, y établit des desservans musulmans
.,et leur assigna des traîtemens. Ce fait est assurément bien difficile à
croire î et, au lieu d'accuser les historiens grecs de Tavoir passé sous
silence , il me paroît Ijeaucoup plus naturel de penser qu*i( a été con trouvé
par les écrivains musulmans, et que Grégoire Aboulfarage a adopté
♦ trop légèrement leur récit» Il y a dans te passage d'Ebn*afathir une
, phrase qui devra paroître très-singulière aux lecteurs qui nen jugeront
que par la traduction* Après avoir rapporté les siiccès de larmée musul-
^inane contre les Grecs et leurs alliés, fauteur arabe dit : /Lk*Jt yt J^
ejy 4_yî j.-*^ i%m^'i jLjjlajJi tX^ Jf ^^L iX£ ^)l\ û^>^ ^Jxi oi^ i c'esi-à-
dire:<cOn raconte qu on employa dix mille chariots à porter le butin,
« parmi lequel il se trouva dix-neurmille cuirasses, " et non pas, comme
fa dit, par une singulière inattention, M, Saint-Marfin» « . , , butin,
^ dont fa longueur ocçupoit en totalité un espace de dix-neuf mille
J3 coudées: >^ sans doute il a confondu c^3 avec c.1^3, La destruction de
la famille des Orpélians racontée dans le chapitre IV, le règne de (a
reine de Géorgie , Thamar, et le rétablissement des Orpélians en la
personne d'Eligou m et de Sfsenfans, événemens qui occupent le chap. V,
offrent des scènes d*un grand intérêt , et ont donné lieu à un assez grand
nombre de discussions historiques et chronologiques. Mais c'est sur-tout
à commencer du chapitre VI que Thisioire des Orpélians acquiert plus
d'intérêt, parce qu'elle se lie k celle des Mongols* C'est aussi dans les
notes de ce chapitre et des chapitres suivans, que les recherches de
M, Saini-Marrin offrent plus de variété, de renseignemens nouveaux,
de problèmes historiques, de conjectures heureuses, enfin un plus
grand usage de tous les trésors de la littérature orientale. Ses observations
sur les diverses tribus turques, tartares ou mongoles, sur les causes qui
ont fait prévaloir le nom des Tartares et celui des Mongols sur ceux
des tribus qui avoient avec eux une origine commune, >urla siiuation
de la ville de KaraLoroum » sur le christianisme prérendu des khans
descendus de Djinghiz-khan , et une multitude d'autres répandues dans
AVRIL ï8iO,
21
ices notes, ne peuvent que confirmer Tidée que nous avons donnée, enj
rendant compte du premier volume, des connoissances aussi étendues
que solides de M. Saînt-Mariîn, de son infatigable patience dans Tétude^
des monumens historiques de l'Orient, et de sa critique sage ei impar-
tiale. L'historien des Mongols, Raschid-eddin , lui a fourni plusieurs
passages imporians ; et Ton ne sauroit trop désirer que quelqu'un de
nos savans orientalistes se charge d'exploiter cette mine de connoissances ,
si féconde pour les temps de la puissance inongole. La liitérature orien-
tale a droit d'attendre ce service de M, Et. Quatremère, qui s est partî-
culièremeni occupé de cet écrivain*
Puisque j'ai parlé de Raschid*eddin , je profiterai de cette occasioa I
pour corriger im passage de cet historien, ciré peu exactement par
M. Saint-Martin. Ce passage, relatif à la situation de Karakoroum, se
trouve p, 278 du volume dont je rends comptêt M, Saint-Martin le
traduit ainsi : « Okiay-Lian ordonna de bâtir sur les bords du fleuve
» Orkùun une ville fort grande qu'on nomma Kûrakoroum. On établit
» ensuite entre cette ville et la Chine une route de poste difl^érente de
» toutes les autres ^ et qui fut appelée lam nar'tn. Il y avoit une poste
i> à toutes les cinq fursangs ; et Ton montoit ainsi pendant irente-sept
» postes (ce qui tàisoit cent quatre-vingt-cinq farsangs), » Le texte
publié par M, Saînt-Martin porte : j^^ jU >4^ tjt b" jLi «^i^X) jIj
t>àj>j ^ ^L_i iAj^ji ^^^ J-» j^j t^^j*s^ *L» ij^j^j t>-ijt^ pL (jL-LijI
tMt ^:i*L_j . Les derniers jnots signifient , « et à raison d'un îani [ ou
« relais] par dnqfarsûïïgj, cela fait au total trente-sept relais. >» L'erreur
vient de cequ*il aa pas bien saisi le sens du mot j^t>j. Ce qui précède
se lit ainsi dans le manuscrit : ^U ^L ^jLjj jùjI^ ^U ^^LL j\ j^j^ ^Lj
(jJ3>^ , et doit être lu ainsi» en rétablisjîant les points diacritiques qui
sont omis dans le manuscrit , J^ (jbL jt j^ ^^Lj ; et je croîs que le
sens est : « On établit des relais ( de chevaux ), en outre des courriers
*> (ou messagers à pied) de la poste, et on appela cela narln iam, « Je
pense que (^IjIj [ et non ^UC ) est le pluriel de ^^\J^ , mot turc qui
signifie puion. Je ne garantis point ma traduction, mais j ai cru nécessaire
de rétablir scrupuleusement le texte. Je joins encore ici un petit nombre
d'observations et de corrections.
Le mot veiûs ou ùesics * BÉnrf, nom de dignité (p. iQz) , me paroît
devoir être rapproché de B/stt|, qui, selon Hésychius, signifie roi chei
hs Perses f Rei. Dissert mlîcel/. tom, U^p* i47)^
Au lieu de ^jiff (p. 2jj}t il faut lire t^î>i.
*î4 JOURNAL DES SAVANS,
Dans un passage de la Géographie d*Abou*Ifeda , cité p- 1^7 , au lieu
de l^ Jf il faut lire l^i-Jui jT; ce qui exige aussi une légère correcûoa
dans la traduction*
Le mot baskkagh ët^tâtuluu*^ ( p. 2S1 ) est mongol , ou, suivant
Casteli , appartient à ia langue du Kharii^me : il s'écrit en persan jU-.ij 1
^LiULi, et inéme qUImIj. Mirkhond emploie ce mot, notamment dans
I Histoire des Ismaéliens de Perse; H veut diregûuventfurf comman/ianL
Le mot dariJjenigtftâfirfrWpitfrtf (p, ^jj) est le ^^^«m* ^b ou ,^5Via. j\^ ,
des Arabes et des Persans, c'est- à-dire, la cartff/e. Les mots hoschdpovûg
^njÊmpnêââ^ ^ povidjenîg pn^ftlipiitrif et gasiman i^ivtâfrJf/u^ me
paroissent être les mots persans ^j^y^j^ -sjy^ tiy? ^^ o^J^* ^^ deux
premiers, qui signifient jubstance de bonne odeur et §dtur de la Chine,
désignent sûrement des substances aromatiques; mais j'ignore i quelle
substance, soit animale, soit végétale ou minérale, ils s'appliquent: le
troisième veut dire le eastoreum.
Je termine ici I extrait de I ouvrage de M. Saint-Martin : des travaux
de la nature de ceux-là n'ont pas besoin de recoin mandation auprès des
hommes capables de les apprécier; pour les autres, ils envelopperoient
dans le même jugement et 1 ouvrage et le compte plus détaillé qu'on
âuroit pu en rendre.
SILVESTRE DE SACY-
Le Monde maîutîME , ou Tableau géographique et hisiori^ui
de t Archipel d* Orient , Je la Polynésie et de l'Australie; con-
tenant la description de toutes les îles du grand Océan et du
continent de la Nouvelle-Hollande; f histoire des peuples qui
les habitent, l'exposition de leurs croyances, de leurs gouverne-
hietts, de leur agriculture, de leurs arts, de leur industrie, de
leur commerce; la peinture de leurs caractères, de leurs usages,
de leurs mœurs , de leurs costumes ; avec des vocabulaires com-
parés de leurs differens dialectes; par C, A. Walckenaer,
membre de l'Institut (académie des inscriptions et belles-lettres):
deux volumes i/i-(S*/^ ornes de gravures; chez Nepvea,
PREMIEtt EXTRAIT.
Depuis que l'ancienne division du monde habitable en quatre pirties
AVRIL 1820. • %%i
a été jugée, pif W géographes , insuffisante et peu coniincKÎe , on ^
iiïiaginé , pour la remplacer » diverses dénoininatioas, dont aucune ,
|iisqu*à présent , neparoît avoir reçu rassentinient général* En les pro-
posant , les auteurs ont été mus par des considérations diverses* Les unS|
cherchant à venger Christophe Colomb d*une injustice que Tusage a
comme consacrée, ont voulu donner à l'Amérique septentrionale le noia
de Colombie^ en restreignant celui C! Amérique à la partie méridionale
de ce continent; les autres ont tenté de faire admettre, pour les terres
australes et tes îles de l'océan Pacifique, les noms de Notash , de
Polynésie, ai Océanique, et même ceux iS Australie et d'Ausiralasie, qui
sont évidemment impropres, si Ton veut les appliquer aux archipels
situés au nord de Féquateur.
M. Walckenaer, en adopiant, dans sa Cosmologie, le nom df Mon40
maritime pour désigner collectivement toutes les terres qui n'appar-
tiennent ni à i ancien ni au nouveau monde , n'a pas cédé au désir
dmtroduire une dénomination nouvelle, désir puéril et rarernent cou-
ronné de succès. Frappé, comme favoient été les plus célèbres géo^
graphes du xvi/ siècle , Mercator , Ortelius, Guillaume Pastel, et, après
eux, Voisin de la Popelinière et le président de Brosses, des avantage*
que semble oflrîr pour la géographie une distribution de toutes \^% terres
du gfobe en trois mmdts , M» Walckenaer a fait valoir, ei^ faveur da
cette distribution, des motifs que Tétai des sciences neût pas permis à
ces anciens aiuteurs sculemeni de aoupçonnor. En effet • comme il
arrive dans toute bonne méthode, ce qui n'étoit d abord qu'une ctassî*
ficaiion imaginée pour meiiie de Tordre dans les objets à étudier,
devient en méjne temps un moyen d'en apercevoir les caractère»
essentiels; et une division qui semble exclusivement du ressort des
géographes» peut offrir de l'avantage au naiuralLste et au philosophe,
parce qu'elle est. véritablement philosophique et conforme à ta nature.
Des nations et des nionumens dont forigine se pefd dafis la nuit d^t^
temps; de grands espaces restés déserts , uniquement parce qu'ils se
refusent à la culture ; des contrées fertiles et habitées par d^s peuptes
puissans et civilisés ; les steppes nvétne couvertes par les tentes nombreuses
des tribus de pasteurs; de graods animauxt l'éléphant , le cheval * lane^
techameau ,1e bcBuf, apprivoisés et rendus utiles i l'homme depuis un
temps immémorial: tels sont les ^aits qui frappent au premier coupr
d'qeil dans laiacien monde et qu on ne retiouve plus da^s les deux autrev
Le nouveau monde U'offre que des fajinlles peu nombreuses d^ s^uvagW
ciwsseurs, errant dans répaisseur des forêts, ou k travers d immenses^
et verdoj^antes prairies^ des villes ci des villages eonsirnit^ depuis un petrt
{
%
r
"ÏÏW JOURNAL DES SAVANS,
nombre de siècles par des colonies civilisées, transplantées d'un autre
hémisphère ; par-tout ailleurs , des bois presque aussi anciens que le sol
qui les nourrît, et le génie de Thomme aux prises avec une nature
productive, gigantesque et sauvage.
Dans le monde maritime enfin, fon voit de grandes îles habitées
depuis long-temps par plusieurs peuples civifisés ; un continent désert,
où Ton n'a trouvé que quelques hommes épars , dans I état du plus
complet abrutissement; de petites nations resserrées, au milieu du vasre
Océan, dans d'étroits espaces fertiles, et présentant un singulier mélange
des mdeurs douces et de Tindustrie de la vie agricole avec Tindolence et
la ftrocît^ des sauvages errans ; de toutes parts , des bancs de corail, des
récifs immenses, des îles entières qui sont l'ouvrage des zoophyies et
semblent attester une formation récente. Des différences si tranchées
n*am.pu manquer d'être aperçues ; mais la diî^tribufîon de M* Walc-
kenaer parof t seule propre à les faire convenablement appércier.
Les trois parties du monde maritime ne présentent pas entre elîer"
des différences moins caractéristiques que les autres divisions de I*ancîen
et du nouveau monde. La plus éloignée des trois est, comme on aoioit
pu rimaginer, celle qui offre les contrastes les plus marqués t c'est dans
la Nouvelle- Hollande , et dans les grandes terres qui font face à ses
côtes orientales, que Thomme semble parvenu au dernier degré d'affoî*
Wissement physique et moral* Là se trouvent ces animaux remarquables
par de $i étranges anomalies, les cygnes noirs, les espèces les plus
singulières de marsupiaux et de monotrèmes , et sur-tout rornitho-
rynque, être bizarre et qu'on seroit tenté de croire hybride» qui lient
à la- fois du quadrupède, du reptile, de Toiseau et du poisson. L'absence
totale de grands animaux sauvages , et les arbres k pain , forment, sous le
rapport de f histoire naturelle, (es traits les plus saillans des archipels
épars surfimmense surface du grand Océan; et enfin lanafogie même,
que la partie du monde maritime la plus rapprochée de I ancien continent ,
ou farchipel d'Orient, laisse voir dans ses productions comparées à cellei
de TAsie, cette analogie confirme ces distinctions, foin de fournir la
matière d*une objection splide. Cet archipel, qui fait, pour ainsi dire, le
passage entre les deux mondes, offre des espèces analogues et non
semblables à celles de TAsie: tels sont le rhinocéros et Phîppopotame.
Sumatra produit larbre à pain de la Polynésie, et, par un dernier trait
qui sembfe fait pour confirnter ks ingénieuses observations de M, Wafc-^
kenaer, on vient de découvrir dans cette île !e tapir, qu'on avoit crii
Jusqu'à présent particulier au nouveau monde. A la vérité, cet animal se
trouve aussi dans les forêts de Malakka. Al. Vakkenaer pense qu'il
.WRIL 1820.
217
pourrait hien y avoir été transporté de Sujiiatra : tnais, outre que le
tapir nommé ii;iou par les Maiais, n'est pas» suivant le témoignage de
M. Farquhar, moins conimua dans (a péninsule que Téléphant et le
rhinocéros» les Chinois, qui fe connoissent depuis fong-tenips et qui
le décrivent sous le nom de me { 1 ) , disent qu'on en trouvoit autrefois
dans le Yun-nan, Je crois donc qu'il vaut mier.K s'en tenir à une autre
observalion de M. Waltkenaer; c'est que si Sumatra se rapproche en
bien des points de Tancien monde, la presqu'île de iMabkka participe
aussi de la nature du monde maritime dont eile est voisine. Ces passages-
successifs et Ces dégradations par nuances insensibles sont trop communs
en histoire namrellc , pour que 1 on doive s étonner d'en trouver des
exemples en géograj>hie,
Oa voit maintenant quelles contrées M, Wafckenaer a entrepris de
décrire; ce sont les trois parties du monde maritime, ou Farchipel
d'Orient, la Polynésie et l'Australie. Cette division naturelle sert de plan
k son ouvrage, dont les deux premiers volumes, ceux que nous
annonçons en ce moment » sont consacrés à la description des îles de
farchipel d'Orient les plus voisines deTancien continent, Sumatra , Java,
Sutnbava , Florès et Timor. L'auteur se propose, dans les volumes
suivans, de continuer à pnrcourir les nombreuses et intéressantes îles qui
composent rarchi[)el d'Orient; puis, se dirigeant à l'est , il décrira, dans
une seconde partie, «cette quantité prodigieuse d*archipels formés de
» petites îles diversement groupcei, lf«^*?s enrre ellp*; par des écueils ,
"tantôt élevées en cône à une hauteur considérable, tantôt aplaties
» jusqu'au niveau des flots, protégées, entourées ou jointes par de
j> redoutables récifs, par de longs bancs de corail, qui cernent des
iy portions plus ou moins grandes du vaste Océan, et forjnent au milieu
» des rHers , et sans aucune côte, des golfes, des lagunes , des ports,
» où , sans craindre les vents courroucés, flottent et se jouent les
y* barques légères des habitans du monde pélagîen* « Enfin, revenant à
l'ouest, l'auteur décrira ks côtes désolées du continent d'Australie, ses
immenses chaînes de montagnes, ses frofondis forets , ses solitudes inex-
plorées. Ce vaste continent fera, avec Van-Diemen au sud, et les îles
alongées, riantes et fertiles qui sont à l'est, Tobjet de la troisième et
dernière partie.
Comme les Européens ont depuis long-temps formé des établisse*
mens dans les principales îles de l'archipel d'Orient, le nombre des
(i) Voycz-ic figuré dans TEncyciopédie japonaise, I. xxxvlUj p. y; et cou»
suicez les Die tion rrcchiDois au mot Aie^ cL CLUI, ir* M.
Ee
,1
i
2i8 JOURN.AL DES SAVANS,
relations dont ces îles ont été lobjet, a toujours été très-considérable,
et s'est encore beaucoup accru dans ces derniers temps. Ces relations
sont, comme on peut croire, les sources principales où doit puiser un
savant d'Europe qui n'a pas lui même visité les contrées qu il entreprend
de décrire- Toutefois on se tromperoit gravement, si ron croyoit que le
travail dont elles peuvent devenir I objet, fût un simple travail de com-
pilation , c{ui consistât à rassembler ces relations , à choisir les meilleures ,
à les dépouiller, et k classer par ordre de matières les extraits qu'on
a u roi t faits. Cette tâche, sans doute assez pénible, pourroit donner
naissance h des ouvrages estimables; mais on ne peut croire que
AL Wakkenaer ail pu s y borner , quand on connoît les- travaux dont
il a déjà enrichi la science géogra|^hique. Pour peu qu*on ait étudié les
voyageurs, on sait combien il est difficile Je les concilier entre eux et
avec eux-mêmes î combien de posiîions mai indiquée^», de noms altérés
et rendus méconnoîssables; combien de vague, d'incertitudes de toute
espèce. S'il s agit de pays un peu étendus, ou d'iles sîiuées dans des
parages peu connus, il faut quelquefois une rare critique pour accorder
Jes anciennes relations avec les nouvelles, ou inême pour s'assurer
qu'elles s'appliquent aux mêmes contrées. C'est bien autre chose quand
on veut non- seulement suivre le i)rogrès des découvertes des Européens
et remonter à l'origine de leur^ établis>emens, mais faire connoître
avec délai! des pays éloignés» tracer le tableau de leur co.istitutîoii
physique et de leurs divisions politiques, décrire leurs productions, non
en voyageur ordinaire ou en commerçant, mais trn naturaliste et en
géographe; faire l'histoire des hahitans, de leurs langues, de leurs
mœurs, de leurs lois , et de tout ce qui constitue la civilisation : c*est ih
ce que AL Walckeiiaer a entrepris pour la partie du monde la plus
étendue en surface, la plus difficile à décrire et la plus ituparfaitetiient
connue jusqu'à ce Jour.
^introduction qui précède Touvrage, n'est pas très-étendue; elfe
contient, outre l'exposé des motifs qui ont fait adopter par l'auteur la
division du globe en xroh mondes , une description géjiérale mais abré-
gée du Afonde maritime. Des considérations applicables à l'ensemble
des îles de Tarchipel d'Orient sont aussi retifermées dans quelques pages.
Enfin le livre premier, partagé en quatre chapitres , occupe les deux
volumes déjà publiés : il est consacré tout entier aux t/es Sumairunncs^
ou îles de la Sonde ; et le premier de quatre chapitres qui le cajnposent ,
a pour objet la description de Sumatra et des petites îles qui [environnent*
Dans cette partie de son ouvrage, JVL Walckenaer n'a pas manqué de
prendre pour principal guide M. Marsden^doni les importaus travaux
AVRIL 1820.
219
ont tant contribué k étendre les connoîssances quon avoît avant lui sur
l'histoire et les langues de plusieurs peuples orientaux , et des Malais
en particulier. Mais le savant français a aussi puisé à Jautres sources;
et les Mémoires de la Société de Batavia, les Recherches asiatiques, et
beaucoup de relations paniculières et d*ouvrnges spéciaux qu'il a soin
de citer, ont servi à compléter les notions qu*i! a recueillies, ou à en
confirmer l'exactitude. Avec tous ces secours, il est parvenu à tracerait
tafrleau historique et géographique de Sumatra qv.'i laisse peu de chose à
désirer, et qui ofîre, sou^ un moindre volume, et sous une forme plus
accommodée au goût des lecteurs français, presque tout ce qui! y a de
vraiment essentiel dans rHiï.eoire de Sumatra de M. Marsden.
Cinq principaux peuples habitent Sumatra: les Achinais, dans la partie
septentrionale ; les Bartas au nord- est , vis-h-vis de Malakka ; les Minang-
kabaus, au centre; les Redjangs, entre les montagnes et les côie^
occidentales; et I^s Lampongs, dans la partie méridionale de ÏUe. Les
langues de ces peuples ont entre elles beaucoup d^analogie , et le malai
en est la base. Si cette assertion, que M» Wafckenaer confirme dans les
notes additionnelles par un vocaijulaire quintuple, esi reconnue exacte,
îl semble qu elle doit fiiire apporter du moins quelques restrîcdons à la
proposition qui les précède; savoir, que des peuples d'origine différente
et de races bien distinctes ont peuplé Sumatra* Les variations qu*on
observe entre les expressions correspondantes dans les langues de ces
peuples, peuvent constituer des dialectes; mais elles ne suffisent pas, à
notre avis, pour indiquer une origine séparée et plusieurs races dis-
tinctes* Ce qui est certain , c'est que les alphabets et les caractères dont on
se sert pour les écrire, ne sont pas semblables : mais, à cet égard même,
les différences sont plus apparentes que réelles; et, en comparant entre
eux ces divers alphabets, on s'aperçoit qu'ils doivent leur origine à un
seul et même système, celui qui a été tiré du dévanagarî , et qui a été
porté par les Bouddhistes à Siam , au Pégou, dans plusieurs autres parties
de fa presqu'île ultérieure de flnde et dans les îles méridionales. Ce
n'en est pas moins une singularité digne de remarque, que rexistence
de tant de lettres à Java et i Sumatra, et dans d'autres lieux où il y a
à présent si peu de littérature; et les circonstances qui les ont fait varier
et multiplier h ce point, méritent d'être recherchées dans Thistoire des
peuples qui en font usage.
-M. Waîckenaer trace d'une manière abrégée celle des cinq tribus qui
forment fa population indigène de Sumatra, II commence par les
habitans du royaume d'Achin, proprement Achrch, état qui s'est élevé
autrefois h un assez haut degré de splendeur, mais qui depuis a perdu
£6 X
219 JOURNAL DES SAVANS,
heaucoLip de son importance. Les Achlunis paroîssent être un mélange
de Bat£as,de Malais et de Choulias : cest par ce dernier nom qu'on
désigne k Sumatra» les habitans de la côte occidentale de THindoustan»
lesquels ont dans tous les tejnps fréquenté les ports d*Achin. Dans
l'intérieur se trouvent d'autres tribus moins connues. La langue des
Achinars est le malai ; ils se servent , en écrivant , des caractères arabes,
qu'ifs ont adoptés avec le inahoniétisme ; cette circonstance a introduit
dans leur fangue un grand nombre de mots arabes. Le coin me rce immense
dont Achin a été jadis le grand entrepôt, est beaucoup diminué à
présent, et ne litisse pas pourtant d*étre encore assez considérable.
Le gouvernement des Achinaîs est cette espèce de monarchie qui est
limitée, non par des fois écrires, mais par la puissance d^s grands; c'est
cette sorte de féodalité qui a été éiabfie presque par-tout en A.sie, A Achin,
tes fois pénales sont trèi-sévères j ce qui, comme il arrive souvent,
nVmpêche pas ce peuple d*élre dissimulé» cruel et perfide : ses annales
en fournissent des preuves continut^Iles, A fa vérité, ce qu'on en cgnnoît
ne remonte guère au-delà de IVpoque oîi les Européens commencèrent
à fréquenter ces parages. Very la fin du xvi/ siècle, les Achinais
s'étoîent éfevés à un haut degré de prospérité. Excepté les Portugais, toutes
les puissances mariiimes , depuis le Japon (u>qu\'i TArafiie, envoyoîent
avec sûreté des vaisseaux dans (es ports d*Achin. Une révolution qui eut
lieu en i 585^ porta im coup fatal h cette puissance : la rivalité qui
existoîtdans ces mers entre fes Portugais et les habitans d* Achin, tourna
au détriment des deux peuples; car, ceux-ci ayant imploré le secours
des Hollandais pour s emparer de Malakka, ces dangereux auxiliaires
recueillirent tout le fruit de cette conquête, et les Anglais, s'étant établis
dans diverses parties de l'île, profitèrent des guerres civiles qui dé-
chîrorent Fétat d* Achin pour s'y fortifier. Le dernier prince de la race
royale étoit encore en j Hoj sur le trône: mais il paroît que fes Anglais
l*ont forcé d^abdiquer en faveur du fils d*un marchand de Pinang. Tel est
le résuftat définitif des assurances données par la reine tli^abe^h aux
monarques d' Achin , que jamais ifs n*auroient à se repentir d avoir formé
alfiance avec les Anglais* : « cette réflexion , dit notre auteur, n est pas de
» moi, mais d'un aufeur anglais " (i)»
Les Battas sont Ie:> plus féroces de tous fes habttans de Sumatra; if est
certain qui (s dtvorent les corps de feurs ennemis, et de ceux qui ont
été condamnés h mort comme criminefs* C'est une sorte de prodige
qu*un ttl peuple, dont toutes les habitudes se ressentent d'un état de civî-
(') Ke^r^ Raffles, Juva^ tom» J, p, 2^7.
AVRIL 1820, ^^B ^^'
iSaiion^niavSncé , aiepi une langue écriiej et que, çRezeux, le nombre
les homïnes illettrés soil moins considérable que celui des personnes qui
savent lire et écrire. Au reste, celte espèce de contraire que furment
tdes jnœurs barbares et une littérature assez raffinée, se retrouve chez
rplusieiirs autres peuples de farchipel d^Orient , comme Ta fait voir
Leyden , dans son intéressante dissertation Sur Its nations hindo-
chînohes.
Les Âiinangkabntii , ou, comme on les nomme pour .les distinguer
des autres hahitans de Tile, les Orang-AIalayo [Hommes Malais],
seroient encore plus intéressans à étudier, si, comme cest l'opinion des
hommes les plus instruiis, on devoit voir en eux la tige du peuple
nialai, de cette race voyageuse dont on trouve des traces dans toutes
les parties de locéan Pacifique , et même au-delà de 1 océan Indien. Par
malheur» leur histoire est peu connue; une tradition » conservée dans
leurs annales, place leur origine dans le royaume de Paleiîibang, dans
nie d'Indalous [Sumatra] : mais le nom de Alahûmeron, donné à une
monîagne de ce pays, ec d autres noms qui paroissent se rnpporier aux
fables brahmaniques sur le grand Caucase , peut faire craindre que
celte tradition ne soit, comme celles de plusieurs autres peuples des
mêmes contrées, un exemplr* de ces applications des Jictiuns mytholo-
giques des Hindous aux pays dans lesquels les Brahmanes It^s ont
transportées, A travers des souvenirs assez confus > M, Walckenaer croit
apercevoir quelques cuïntidcnccs cniri: le^ éj^oques des émigrations des
Malais, selon leurs propres annales, et des événemens rapportés dans
les chroniques javanaises. Sans porter un jugement positif sur ces an-
nales et ces chroniques, dont les époques offrent encore beaucoup
dmcertiiude, nous croyons qu'on peut admettre la conclusion que le
savant géographe lire des faits qu'il a examinés; savoir, que, vers îe
milieu du xir,* siècle, il y avoit un mouvement général dans la popu-
lation de ces différentes îles. C*est une circonstatice très-importante à
remarquer pour le problème historique de la diffusion des Malais et de
la population de la Polynésie. Au reste, pour arriver à un résultat
précis sur les détails de la chronologie é^i Malais, il faudroit qu'on
parvînt à dégager totalement les traditions locales des mythes hindous
quon y a évidemment mêlés; et c'est ce qui est fort difficile dans l'état
actuel de nos connoissances.
On trouve des Minaogkabaus dans la presqu'île de Malakka» dans
les montagnes de Rainbuu, et Ton sait d:uis le pays qu ils tirent leur ori-
gine de Poulo-Pertcha ou de rîle de Sumatra. H est maintenant à peu près
constant que les Malais sont passés de Sumatra dans la péninsule, et
n
i
JOURNAL DES SÀVANS,
ion de fa péninsule h Sumatra* Li langue des Malais de Ramlîon est
îisiinguée par [e nojn de laîigue des Minûngknùaus, La religion de ces
ïuples, avant leur conversion au mahométisine, paroît avoir été celle
de Brahma. Les noms propres, fes mots qui servent à désigner les
litres, offreni un mélange incontestable de dialectes hindous et persans.
Je ne m'arrêterai pas aussi long-temps à ce qui est relatif aux Red-
Jangs et aux Lampongs , sur Thistoire ancienne desquels on n*a pas des
notions aussi curieuses que celles que nous venons d'indiquer. Les deux
paragraphes que M. Walckenaer a consacrés à ces tribus , vy^vï sont pas
jnoins întéressans ; et les tableaux de mœurs qu'il a tracés, et les détails
dans lesquels il est entré sur les productions des pays que ces tribus
habitent et sur le commerce qui s'y fait, méritent toute l'attention des
lecteurs» Je ne dirai rien non plus des petites îles situées au sud et à
l'est de Sumatra : la plus remarquable de ces dernières est Banta , célèbre
par ses mines déiain ou de kaiin. Les Anglais, qui s'en étoient emparés
en 1813^ Tout échangée depuis avec les Hollandais pour le comptoir
de Cochin, sur la cote de Malabar.
Les notes que M. Widckenaer a jointes k son premier chapitre» ont
pour objet quelques points d'histoire naturelle ou de géographie qui
réclatnoient des explications particulières. La preinfère traite des cartes
de Sumatra: la meilleure, suivant M, Walckenaer, est celle qui est in-
sérée dans la iroi:»îème édition de rHisioire de Sumatra de M. Mars-
den ; elle laisse pourfant lieaucoup k désirer. L'intérieur de file est
encore presque inconnu. Les reconnoissances maritimes qu'on a faites
des cotes sont incomplètes et incertaines, et les positions indiquées
dans ï Orientât Navigator de Purdy n'ont pas Texaciitude désirable;
aussi iM, Wakkenaer n*a-t-il pas jugé à propos de les transcrire.
L'espèce d'arbre qui donne le camphre de Sumatra n*a pas été coni-
plélement décrit, et Ton n'est pas d'accord sur ses caractères naturels.
M, Walctenaer rapporte et discute les opinions qui ont été émises à
ce sujet par Krmpfer, Gxrriner, MM. Marsden et Correa de Serra,
Le résultat de cette discussion est que le dryohatanops camphora a pour
caractère essentiel un calice monophylle permanent, élargi en coupe gib-
àeuft, avec ctnci folioles longues, scarleuses , lancéolées; une corolle à cinq
pétales: des capsules a trois valves unkellulaires ; des semences solitaires,
un emhyon inverse sans périsperme. L'arbre qui, suivant la conjecture
de Kxmpfer, n'appartient pas au genre laurier, est un des plus élevés
tt des plus gros qu*on trouve sur la côte de Sumatra, et il n'est pas
rare dVn voir des individus qui ont six îi se]>t pieds de diamètre. Le
camplire ne se trouve pas dans toute la longueur du tronc, mais seule-
AVRIL 1820.
ment dans des inlen^alles d*un pied ou dun pied et demi, et contenu,
vers le coeur de ! arbre, dans des vides qui , dans d'autres espèces, sont
remplis de poix ou de térébenthine. Le produit d'un arbre de grandeur
ordinaire est d environ huit c/iti de la Chine, ou onze livres anglaises ;
mais on m mile quelquefois des centaijies d'arbres avant d'en rencontrer
qui dojinent du camphre.
Les notes qui suivent celles que je viens d'indiquer, sont relatives
aux fois sur le mariage, extraites du code de-s Redjnngs^ aux poids et
mesures de Sumatra, et au détroit de Gaspard, dans lequel le navire
anglais l'Alaste, capitaine Maxwell j fit naufrage le 18 février «8175
en ramenant de la Chine lord Amherst» ambassadeur de S. M. B. La
dernière note a rapport li l'intéressante découverte faite k Sumatra d'un
tapir de la grosseur d'ujî zèbre. J'ai déjà eu occasion de faire mention
de cette découverte» M. Walckenaer donne la de^^cripiion d'un individu
pris par des Malais de Sumatra, et desiini à la ménagerie de lord
Mûira, Cet animal, qui étoii jeune et très-caressant, avoit l'exirémité
des ort-illes, le do.>, la croupe, le ventre et les flancs, du couleur IJnnche;
par-tout ailleurs il étuit d'une couleur noire assez foncée. Quand il
étoit debout , les doigts de ses pieds , au nombre de trois postérieurs
et quatre antérieurs, s'appuyorent entièrement sur le sol, comÉue dans
le tajHr d'Amérique; il avoit aussi le même nombre et la même e>pèce
de dents antérieures» deux canines et six inci^ives, supérieures et infé-
rieures. Cet individu n*ùvoit enrore que d^n* pîf-fl^i huit priuces anglais
de hauteur. Suivant une autre descripîion, la longueur de la trompe
est de sept à huit pouces dans les miîleê adultes* Les Musulmans ne
mangent pas fa chair de cet animal, qu'ils prennent pour une espèce
de cochon.
Quoique je ne me sois arrêté qu'aux points les plus împortans de
îouvrage intéressant que fexajnine, et que je n'aie pu donner même
qu'une indication trè<^-sommaire des matières qui y sont traitées, je me
suis laissé entraîner hors des limites que j'aurois voulu me prescrire. Je
me vois forcé de renvoyer îi im second article la fin de cette analyse, et
sur- tout la partie relative à fhistoire de Java, pour laquelle les relations
des Chinois offrent des points de comparaisoti utiles à faire ressortir;
tuais je dois dire, avant de terminer ce premier extrait, que le Mondi
maritime est un ouvrage non moins attachant par la forrne qulmportant
pour le fund* Les recherches auxquelles M, Walckcnaer s^est livré
recommandent son travail aux savans ; et les de'^crïptions riantes, les
tableaux animés, les détails de mœurs que son sujet lui offroit en fouler
«t qu'il a su traiter avec habileté, seront du goût de cette nombreuse
i
ai JOURNAL DES SAVANS,
classe de lecteurs qui n'aiment pas h acheter l'iristiucfion par Tennui-
On s'aperçoit aisément qtie rameur na pas moins consulté le goût
des uns que I*intcrèt des autres, D'élegaiiies gravures, qui ont t\ù co-
loriées avec soin dans quelques exemplaires, ajoutent à ce [ivre une
sorte de mérite qui nest pas k dédaigner; et qui a fait seul, dans ces
derniers temps, la fortune de beaucoup d'ouvrages qui n'avoient pas la
valeur intrinsèque de celui-ci.
J. P. ABEL RÉiMUSAT.
A CLASSICAl AND TOPOGRAPHICAL ToVR THROUGH GrEECE,
durwg îlie years iSot , iSo^ et iSoS, hy Edward Dodweil, &€.;
c est-à-tJire , Voyage classique et topographiquc en Grèce $
exécuté durant les tin née s iSoi , i8o) et i8o(}f par EJ-
Dodweil, membre de plusieurs ûcadémies, &c, Londres,
i8[
p, 2 vol. //^-^/ de près de 600 pages chacun, avec
une cane de la Grèce > soixante vues putoresquesen lailte-
douce^ et quarante-cinq gravures en bois.
SECOND EXTRAIT.
Nous avons laissé iM DodvirÊH dans la ville d'Athènes; après en
avoir étudié les antiquités, notre voyageur gravie toutes les montagnes
deTAttiquet FHymeue, le Pcctélique, le Famés, le lirilessus, l'vtgia-
léon, i*Anchesïnus. Sa pre/nière excursion fut sur fe sommet du mont
Hymette, Joii Ion jouit d'une magnifique vue, qui comprend (es plus
célèbres contrées de la Grèce, TAitique, i*Argolide, TAchaïe et la
Béolie,eten outre toute Tîie JEubée ; i[ croit même avoir aperçu les
montagnes de Uie de Chro, quoique situées à cent cinq milles géo-
graphiques: au pied du mont Hymeite, on trouve un lioji colossal ^n
marbre pentélique, et bien conserve. Dans son excursion au juont
Pentélîque , AV. Dodweil vil une des ancietines carrières de marbre dont
iJ donne ta vue.
Ce voyageur visita les ruines qui existent à Casha , et qu'il prend pour
celles d* Acharnes ; puis la côte comprise entre les caps Colias et Zoster,
pour rechercher les dunes mentionnées par Strabon et Pau^anias, Il
trouva en effet des ruines en plusieurs lîeujf ; entre autres, un lion de
marbre , dans le style de ceux de Mycènes, et les restes de la ctlla d'un
temple. Enfin il entreprit, dans la compagnie de MM. GelJ et Monck,
AVRIL 1810.
im
le tour entier ^JeTAnique, h coininencer par Cephhshi, lieu quî conserve
erivoreson ancien nom» Arrivés au port Raphfy, qui e>t , selon les uns,
f ancienne Punormos, et selon d'autres, Haiœ AraphdniiliS , ou Pmslœ»
ïes voyageurs se proposoîent de passer la nuir dajis ce Ireu inhabité; ils
voufurent acheter des provt>ioiis dans un village voisin : <c mais les
i> villageois, dît M. Dodweil, forsqu*îls nous vireni accompagnés de
^> lurcs, se hâtèrent de renfermer toutes leurs volailles, qui forment''
» presque fa seule nourriture dans les vi linges grecs. Nous ins^isilmes
» pour avoir des vivres; mais ils répondirent gravement qu*Qn ne
y> trouveroîi pas une poule chtz eux* Alors nous nous adre>sâmes directe- •
» ment à \ hè^oumems [ 1 abbé] du couvent; ce moine vénérable ne
n nirHiqua pas de nous donner l'assurance soletnielle qu'il n'exîstuit
^ pas une seule poule dans un circuit de dix milles: mais, à TinsEant
y* même, un traître de coq se mit à chanter dajis iencJnte des sacrés'
» murs, ei tous les coqs du village jugèrent à propos de faire chorus,
»Ce contre tenips inattendu donna de i'buineur à ïhê^oumenos , qui,
*ï tout en n)audis>ant ce cuq malencontreux » persuada aux villageois de
*> nous céder quelques poules, que nous payâmes le double de Itur
» valeur. On est souvent obligé en Grèce d élever la voix pour obtenir
» des vivres. Quoique nous fussions toujours dis|)osés b bien les payer,
39 il nous fa I loi t souvent exhiber le finnan dont nous étions porteurs. »
Les ruines de Thorkus , une des douze villes de TÂin^que au temps
de C^^^C^t>p.<, MJiit Ltcnducj tt îiatv » t a^flntc o 1 cette \îll«^ ^tnîf de ftirMIÔ
ir régulière, el entourée de murai lit s flanquées de tours carrées, Quuî-
que (es pierres de ces murs soient qundrangulaires et que les lits en
soient pbcés horizontalemenî, il y a de rirrtgulariîé dans It-ur g»-andeur,
et les an^^les en sont rarement rectangulaires/ C hï voit aussi à Tkorkuî
les restes d'un édifice orné de colonnes doriques, dont la société des /)/-
h'ifanti a fut lever le plan en 1812. Quelques tronçons de coloniies
portent encore sur leur surfice plane les marques qui servirent poiir gui-
der ToMvrier dans lexécution de la cannelure; ce sont drs lignes 1 racées
du centre à fangle de chacune des cannelures, au jiombre de vingt; ce
qui [>rou' e que les cannelures éfoient ébauchées sur chaque tronçon en
par*rculier ; on les termînoit prt)ba' lement quand la colonne éioit en
plate; et voilà sa*is doute pourquoi, parmi les colonnes du îempîe
d'Apollon nidymten dans TAsie mineure Jes cannelures sont dans un état
plu> ou niuîns imparfait. Au pied de Vaàrofofis , on voit les resies dun
grand et fi.agnifique théâtre, dont les sièges sont a^stz bien conservés.
Dans !t? \oi>inage du tnont launum, on trouve d^s monceaux de
scories, vestiges de raniique exploitation des mines d'argent ; on y voit
Ff
3.l6
JOURNAL DES SAVANS,
r
aussi les fondations d'une grande tour ronde , et plusieurs restes Jan-
ciens murs de construction régulière. Ces restes sont si étendus» que
M, DodweH fes prend pour ceux de la ville de Laurium : mais, comme
tout prouve qu'il n*y a jamais eu de ville de ce nom, il est bien plus
ynhemhlsLhh que ces restes appartiennent à quelque grande forteresse,
l>5tîe pour protéger les mines, selon le conseil qu'en donna Xénophon
dans son traité sur les revenus d'Athènes (i ),
On pense généralement, d après PausanîaSj que la statue de bronze
de Minerve à Aihènes éroit visible de Suniurn; M. DodweH prétend
que c est une erreur. «Pour que cela fût vrai, dit-il, il faudroît Tœil
3î perçant de Lyncée, attendu qu'un prouionloire élevé » détaché du
a» mont Laurium j dérobe à Sunium la vue, non-seulement de VacropôUs
>y d* Athènes » mais encore de toute la côte avancée du Pirée et de Mu-
»» nychie, » Cette observation a été faite également par M. Hobhouse (2),
qui tance verletnent Pausaiiias d'avoir dit une si grande absurdité (j).
M. DodweH traite avec plus de révérence le voyageur grec; il croit
seulement qu*on a mal compris ce texte ; Tmmç 'Aç A^wm? w ^ <fi^7nç
'tlxf^ ^ ^ Ao^oc 7? xf^^itÇy "imi XariH «z^csjAitifftK Isif îtcAf m/v^ifla.* <c Cela
« signifie, dit-il, non pas qu*on voyoit de Sunium fa pointe de la lance
ȕ et faigrette du casque, inais quon les voyoit en venant de Sunium, ^^
Notre voyageur semble s'être fait illusion : les expressions de Pausauias,
*&à ^^fU 'Oc^«oAftfff7»' UàH infyoTfJA^ ne prêtent nullement k cette inter-
prétation; fe mot nJh n'auroit aucun sens dans Thypothèse de M. Dod*
welK II est certain que lauteur grec a voulu dire qu'on voyoit le casque
et Faigrette iia Sunium; et quant h ! obstacle physique dont parle
M* DodweH» ni loi ni M, Hobhouse n'ont songé que Pausanias parle,
non pas de la vue prise sur le cap Sunium, mais de la vue prise en mer
d'un vaisseau qui vient dédoubler ce cap (^^efocoAtV^— tfvvo^rîoi). On sait que
le cap Sunium , toujours battu des vents, est presque aussi mal faméchtz
les modernes que Fétoit le Malée chez les anciens : aussi les marins,
quand ils le doublent, s'en tiennent à une certaine distance. Or il suffit
d'éîre seulement à cinq quarts de lieue de la côte, pour se trouver hors
delah'gnement du promontoire que projette {^Laurium, et être en vue
d^Athènes, Il est d'autant moins surprenant qu'on pût apercevoir de
là les amies de la statue resplendissantes, des rayons du soleil, que
M. DodweH dit avoir aperçu de Corinthe les colonnes du Parthénon,
qui en sont éloignées de trente -neuf milles géographiques. Pour
(ï) Xrnoph. mtÀ ^©o^'<^Ê^ — (^) Hobhouse s Joumey , p» 4^^* — (3) V^m-
\
AVRIL l8lO. -^^— ^^
expliquer cîes fiîts analogues rapportés par les mueurs anciens» on a
supposé queFquefuîs que les Athéniens avoient beaucoup meilleure vue
que nous; tnaisja transparence de l'air, dans ces climats , suffit pour en
rendre compte*
On sait, par d autres voyageurs, en quel état de dégradation se trouve
fe temple de Sunium : ainsi nous passerons sous siknce ce qu'en dit
M. DodwelL La route le long de fa côte occidentale de TAttique » ^
partir du cap Suntum , ne luî offrit rien de remarquable, si ce i\*%n lantre
de Pan, déjà décrit par Chandier {1} et Hobhouse (2). Nous nous
contenterons égalertient dindiquer un chapitre contenant de curieuses
observations sur (e soi, le climat 1 les productions de rAttique, sur les
mœuri et les superstitions des Athéniens, leur musique, leurs danses
et leurs feux.
Avant de quitter Athènes, M. Dodwell visita les îles d'Egrue et de
Salajuine: dans la première, les ruines de 1 ancienne ville couvrent une
étendue de terrain considérable ; mais les seules qui soient dignes
d'attention, sont celles du temple de Vénus» qui ne consistent plus
maintenant qu'en deux colonnes dont funeest rompue par le milieu. La
destruction presque complète de cet édifice tient à la nature molle et
friable de la pierre calcaire employée à sa construction. Cette île, de
même que celle de Salamine, est déjà si bien connue par ie récit d*autres
voyageurs, que nous devons nous bâter encore de suivre M, Dodwell
dans son excursion en l tiessalte.
Arrivé aux Thermopyîes, M< Dodwell examina les descriptions
données par Hérodote et Strabon » et il trouva qu'elles ne s'accordent pas
avec Fétat des lieux, ti Je n en conclurai pas, dit-il, que ces deux auteurs
1» doivent être taxés d'inexactitude j ce défaut d'accord tient aux chan-
» gemens physiques qua subis cette contrée: la mer s*est retirée; les
i> rivières ont changé de cours; les villes, les châteaux, les temples, ont
fï disparu de la surface de la terre; leurs ruines sont enfoncées dans les
3î marais , ou cachées sous les buissons et les ronces ; on doit peu s'é*
» tonner d'après cela que des six rivières meniiounées par les anciens , il
w n'y en ait plus que trois dont on'puisse assigner la dénomination avec
» quelque certitude: savoir, le Bûag*ius, rAsapus et le Spenhius (^Kw
Cette observation importante , qui peut s'appliquer à d'autres lieux de [a
Grèce, montre quel fond Ton peut faire sur les plans to])ographiques
quon dresse dans le cabinet» uniquement d*après les textes anciens.
(r) Chanrllers Travefs ^ cjz, — (2) Hobhouse's Joumey^ p^ ^az, — (3) Lci
trois autres éioitnt le Mêlas j le Dyras elle Phœnix,
Ff a
2ii JOURNAL DES SAVANS,
DeZeîiounj qu'on croît être lancienne Lamis, M. Dodwell, coniîr
nuant sa route au nord^ décrit successivement le village d*£"W///70j, qui
arempfacé la vide du même nom , et dont il reste quelques ruines; puis
les vestiges d'une ville antique que notre voyageur conjecture être
Larissa Cremaste ; h ville d'Armiro, quon suppose avoir succédé à
Thèbes de PhthioHde; celle d*Aïas, qui pourroît être T^^ï dTtienne de
Byzance, et dont les muraîlies conservent des traces de la construction
cyclopéenne; Demeitiûs, où Ton voit encore un stade , un hippodrome;
Pûlo, vilfe située sur le penchant du mont Pélion : kpeu de distance
sont les ruines d'Jo/cos, qui ne consistent plus qu'en quelques pans
de muraille.
M. Dodwell quitta Volo, dans rintentîon de visiter la vallée de
Tempe, en passant par PA^riF et Z^nxj^ ; la première ville répond au
lieu appelé maiotenant BeUsfina; la fontaine Hypérie^ jadis située au
milieu de la ville, subsiste encore au pied de Wiavpolis. Larissa,, qui
conserve son nom , est, comme autrefois, la capitale de la Thessalie; il
y reste peu de ruines antiques. C'est à Larisse que M, Dodwell vit pour
la première fois des chameaux en Grèce; ils sont assez communs dans
la Macédoine et dans la Thrace; mais, dans le reste de la Grèce» on
n'en voit pas un seul. De Larisse fOlyïnpe se montre dans toute sa
majesté : on croit que cette montagne est la plus élevée* Selon Blt-
noulli, son sommet est à onze cent dix-sept toises au dessus du ni-
veau df» î^ iiiprf «rcttc inclure s'iiixuidc ai5C£ bleu avec celle de Xéoa-
goras, oblt^nue, selon Plutarque, par des mesures géométriques (i).
Selon ce mathématicien, l'Olympe étoit élevé au-dessus du solde dir
stades et quatre-vingt-seize pieds, c*est-à-dire, de six mille quarre-
vingt -seize pieds grecs, répondant à environ cinq mille sept cent
quatre-vingt-dix de nos pieds ou neuf cent soixante-cinq toises,
La. vallée de Tempe est le terme du voyage de M, Dodwell dans
le nord de la Grèce. En revenant sur ses pas, il traversa la plaine et la
ville de Pharsale: les murs de Vûcrop&lîs sont encore bien conservés et
ont quinze pieds et demi d'épaisseur; ce qui est le double de la plupart
des murailles de ville en Grèce. A deux heures de Pharsale, on rencontre
(l) Plutarch. în ^m'tL PauL /. //, O juav -nt Etrct^i^^ » ^a^if^yaç^ «tW
^%lta ^ /i* ipyaft^n fÎKv^ya^ iôtil mV fjukjpv^my. On voit dans Eustathe (ad
Odyss, ^' ) qu'un certain Apollodore avoit trouvé le mont Cyllène , en
Arcadie, élevé de neuf stades et cinquante pieds > ou de cinq mille quatre cent
uatre-vingts pieds [:= 5204 preds,ou 867 toises] au-dessus du sol» Ces mesures,
onnéc5 en termes aussi précis, attestent que les anciens ontqiielquelbis essayé
de mesurer la hauteur cft^s nioniagnes parties procédés rigoureuji»
3
AVRIL 1820.
CtU
des ruines assez considérables; mais il est bien difficile de savoir à
quelle ancienne ville elfes ont appartenu. Thauin.'ikia , matatenant
Tkûumûkos , est encore un lieu assez imponant; la vue, qui sVtend sur
la plaine de la Thessaiîe, est une des plus étonnantes de la Grèce. Notre
voyageur, traversant la Doride et la Phocide^ passa sur les ruines d'E-
latéci où Ton voit des restes de construction cyclopéenne : h trois quarts
d*heures de distance il retrouva ie temple de Minerve Cranœa, dont
parle Pausantas; cet édifice ressemble au T^^j^r/^w d'Aihènes,
M. Dodwell revint à Athènes, en prenant par Test de la Béotîe et de
TAîtique; il décrit en conséquence fes ruines de Chalcis et d'Orope^ la
plaine de Marathon , déjà bien connue par le voyage de Clarke et le
plan du colonel Squîre (i), «Il est singulier, dil-il, qu'on n'ait trouvé
»* aucune armure ancienne dans la plaine de Marathon , et presque
»> aucun reste des nombreux guerriers qui y perdirent la vie. Le grand
>» tumulus a été ouvert, mais sans succès, parce qu'on n'a point creusé
» à une profondeur suffisante ; j'y ai trouvé des fragmens de poterie
» grossière, et un grand nombre de pointes de flèche en silex noir, qui
>5 probablement ont appartenu h Tannée des Perses (2); c'est le seul
3> lieu de la Grèce où feu aie trouvé : les pointes de flèche en bronze sont
3> au contraire fort communes dans tous les lieux ou se sont données des
» batailles. Les voyageurs trouvent aussi dans cette plaine des balles de
" plomb, en forme d amandes, qui ser\ oient aux frondeurs, et sur les-
» quelles on lit souvent un uuui, Lela tj^uc ac-an^ ^ ♦i.Mnrrov ^ nEPAlK-
«KAS, &C. (3),«
Parti d'Athènesi à la fin de novembre, pour son voyage dans le
Péloponnèse, M* Dodwell suit fa roule sacrée, parcourue déjà par tant
d'autres voyageurs ; il passe à Eleusis, à Mégare, à Corinthe, dont il
donne des descriptions auxquelles nous trouvons le double défaut d être
longues et de n'offrir rien de neuf. Sur le chemin de Coriothe à Argos
sont les ruines du temple de Némée ; il n'en reste que trois colonnes
debout, dont deux avec leur architrave : elles ont quatre pieds six pouces
et demi de diamètre, et trente-un pieds dix pouces et demi de haut,
(1) Voy* le Journal des Savans, cahier du mors d'août 1818, p. 476» Ce
plan est gravé dans le dernier cahier des nouvelles Annales Aqs voyages
{ iom* m ,p, 2S0J ; il y accompagne une traduction de quelques observations
du colonel Sf]urre.
[2] M. Dodwell ne parok pas se souvenir qu'He'rodote dit formellement
3ue les Ethiopiens, dans i armée des Perses j se scrvoient de flèches garnies
e cailloux aigus (Hérod. vil , fyj,
(3) Les anciens appeloient ces balles maj^i jiJi4\\jCi^m ( Appian.^rf/. Alkhrid,
r
JOURNAL DES SAVANS,
sans compter îe chaphetiu. Le temple étort hexastyle, périplère, avec
quatorze colonnes sur les côtés, autant qu'on peut ic conjecturer; la
partie inférieure de (a cella subsiste encore: les colonnes sont toJubées
si régulièrement , que le temple semble avoir été détruit plutôt par
une secousse de tremblement de terre, que par faction lente du temps,
£n tout, fe style de rarchîtecture manque de noblesse et de pureté;
les chapiteaux sont trop petiis pour les colonnes, dont le fût a , comme
on Ta vu, plus de sept diamètres de hauteur, proportion qui surpasse
tout ce qu'on voit dans la Grèce. Argos est trop bien connue |)ar les
récits des voyageurs, pour que M* Dodwell ait pu rien dire de neuf
sur les ruines de cette ville; les principales sont les murs cyclopéens de
VacropQlis ou Larissa , célébrés par Euripide (i). M, Dodwell nous
promet un ouvrage spécial sur les ruines pélasgiques et cyclopéennes de
la Grèce et de l'iialiet accompagné de nombreuses gravures. « Je
» n'entrerai donc point ici» dit-il ^ dans une longue discussion sur ce
^> sujet, dans fespérance quU sera pleinejneni éclairci par le savant
» auteur de ce système, M. L. Petit-Radel : son ouvrage, si long-temps
4> attendu, répandra, je n en doute pas, une nouvelle lumière sur cette
» partie tant négligée de rhîstoire primitive.»
L état actuel de Mycènes n est pas moins connu que celui d'Argos,
par Touvrage de M,GeIlî M, Dodvrell croit reconnoîire le style égyptien
dans fa construction de Tédifice appelé vulgairement le Trésor d'Atrce^
ainsi que dans tous les ornemens répandus parmi les ruines \ la fameuse
porte des Lions elle-même lui paroît présenter le même caractère ^
tandis que les murs de la ville en construction cyclopéenne (2) sont dus
à un autre peuple : toutes ces idées ont été depuis bien long temps
émises par M. Petit*RadeI. « II est vraiment étrange, dit notre voyageur,
» que Strabon ait prononcé aussi hardiment qu'il ne restoit aucun vestige
« de Mycènes, lorsque Pausanias, cent cinquante ans après, décrit les
» ruines d édifices qui subsistent encore de nos jours. Diodore de Sicile
^^ dit que les Argiens détruisirent Mycènes, Taiç Munmoi ij^Ti^toÉ^*»' »
» et ajoute que cette ville demeura déserte» Diodore, en parlant de la
>* destruction des villes, se sert ordinairement du mot ^7i<ratot>(Af, qui
» signifie qu'elles furent rasées complètement. Mais un grand nombre
(ï) Euripîd. Iphrg, AuîU, v. ^j^j — HercuL fur» V. ij; — Troad, p, toSSi
m^ Danae, v» 2.
(2) Euripidie en parle, Iphîg. Aul v. /j-i , 26^} — HercuL Fur. v- $44; —*
ElfCtr. V. iijS; — Orest. v. ytfy. AlpheiH, dans l'AnihoIoiiie, appelle Mycénei
Waic Kv^ûi-TOfif ^fom, //^ p» ij^, id, Jaçobs), et un anonyme, ICwitAwm/n Mi^péwV»
(rom»IV,p> 2ifJ,
\
AVRIL 1820. 1)1
» de celles qu'if a rasées ainsi offrent encore des ruines considérables,
^> des murs, des tours ^ des portes, dans un haut degré de conser-
î> vatfon* n Au reste, une preuve que Mycènes fut abandonnée i
I époque dont parle Diodore , c'est qu'on n'y a trouvé aucun fragment
d architecture appartenant h un ordre grec, excepté ia moîué d'un
trigfyphe en pierre jaune molle. Tîrynthe conserve les plus beaux restes
de construction cyclopéenne qui soient dans la Grèce i mais ils ont été
trop souvent décrits pour que nous nous y arrêtions. Suivons lauteur à
Epidaure , dans ïhkivn d'Esculape » dont les antiquaires liront avec
fruit la description , même après celle qu'en ont donnée Gell etClarke;
à Trézene, à Méthone , à Calaurîe, qui attirèrent assez long- temps
l'attention de notre voyageur. II ne reste pas une seule colonne debout
du temple de Neptune à Calaurîe, et même on ne trouve parmi les
ruines aucun fragment de colonne ; quelques masses confuses subsistent,
ainsi que les guttœ placées sous les triglyphes, ce qui indique que I ordre
étoit dorique. Le vtnex ou epkranitis 4u fronton gît à terre : dans fen-
ceinte de la a/la, on voit de larges blocs qui ont servi à former la partie
cjctérieure d'un petit bâtiment circulaire; M- Dodwell conjecture que
c'est le tombeau de Démosthène.
De retour à Corinthe, M. Dodwell en repartit peur visiter Sîcyonc,
qui conserve des restes de son ancienne magniticence, entre autres un
théâtre, situé au pied de ïncropolis ; tout prés, sont de grandes masses
de nuirailles en brfqnp«, pr Tpc r^^tt^^ d'un gymr*?!*;*» soutenu p*ir des
murs en construction polygone. Sur la route deSicyone \ Patras, le long
du golfe de Corinthe » M. Dodwell ne trouve guère à remarquer que les
ruines à*^giumj où la confédération achéenne lenoit ses assemblées
générales. Il ne reste presque rien des quinze temples, du théârre, d'im
portique, rfun ûgora et des nombreuses statues qui existoient au
IJ.' siècle de noire ère, lorsque Pausanias visita cette ville.
Notre voyageur parcourut ensuite la côte occidentale du Péloponnèse ,
à partir de Pairas. Les ruines d'EIis sont peu considérables et peu intéres-
santes; on nY trouve presque que des vestiges de constructions ro-
inaînes. La route sacrée d'Élisà Olympie traverse un pays dont le sol
est d'une extrême fertilité. Sur cette roule est Pyrgo, ville considérable ,
dont la population est entièrement grecque. On sait quVne idée fa-
vorite du docte Winckefman étoit de former une souscripiion pour faire
des excavarions dans la plaine d' Olympie ; si celte idée étoit mise k
exécution, il n'y a aucun doute quon ne découvrît une foule de restes
curieux d'antiquité; car on retire journellement du lit de TAIpliée, des
inscriptions, des débris d'armures et d'ustensiles en bjonze : tek sont
1
M
tjz JOURNAL DES SAVANS,
trois beaux casques trouvés par feu M. Matkensie; [eur épnîsseur est si
grande, quon peut clouter qu*ils aient jamais î»ervi à la guerre; ce sont
prohaLlf ment des casques votin*. Auprès de^ foihies rt>ie> d'un lemple
spacieux qu'oaa toute raiscm de prendre pour celui de Juj^iter Olympien,
M. Dudwtil fît faire une excavation qui mîr à découvert un précieux
fragïneiit de colonne dorique , dont les can.Melures int trti/e pouces de
large, et le diamèire sepi pied^ trois pouct:> [ ^= ^ mètres 20H J ; même
en prt^nant cette mesure pour telle du plus grai:d diamètre des cofcnnes
des angles, elle surpasse foutes les dimension^ connues dans la Grèce, sans
exteprer les colonnes du Panhénon. Cependatii Paiisanias donne a la tar*
geur du tetnpie de Jupiter Ofym|iîen quatre-vingt-quinze pieds grecs , ou
cinq pieds de moins qu au Panhénon .il s'ensuit que renire-colunnement
étuit plus petit qu'au Parthétîon, Ce fragmeni de colonne \ieni d*une
manière assez remarquable à Tappui dune conjtcîure de Sitan, qui,
d'après la hauteur de soixante-huit pieds que Pau^anijs donre au len^ple
de Jupiter Olympien, pensoit qu'au lieu de (junire-vtn^t'qtiin^e pieds
il falloit Vite cent quinze pour la largeur; et îl en concluoii que (es co-
lonnes des angles dévoient avoir sept pieds trois pouces de diamètre, ou
deux mètres deux cent trente- trois centim. , ce qui est à irès-peu près
la mesure du fragment trouvé par M, Dodwell [^2 nièiies 20K J*
Un autre fragment précieux découvert dans celte excavation, est
celui d'une petite colonneen marbre de Paros, d'un pied de diairèîre;
elle est !rop p*^irtc powr- «vc^rr ?r|rr|TiiTtcou il \a rtirîgée ultérieure des
colonnes du temple; M, Dodwell conjecture, avec beaucoup de vrai-
semblance, que c'est \me des peiiies colonnes qui, selon Pausanias,
soutenoient le trône de Jupiter (i). Il paraît, d'après quelques débris,
que les colonnes du temple, construites avec une pierre coquiilière inolle
et friable, ^toient recouvertes d'une couche de stuc d'environ un dixième
de pouce d ep.iisseur.
En consinu.int la roule au sud, on rencontre, entre autres lieux, une
ville antique* abandonnée» qui pourroit être Lcpreum deTriphylîe Aj^rès
avoir traversé fe Ntda , M'^ainrenant Routzi, M- Dodwell se trouva sur
le territoire de la Messénie : il vit d'aljord les ruines de Cypanssla à
fendroit nommé Anadia ; ensuite il gravît sur le sommet du n:ont
Ithome,où sont les rutnes d'un petit temple dorique et des restes de
înurs en construction irn'gu Itère sans être cyclt»péenne. Les ruines de
Messène consistent dans un thiâire qui est !e plus i>etit de la Grèce , dans
un stade» et dans des murailles construites au tempis d'Epaminondas* Le
(1) Fausaa* y, ti.
\
AVRTL 1820/
^ii
grand nomSrêaes brigands força iVL Dodwelf d*abandonner le projet
de parcourir en détail la Messéaie» Il prit le chemin de TArcadît^ four
yisiier A fega/ûpo/îs f qui ne possède plus d'autres ruines que des pans cJe
murailltrs et un théâtre très*ina( conservé ; celles de Gortyi ne sont guère
pfus considérables. Notre voyageur se prometioit des résuhats plus
heurt^ux eu recherchant fes ruines du temple d'Apollon Epicurws. Ce
tempfe, siiué sur le mont Cotylion, qui fait partie de la chaîne du mont
Lycée, avoit été Mti par Iciinus, l'architecie duParthénon, et cetoît
îe plus beau du Péloponnèse après celui de Minerve à Tégée; d'autres
voyngeurs en ont décrit les magnifiques restes. Une excursion au
sommet du mont Lycée procura à M. DodwefI l'occasion d'enrichir sa
collection du plus beau panorama qu'elfe renferme; et, à la descente
de cette mont;*gne, il fut assez heureux pour trouver les ruines de
Lycosure, qu'il avoit plusieurs fois cherchées iiiutilement« Vacropolis de
cette ancienne ville est soutenue par des terrases consuuitcs connue les
murs de Tirynthe; le resic des ruines consiste en débris d'architecture
dorique.
1 els sont les lieux de l'Arcràdie visités par M. DodwelL A partir de
Lycosure» il dirigea sa route vers la Laconie, et, après avoir franchi le
Taygète, il descendit dans la plaine de Misitra, pour examiner les mines
de Sparte et (SAmyclœ: elles sont si connues par les récits de ses prédé-
cesseurs, que je ne m'y arrêterai point. Notre voyageur rentra dans
TArcadie, pour se rendre à Fatras par Tripolitza. Parmi ies ruines de
Tégée, on distingue celles du fameux temple de Mîntrve, bâti par
Scopas; on y reconnoît les débris des trois ordres d'architecture dorique^
ionien et corinthien, dont il éïoit formé : M. Dodwell ne put en prendre
les dimensions; toutefois les fjagmens d*ordre dorique annoncenî qne
le temple avoit ii peu près celle»* du Pnrihénon. Les ruines de Manilnée
ne sont presque d'aucun îniérét; il n'en e#*t pa^ de même des ruines
d'Orchomène, qui offrent de beaux restes de murailles dans le genre
de celles de Tirynthe, Le lac deSiymphale, quoique de peu d*étendue,
est extrêmenîent pittoresque, à cause des montagnes qui l'environnent:
la vifle de même nom , située à cinq sîades du lac, et non à cinquante
stades, comme le dit Sirabon, n'est plus qu'un monctau de ruines
informes, où Ton remarque une quantité considérable de débris
d'architecture dorique. On y arrive pnr une ancienne roure, pavée de
larges blocs de pierre en polygones irréguliers , Lomme ceux des routes
romaines. De là jusqu'à Patras, on ne rencontre d'intéressant que les
ruines de Pbénée et de Clitor , ville jadis célèbre par une fontaine dont
feau étoit si délicieuse, qu'après en avoir bu Ton ne pouvoit supporter le
^34
JOURÎSfAL DES SAVANS,
goût ni Todeur du vin ( î) : il paroît, d'après rexpérience denofr^vSyS
geur, que le temps a enlevé h cette fontaine celte propriété admirable*^
En passant sur les bords de VÂrodniuf, il eut beau prêter l oreille , i|
n'entendit pas non plus la voix du poisson pcecUia, qui, disoit-onH
chantoit comme une grive (2)* Pausanias assure qu'il vit plusieurs de
ces poissons vivans ; mais il avoue ingénument qu il ne les entendîi
point chanter. APatras, M. Dodweil s'embarqua pour Civitta-Vecchia/
où il arriva le 1 8 septembre i 806 ; mis provisoirement en surveillance*]
dans le donjon du château, il fut rendu bientôt à la liberté, grâce i'
Tentreniise des célèbres artistes français Cranet et Dupaty.
Un appendice termine ce voyage : on y remarque par lieu fièrement
une plan*.he représentant les quatre genres de constructions irréguliérei
qui :>e retrouvent dans les antiques murailles des villes grecques; unej
table des différentes formes des jettres de 1 alphabet grec; enfin des
inscriptions recueillies en diver> lieux de la Grèce: les unes sont déjà'j
connu€rs; le reste e>t ou extrêmement fruste ou peu intéressant. La plus*
remarquable est une inscripiîon laiine, qui exj>te à Delphes ; Cl;irke*|
nVn avoit donné que quatre lignes ( ^) ; M, Dodweil fa copiée entière :
les lacunes qui s'y trouvent empêchent d'ensuivre le sens complètement;
cependant on voit qu'il sVgit d'un décret rendu sous un empereur dont 1
ïe nom majique, relativement à un diUcrent survenu entre les villes de
Delphes et d'Anticyre,
LETRONNE,
Traductwn française deStrabon; tome V. Paris, 1 8 rp ,
de Timpri merle royale.
PREMIER EXTBAÎT,
Le cinquième volume de Strabon qui vient de paroître, et qui
complète la traduction de cet auteur, est assurément Fun des ouvrages
les plus importans dont nous puissions entretenir nos lecteurs. Afiii de
nous réserver • plus d'espace pour les discussions que cet examen
exige , nous croyons devoir placer dans un article préliminaire lanalyse
rfun mémuire fort étendu et fort instructif, que M, Gosîellin, fun des
Collaborateurs de cet ouvrage, a joint au volume que nous annonçons.
(1) Aihrn. DtipnQs. Ji, ^j , Ei Vitruv. F///> ///; Ovid. Aîetam. XV,
J22. — (2) Pausan. yiiJ^ sa; Athen. Yiii , j^t, £, — (3) Clarkc's TTavtU ,
w/. ly, p, j^f.
À
?5^ idées que Fauteur de ce mémoire expose sur le principe des dîfferens
^systèmes métriques de laniiquité , sont de nature à exciter vivement la
curiosité des personnes qui s'occupent de ces rechercher* Nous pensons
t^oncquon nous saura gré de placer ici, san« prétendre nous établir
V^uges de sa doctrine , une exposition succincte et fidèle de celte
[théorie.
Dans un mémoire placé k la tête du premier volume de la traduction
deSfrabon, M. Gossellin avoit proposé une nouvelle méthode pour
l J^évakiation des mesures itinéraires employées par les Grecs et les
Romains. Le résultat de ce travail avoit été de prouver, par un grand
nomîjre d'exemples^ que fa diversité des mesures que les anciens nous
ont transmises, dérivoit de celfe des modules dans lesquels, depuis
un temps immémorial, étoit exprimée fétendue de la circonférence
de la terre. Le nouveau mémoire dont nous allons rendre compte, est
intitufé, Recherches sur le principe, tes bases et révdluation des diffcrens
systèmes métriques linéaires de F antiquité, et a pour but de compléter et
de justifier la théorie que Fauteur avoit précédemment établie, II examine
d'où provient la variété de ces systèmes, et il montre comment il est
possibfe de les déduire tous d'un élément unique.
Ce mémoire se divise en trois parties : la première traite des systèmes
réguliers, c'est-à-dire, de ceux dont toutes les divisions découlent d\uî ,
seul et même élément ; la seconde, des sy:*itèmes îrrégulieri , ou de ceux
qui renferment dans leut ensemble des mesures étrangères les unes aux
autres; la troisième, des systèmes métriques employés par les Arabes du
moyen âge et par quelques autres peuples.
Ces differens systèmes présentent la nomenclature des principales
mesures usuelles, telles que le doigt, le palme, le pied, la coudée,
Forgyîe, le stade, le mille, &c. avec leurs proportions relatives, « Mais
» parmi ces mesures, dit M, Gossellin, celles qui précèdent le stade,
» n'ayant pas de type constant dans la nature, ne peuvent êire évaluées
j» isolément ; le stade, au contraire, étunt donné par les astronomes et
» les géographes de l'antiquité pour une partie aliquote de la circonfé-
n rence de la terre, offre un moyen sûr de retrouver la longueur qu'on
»> lui attribuoit en fa déduisant de celle du degré terrestre; alors le siade
» devient nécessairement le module d après lequel doivent se conclure
M toutes les autres mesures, i»
Cela posé, fauteur procède \ la recherche des causes qui ont affecté
de valeurs difi'éren tes ce module primitif; et dVbord, en réunissant les
diverses évaluations du périmètre de la terre que les anciens nous ont
transmises ou indiquées , il en trouve neuf, qu'il range dans I ordre suivant ;
Gg %
JOURfiAL DES SAVANS,
4oooco stàtles. 24*^^00 stades* 570C00 stades/
3C0000. iSoooo. 2:^5000*
^^Cocoo* ît6ooo. 250000 ou 25 2000.
En voyant de^î évalnatron.^ si drsproîxîrrionnées, on peut demander sî
elles îiont fes réi»uliats de plusieurs opérations distinctes, ou sî l'on doit!
croire qu'une première mesure de [a terre, modifiée dans la suite paruna
raisort quelconque, aura suffi pour produire les variations que ron vient
dVxposer. Le savant Bailly essaya de résoudre une pardedeces questions, i
en supposant quatre coudtes préexistantes dont les rnullij»les auroient j
'servi à former les stades de 400000, de ^00000, de 240000 et de^
180000 à la circonférence de la terre. Mais celte supposition, dont
M. Gossedin ddmontre les vices et les invraisenil)lances, ne rendroit
com})te encore que de quaîre de ces grandes mesures , et laisseroit les
cinq au:res sans explication. II faut donc la chercher dans une théorie
qui les etnbrasse toutes; ei cette théorie» ausM simple en elle-même que
féconde dans ses conséquences, consiste à reconnoître une p>remière
mesure delà terre, et à admettre des différences dans la méthode de
gjaduersa circonférence et d'en subdiviser Its degrés,
«Dès rinstantjdit M, GosseKin, ou les Grecs se sont occupés de
y> géograjjhie astronomique , on les voit rapporter et comparer la valeur
» de toutes ies distances itinéraires qu'ils recueilloîeni, à fétenduede fa
3î circonférence du gfobe ; f t cet usage atteste que, d'après une tradition
:»» constante , les modules des stades et ceux des nulles étoîent regardés
» comme des parties aliquoîes de cette circonférence^ et par conséquent
>j comme des résultats posiufs d'une mL3ure de la terre. >î
Partant de ce principe, et considérant, en second lieu, que, toute
division du cercle étant arbitraire et admi5>ibfe, on a pu varier sur îe
nombre des degrés dans lesquels sa circonférence devoit être pariagée,
M. Gossellîn regarde les nombres de 4^0000 > de jooooo et de
3600CO stades donnés au périmètre de !a terre, comme indiquant trois
essais successivement applîqiiés à la division du cercle en 4oo, en joo
et en 360 degrés. C est de Ih , en eflet, et des différentes sulîdivisions de
ces degrés, qu'on voit sortir les divers stades, les milles itinéraires et les
autres mesures de longueur connues des anciens et rapportées dans le
mémoire dont nous parlons.
Cet auteur pense donc que les anciens appliquèrent , à diverses
époques, trois méthodes différentes à la division du périmètre de la
terre. La première et la plus sitnpie , celle qui le partageoît en quatre par
l'réquaicur et par un méridien, produisit, d'après la division décimale
de chacune de ces quatre parties en cent degrés, puis du degré en cent
AVRIL î920* wm^^ 2J7'
jnufes, ef de Ta mioute en dix parties, produis! tTmSonMibu s , des
niiltes itinéraires ei des stades qui furent des cenîièrnes et des miilietnes
du de^ré terrestre, de sorte que la circonférence de la terre eut 4oo
degrés et 4000CO stades. Far une seconde divisi<ïn, îiraginée pouf'
fîitiiîter Us c;;lcyls» ie cercle tut partagé en joo degrés, et le périiuétre
dugfobeen jcooco stadeîi. Enfin, le nombre j6o offratu vingt-qiaire
'diviseurs, et pnr conséquent encore plus de facîliié dans les opt rations,
♦on fut porté définitivement à partager le cercle en 560 dt-gres, quoa
•-divisa de la même manière que les précédens, et la circonférence de lai
terre eut }6oooo stades.
Telles ont été les bases des trois plus anciens systèmes métriques ; et J
ia valeur, en mesures modernes, déduite par M, Gosse/lin, pour chacun ,
des stades et des milles qui eniroientdans la composition de tes sysièines,
est fixée comme il suit, d'après les 4ooo myriameires attribués par no%\
astronomes à la circonférence de la terre :
RI
Pour le stade de 4ooooo à la circonférence 1 oo,ooû^
Pour le mille itinéraire 1 000,000.
Pour le stade de 30000©, j 3 },ijj.
Pour le jnîlle ^ 13 3 JijjJ.
Pour le stade de 360000 i j i^n».
Pour le mille • • . • * . 1 1 1 i m j«
Les longueurs des mesures précédentes restèrent fixes et indépen-
dantes des trois divisions du cercle; et quand, par la suite, le partage]
du degré centésimal en soixante minutes eut prévalu sur (ancien par-*]
tage en cent minutes, il en résulta d'autres mesure* de deux tiers plus
grandes, que les écrivains de rantiquîté nous ont aussi transmi:>es, i
et dont M. Gossellin fixe ainsi la \aleur :
m
Pour le stade de 240000 à la circonfèrence» 166,^^7,
Pour le tnille itinéraire 1 666^6f,j^
Pour le stade de 1 Hoooo . . , 222,^11,
Pour le tnille. ...•*• 2122, ^i*.
Pour le sfade de 2 1 6000. 1 H 5»r8j^
Pour le mille, 1 S j 1 ,«jâ.
Enfin, quand la division du cercle en }6o degrés, de 60 mîmiteç
chacun , eut été généralement adoptée , il fa Tuf pri>pornunner le
nombre des milles et des stades précédens à la dîv[sion .sexa ésimafe,
sans rien changer k leurs valeur:^ ; et c'est alors que ion etii pour chaque
degré :
i
a}8 JOURNAL DES SAVANS,
I 1 1 i I stades de 4ooooo , ou i i i y miilei itinéraires;
8j j î^ stades de jooooo, ou 83 | milles;
1000 stades de }6oooo, ou toc luilles;
666 j stades de 240000, ou 66 j Jiiilles;
joo stades de 180000, ou jo inillcs;
600 stades de 216000, ou 60 milles.
L'auteur s'nrrête un instant pour montrer comment les anciens ont
formé , d*aprè$ les suhdivi^ions décimales et duodi-cimiiles des stades,
leurs autres mesures, telles que le plèihre, rorgyie, le pas, la grande
et la petite coudée, le pied, la spiihame, le palme, le pouce, le
doigt, &c.; et il présente, dans un tableau général placé à la fin de
son mémoire, les valeurs de chacune de ces mesures dans les differens
systèmes dont on vient de parler» et dans les trois suivans, qui n'offrent
que des modifications de deux des stades précédens.
Le premier de ces trois stades, celui de 270000 i la circonférence
de la terre, paroit être à M* Gossellin le mêine que Censorin appelle
itatîijue, L*auteur fait voir que ce stade étoit en usage en Italie, qu'if
étoit de dix au mille romain, ou de 7J0 au degré, qu'il doit être
évalué à i4î^"'>'4«, et qu'il se trouve composé de 400, au lieu de
500 grandes coudées du stade de 560000 : d*où il résulte que le stade
italique et !e mille romain avoient aussi pour base une jartie aliquote
de la circonférence de la terre.
Il en est de même du stade de 22^000, ou de 62 j au degré, que
M4 Cossellin nomme staJe du dolique syriçn , parce quil déduit les
I77'",77^ de sa valeur, de Tétendue assignée par S, Epiphane au dolique
syrien*; et un simple rnppracfiement suffit pour fiiire voir que ce stade
est composé de 4oo grandes coudées de celui de jooooo.
Enfin , le stade de 2 j 0000, faussement attribuée Eratoslhéne, n'est
encore, suivant M. Gossellin, quune modification de Tancien stade
de 500000, dont on a pris le doigt décimal pour en former le doigt
duodécimal du nouveau stade, ce qui a porté sa longueur à 694 | p^r
degré; et cest pour éviter ce -nombre fractionnaire qu'ojv a ensuite
supposé ce stade de 252000, ou de 700 au degré. L'auteur démontre
que ces deux opérations sont la cause des erreurs qu'Ératosthène a
commises dans fa détermination de toutes tes longitudes de fa carte
qu'il a publiée.
Voil^ donc les neuf stades connus des anciens , qui ont pour base
un seul et même type primitif, combiné, modifié de différentes ma-
nières; et la valeur de lun de ces stades, ou seulement de Tune de
fes portions, étant déterminée > il eu résulte quon peut avoir la vajeur
AVRIL 1820* 139
•tous les autres avec la même certitude , et que fa recheiche des
mesures de longueur employées par les anciens se trouvera considé-
rablement simplifiée.
Ici M. Gossellrn s*nrrête pour justifier révalution qull vient de
donner à chacun des stades précédens, et d'oi* il conclut la valeur de
toutes les autres mesures usuelles des anciens: il fait voir combien ces
déterminations s'accordent avec les mesures itinéraires; avec les dis-
lances terrestres, fixées par le moyen des observations astronomique*;
avec les mesures grecques et romaines dont on a retrouvé quelques
types ; avec la coudée du nilomêtre d'Eléphantine, découverte par
Al. Girard, qui fa prise pour fa petite coudée de 4^^ d*iin stade in-
connu, tandis que, dans l'ensemble des opinions de M* Gossellini
elle se trouve être la grande coudée de 300 au stade > du stade égyp-
tien de 252C00; et il termine la première partie de son mémoire par
les conclu ions suivantes :
ï/ Qu'il y eut une époque dans Tantiquité oii. letendue de Fa
circonférence de la terre et la valeur de ses degrés ont été connues
avec une très-grande précision ;
2/ Que les diflérens systèmes métriques que les anciens nous ont
transmis, ont eu pour base une des piiriies abquotes de celte circon-
férence ;
}•* Que le système de division du cercle en 4oo degrés, renouvelé
par nos astronomes , et les opérLitions qu'ils ont faites pour déterminer la
valeur du degré moyeti de la terre; confirment Texactitude des nieî>ures
anciennes, et achèvent de prouver qu'il est possible de les ratnener àv
un type priïnîtif*
Après avoir considéré les systèmes méiriques des anciens dans leur
ensemble et dans leur première tégularité, M.GosseDin passe à rexamen
de ceux qui, d'après le mélange des mesures dont ils sojit composés,
annoncent une origine postérieure. Cest partitulièrement dans lacom*
paratson des milles itinéraires , des parasonges ou des schœnes avec les
stades, que rirrégularité de ces nouveaux systèmes se fait remarquer;
mais l'auteur prétend que ces mesures hétérogènes peuvent se rapporter
aux élémens qu'il avoît précédemment indiqués.
II montre d'abord que, dans l'origine, le mi fie fut toujours composé
de (^ix stades du système auquel il appartenoit, et que Ton dut par con-
séquent compter autant d'espèces de milles qu'il y tut dt* stades difle»
rens. H prouve que la même chose eut lieu à I égard du schœne ou de la
parasange, mesurrsqur lui paroissent être identiques, et qui , coii'posées
de 30 1 de J^q et de ôo $tadeS| ou de 3^ de 4 ^t àt 6 milles ittiiéraires.
fo JOURNAL DES SAVANS,
suhireni les variaiions comrniuîes à ces deux élenieiis* T;uU que les sys-
lèines métriques n éprouvèrent point de mélange, la valeur relative de
chacune de ces mesures fut aisée à trouver d*après des rapporta ainsi établis.
Il ny eut de difficultés que lorsque, par des communications successives
de peuple h peuple, les mesures d un pays se trouvant mélangées avec
celles oun autre, l'emploi simultané de ces mesures hétérogènes obligea
den déterminer les mpports; et de là sont venues les distinctions si
cnjbarrassantes aujourd'hui de ces milles comparés tantôt à 7 stades,
Uutùt h 7 stades 7, à 8 stades, h 8 stades j,à lo^ à 12 stades t écc.
Or, d'nprès roLservation de M. Gossellin, que ces différens milles
étoiunt toujours composés recollement de dix stades, et que s'ils paroissent
Cii contenir plus ou moins, c*est parce qu'ils se trouvent comparés à des
siadts ou plus petits ou plus grands que ceux des systèmes auxquels ifs
apparncnnenl, il donne le tableau des différentes combinaisons sous
lesquelles ces mesures peuvent se présenter dans les écrits des anciens.
Après ces observations générales et quelques autres qui montrent
comment des mesures si dissemblables en apparence se rattîichent les
unes aux autres , et dérivent toutes de combinaisons différentes d un mêma
élément, M. Gossellia se livre k Texamen particulier des systèmes
métriques anciens qui nous sont parvenus, et dans lesquels le mélange
des stades, des tnilles et des parasanges de diverses espèces, se fait sur-
tout remarquer. Il analyse et recompose successivement le système
romain; le système arménien recueilli par Mrïse de Chorène; deux
systèmes syriens que nous ftit cotinoître S, Épiphane; un troisième
système syrien quon retrouve dans les extraits de Julien d'Ascalon ;
deux systèmes alexandrins, l'un antérieur k Héron, l'autre employé par
les Grecs d'Alexandrie au temps de ce géomètre; un troisième système
décrit dans un ouvrage attribué à Didyme d'Alexandrie, et qui se
trouve parmi les manuscrifs de la Bibliothèque du Roi. Dans les dis*
eussions qui accompagnent chacun de ces systèmes, M, Gussellin
s attache à démêler les élémens primitifs sur lesquels ils sont établis, les
mesures hétérogènes qu'on y a intercalées , et il fixe dans autant de
taljleaux séparés les valeurs qui leur sont propres. On conçoit que ces
distus:»ions ne sont pas susceptibles d^extrail . et qui! suffit d en indiquefi
comme nous le taisons ici, l'objet et le résultaf»
Cette seconde partie du mémoire est terminée par des observations
sur ta coudée du nilomètre dÉléphaniine, que M. Girard a trouvée
di\isée en quatorze parties; ce qui lut a fait croire que la coudée
égyptienne ve pariagcoit en sept palmes. M, Gossellin pense que cette
division de la coudée a été inconnue dans rantiquité , que celle d^l^Ié*
AVRIL 1820.
pfianlîne est la grarï3? coudée de huit palmes du stade de 251000; îV
explique comment les divisions qu'elle présente ont eu pour objet de
faire connor Ire en même temps, lors des crues du Nil, [a hauteur du.
fleuve en mesures égyptiennes prises du stade de 2 j 1000 , et en mesure»
grecques prises du stade ofympîque de 216000. Cette discussion
conduit M. Gosseilin à examiner la valeur comparative des mesures
égyptiennes et des mesures babyloniennes, dont la différence indiquée^
par un passage d'Ezéchiel a donné lieu à diverses suppositions. Uautetir
montre encore que> dans ce passage, il ne peut être question d'une
coudée de sept palmes proprement dite, et dont fusage eût été parti- «
culîer aux Hébreux : il fixe ensuite d'une manière nouvelle, et d*après le
principe qui lui est propre, la proportion des mesures égyptiennes avec j
celles des Babyloniens et des Hébreux, en confirmant les résultats quiJ
obtient par fapplication de ces mesures îi différens objets dont les
longueurs nous ont été transmises.
Dans la troisième et dernière partie de son mémoire, M. Gosseilin
s'applique à découvrir la valeur des mesures employées par les Arabes,'
fes Indiens, les Chinois, &c. Ces recherches présentent d'autant plus
d*întérèt, que la description d'un grand nombre de contrées encore peu
connues de nos fours nous a été transmise par des géographes orientaux.
L'auteur, en observant que Tusage du doigt, du palme, de la coudée,
du mille, de la parasange , s'est conservé parmi ces peuples, pense que
leurs systèmes métriques ont la même origine que ceux des Grecs, et
que, sous cet aspect, les mesures des Arabes du moyen âge, c'est-à-
dire, des écoles de Bagdad et de Samarkand, appartiennent encore à
J antiquité, et doivent se rattacher aux systèmes précédemment exposés.
Il commence par l'examen de la mesure de la terre faite par les as-
tronomes d'AI'Mamoun, dans quatre contrées dîfTérentes, et qui trou-
vèrent 56, 56^, j6 j et 57 milles à Féiendue du degré de latitude.
L'auteur fait voir qu'ils ont employé dans ces mesures la grande coudée
du stade de ^70000, qui est leur coudée noire, et qu'ils ne se sont
trompés qu'en préférant le mille de j6^ à celui de 56 ^. II rétabliti
sous ces deux aspects , le système introduit par Al Mamoun puis il passe
au système hachémique dont les Perses se servoieni avant la domination
de^ Arabes , et il discute successivement les différens systèmes présentés
par Mésoudi» parTEdrisi, par Aboulféda , Ali-Koshgi et par Ebn al-
Ouardï, en observant que ces auteurs comparent toujours les élémens
des mesures dont ils parlent à la circonférence du globe; ce qui donne
yne nouvelle preuve de la tradition non interromjïue qui rappeloit le
module de toutes les mesures h la valeur du degré terrestre. Viennent
Hh
liz JOURNAL DES SAVANS,
ensuite les systèmes indiens, antérieurs et postérieurs à rinvasion des
Mahométans ; celui qui fut établi par Akbar ; b valeur de plusieurs mesures
itinéraires actuellement en usage dansTInde; deux systèmes métriques
des Chinois , &c. que nous nous contentons d'indiquer parce que les
détails nous meneroient trop loin.
Au reste, les peuples de TAsie ne sont pas les seuls qui, h travers
les siècles et les révolutions , ont su conserver dans leur intégrité quelques-
uns des types originnux qui avoient été puisés jadis dans la source com-
mune à toutes les aiitres mesures; lauteur fait voir qu*ea Norwége» en
Suède, en Pologne» en Lithuanie, en Prusse, en Bavière, en Saxe, en
Silésie, en Suabe, enScanie^en Allemagne, en E>pagne,en France, &c. p
les lieues les plus en usage sont toutes des parasanges ngoureusemenl
égales à celles que les anciens ont employées. Nous terminerons cette
analyse I bien incomplète sans doute, d'un travail aussi important, aussi
neuf dans son ensemble, et aussi curieux dans ses détails, par la citation
suivante, qui en offrira le réî^uhai à nos lecteurs avec plus de précision
que nous ne pourrions le faire nous-mêmes:
M II scroît facile, dit M. Gossellin, de multiplier ces exemples rmais
!• je crois avoir réuni, dans mes deux mémoires, plus de témoignages
» qu'il 11 en faut pour montrer que les bases de tous les systèmes
>i métriques linéaires que j'ai pu découvrir, soit chez les Grecs et les
)»Romaiiis, soit chez les Germains, les Gaulois, les Arméniens, fes
y* Syriens f les Hébreux, les Egyptiens, les Arabes, les Perses, les
K» Indiens, les Chinois, les Japonais, se rattachent à la mesure de la
** terre, i un seul type primitif diversement modifié, et toujours
» conservé avec exactitude dans les variations qu'il a éprouvées. Cette
•9 unité de module peut seule exphqucr la liaison , les rapj>orts constans
» que présentent les difit: rentes mesures anciejines, quand on cherche à
» les comparer, à les combiner entre elles; et c'est en les raj^prochant
» toutes , qwt les dévebppemens d'une théorie trè> simple m\>nt conduit
y> h de^ résultais confirmé:^ h-la-fuis par les obstfv.itions astronomiques,
n par des monument qui exi>ient encore, par de nombreuses applications
» des antiennes mesures itinéraires» enfin par Femploi de ces mêmes
» mesures, continué jusqu'au'nurdiiui chez diffërens peuples et dans
a» de vastes conir^^es, dtpuis les confins occidentaux de TEurope
9> jusqu aux extrémités orientales de FAsie» «
RAOUL-ROCHETTE.
AVRIL 1820.
2W
UCTIONNAIBE ONIVEItSEL DE LA LANGUE FRANÇAISE,
composé et publié par AL Raoul-Rochette , d* après des nuué-
riaux recueillis en grande partie par M. Boissonade, A Paris,
chez Nicole, 1819 (spécimen); 32 pages in-^.^
Ce Dîciionnaîre doit remplir deux volumes, dont le second paroîtra
^ers fa fin de 1 82 1 , et le premier au mois de décembre 1 820 : les feuilles
que Ton vient de publier sont les premières du lome I/% et contiennent
le commencement de l'ouvrage j depuis le mot rîr jusqu'au mot accepter.
Ce n'est donc point un choix d'articles , mais la série naturelle et complète
de ceux qui doi\ent précéder tous les autres. Ce genre de spécimen nous
paroït plus propre qu'aucun antre à donner une juste idée et du plan et
de l'exécution d'un lexique. On y peut voir immédiatement quel genre
de notions il renfermera, quelles en seront les formes, la méthode et
rétendue. Depuis un siècle et demi, trop d'essais ont prouvé Textrême
difficulté d'un dictionnaire universel de notre langue. On prétend que si
ces travaux sont restés incomplets et défectueux , c'est qu'ils avoient été
entrepris trop tôt, c est-à-dire, avant la publication de (a plupart des
chefs-d'œuvre de la prose française : mais cette prose, déjà riche en 1 694 •
Tétoit de plus en plus en 171 8, en t74o, en 1762; et, quel que fût au
surplus fétat de la langue à ces différentes époques, il semliloit au
moins possible de ta décrire telle qu elle étoit, d'en donner un inventaire
complet et fidèle. L'imperfection des lexiques français tient k plusieurs
autres causes, dont quelques-unes sont indiquées dans \e prospectus de l'ou-
vrage qui nous occupe. En ce genre, comme en tous les autres , le talent
réussit à force de travail, de savoir et de méthode ; et c'est à ces moyens
que le nouveau Dictionnaire, s'il est en entier tel qu'il î^'annonce, devra
un succès qui restoh à obtenir, Nous croyons qu'on n'avoît point encore
puiant approché du but.
Le plan exposé dans le prospectus « consiste à donner à la suite de
n chaque mol , i •* son éf} mologie exprimée en peu de paroles, et seule^
î> ment dans les cas où elle est claire, certaine ou du moins très-vraisem-
n blable , et propre à expliquer le sens et Tusage de ce mot; i.*' la
» définition au moyen de synonymes qui en éclairent les diverses signi-
33 fications , DU de phrases qui en exposent clairement la signification
î> propre et primitive; 3.* les diverses acceptions rangées suivant la pro-
» gression la plus naturelle et la plus logique; et 4'*" ^ l'appui de chacune
» de ces acceptions , des citations textuelles tirées des meilleurs écrivains
30 en vers et en prose, avec rîndication exacte de l'endroit même oii
a44 JOURNAL DES SAVANS,
w chaque citaiion est puisée, et disposées enfin dans l'ordre chrono-
» logique, afin de mieux marquer, outre remploi de chaque terme,
» les variations qu'il a subies dans son cours, répoqueoà il a pris nais-
»S3nce, celle ou il a cessé de paroîire. >i II y a bien un cinquième
article qui auroit pu être ici indiqué; savoir, les règles de syntaxe h suivre
dans Tusage de chaque mot : mais cette partie essentielle n'a point été
omise dans l'ouvrage même* Du reste , ce sera par des extraits , beau-
coup plus que par des observations générales, que nous pourrons faire
connoitre ce nouveau Dictionnaire à nos lecteurs. Nous hasarderons
dy joindre un petit nombre de réflexions critiques.
« A» s. m. L'ac;jdéjïiie dit qu il est indaclinabU et qu'if ne prend point
n dV au pluritL Cependant, ailkurs, l'acadctnie décide qu'il n'y a point
î> en français de cas, ni par conséquent de déclinaison propreme^nt dite:
j> d\m il suit que tous les mots de la langut* française, ausîti bien que le
*» substantif ^/» ioni indéclinai les î il falluit dire ici invariables ^ selon
^ Lûvemx ( Dict. au mot a ). Lj^ même grammaîrit-n donne la raison
*> pour laquelle le mot // ne prend point ici d / au pluriel. »
Peut-être étoit-il plus simple d ex])o<er ici cette raison, que de ren-
voyer à Fun des grammairiens qui la donnent ; jnais la remarque sur la
contradiction dans laquelle est tombée lacadémie, est d'une jusies&e in-
contestable: seulement nous pourrions dire que celte compagnie a laissé
dans son travail un si grajid nombre d'inexactitudes pareilles, que, s*il
fàiloJt les relever toutes dans un dictionnaire nouveau, il prendroit une
étendue déiuesurée. La matière 'i traiter fournil d elle-mcme bien assez
de détails, sur- tout lorsqu'on s'impose Tobligaiion d*éclaircir toutes les
notions par des exemples classiques. C'est Tun des soins par lesquels se
recommande le nouveau Dictionnaire; peut-être même les exemples y
sont-ils un peu trop nombreux : mais le choix en est excellent, et ils
s'appliquent, pour rordinaire, avec beaucoup de justesse aux acceptions
et constructions diverses. En citant , sur le mot aux pour à les, ces deux
vers de Voltaire «
Charles éveillé, Charles bouillant d*ardeilr,
Ne lui répond qu*en s'écriant : Aux armes î
on a imprimé Charles avec IV final qui i^ompt la mesure du vers.
Mous faisons cette remarque, parce quen général ces feuilles sont très-
soigneusement imprimées, condition spécialement indispensable dans
les livres de grammaire.
Pour ex|Jrquer les différentes acceptions de la préposition a, on dit
qu'elle s'emploie \iO\XT après, et l'un cite cette phrase de La Bruyère; tiCet
» autre, . . augmetue d*année X autre de réputation, w Nous ne croyons
AVRIL 1820.
pas qtncï à mua puisse se traduire par ûpr(s Vautre ; d'une année est le
lerme antécédent, à autre le subséquent; c'est avant et non après W
que fe prejiîier est arrivé, La Bruyère veut dire que Thoinme dont il
parle augmente de réputation en passant d'une année à la suivante.
A se prend aussi pour avec , et, selon le nouveau Dictionnaire, il
en est ainsi dans ce vers de Racine:
Lui*mcme, à haute voix, viendra la demander.
Nous n'examinons pas si Ton pourroit dire avtc voix ft /ju te : m^is ^ en
ce cas, la préposition avec n'aurait plus elle-même sa signification propre
et primitive de concomitance; à n^équivaudroit ici à avec que parce
que fe mot avec équîvaudroit à quelque autre préposition*
Sur a, troisième personne du singulier de rindicaufprésent du verle
avoir, on s'arrête au gallicisme, i/y a. La Bruyère dit , il r a des con-
jonctures où &c. , et Ton suppose, avec M. Laveaux, que cet //
est \\n être métaphysique, ou Têtre métaphysique en général, qui,
dans le point dont il s'agit (y ) , a ou possède des conjonctures. Nous
doutons de l'exactitude de cette analyse. Nous croyons que, dans cette
locution et en beaucoup d'autres, JL est un pronom neutre ou abstrait,
plate > en quelque sorte, en expectative, pour être expliqué par des mots
plus éloignés. Si La Bruyère avoit dit , // est des conjonctures , cela
signifieroît, //, ou cette chose quoti appelle des conjonctures, est ou
existe A notre avis, le jnot /7 rejnpiit précisément la même fonction
dans la phrase, il y a des conjonctures ; seulement il reste h expliquer
comment, dans notre langue, y avoir a pris le sens d>xistcr ou être.
Or nous soupçonnerions que ce gallicî:»me n'est originairement qu'une
traduction vicieuse ou grossière du latin haberi : on a substitué 1 actif au
passif; et, pour traduire habetur, on a dit^ a, au lieu de est eu.
Il rebte ainsi dans la grammaire analytique plusieurs questions indécises
ou épineuses sur lesquelles nous ne partagerions p*is toujours les opinions
des auteurs du nouveau Dictionnaire universel. Mais une partie de leur
travail à laquelle nous croyons devoir beaucoup d éloges , est celle qui
tient à Thistoire positive de notre langue depuis l'avènement de Fran-
çois I/' Ils ont soigneuseinent retracé les vicissitudes que le vocaLuIaire
a éprouvées durant les trois derniers siècles, et assigné les éfïoques où
s'est introduite chaque locution renkarquable. Ce résultat extrêmement
précieux s'obtient par la distribution chronologique des exemples re-
cueillis dans tous nos livres cla^^siques pour servir de matériaux à tous
les articles de ce Dictionnaire. Par livres classiques, on a entendu tuus
ceux dont le fotid ou les formes ont attiré ou attirent encore les lecteurs,
et qui par conséquent ont piuj ou moin? influé fur letat du langiu*-.
1
4
^W - ^fOURNAL DES SAVANS,"
On a même compris au nombre des textes quelques-unes des p/irûscjn\
\Jiï:t.s qui ne se lisent que dans (e lexique de I*académie française; e|
nous Ignorons sî ces citations ii'ont pas introduit par hasard quelques!
inexactitudes dans I*ouvrage dont nous rendons compte. Ct^ peuples- la A
dit racadémie, sont dans l'aMus, ce qui signifie, suivant elle, que ces
peupfes sont dans Terreur- Si pas un seul écrivain recommandabfe n'a
employé cette phrase ni en ce sens> m en aucun autre, nous en conclu-
rions qu'elfe nesi pas française. Il nous semble qu'^/;i/j et erreur ne s€ij
confondent que lorsque Terreur consiste en quelque abus du raisonne^
ment ou du langage, en quelque déductioîi fausse que Ton veut fiiir#
particulièrement apercevoir. Considérée en elfe-méme, comme immé-
diate et directe. Terreur Jie s'appelle point un abus; personne ne dira
qu*îl est abusif de croire que Louis XII ait régné avant Charles VIIL
Le praxpectus du nouveau Dictionnaire annonce qu'on y trouver^^
I Tancîenne orthographe de Tacadéinie, qui est, dit-on, celle de tous nos ,
lions auteurs; et Ton ajoute que le changement proposé par Voltaire est
irop partiel pour mériter rf rrom d'orthographe de Voltaire, que quelques
esprits superficiels s*obsitnent encore h lui donner* Vraisembbftiement ,
creux qui se servent de cette expression ne l'emploient en effet que pour
désigner la substilurton de IVr à To dans quelques syllabes; changement
qui, à vrai dire, est bien loin d*avoir l'importance que semblent y
attacher ceux qui Tadoptent et ceux qui le réprouvent; mais, à notre
livfs, ni les uns ni les autres ne méritent la qualification d'esprits super-* .
l^ciefs. Au fond, la véritable prononciation de IV ouvert n'est guère mieux
représentée par ^7/ que par oi; et de tous les motifs allégués pour justifier
Finnovation de Vohafre , le plus plausible est celui qu'on tire du besoin
de distinguer les deux prononciations différentes de certains mois, comme
Anglois et Danois» S. François et le peuple François, Dumarsais et Duclos,
qui, sans occuper des rangs très-éminens dans la littérature, ne sont
pourtant ()as à exclure lout-à-fait de la liste des tons auteurs, ont essayé
des innovations plus nombreuses et plus graves, qui ont beaucoup moins
réussi. Le système général de Tancienne orthographe a dû prévaloir;
mais il s'en faut que celle qui est aujourd'hui usitée soit celle des
tons auteurs et des bonnes éditions du siècle de Louis XIV* En réim-
primant aujourd'hui les livres classiques de cette époque / on change
à chaque instant desj^ en /, des j en j,5çc*, et on retranche ou Ton ajoute
beaucoup de lettres ^i beaucoup d'accens. L'académie elle-même a
modifié successivement Tonhographede son Dictionnaire, et les change-
ITiens qu'elle y a faits n'ont pas été toujours très*heureux.
Conserveries traces de Tétymofogie est un h\xt essentiellement utile,
AVRIL 18Z0-
45^
auquel on doit toujours tendre. Notre orthographe ne sVtatit poîiit,
comme celfe des Italiens, dirigée de bonne heure vers un autre but,
savoir, vers une représentation plus immédiate de la prononciation , il
Ji'est plus temps de se proposer cette fin ^ et les tentatives hasardées pour
I wtieindre n'amènent que de ridicules bizarreries. Le système étymo-
logique est depuis long- temps le seul possible parmi nous. Mais le
respect dû à letymofogie a<t-il dû s*étendre aux traces des simples pro*
nonciaiions loiu-à-fait abolies et étrangères îi Torigine des mots î c'est
réellement une tout autre quesiion, que l'usage n'a i>eut-êire pas encore
définitivement résolue dans tous les détails qu*eUe embrasse. Quoi qu'il
en soit, Forthographe suivie dans le nouveau Dictionnaire nous paroît
€n général la plus sûre; elle est plus systématique, mieux arrêtée,
moins variable, que celle de l'académie r et, sous ce rapport, comme
sous tous les autres, nous ne pouvons hésiter à dire que ce nouveau
travail, s'il est coniijiué et achevé comme il cominence, aura de très-
grands avantages sur tous ceux qui ont été publiés jusqu'ici dans le même
genre : peut-être laisse- t-il h désirer un peu plus de précision dans l'ana-
lyse grammaticale.
DAUNOU.
NOUVELLES LITTÉRAIRES.'
INSTITUT ROYAL DE FRANCE.
L'Académie des sciences a lenu sa séance publique ie 27 mars dernier:
On y a entendu un dbcours de M, Dup'ut sur ïcs progrès des sciences et des
arts de la marine, depuis la paix; une notice mcdicaSe et anecdotique sur.
Tinflucnce des agens physiques et moraux sur le counge, par M, Ptrcy * et
un éloge historique de M. Paiisoi-Beauvois, par M, Ctn^Ur*
Uacad<^mie avoir, pour la seconde fois, proposé, pour sujet da prîx de ma-
thématiques, le THrt UEME DE Fermât , savoir ; (jue, passé le St'cond dtgre , ri
^'exïàte aucun- puissance t^ui puisse se partager en deux du tris puissances du même
Jegff^, Lis mémoires (^voyés n^ayani pas rempli les cnnJiiiûn* du programme,
l'académie retire ce sujet du concours; elle a arrêté que la somme qui croit des-
tinée à ce prix sera reportée sur la qtiesûon des tables de la lune, pour laquelle
elle a reçu dtnx pièces singuliéremeni intéressantes. L'académie avoii aussi
proposé la question suivante : Former, par la seule théorie de la pesanteur uni^
verseile , et en n'empruntant des observations que les clémens arbitraires, des tables
du mouvement de la lune, aussi préiists que nos meilleures tables ûctuelles. Elle
a déc<^rné un prix de 3000 fr< à chacun dtrs deux mémoires qu'elle a reijus pour
ce concours- Le premier, enr<*giâtrc sous le n.** 1 , porte pour épigraphe z Astrt
bizûrre et irrégulier, qui ne marche qu*en dévoilant des in égalités différentes et
uccttmuléa , et qu'en ne peut saisir^ cçmme le Frvtéè de la fable ^ qu^et^ épuisa ni
m
JOURNAL DES SAVANS,
la vûrlétc de ses Jhrmes successives* L'auteur est M. Da moi SE AU. Le second
mémoire, enregistré n.** 2, a pour épigraphe: A'Ialè loçuuniur^ qui methodum
allquam aliâ magis mmiisve exactam yrcnunaant» Ea enim sola meîhodus pro-
hlema solvisse censenpo est , ptr quant quemv'ts priFctsIonh gradum attîn^ere sal-
fem ht poîestate eH ( GausS, Theoria motus corporum cœlestium, pag, i6^)* Les
auteurs sont MAL Carlini et Flana.
Un anonyme ayant offert une somme à racadémte, avec rintcntîon que le
revenu en fut affecté à un prix à décerner chaque année à Touvrage imprimé
ou manuscrit qui paroîtra avoir le plus contribué aux progrés de (a physiologie
expérimentale, le Koi a atttorisé cette fondation par une ordonnance en date
du 12 juillet i8j8. Parn)i les ouvrages envoyés au concours, l'académie a con»
sidéré comme devant être mis au premier rang, chacun dans leur genre, le
mémoire de M. Serre ourles lois de rosiéogénie,et celui de M. Edwards
fur Tinfluence des agens physiques sur les animaux vertébrés. Ces deux ou-
vrages étant trop peu comparables pour que Ton puisse leur assigner un rang
entre eux, l'académie a cru devoir les couronner tous les deux, en faisant ïa
dépense d'un second prix. Elle a décerné Tacces-it au mémoire de MM. Bres- '
eu ET et VlLLERME sur les phénomènes du cal, et accordé une mention ho-
norable, comme encouragement , aux essais de M. Isidore Bourdon sur le
niécanisme de la respiration.
Un anonyme ayant légué une somme de sept mille francs^ pour être placée
rn rente sur TEtar, au profit de l'académie dt^s sciences, et employée en une
médaille dor équivaleiHe à la sonïme de cinq cent trente francs , produit de
la renie; le Koi a autorisé Tacadémie» par une ordonnance en date du 2.x
octobre 1S17, a distribuer annuellement un prix de cette valeur à Touvrage
publié chaque année , et qui» à son juoeiTrent, contiendra les recherches les
plus utiles a la statistique de la France. Les ouvrages envoyés cette année pour
concourir au prix de statistique n*ont point paru à l'académie devoir mériter le
prix; quel qu'ait été à ses yeux le mérite des travaux des deux principaux concur-
rens pour approfondir certains points qui semblent leur être plus familiers,
racadémic n*a pu se dissimuler les défauts de l'ensemble de leur travail, ni
regarder comme dignes d'une couronne des productions incomplcies^ 011 l'on
pouvoil remarquer d assez graves inexactitudes. Il est sans doute d'une haute
importance d'encourager par des récompenses auxquelles, à juste titre, l'opi-
n'on attache un grand prix, des recherches éminemment utiles, et dont, parmi
nous, nn généreux anonyme est maintenant le seul promoteur public; il est
bien vrai que, dans ce genre de travaux, la perfection est comme impossible
à atteindre, et qu^on trouve souvent, i«cme dans les plus médiocres, des do-
cuniens et des faits jusqu'alors inconnus, ou moins bien observés; on ne con-
testera point Tinconvénient de rebuter, dés l'ouverture d^lnc sorte de carrière
si nouvelle encore en France, certains observateurs capables de bien voir au
moins ce qui les entoure, en paroissant placer le but â une hioteur qu'ils ne
sauroicni atteindre, et en arrêtant ainsi l'essor qu'ils auroicnr prîs; on convien-
dra enfin que, placés romme nous sommes ,^ if faut peut-être moini exiger du
présent, pour obtenir plus de l'avenir. Mais, sans renoncer a l'indulgence que
doivent inspirer ces rértexions, on ne perdra pas de vue non plus le danger de
n'arrcter ses regards, dans les ouvrages soumis au concours, que sur les parties
plus ou moins Qignes dVbges, en les déiDurnanr de celles qui renfermeroicnt
lVRIL 1820-
149
des erreurs de quelque importance. Une compagnie savanre ne doit pomt
s'exposer à voir ses jugemens infirmes par ï opinion : or, comment empêcher
qu'une partie du public , s'attachanl plutôt à remarquer ce qu*aurait de vicicuic
un ou vTtige couronné dont la publication ne saurait être prévenue, ne mrc pat
beaucoup de soin à discerner cqtiifablementce qui aurait déterminé les sufî»agef
académiques! et, sous un autre point de vue, comment faire pour que, séduiti
par l*appa rente facilité d'obtenir ces suffrages j lesconcurrens à venir ne prennent
pas une fausse route! IS'cst-il pas évident, au contraire, qu'un encouragement
accordé dans les vues lesplus sages, mais avec trop peu de prudence, pourrait
faire pulluler les productions les moins dignes d estime! Déierminée par ces
dernières considérations, i'académie remet le prix, et le fonds sera tenu en
réserve pour être joint à celui de l'année prochaine» Elle a cependant arrêté
qu'il seroit fait une mention honorable des noms de M. Gondinet, sous-préfet
à Saint-Vrieîx , département de la Haute- Vienne, qui a envoyé une statistique
manuscrite ec assez étendue de cet arrondissement; et de M. Rouget, auteur
d\jn ouvrage imprimé sur la statistique de la ville et du canton du Vigan,
dépancment du Gard*
Méddilie astronomique , fondée par Aï. DE LalANDE, Deux pièces ont
concouru pour ce prix, La première offroit un grand travailsur X^llbrûtion de la
lune, L'auteur, M. Nicollei, astronome attaché à Tobservatoire de Paris^ ayant
rafseniblé et calculé les observations de MM. Bouvard et Arago, y avoit ajoute
trente observations faîtes par lui-mcme, et qui ont confirmé les conséquence*
qui 5C liroient des premières» La seconde oifroit les calculs et les résultats de
M* Encke , directeur adjoint de l'observatoire de Gotha, qui étoit parvenu à
représenîer avec une exactitude remarquable, et par une ellipse unique, les
quatre apparitions de la comcie observée en 1786 , 1795 , 1805 et jSjç, Les
géomètres ont vu avec intérêt , dans la pièce de M. Nicollet , des calculs propres
à jeter (jutrlque jour sur un point curieux et obscur de la physique céleste. Lef
astronomes insistoieni particulièrement sur le mérite d'un travail qui leur
lâisoit connoîire une chose tout-à-fail nouvelle, une comète dont la réyo-
lution n'est que de douze cent cinq jours, et dont îîs peuvent se flatter d'observer
plusieurs retours. Cette comète est foible, didlcile avoir; elle peut passer^ et
elle a réellement passé nombre de fois , sans être aperçue. L'ellipse de M, Encke
facilitera leurs recherches, en leur indiquant d'une manière précise IVndroit
du ciel ou ils pourront la trouver à chaque révolution. L'académie a partagé le
prix également entre les deux ouvrages.
Elle propose pour les années 1821 et 1S22 les prix suivans :
Prix de mathématiques, L'académie, considérant que plusieurs questions déjà
proposées , notamment celle qui regarde les perturbations des planètes dans le
cas où leurs orbites ont des excentricités et des inclinaisons considérables,
n'ont pas encore été résolues ; que, d'ailleurs, dans féiat actuel de l'analyse, il
ne paroît pas se présenter de question spéciale et iniporiante qui lui donne l'es-
pérance fondée d'en obtenir la solution dans Tintervalle fixé pour le contours ^
a jugé qu'il seroit plus uiile anx progrès de la science de ne point indiquer
cette année de question particulière, mais de laisser aux concurrens une
carrière plti? étendue. En conséquence, le prix de mathématiques sera décerné
au meilleur ouvrage ou mémo ne de maihémaîîques pures ou appiïijuées , qui aura
paru n ou qui aura été communiqué a l'académie ^ dans l'espace des deux aimées qui,
11
â}o JOURNAL DES SAVÂNS,
Sifftt û^Cùrditi'akft tancurrerts* Le pri* fera une médaille d'or de la valeur de
froii miiie francs. Il sera adjugé dans la séance pubki(]ue du mois de mars iB22«
Le terme de rigueur pour l'envoi des ouvrages en le j**' janvier 1822.
Fen M, Alhumbert ayant légué une rente annuelle de trois Cfnfs francf ,
pour ctre employée aux progrés des sciences et des arts, le Roi a autorisé les
académies des sciences ei des beaux-ans à distribuer alternativement, chaque
année j un prix de cette valeur. Sinvrt le développement du triton ou salamandre
aquatique ditns ses différer s degrés, depuis L^œuj jusqu'à V animal parfait, et
décrire tes changemens qu'elle éftrouve à l'intérieur^ principalement sous le rapport
de l'astéogénie et de la distribution des vaisseaux ; tel eal le sujet dn concours de
cette année. Le prix sera une médaille d*or de la valeur de trois cents francs,
Prix de physiologie expérimentale , fondé par un anonyme. Une médaille d*or,
delà vsiltUT Qç quatre cent quarante francs , sera adjugée à l'ouvrage imprimé ou
manuscrit oui lui aura été adressé d*ici au i/' janvier 1821, et qui parotira
avoir le plus contribué aux progrés de la physiologie expérimentale. Les
auteurs qui croiroient pouvoir prétendre au prix , sont invités à adresser leurs
ouvrages, francs de port, au secrétariat de l'académie, avant le i,'^ janvier 182%
Un anonyme ayant offert une rente de cinq cents francs sur l'Etat pour la
fondation d'un prix annuel, tjue le Roi a amoribée par une ordonnance en date
du 20 septembre 1819, en faveur de celui qui, au jugement de racadémit
royale des sciences, s'en sera rendu le plus digne, en inventant ou en perfec-
tionnant des instrumens utiles aux progrès de l'agriculture , des arts mécaniques,
et des sciences pratiques et spéculatives, ce prix sera adjugé dans la séance
publique du mois de mars 1821 : il pourra être donné à toute machine qui
sera venue à la connoissance de l'académie avant la clôture du concours , dans
*3uelqiîe pays qu'elle ait été inventée. Les machines qui n auroient pas été
connues a temps de l'académie, seront prises en considération l'année suivante.
L'académie invite les auteurs qui croiroient avoir des droits à ce prix, à lui com-
muniquer leurs inventions avant le 1.*' janvier 1821*
L'académie royale des sciences rappelle qu'elle a publié, l'année dernière, un
programme sur la maturation des fruits , é^c, , et une description comparative
du cerveau dans les quatre classes d'animaux vertébrés , ifc. Ces deux prix seront
adjugés dans la séance publique du mois de mars 1821.
On a distribué l'analyse des travaux de l'académie pendant 1819; Partie
mathématique, par M, Delambre, 8 1 pages in-4,%' Partie physique, par M. Cuvier,
46 pages in^^,^
La partie mathématique fart connoître les mémoires de M. Poisson,
sur le mouvement des Huides élastiques dans des tuyaux cylindriques et sur
la théorie des instrumens à vent j — de M. Cauchy , sur la résolution analy-
tique des équations de tous les degrés par le moyen des intégrales définies 5
^ àt M* Laplace , sur la figure de la terre, et sur Tapplication du calcul des
probabilités aux opérations géodésiques de la méridienne de France; —de
M. Poisson, sur la libration de la lune; — de M. Fourier, sur la théorie ana-
lytique des assurances mutuellei; — de M. Biot, sur les lois de la double ré-
fraction et de la polarisation dans les corps régulièrement cnstaljisés; — de
M. de J urine , sur le mirage observé sur le lac de Genève; — de M, Bivt, sur
une nouvelle propriété physique qu'acquièrent les lames de verre, quand ellrt
exécutent des vibrations longitudinales; — de M. Dupin, sur Jcs populations
AVRIL 1820.
ajt
comparées de Fr«oce et d'Angleterre. * , . =r Rapport d*une commisjîdn sar (a
situation des travaux du canal de TOurcq et ses dépendances, par M. Girard*
= Rapports sur les ouvrages, les essais^ les machines» &c, qui ont été soumis k
J'exanien de racadémie.
Partie physique, j."* Chimie. — ^ M. Bersélius, chimiste suédois, a publié,
durant son séjour à Paris, en 1^19^ une traduction française de son ouvrage
sur la théorie de^ proportions chimiques et sur TinHuence chimique de Péïec-
tricité. Il a également donné une traduction de son nouveau système de mi-
néralogie.— Mémoires de MM, Gay-Lussac ti W thher ^ %nr \\n nouvel acîdc
Formé par l'union do soufre et de i'oxigéne , et qui a reçu le nom A^aàde
h/po-sulfi/ncfuf; — deMM. Pelhnertl Cavemin ,%vlt ûtn^ nouveaux alcalis qu'ils
ont nommés strychnine et bracine : le premier a été trouve dans la fève de
Saint-Ignace, fruii d'une espèce du genre strychnos; !c second dans la bracea
tntîdysenterica ; — de iVï, Chevreuil^ sur les corps gras, et particulièrement sur
le beurre de vache; — de M, Decandolle^ sur la neige rouge de la baie de
Baiîîn, -=, 1.** Minérûlagie et Géologie. — M- Bcnmird, ingénieur en chef des
mines > a présenté à l'académie un aperçu géognostique à^i terrains; M. Bto~
gnard, des considérations sur les terrains qui présentent des fossiles; M, RigoUot^
du Facadémie d'Amiens, des observations sur des dents d'éléphant et de rhino-
céro déterrées à fa porte d'Amiens, dans des couches de gravier; M. Bron^
chant , un iraité éhmentaire sur la cristallisation, et M* Sage, des mélange*
historiques et physiques. ^ J*** Physique végétale et Botanique, — - Mémoires de
M. Turpin sur Finflorescence des graminées et des cypéracécs; — de M, Loiseleur
de Longchiimp , sur les plantes de la France qui pourrorent être substituées aux
végétaux étrangers pour fusage de la médecine; — ^de M. Kunth, sur la famille
des bignoniacèts ^ ^,^ Xoologie , Physiologie animale et Anatomie* — Mémoires
de M. Latrrilh , sur le* différons insectes qui sçrvoieni d'emblèmes dans récri-
ture sacrée des anciens Egyptiens ; — de M. Moteau de Jonnh, sur les reptilei
desAniillts; — de M. iVrr^^ sur les premiers çommencemens de i*ossificaiion dans
l'homme et dans les animaux. ^5.* Médecine et Chirurgie* — Mémoires de
M,Percyi fur les plaies dans lesquelles il se manifcstede la phosphorescence; — de
M. Deuille, sur IVpidémie de cnolera-morbus qui a ravagé, en 181 8 » le Bengale
Cl une grande partie de Tlndosian; — de M. iUrrty, sur une lumeLtr squineuse;
— de M. Faute , sur une pupille anificielle , et une méthode nouvelle d'opérer la
cataracte, ^ 6.** Agriculture , Art vétérinaire et Technologie, — M. Tessitr a
publié ûei considérations sur les chèvres du Tibet j M. ivarr, un ouvrage sur
Tagriculiure de l'Auvergne; et M. Morel de Vimli a soumis à l'examen de
l'académie le plan d'une bergerie.
LIVRES NOUVEAUX.
FRANCE.
Versos sobre a morte do immitavel poeta FiVwto El/sio , por B* L, Vianna.
Paris, imprimerie de Rougeron , m-^/ d'une feuille.
fables j, contes t ép)tres et poésies diverses , par J. F. Roucher. Parb, imprimerie
de Dupotit» chez Brissot-Thivar?, In-S*^ de 280 pages. Prix , ç ("r.
Piirga, poème, par J, F, G. Viennet, imprimé au bénéfice des Parganiotes,
Paris» imprimerie de Faio» chez Delaunay , in^B/ de 5 t pages»
Il 1
\
^}A
JOURNAL DES SAVANS,
La Pùl'iiiqut de AI a tius^uieu, ou Intraduciion à l'Esprit des lois, Piriffi
de Faio , librairie de Desocr, in-èJ de j i ffuilte» 5/4. Prii, 6 fr.
Economie de i'agriculwre ; par le baron El, V. B, Cruci. Gei^éve el Piris , cHet
Paschoud, /«--^/ de 52 feu il Les, avec ui\e planche. Pnx> (5 fr.
Beautés du jardinage^ ouvrage orné des signes symboiiqaes des mois et de
«[ilatre joUcf gravures d'après Girodet. Paris, chez Petit, in^tz. Prix, \ fr* 50 c.
Art dejaire te vin et de distiller les eaux-de-vk ^ par A. C/** Paris, inipnm.
et libr. de Baudouin, itx-Sj' de 7 feuilles, plus 2 planches. Prix, 3 fr. 50 cent.
Eûmûfi doptUiue, ou Probabilités sur l'existence de différentes espèces de
irues, d'après lesquelles on exatnrne sî rhomme voit la nature sons son plus
bel aspect; par M. Tabbe Moussaud: nouvelle édition, revue par Tautcur. La
Kochelle, imprimerie eî librairie de Bouger; a Paris, chez Maradan, in-B*
Perfectionnement des secours contre les incendies, contenant les dispositions à
établir dans la capitale pour le salut des citoyens, la sûreié des châteaux
royaux, de l'académie royale de musique et autres édifices publics; ouvrage
approuve de Tlnstitui et de la Société d'encouragement; présenié au Roi par
Iréchard, inventeur du chissis ou rideau de tôle et mur de refend, exécuté
à rOdéon. Paris, imprimerie de Delaguette, chez l'auteur, rue Neuve-Saint*
Eustache, n.« 11, in-^' de 4 ft^uilles.
De la Fortification, ordonnée d'après les principes de la stratégie et de la
balistique modernes; par Ch. Fertusier, officier d'artillerie* Paris, imprimerie
de Faio, chez Bachelier, in-S.' de 26 feuilles. Prix, 7 fr.
Le Liire d 'honneur de l* indu hrie française , contenant, en trois parties, i,** Té-
ounieratton motivée des mftaiiles d'or, d'argent (première et deuxième classes),
de brome, des mentions honorables, des citations, qui ont été accordées aux
expositions publidues de» produits de Tindusirie nationale des années 1798,
i8ot , j8o2, 1806 et 1819, et de celles proposées au rapport du jury pour la
distribution des prix décennaux en iHioiZ," rénumération motivée des prix,
de» médailles, d'accessit ou d'encouragement, des mentions honorables et des
citations décernées par l'institui royal de France , par la Société centrale
d'agriculture, &c.; par S. Botiire ; i.'* partie* Paris, imprimerie de Smith, au
bureau de TAImanach du commerce rue de J*J. Rousseau, n.^ 20, in- j/ de
3 ï feuilles. Prix , 6 !>•
ANGLETERRE.
Spécimens oflrish éloquence , iiZc* ; Alodèles d^éloquence irlandaise ^ êvtc i€%
notes biographiques et une préface; par A, Philips. Londres, Reynolds, in-S/,
avec portraits: 16 sh*
A Séries ofsacrtd Songs , JXc, ; Collection de Cantiques , paroles de Thomas
JVÎoore, musique de Stevenson. Londres, Power, tn^JuL : 1 I. st. i sh.
Taies and nistoric scems in verses Contes ex Descriptions en vers, par Felicia
Hemans. Londres, Murray, 1819, in-B,' Prix, 7 sh. 6 d.
Journal ofa visit to south Afrka , ifc, ; Journal d'un voyage fait dans l'Afrique
méridionale en /^/c et iSté, avec la description des établisse m en s des mission-
paires de» Frèi^»-Unif jprésdu cap de Bonne-Espérance; par J. Latropc. Londres,
Longman , inâ/
Traveii in E^ff, Nubia , 4^€. i Vùyam en Egypte, en ffubie,àla Terre ^
Sainte t au tnont Liban ei en CA/pr#, dans Tannée itiJ4, par le capitaine Light
Londres, chez Rodwellj în-^,% avec 34 planches gravéei par Ch, Heaih ,
d'après les dessins faits sur les lieux par Tauteur. Prix, 2 1. st. 5 sh.
Travils in JVutia^ by the kte John Lewis Biirckhardf, Published hy thc
association for promoiing the dtscovery of the interior part^ of Atrica*
with niaps* Lonaon, Longmari j 1819, ïn-^.*
Afoliien 's Travds ta the sources ofSenigalanJ Gamhla; Voyages de M, AfolUen
aux sources du Sénégal et de la Gambie» Londres, Murray, in-^/, avec Êgures.
Prix,! It st,
Letters Ùlc, ; Lettres écrites du nord de Vhdlie et adressées a Henri Hallau,
Londres , Murray , 2 vol. in-S*^ Prix, 1 h st.
The naval History 0/ Great Britain ; Histoire navale de la Grande-Bretagne ,
depuis le conimttncenient des hostilUés , en 1 793 » jusqu'à et jour; par W- James.
Londres, 1820, Longman, 4 v^'* in-S." Prix, 3 h st,
Hisîory of the tower of London ; Histoire de la tour de Londres, Londrei,
1820, Baiiey , ^>ï-4,^ avec 30 figures* Prix, l L st.
Provincial A n t iqu it its of Scotland , ifc, ; A n l iqu it es p rovi n ci aies et Vues p irto-
resques de l* Ecosse , avec des éclaircissemcns historiques de Walier Scou.
Londres, Rodweïl, 4 livraisons ittuf." Le prix de chaque livraison est de i6sh,
Sketches of America ; Esquisse de C Amérique , par B* Fearon» Londres^
Ltiogman, j8i 9 , i/ï*^/ Prix, 16 sh.
America and the british Colonies ; l'Amérique et les^ Colonies britanniques,
ouvrage extrait desrenseignemens les plus uùies sur les États-Unis, les colonie*
anglaises au Canada, au cap de Bonne-Espérance, à la Nouvelle-Galles du Sud
et a l'île de Van Diemen. Coup-d'œil comparatif des avantages et des désa-
vantages que chacun de ces pays présente pour rémfgration; par W. Kingdoni.
Londres 1 Whittaker , î«.-5*.*' Prix , lo sh,
European Commtrce ^ dfcj Commerce de l'Europe ^ ou Guide du négociant^
contenant un tableau des principales villes du contuieiu, avec des tables nom-
breuses de Jeors monnoies > poids et mesures, tarifs des douanes, &c,; par
M, Rordanoz. Londres, Baldwin, 1819, irt-S.^ Prix, i L 1 sh.
A Treatise ifc. ; Traité de la science de la construction des navires; par Isaac
Blackbu^rn* Plymouth, Aspenne, in-^/ , 1 L 5 sh.
Essais on phrenology Ù*c,; Essais sur la phrénologie^ ou Recherches sur les
principes et Tutilîté des systèmes des docteurs Gall et Spurzheim, et sur le*
objections qui ont été faites contre ce système; par Combe. Londres, Lon^nun^
1819, in-Sf Prix, 12 sh.
BOMBAY. Tlie Desaîir, or Sacred Writlngs ofthe ancient Persian prophetf,
in the original îongue; together with the ancient Persian version and corn-
meniary ofthe fifih Susan , carefnlly published by Mulla Firuz ben Kaus, who
has subfoined a copions glossary ofthe obsolète and lechnical Persian tcrms;
to which is added an english translation of the Desatir and cooimeniary ; ia
fwo volumes* Bombay, 1818, in-S,*^
CALCUTTA. The Annals ofthe collège ofFort William ^ fiom the perlod af
bis foundation &c,; comptJed from officiai records arranged and published by
Thomas Roebuck, captain in the Madras native infanlry, Caicuiu , 1 8 1 9 , //i-i*/
ALLEMAGNE.
AUginveines bibliographisches Lixikon ^ von Ft A. Ebert, crste Lieferun|,
2j«î JOURNAL DES SAVANS.
A-Bibl. Leip5îg, Brockhaus, 1820, i«-^/ de 191 pages. C*est le commence-
ment d'un DiclTonnaire hihlrographîque,
DerZt/g dt:r Normatmen nach Jérusalem, ifc^; Le Voyage des Normands à
Jérusalem ; poème héroïque en douze chants, par George Grotsch. Leipsig^
ibic;, Brockhaus, /'^-'5^-'' Priï, 2 rxd,
Httnyady ^ ifc. / Hunyady , tragédie en cinq actes et en vers, par de Piichlcr.
Vienne, 1^19, M-<^/
Das Ala^iiSAnische Europa Ù*c. ; Les Phéniciens dans l'intérieur de t Europe
méridionale jusqu'au Weser et la Werra. Tableau des temps les plus reculés oc
TAliemagne, delà France et de l'Angleterre, par M. de Donop. Memmingen,
1819, Keyssner, in-S," , avec figures et cartes. Prix, 2 rxd. 6 gr*
Die Ritterorden ifc, ; Les Or^rej </^r//fViî/mf .■ liste chronologique Jittéra ire
€t historique de tous les ordres de chevalerie, tant séculiers que réguliers, par
J* WippeL Berlin, Schade, 2 vol ''i'-f-' Prix, 2 rxd, 12 gr.
Catecliismo de* G esu i tr ,ts^osïo ed itlustraio in conferenze storico-theologico-
moraii, a prohtto délia gioventù priva già da tanto tempo dt una buona
cducaziont. Uitima edîzione, correduta datl' ediiore con note*Lipsia, presso
A. Brockhaus^ 1820, /«-^/^ viij-690.
Abriss der Geschiclite dcr Philosophie ; Ahrcgé de V histoire de la philosophie ,
parFréd, SuelL Giesen, Miiller, i/î*<f/ Prix, 1 rxd.
Nota * On peut s*adresser à la librairie de M AI. Treuttel et Wurtz , à Parts,
rue de Bourbon^ n,^ îj ; h Strasbourg ^ rue des Serruriers; et à Londres j n." jo,
Soho*Siiuare , pour se procurer les divers ouvrages annoncés dans le Journafdej
Savant* Il faut affranchir les lettres il le prix présumé des ouvrages.
TABLE.
Supplément au Glossaire de la langue romane ^ ifc.j par *A B, df
Roquefort, ( Article de Af, Rayiiouard. ) * Pag. 195 .
Afcmoircs historiques tt géographiques sur l'Annénie, if c; par Ai*
Saint' Al artin. { Article de M, Silvestre de Sacy. ). . , 202»
Le Al onde maritime , ou Tableau géographique et historique de l'ar-
chipel d* Orient, S^c*s par C A, wakkenaer, {Premier article de
AI, Abel-Rémusat. ) 21 4*
Voyage classique et topographi/ue en Grhe , exécuté pendant les années
tSotf iSùj et iSoâ, par Ed* Dvdwdl. (Second article de Ai. Lc-
tronne* ) * ......,* • , . 224«
Traduction française de Straban , tom. V* ( Premier article de Af,
Raoul-Rochette* ) * 234*
Dictionnaire universel de la langue frattçaise, compose et publié par #
AL Raoul-Hochette* (Article de AL Dauncu» ) . . , ♦•••.. 24î .
NouvelUs littéraires * 247#
FIN DE LA TABLE. .
A PARIS,
DE L'IMPRIMERIE ROYALE.
1820.
%
Le prix de rabonnement au Journal des Savans est de 36 francs par an,
et de 40 fr. par la poste » hors de Paris* On s'abonne chez MM. Trtunel et
WSrt^, i Paris, rue de Bourbon^ »/ J7/ à Strasbourg, rue des Serruriers, et n
Lendres, n.* jo Sûho-Square. II wt affinnchir les lettres et l'argent.
Tout ce q^féut concerner lês annonces à insérer ii^is ce journal,
lettres , a¥is\ wiémoires , livres nouveaux, &c. i(At étrêjadressé .
FRANC DU JM^VT/ M Imnâu du Journal des Sapant^ i Paris, rue
deMénil-montant» n.*" %i.
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JOURNAL
DES SAVANS
MAI 1820.
BeMEBKUNGEN VBEH die SCHRIFTEN des Ai. CoFNELfVS
Fronto , &€. — Observations sur les écrits de M, Cornélius
Fronîo et sur le siècle des Antonins , lues dans la séance pu^
bUque de l'académie royale des sciences de Munich , le jour de
S. Maximilien , par Fréd- Roth, membre de cette académie,
l^E peu d'étendue de cet ouvrage, et sa date, qui n*e$t déjà plus récente
( octobre 1817), nous auroieiit détournés den rendre compte, si, dans
te peu de pages dont il est composé, il ne présentoit des vues assez nou-
velles sur une époque de rhistoire qui. Lien que très-célèbre, réclame
encore un historien. Ce nVst point en philologue que iM* Roth a examiné
les ouvrages de Fronton publiés par M, Mai, mais en littérateur et en
pliifosophe. Comme littérateur, if apprécie le mérite de ces ouvrages et
Çk 2
26c JOURNAL DES SAVANS,
le réduit à ptii de chose; loin de les admirer , comme le premier éditeur,
il ne trouve dans ce rhéteur africain que les sables de TAfrique, et non
sa chaleur brûlante, comme dans Tertuilien et S. Augustin, Ce jtige-
ment ne i» 'éloigne pas de celui de M. Daunou, qui , dans ce journal , a
déjà présenté comme un simple déclamateur ce prétendu rival de fauteur
des Catiti narres. M, Roth ne trouve rien non plus à gagner pour les
sciences dans les éaîts de Fronton : il n'y découvre qu un fait dont
f histoire puisse s'enrichir; savoir, une défaite des légions romaines en
Bretagne sous le règne d*Adrien, défaite dont Fronton ne parle même
qu*en passant : mais c'est dans le caractère de ce précepteur de Marc-
AurèJe, dans celui de son style et dajis la nature de ses opinions, que
noire académicien trouve des données précieuses pour le tableau d'un
siècle adjuiré jusqu'ici comme Mge d'or de l'histoire, mais qui, au gré
de M. Roth, est bien loin de mériter ce titre glorieux.
Les principaux panégyristes de ce siècle que notre auteur avoît à com-
battrei étoîent M, Hegewisch, savant historien allemand, et le célèbre
Gibbon, qui avoit prisa la lettre l'éloge de Rome par le rhéteur Aristide,
Si nous voulions suivre M, Roth dans ses réfutatiojis, cet article devien*
droit aussi étendu que son ouvrage. Nous nous bornerons à indiquer la
marche quil y a suivie.
Le point d'où part M. Roth est Texcessive et ridicule importance que
Fronton et ses contemporains attachoient à Tart de la parole, dans un
temps oïl cet art n avoit plus de véritafjle utilité, II en trouve la preuve
dans lesérudes minutieuses que ce rhéteur ijnposait à son illusire élève,
comme de rassembler des synonymes, de rechercher de vieux mots pour
les rajeunir, d ennoblir des tournures vulgaires, SiC, Des preuves plus
fortes encore s'offrent à M. Roth dans la colère où entre Fronton contre
Marc-Aurèle lorsqu'il voit ce prince plus avide de la gloire du philo-
sophe que de celle de forateur, dans ses critiques de quelques négti*
gences de style qui déparoient une harangue de fenipereur Autonin,
et dans les répriniandes un peu vives qu'il lui adresse à ce sujet. Des
souverains» ajoute M. Roth, qui agréent de pareilles remontrances et un
rhéteur qui leur prescrit de pareilks occupations, sont sans doute des phé-
nomènes assez extraordinaires; mais il n*est pas difficile de les expliquer.
Notre auteur en trouve la clef dans le système de duplicité sur lequel
Auguste éleva sa monarchie, Cet astucieux usurpateur, en liri:>ant l'an-
cienne constitution de l'Etat, en laissa subsister toutes les formes exté-
rieures, et féloquence fut naturellement appelée à soutenir l'illusion par
laquelle on vouloit fasciner les yeux d'un peuple asservi. Les délibé-
rations du sénat, les plaidoyers devant les juges, continuèrent , comme si
FAI 1820.
201
b fîberté eftt encore existé ; et Fart du rhéîeur devint d'autant plus nn-
portant) que, dans ces frivoles comédies, la véritable éloquence ne potîvoîf
entrer pour rien. Autrefois, on se préparoit par de petites actions ora-
toires i soutenir les actions les plus importantes: depuis Auguste, on se
prépara à jouer les grandes comédies en en répétant de petites, cest-à-
dire , par des déclamations sur des sujets imaginaires ou pris dans les
temps anciens. Les écoles se multiplièrent, et les maîtres fiirent mieux
payés» parce que, les influences naturelles manquant, i! fallut y suppléer
par une culture artificielle. Ce fut bien pis lorsque cette éloquence
nouvelle dut s*appliquerà Téloge des empereurs. Nul titre ne fut asse^'
pompeux pour ces princes; la langue s'usa et s*épuisa par lexagératinn^
et les hyperboles, dès les premiers siècles de notre ère; et voilh pourquoi'
Fronton et les autres tentèrent vainement de la rajeunir sous les Ajitonîns /j
en recourant aux archaïsmes , tant dans les phrases que dans les mots.
M. Roth rassemble ensuite les reproches que Thisioire a pu fîure au*]
gouvernement des empereurs qui régnèrent pendant ce siècle ; maïs cef;i*|
ne J'empêche pas de rendre justice à leurs vertus; ce nesi pas eux, cen*
plutôt le siècle même, qu'il accuse. Si Tempire parut jouir alors de'j
quelque bonheur, ce ne put être que par comparaison avec les mauxM
qu1l souffrit dans le siècle précédent et dans le suivant: il n'en est pas j
moins vrai que, dans cet âge d'or prétendu, la misère des peuples fut ]
extrême, M. Roth prouve, par des citations , que toutes les richesses de^l
lÉtat éioieni partagées entre vn petit nombre de familles, que les im-'j
pots étoient énormes et répartis injustement, que des corvées de toufe^
espèce écrasoient lagriculture et resireignoient la population, souvent'
éclaircie par des pestes et des famines. Cependant, ajoute notre aurcur, I
ce n est ni dans les vices de fadministration, ni dans les fléaux de la"
nature, qu il faut chercher les raisons d*un fait singulier qu'offre cette
époque de paix. La population n'y augmenta point; le monde romain*]
ne répara point les pertes qu'il avoit faites par tant de guerres éïran- '
gères et civiles. M. Roth établit ce fait sur les téinoignages des historrenîr ,
et en particulier fur un passage très-rémarqunble et très-décisif de''
Plutarque, dans son traité des OracUs qui ont cessé. Il cherche ensuite à
l'expliquer par des causes morales : selon lut, la servitude des peuples est
contraire à leur multiplication ; et toute nation qui , après atoîr joui de 1
la liberté, tombera dans la dépendance, sera frappée de stérilité.
Quelques exemples tirés de Hiistoire appuient cette opinion de M. Roth :
sans fadopier dans sa généralité, nous pensons du moins qu'elfe convient**
irès'bien au temps auquel il ra[>plique. Il fait voir que , dans le siècle^
des Antonins, il s'en falloit bien que les villes de fempire eussent
JOURNAL DES SAVANS.
conservé cette fibené municipale , dont on leur avoil laissé Fappa-
rence, et qui dédommageroii de la privaiion des autres » sr, au moment
où on les a perduesi on en perdoil aussi le souvenir. A cette époque,
fes gouverneurs de province s*irnmisçoient dans la police même des cités :
pour un grand nombre d affaires ils étoienc obligés de recourir à la
chancellerie impériale* Londres et Smyrne, Cadix et Cologne, ne pou-
voient bâtir ni murs, ni portes, ni aqueducs i sans une permission venue
deRome-Cependajit, tandis que cette centralisation des pouvoirs, si chère
à tous les genres de despotisme , fàisoit sentir plus vivement encore aux
peuples asservis la perte de leur liberté, tout contribuoit à entretenir la
mémoire de leurs brillantes époques. Ce nétoit pas seulement les livres
qui la perpétuoient pour les savans; elle étoit conservée aux peuples par
la continuation des anciens usages, par la céfébralion des anciennes
fties, par les noms toujours existans des anciennes institutions. La
Grèce avoit encore desamphictyons ; Athènes, un aréopage, et même un
polémarque, réduit, il est vrai, à finspection du marché aux blés. On
célébroiî encore Tanniversaire des iournéesde Marathon et de Leuctres; le
fouet éprouvoit encore la fermeté des enfans de Sparte, à Fautel de Diane
Orthia. Mais gardez-vous , s'écrioit Pluiarque, d'attacher aucune impor-
tance à ces souvenirs des temps anciens. Ne songez point à Marathon et
à Platée, mais à votre foiMesse^à votre nullité. Vous navez ni guerre à
faire, car la paix règne par-tout ; ni état à régler, car vous êie$ sujets. II
est ridicule à vous, petits comme vous êtes, de chercher à vous parer des
couronnes de vos pères; il est dangereux pour vous doser exprimer vos
senumens, au lieu de répéter ceux qu'on vous souffle; car vous ne seriez
pas corrigés par des huées et des sifflets comme de mauvais comédiens,
mais par la hache, le plus terrible des instituteurs^
Après avoir cité ces lignes de Plutarque , M. Roih termine à peu près
ainsi le tableau de la dégénération morale du monde romain à Tépoque
dont il s'agit : « C'est un fait honorable pour l'espèce humaine, que ce
>» dépérissement où on la voit tomber, lorsquelle languit dans un état
» d^oppression et d'humiliation qui ne lui permet point de résistance*
w L'énergie qui s'étoit jadis manifestée dans la vie politique de tant de
» peuples, ne tourna point au profit de la vie civile et dojuestique,
» lorsque la première s'éteignit, par leur incorporation au vaste empire
» des Césars. Ce qu'ils avoient de vigueur et de vertu disparut faute d'em-
» ploi ; il ne resta que les qualités opposées ... La maladie de ce siècle
» fut Ténervement; on la reconnoît à divers symptômes, mais sur-tout
1» à la multitude des jongleurs de toute espèce, devins, magiciens,
>» thaumaturges, et au crédit dont ils jouissoient* Ce fut eu vain que
MAI 1820.
1^3
» des hommes de toutes les provinces furent Adinis dans le sénat; que
>» Ton fit Yoyager des savans du mont Taurus aux bords de fa Tamise ;
o que Ton érablit des biblioihèqaes avec des sociétés savantes, des
» écoles publiques avec des professeurs soldés : ce fut en \nm que Ton
» s'occupa sans cesse à iouer, expliquer, commenter les anciens chefi.*
» d œuvre; le génie qui les avoit enfantés étoit éteint. Plus les con-
« noissances gagnèrent en étendue et en variété, plus elles se mulil-
» plièrent , et plus aussi lagénéraiîon devint frivole, superficielle, impuii-
» santé. De là vient qu*ellc ne produisit rien de grand, ni dans les sciences
» ni dans les arts de la parole : les esprits les plus éclairés passèrent leur vie
s> dans l'ennui, et la foule à d'oiseux divertissemens lorsque la fkm Jeper*
*> mettoit; car il existoit encore un attrait, un besohi impérieux, celui dt$
>i spectacles, également insatiable de pantomimes, de gladiateurs, de corn»
» bats de bétes. Fronton avoue que les maladies ne lempécheni point d y
» assister; il loue Trajan et Verus d'avoir fait venir à leurs camps en Asie
» des comédiens de Rome, et regarde comme une profonde politique le
»> soin que Ton prend des spectacles. On apprécioit la magnanimité d'un
n empereur par le nombre d*élëphanset de lions qu'il faisoit paroître, et
» Marc-Aurèle fut lui-même obligé de subir le foug de la coutume en
» fréquentant les jeux publics. Si l'on songe i quel point une pareille
>î manie de dissipation, commune k tous les états et à tous les âges,
» dut encore dégrader une génération dé)h corrompue , on ne s'étonnera
» plus qu'un Père de l'église (SalvienJ, ait regardé comme Tceuvre de
w fesprit malin les divertissemens dont cette manie se nourrissoit. »
C'est ici que M. Roth termine son esquisse du second siècle de notre
ère; peut-être a-l-il trop déprécié ses mérites, sur-tout dans ce qui
regarde les sciences et les lettres, puisque ce fut à cette époque que
vécurent Ptolémée et Lucien» Je doute qu'il ait exagéré de même les
vices de l'administration et les maux particuliers qui en sont la suite : la
dégradation morale et raftoiblissement politique qu'elle produit. Quoi
qu'if en sott, on peut au moins penser avec M. Rotli, que ce siècle a
été beaucoup trop loué , et qu'il dut en grande partie ces éloges aux
malheurs et à la corruption plus profonde encore du siècle qui le suivit. Au
reste, M, Roth conclut son discours en observant quedès-ïors croissoieni
et le chrîsiianisme dans l'intérieur de l'empire, et les nattons germaniques
sur ses confins. Ces nations, divisées en tribus nombreuses, ennemies de
toute monarchie universelle , et dévouées aux antiques races de feurs
princes, apportèrent un nouvel esprit de vie dans les états qu'effes
fondèrent sur les débris de Tempire romain: elles en confièrent l'édu-
cation et la culture au christianisme, qui, tout-à-la- fois plus sévère et
z64r JOURNAL DES SAVANS,
plus clément , plus sublime et plus populaire, plus rjnposant et plus
attrayant que toute la sagesse des païens, réunit fes peuples dans une
seule croyance, mais non sous lui seul souverain. Ainsi se forma la civi-
lisation moderne , plus susceptible de perfectionnement que l'ancienne,
et qui» loin d avoir a craindre une dégénération incurable, porte en elfe-
méme la faculté et [es moyens de se régénérer sans cesse par le retour
h ses premiers principes, et de sortir en quelque sorte rajeunie des crises
mêmes qui semblent fa mettre dans le plus grand danger*
Nous n'ajouterons rien à cette péroraison de M. Roth ; nous nous
bornerons ^ en finissant cet article, à nous joindre au vœu qu*il exprime
pour que le siècle dont nous venons de nous occuper, trouve enfin un
historien capable de Tapprécier avec impartialité et de le peindre avec
exactitude. Il nVst pas probable cependant que Ton puisse ajouter beau-
coup de faits historiques à ceux qui sont déjà connus ; les matériaux sont
en trop petit nombre : mais ils ne manqueroient pas pour le tableau
politique, philosophique et moral de cette époque ; et de tous les points
de vue sous lesquels Thistoire peut être considérée, celui-ci n'est pas le
moins important»
VANDERBOURG-
TESTAMENT DE LOUÎS X VI, Roi DE FrA NCE ET DE N A VARBE,
avec une traduction arabe par M. le baron Silvestre de Sacy.
Paris, de rimprîmerie royale; i vol. /Vï-^/
Lorsque, grâce au zèle infatigable des savans et laborieux coopéra-
leurs des travaux de la Société biblique, les saintes Écritures ont déjà
paru et parpis&ent encore tous les jours dans les innombrables idiomes
de rOrient, M. de Sacy ne pouvoit trouver une époque plus favorable
pour traduire dans une des langues les plus répandues chez ces peuples
un des monumens les plus éminemment religieux sortis de la plume
des hommes; écrit sublime, dans lequel respirent au plus haut degré
cette force dame, et en même temps cette admirable résignation que
la religion seule peut donner.
Qui ne seroît touché, dans tous les pays du monde» à moins de
participer à la férocité du tigre, des illustres infortunes d*un Roi assai-
sine par les mains de barbares qui n'avoient d'autre crime à lui reprocher
que l'excès de sa bonté !
Quel être , à la lecture de ces lignes angèliques , h moins qu'il ne
Ait entièretneut corrompu par tes désolantes doctrines de rathéisine^
MAI 1820, 2(S|
pourroîl ne pas se sentir entraîner vers xxne morale dont plus elle en
est imbtie, pJus l'ame se complaît en elle-même, parce que, toute en-
tière aux idées les plus élevées, elle se trouve de plus en plus digne de
$s^ céleste origine ! *
' Ce petit ouvrage de M, de Sacy , que nous pouvons regarder comme
une perfe enchâssée dans for de ses autres productions, peut donc
faire treaucoup de bien, s*il tombe sous des yeux dignes de le lîrer
et nous espérons qu'il en sera ainsi ; car, grâce au ciel, la vertu n'a
pas encore lout-a-faît aijandonné la terre.
Que devenir, si, dans le désert aride et sau mitre de la vie, i! ne
je rencontroît pas, de distance en distance, quelque source près de
laquelle fe voyageur altéré pût trouver fe se rafraîchir! Jfc seroit trop
artreux de songer à le traverser.
Que ces divines pages portent au loin la consolation dans les âmes;
quelles y fassent éclore le germe des venus : voilà quelle fut Tinteii-
lion de M, de Sacy en les reproduisant dans une langue parlée dans
une étendue de pays immense.
Maïs laiisojis-Ie lui-même nous développer sa pensée dans Taver-
tiisement qui précède son ouvrage, et qui mériterait bi>i d'être transcrit
en entier: ««En essayant, dit le vénérable traducteur, de faire passer
w ce chef-d'œuvre inimitable dans une des langues les plus répandues
î> parmi ks naiions de fOrient , je me suis propose de faire participer
» les chrétiens de ces contrées, et les infidèles eux-mêmes, aux nobles
y» seniimens qu il réveille dans le cceur de tout hotnme pour qui la vertu
» n'est pas un vain noju : j'ai pensé que les premiers, accablés sous uti
m jougetranger , y trouveroient utie source de consolations et de courage,
» et qu'il pourroit devenir pour les autres une précieuse semence de
î> foi, et contribuer à ouvrir leurs cœurs aux prédications des ministres
w de TEvangile* Si ce vœu de mon cœur étoît rempli, je me féliciterois
n dout.lemtnt d'avoir payé ce tribut de ma vénération à la mémoire
» du plus infortuné et du plus vertueux des rois. «
Ce n'est pas ici la première fois que M, de Sacy fait résonner Je
luth oriental [1). Déjà, dans la belle préfice arabe de son Kalïla n
Dlntna , et pfus mcemment dans fintroduction persane qui précède
son élégante édition du Paid-nauûh , il en a tiré des accords aussi richei
(1) Ctîte figure, qui, d'après notre manière devoir, ne sembîeroit pouvoir
être employée avec justesse quVn Pappliquam à la poL*sre , peut être' égale-
ment juste, en égard â fa prose élevée oes Orientaux , prose à-la-fois cadencée
ec rimée, et où ti y a même souvent plus de véritable poésie que dans téun
compositions en veri.
aétf
JOURNAL DES SAVANS,
que Taries; mais, dans ces deux compositions, libre de donner Tessof
à son imagination, il a pu laisser ses doigts errer à I aventure, tandis^
que, dans cette traduction, enchaîné par son original, et quel origi-
nal î . , • il a dû éprouver les plus grandes difficultés pour rendre, sans
s'écarter du génie de la langue arabe, cette simplicité de style, cette
noblesse d'expression, ce pathétique entraînant, qui font du Testament
de finfortuné Louis XVI un chef-d'œuvre accompli; et cependant if
nous semble qu'il y a réussi avec le plus rare bonheur.
Ajoutons que les amis des lettres orientales pourront voir d'avance
avec plaisir dans la forme élégante du double caractère arabe (ij qui
servi à Fimpression de cet ouvrage, un modèle de cj^Iui qu*ils re-
' trouveront dans Tédition du //<ir/rî, accompagné d'un ample et docte
I commentaire, rédigé particulièrement d après ceux de Charichi et de
Mûiariil, par M* Silvestre de Sacy, et dont la première feuille est
; sous presse en ce moment,
CHÉZY.
IApebçu céocnostique des Terbains » par B. H, de
Bonnard, ingénieur en chef au corps royal des mines ; un vol.
in-S/ de x66 pages, i8i^. A Paris, chez DétervîHe,
rue Hautefeuille, n.'' 8.
Nous avons rendu compte en i8r6, dans ce journal» d'un essai
[géognostique sur fErzgebirge ou sur les montagnes métalliftres de fa
{Saxe, par M, de Bonnard, Cet ouvrage n*avoii pour objet que la des^
rriptton détaillée d'un pays, sous les rapports de la minéralogie:
lujourd^hui nous allons faire connoftre un travail plus étendu du
lême auteur; c*est ujie classification des terrains, d'après les résultats
de ses voyages en France et en Allemagne, d'après ses observations
personnelles, et celles qu*if a pu y réunir. Les noms qu'il cite plus parti-
cultèrement, sont ceux de Dolomieu , de Humboldt, de Saussure, de
Cuvier» de Brogniart, de Wcrner^ de Brochart de Villiers, qui font
luioritéen pareille matière.
(i) Ceiontproprv'meni les caractères de* Medicis , qui ont servi aui édrtions
de ÏEuci'tde et de VAvktnne , mais reiouchts avec soin, et enrichis de quelques
nouveaux pointons. Le caractère de rEucIrdc sera employé pour le texie^ et
celui de rÂviccnne, pour le commentaire et les notes du Hariri,
MAI l8lO,
M. de Bonnard reproche aux anciens géologues des*ètre trop hâtés de
faire des systèmes, prétendant quils auroient du attendre quon eût un
plus grand nombre de faits, et les accusant de n avoir admis que ceux
qui s accordoient avec telle ou teHe théorie. Les géofogues ne sont pas
les sei-Is auxqueU on puisse faire un semblable reproche,
La géognosie considère le globe terrestre de deux manières : exté-
rieurement , elle en étudie la grandeur, la forme, l'aspect général et les
inégalités; les différens fluides qui lentourent, et leur action sur la
partie solide de son écorce : intérieurement, elle observe la nature» la
structure et la position absolue et relative des masses minérales, en
étendant ses observations depuis la cime des h^iuteurs les plus élevées ,
jusqu'aux plus grandes profondeurs ou Thomme puisse atteindre. Sous
ie premier point de vue, ia géognosie se lie à plusieurs autres sciences, ei
elle a sur-iout des rapports avec la géographie physique. Cette consr-
déraiioii n*est, pour ainsi dire, que préliniirtaire ou accessoire dans les
études géognostiqueSj dont fobjet essentiel est la considération intérieure
du globe , ou lobservation de la composition ou de la manière d'être
des dijfftrens giies de minéraux ^ qu'on distingue en généraux et en partî-
culierîi. Les premiers sont les masses les plus répandues et qu'on retrouve
dans diverses parties de la surface du globe , avec des caractères déter-
minés de composition et de gisement ; les seconds sont des masses moins
coJinues, qui se présentent isolées au milieu de gîtes généraux dont
elles diflerent par leur naiuré : ils sont souvent recherchés à cause det
minerais utiles qu'ils renferment; on leur dorme spécialement (e nom
é^ gîtes de mineratî. Les gîtes généraux peuvent être considérés comme
composant par leur ensemble la partie solide de la voûte du globe; oii
les nomme terrains : ceux-ci sont stratifiés ou divisés en couches » qo on
appelle roches. L'ensemble des terrains ou des couches ou des gîtes
quelconques de minéraux, qui paroissent avoir été formés en même
temps , constitue ce qu'on nomme en géognosie wne firmation, Teîle esr^
suivant M. de Bonnard, la distinction à établir dans l'acception dé ces
trois termes, que Ion a souvent confondus ensemble. Il résume cette
distinction en ajoutant: «Les terrains sont formés de roches et com-
>5 posent des fonnations; mais on applique aussi la désignation de
>ï formaiion à chaque terrain considéré dans [es diverses formations dont
w ils font partie. 3' L'auteur regarde les formations comme les <'//?^i:f/
giognos tiques» que Ton détermine par i étude et la connoissatice des terrains
et des roches ; il admet une nomenclature française de roches , proposée
par M, Brogniart.
hc% terriin$ sont divisés par les géologues en primordiaux ou pri-
lI a
4
n
ÏB JOURNAL DES SAVANS,
mitifi , siconàûires, d^alluvion et xolcamqua ; le plus grand nombre
d*entre eux, adopte aussi une classe de transition ou inttrmidiairc entre
\t^ primordiaux et les secondaires ; il y en a aussi qui reconnoissent une
Cilasse tertiaire entre ceux*ci et les terrains d'ai/uvion. Tout ce que contient
1 ouvrage de M. de fionnard, est rangé sous ces grandes divisions; il
partage encore en deux groupes distincts la classe des terrains secon-
dairist mais il fait observer que les caractères, assez faciles à saisir cjuand
il s agît de distinguer les terrains situés au milieu de chacune des classes,
disparoisseni presque entièrement lorsqu'on approche dune classe
voiiïîne.
Al, de Bonnard, en combinant continuellement les considérations
relatives à la nature des roches» avec celles qui dépendent du degré
d'anciiïnneté reiative des formations, présente le tableau des connois-
sances actuelles sur les terrains ; il s*attache principalement h suivre
dans chaque classe la trace des différentes séries, à y reconnoître les
relations que présentent les terrains de chaque série entre eux et avec
les terrains de4> auires séries; à déterminer ainsi pour chaque terrain les
formations dans lesquelles il se présente, et par conséquent les espèces
géognosliques qui! contribue à former i il tâche ensuite, dans un résumé
relatif à chaque classe, d'établir, d'après les faits indiqués pour tous ie%
terrains, IVrdre général des formations ou espèces , autant qu*il e^t connu
ou présumé. Ai. de Honnard assure que ce mode d exposition lui est à
peu près particulier. »•
Nous allons maintenaiit le suivre dans fapj'lication des principes dor^t
nous venoïïs de donner une idée; nous prendrons pour exemple la
,premièreclasse,à laquelle nous nous bornerons. Elle contient sept séries
L'auteur examine d abord les terrains de granit (première série),
qu'il range en trois formations générales; il fait remarquer que les hautes
inoniagnes granitiques paroîssent appartenir plutôt aux secondes et
troisièmes formations qu'à la première.
Il passe successivement aux six autres séries. La micacée cotnprend
les terrains primordiaux le plus universellement répandus, tels que les
gneiss, ïe^ micaschistes, et les phylfades ou schistes. Le terrain de schiste
iouvent ne présente plus de caractères de précipitation chimique. M
arrive d'une manière inscnsinle aux schistes des terrains intermédiaires.
Dans fexamen de ceux de la série feldspathique , il appelle Taitention
surir yresetles pycn!te$,qui embarrassent les géologues, à raison
des K ^ ^ ^ qu'ils présentent avec des ti-rrains semblables des; classes
suivantes , ou avec des terrains qui sont regardés comme volcaniques.
L'auteur insiste particulièrement sur les analogies intéressantes
MAI fSiO. ^^^H 26$
['•ïu'offre la lérîe talqueuse avec les faits ofFerts pines séries feld*
spathique et micacée, analogie qui semble souvent correspondre à
celles qui lient coinîne espèces mînéralogrques le talc et fe mîcaî il
► fait remarquer, par exemple, que les diverses variétés ftidspathiques.
quartzeuses et tafqueuses du stea schiste ou schiste talqueux, lesquels
répondent aux gntî:5S5 mica schiste et phylhide des terrains micacés,
ont entre elles les mêmes relations de giseiiiens que les divers gisemens
des porphyres, correspondance qui est en rapport avec la ressemblance
qui se remarque dans la structure de ces roches, &c.
Dans la série quartzeuse et amphibolique» on ne connoît que des
terrains subordonnés aux terrains micacés , talqueux et feldspaihiques.
Enfin la série calcaire pn roi t se composer aussi, dans h première classe,
plutôt d'une suite de membres subordonnés aux forTiiations micacées,
que de masses minérales indépendantes. Ces terrains de calcaire
pur ou mélangé de mica ou de talc se présentent seniblables les uns
aux autres, dans toute fa période primordiale.
Telles sont les séries des terrains, dont M. de Bonnard indique
lexistence dans la première classe, et pour chacun desquels il fait corif
noître les caractères qui lui sont propres. Rapprochant ensuite dans un
résumé les faits exposés pour les différentes séries, tl cherche à déterr
miner un ordre général d'ancienneté pour hi formûtlons ou les espèces
géognojthjues que la classe renferme. A la fin de son résumé, il revi«;iu
sur les incertitudes qui existent relativement i la priinordiatité réelle
dwne pâi'tiedes terrains ainsi classés, et aux caractères qui servnentà les
distinguer géognosiiquement les uns de? autres, ainsi que de ceux de fa
classe suiva/ite. « Plus on examine , dit-il, plus on doute qu'if y ait en
3/> géognosie des classes bien séparées, des espèces bien déterminées , plus
» on pense quît faut se borner à faire connoître, pour faciliter fétude des
>» terrains, cerLiins types autour desquels on doit grouper ce qui en
y» diffère le moins, en indiquant ensuite, et seulement comme probable»
» une place pour chaque groupe dans la grande série de5î formations
» minérales, iSiC, »
Nous teniiinerons ici Tex trait d'un ouvrage qui nous paroft digne d m-
îéresser ceux qui se livrent à féiude de fa mijiérsiogîe* U vippose dans
son auteur des connoissances approfondies dans une science qui est
encore loin du but où elle pourra atteindre- Des commissaires de laça-
déiTvie des sciences ( MM. Leiièvre et Brogniart) en ont porté un fuge-
nient favorable; ils ont déclaré « qu on y trouve dans l>eaucoup départies
y* un ordre de classification propre à Fauteur, des rapproclienicns nou-
n
A>o JOURNAL DES SAVANS.
19 veaux » des observations judicieuses » des discussions Savantes et ont
» saine critique. »
TESSIER.
NIKHTA2 Err£NEIAN02 ICAl' KONSTANTfNOX MANA2XH 2 :
Nkeia Eugetùam narraîionem amaîoriam et Cottstantini Ma-
nassîs frajj^menta edidit , verîit nique nous tnstruxiî Jo, Fr*
Boissoriade» Parisiis, excudebat A* Bobée» i8ip, % voL
Le poème ou plutôt le roman des Amours de Drosille et Chariclès,
par Nîcétas Eugénianus , quoiqu'encore inédit, étoit connu par des
fragfiiens pubtiés dans les noies de Vilfoison sur Longus, dans les pro*
ïégomènes de M. Coray sur Héliodure, sur-tout dans la notice dé-
taillée qui fait partie du tome VI des Notices des Manuscrits : mais
il faut convenir qu'il ne fouissoit pas d'une très-bonne réputation,
M, de Villoison déclaroit l'auteur ^^/rr^/wx loquax et hepti vcrhsus ;
il jugeoit son ouvrage absurde , détestable , indigne de voir le jour*
M, Coray n'est guère pfus favorable à Nicétas: <c De tels poèmes, dît
»• ce profond critique I ont été inspirés sans doute, non par Apollon p
i> le dieu du four, mars par quefque génie de ténèbres. «>
M. Boissonade ne s'est pas cru obligé, en sa qualité d'éditeur, de
prendœ la défense de Nicétas; il ne réclame nullement contre les cri-
tiques rigoureuses, mais justes, dont Nicétas a été YoUjei, Nm sum,
dit-il dans sa préface, menfe adeo exsens a, ut non bene intelligam quam
fit msubidus ûtque plenus ivAp^thain; quantum ejus narrationes à poeticâ
facultûte abhoneant , dïctu profatuque tpso insuaves; quàm cêactit ac
rancidis vôcum ^ctionibus linguam avitam dedecoret ; quam sit ineptus
imttûtor, ita ut mala fûciat qum in antiqulmbus scriptoribus sunt admo^
dum quàm bona ; nec sum adeo candidus patiim, ut ejus vitia, qua jam
me nema meliùi novit, velim dissimularr.
On voit que M. Boissonade n est guère moins sévère à Têtard de
Nîcétas que MM* de VîHoison et Coray; seuiemeni il pense, avec
MM. Lévesque %x Cliardon de la Rochette, que les défauts d*un tel
DUYrage ne sont pas une raison de ne jamais lé publier. En eflt^t, ries
n'est à négliger dans fa littérature grecque ; même chez les écrivains
des bas temps de fa grécilé, on trouve des expressions* des locutions,
MAI 1810.
aji
es idées, des traits puisés k des sources anciennes tt qui peuvent servir
à éclaircir les auteurs classiques; pour s'en convaincre, il suffit de
réfléchir à tout ce que les commentateurs rfEumathîus , d'Aristénèie , de
Chariton , &c, ont tiré de ces écrivains médiocres pour éclaircir et
enrichir l'histoire de la langue grecque.
Nous croyons superflu d'entrer ici dans l*analyse du poème ou du
roman de Nice tas , et d'en présenter à nos lecteurs les morceaux les plus
saillans; nous ne pourrions que répéter ce quils trouveront avec plus
de détails dans la notice très-judicieusement rédigée par M. Lévesque,
et qui fait partie du sixième volume des Notices des Manuscrits (p. 22 j^
2p): il nous suffira de rappeler ici que Nicétas a composé son ou-
vrage dajis le XI J/ siècle, à Timitaiion de celui de Théodore Prodrome;
que ce poème est divisé en neuf chants, qui contiennent en tout trois
mille cinq cent trente-huit vers ; qu'il est écrit en vers ïambiques poli*
liques.
Le premier volume de cette édiiion coniient le texte de Nicétas
imprimé sur un mamiscrit de la Bibliothèque royale, et sur une copie
du manuscrit de la bibliothèque de Saint-Marc; cette copie avoit été
envoyée par le savant abbé Morelli à M. Chardon la Rochette, qui se
proposoit de publier l'ouvrage de Nicétas: après la mort de cet habile
helléniste» elle fut communiquée par M. de Sacy à M. Boissonade,
Le texte de Nicétas, accompagné de la version latine en regard, est
suivi des extraits de Constantin Manassès» également traduits en tarin
par M* Boissonade. Ces extraits, dont l'auteur est un certain Mncaire
Chrysocéphale, sont tout ce qui nous reste du roman de Constantin
Manassès ; ifs se composent de pensées et de sentences détachées ,
quelquefois justes , le plus souvent communes, exprimées dans un style
qui manque rarement d'être médiocre, toutes les fois qu'il n'est pas
décidément mauvais.
Le second volume contient le commentaire sur Nicétas et Cons-
tantin Manassès; commentaire excellent, plein d'une critique ingénieuse,
et qui atteste, comme tous les autres écrits de Fauteur en ce genre , une
étude profonde et étendue, non-seulement des auteurs anciem, mais
des auteurs classiques des principales nations de rEurope, Le poème de
Nicétas Eugénianus, s'il eût été publié par un éditeur moins habife,
n'eût peut-être attiré Tattention de personne; mais, grâce à ce com-
mentaire, i! n'est aucun helléniste qui puisse se dispenser de joinfire fe
Nicétas à sa collection philologique.
Dans sa préface, M. Boissonade cherche à se df:fendre du reproche
que lui ont fait plusieurs fois ses arais, d*ajmer îi répandre les richesses
xjz JOURNAL DES SAVANS,
*desa rare érudition sur des auteurs grecs du second i du troisième et ^
peut-être du dernier ordre, au lieu de feinployer comme les Heynei
les Curay , (es Wolif ^ fes Schaefer, à éclaircir les auteurs classiques ; sftj
prirrapale excuse, c'est qu il ne croit pas posséder assez de sagacité etj
de savoir pour entreprendre avec succès de [pareils travaux : Sed illos^
, idere nolo, quod non sat/s in me esse critici acuminis et doctrinœ inwUfgoA
'i/f liill consilio par esse qutnm. M, Bors^onade nous permettra de dire
qu'on ne se paiera point dune telle excuse, que tnéme, selon toute i
^tpparence, on la trouvera fort mauvaise, et que ses amis continueront J
à deairer qu'il attache son nom à quelque auteur du premier ordre. Cen
qui ont lu les éditions qull a données successivement, et son iravaif]
précieux sur les lettres du faux Diogène (i), ou seulement qui ont]
, assisté au cours de langue grecque que cet habile professeur donne à!
Ma faculté des lettres de Paris, savent qu'il n*y a personne en FrancM
et qu on trouvf roit diflkilemejit d:ini réiranger on savant plus eji éiall
que lui d'apporter à l'édition d*un auteur classique toutes les qualités l
dont la réunion est si rare, un grand sens, une vaste lecture, un«1
critique sûre et ingénieuse*
LETRONNE.
AMBÎTi BBN-KeLTHVM TaGLEBITj£ MOAILAKAM , Ah:î dhd
iilla el Hossein ben Achmed Essuscrii scholih illustratam , et
vjttim Amrui ben-Kelthûm è libro Kiiâb el Agluhii excerptam ,
è codicihus Parisiensibus edidit , in hnhmm îraustuHt, nota s que
ûdjecit Joan. Gothofr. Ludov. Kosegarten, AA. LL^ M.
Plu D. linguar. orient, in univers* liter. fenens, P, P. On
lenae, i8rj>.
Lorsque nous rendîmes compte dans ce Journal (année t8i7%
p, lyS et suiw) du poème d'An tara» 'publié en arabe et en latin par
AU Ménil, nous annonçâmes la prochaine publication de celui d'Amrou
ben Kelthoum, qui, comme le précédent, occupe une place dans le
recueil des Moallakas, Depuis celte époque, M. Kosegarten, au nom
duquel nous avions en quefque sorte pris cet engagement, a été appelé
à professer les langues orientales en Tuniversité d'Iéna, et c'est dani
(i) Notices des Manuscrits, totn, X,
t II
I
MAI 1820.
Vi
cette ville qu'il vient de le remplir , d*une manière qui justifie pleinement
l'espérance que nous avions conçue. Ayant parlé, à Toccasion du poème
d'Antara, et de la poésie arabe en général, et des Moallakas en partir
culier, nous devons nuus borner aujourd'hui à faire connoître le iravaj|
de M, Koîitfgarten* ,
Ce volume se divise naturellement, en deux parties. L'une, de } i pageS)
aisufettie à la marche de (écriture arabe, contient d'abord une notice
biographique du poète Amrou ben-Keiihoum, extraite du recueil célèbre
intitulé KHal/ alaghani ; pui» le poème, avec les gloses de Zouicni^
placées k la suite de chaque vers : le texte seul du poème est imprim^
avec les voyelles. La deuxième partie» outre une préface, contient» en
72 pages, i.*" la traduction de fanicle extrait du Ifitûb alaghani;
aJ" celle de la Moallaka et des gloses de Zouzéni ; J-"* les notes de
i éditeur, tant sur la vie du poète que sur le texte du poème et des
scholies; 4** uti^ traduction eu vers allemands non rimes de cette
Moallaka.
La Moallaka d' Amrou a paru à plusieurs critiques avoir une liaison
plus ou moins directe avec un trait remarquable de la vie de ce poète,
traitqui,d'ailleurs> peut donner une idée du caractère noble, mais féroce,
des tribus arabes de la Mésopotamie un peu avant Mahomet, et que,
par cette raison, nous croyons devoir rapporter,
Amrou, qui, par son père, étoît d'une famille illustre, tenoît encore
une illustration plus grande de sa mère LtVla, qui étoit fille du célèbre
Mohalhel, frère de Colaïb. J ai parlé ailleurs de ces guerriers et de leurs
aventures; mais tl suffit, pour avoir une idée de la gloire attachée à
leur nom, de se rappeler que les Arabes disent proverbialement plux
ïîlustrt que Cof aï i : aussi Amrou, âgé à peine de quinze ans, étoit-il
déjà le chef de sa tribu.
Cependant les rois arabes de Hira exerçoient une sorte de souveraineté
sur les tribus répandues dans les piaijies de la Mésopotamie. Amrou ben-
Hind, qui régnoit alors, se vantant un jour de fa noblesse de son origine f
dit à ceux qui reniouroient : « Est-il un seul des princes arabes dont
» la mère se refusât à servir la mienne î ~ Sans doute , lui répondit-on;
nh mère d' Amrou ben-KelthouJu ne conseniira jamais à cela. ^ — PoHr
» quelle raison! reprit le roi* — Parce qu'elle a pour père Mohalhel fils
» de Kébia,et pour oncle paternel Colaïb descendajit de Wayel, les deuK
n hommes les plus illustres entre les Arabes; que son mari est Kelthoum,
» le meilleur cavalit^r de sa nation ; et que son fils est Aiiirou , le prince
j> de sa tribu» >' Le roi de Hira, piqué de ce discours, résolut d obtenir
de la mère d*Amrou ce qu'elle devoît, disoit-oi) , lui refuser- 11 fit
Mm
^ JOURNAL DES SAVANS,
fMMer Amrou-ben Kelthoum à venir [e voir, et le pria de déterminer
$% «1^ ' raccompagner. Le prince deTagleb^ c*étoît h tribu d'Arnrou^
itic rrndît h, Hîra avec un nojnbreux cortège ; sa mère LèÏÏa y vint aussi;
accompagnée de beaucoup de femmes de sa tribu, Amrou ben-Hind fit
dresser, pour les recevoir, ses tentes dans une plaine entre la viife de
Hrra et TEupHrate , et sy rendît accompagné de sa mère et de tôuie sa
cour* Le fifs de Kelthoum , et tous ceux qui Tavoient suivi , s'y rendirent
aussi pour faire [eur cour au roi. Amrou ben- Kelthoum fut admis dans
la tente du roi, etLeïb entra avec Hind, mère du roi, dans un pavillon
qui é toit à coté de cefui de ce prince: ces deux femmes étoient liées
par fes liens du sang. La mère du roi devoit, par ses ordres, saisir Tins-
tant oti il auroit fait servir fe dessert et renvoyé les esclaves, pour dc-
maiiderà Leïla de lui rendre quelque service. Au moment convenu, fa
mère du roi dit à celfe d'Amrou : « Leïla, présentez-moi ce plat. — Que
3» celle, dit Leïla» qui veut être servie, se serve elle-même. —Hind
y> insistant et réitérant sa demande, Leïla s'écria : Jour d'opprobre* &
33 fainille de Tagleb î» Amrou ben-Ke!thoum , qui mangeoît avec le
roi , entendant les cris de sa mère , rougit de honte et de colère ; ce que
voyant le roi, if prévit que quelque grand malheur alloit arriver* A
rînstant même le fils de Kelthoum se leva de table , prit une épée qui é(oit
suspendue dans la tente du roi, et lui coupa la tête. Tous les Arabes de
Tagleb aussitôt pillèrent les tentes du roi, s'emparèrent 4es chameaux^
tv$c hâtèrent de regagner leurs habitations.
Quoique quelques vers du poème d' Amrou présentent des allusions
à cet événement, fe pense cependant qu'on suppose à tort qu'il a été
composé îi cette occasion. Je suis plus porté même à croire qu il avoit
été récité dans une autre circonstance devant le roî de Hira, Amrou ben-
Hind, et que les vers qui semblent foire allusion h la vengeance que
notre poète prit de ce prince , y auront été ajoutés après coup i on
pourroit même révoquer en doute ta réiKté de ces allusions.
* La Vie d'Anirou ben-Kehhoum , que M. Ko^egarten a tirée du Kifûi
Hfffgfjant, et qu'il a publiée a\*ec une iraduciton latine, oflVe plusieurs
difficoftés , spécialement à cause du grand nombre de vers qui y sont
dïés. iramVe très* fréquemment qu'on ne sait qutri sens donner à ces
rers aînfi isolés i dont parfois méïne on ignore le sujet. Asser souvent
aussi le texte en a été altéré par les copiâtes, qui n'entendoieni point
cfe qu'ils écrivofent : réditeiir en fait l*obser%iH}cn à la fin de sa préface.
J^ hasarderai une conjecture pour corriger un vers oii Ton ne peut
douter que le copiste n*ait fait quelque ftiute, parce qu'on ne sauroit /e
Kander tel qu'il est.
MAI 1820- 27Î
/auteur raconte que Leïla, mère de notre poète, éunt enceinte de
lai, vit pendant son sommeil un personnage qiiî lui annonça la future
grandeur du fils qu'elle portoit.
Vti an après la naissance de I enfant, le même personnage lui apparut
de nouveau , ei (ui dit que son fîJs Amrou répondroit par sa bravoure
k la noblesse de son origine , et gouverneroit à fâge de quinze ans sa
tribu. Cette prédiction est exprimée en cinq vers. Le troisième de ces vers
se lit ainsi dans les manuscrits: ^^VJ cvjox c->bl j^^^ , ce que 1 éditeur
traduit de celte manière, VU'tis CArtnSp pradhui vobon, en avertissant
dans une note que le texte lui paroît altéré ^ et qu'il change tjjb!>oU^
en ti>fjJt^^Uj. Je doute que le texte ainsi corrigé ait le sens que lut
donne 1 éditeur, et même qu'il ail aucun sens; et je propose de lire
<^îoJI j^Uj bitn propùrtîçnni d^ns faute sa personne.
Je corrigerai aussi par occasion quelques autres passages de la Ira*
duction de cette même Vie. ^
{Pag. 4, /l^ne ij.J Les mots oJUj ss^ ^^ ^^ J jJ oJLïfj sigai*
fient, «cLeïla arriva aussi avec une troupe de femmes delà tribu des
1» Uénou-Tagleb » , et non pas, etlam Léila cum TagUbhurum piUnits
accasii, ^mià est le pluriel de ^m^» qui signifie d abord une voy/rgeuset
et ensuite, d'une manière générale, une femme; et c est ainsi que Zouséi^i
explique ce mol dans sa glose sur le neuvième vers de la Moallaka
d* Amrou: « On appelle, dit-il, une femme iU^, /ors même quelle est
a» dans sa maisùnia; c>aJI j j^^ ( p^g* ^^» l^g^^ ^)^ Ce passage na pa^
non plus été bien entendu par M, Kosegarten , qui, trompé par le doubif
t^\\% du mot 4;>o , a traduit ; ûtque ita in venu auctoris.
(Pag. 4t ligne j.) Dans ce passage, v^U-JÇ? ^Vi fj, on a réuni des
mots qui devroient être séparés ; il faut rétablir le texte ainsi : 4,>JUj* jLi ,
Dans les manuscrits anciens et dans les manuscrits africains, on trouve
souvent JU pour Jl L> ^j^^, pourj^f l^ > &c,
Pag, 6 , ligne 9 , de la traduction , on lit une réponse d' Amrou ben-
Kehhoum à un autre chef arabe nommé aussi Amrou. Notre poète avoit
commencé par le braver, en lui deinandant pourquoî la troupe qu'il
commandoit, parorssoit éviter de se mesurer avec la sienne. Ce chef lui
avoît répondu que jamais sa tribu n'avoit réveillé la guerre endormie, uns
y trouver une augmentation de gloire et de puissance* J-efils de Kelthouiii
lui répliqua : Jt aIj j_jfj a)^( U^ 3>^] ^[^ ^ l^y ^U ^Ubl
'^' t-i^'^ ^-^ a*-^y » cesl-à-dire, « Si je les réveille, ce réveil strtk
. » pour eux ui\ sommeil quaucun rêve n interrompra ; un smmeil oi
Mm a
f ai: DES SAVANS,
lîfexiîq^eraî jusqu'à leurs racines, et je baiinirai leurs restes fugiiif*
» dans un désert aride et nu, dans une solitude où ils ne trouveront que
>> des ciiernes épuisées. » Ce passage n'a pas été compris par Tédiieur,
qui fa rendu ainsi : Excitare e&s e somrto ab humanîmtt nlîenum asit ;
nam evellerem ta radiées corum ; nasus mtus ecs ahtgit in arida dacrta ci
ad ex fiûùstôs fontes*
La traduction latine que M* Kosegarten a jointe au texte du poème
d*Amrou , paroîtra à peine intelligible aux personnes qui ne pourront
point la comparer avec le texte, et nous conseillons à cette classe de
lecteurs de recourir à la traduction allemande. Cette version latine, au
contraire, sera d*une très-grajide utilité aux jeunes orieniaiisies, auxquels
cet ouvrngeeK particulièrement destiné: ils pourront suivre dans celle
yersion le texte arabe presque mot pour mot ; et i aidés des gloses arabes
de Zouzénî, et de la traduction de ces mêmes gloses, ils seront ^ même
de se rendre compte de chaque expression en particulier, de Tensemble
du sens, et A^t figures hardies employées par le poète. Nous ne voulons
pas dire par-là quil ne soit échappé aucune méprise à I*éditeur dans
fa traduction du poème et des gloses ; nous en avons remarqué
quelques-unes, mais en très-petit nombre > et en général d'assez peu
d'importance.
Nous n'nnalyserons point la Moallaka d'Amrou : elle comprend,
comme tous les poèmes arabes de ce genre, divers tableaux associés
moins par leur nature que par une sorte de convention ; toutefois le
poème entier a un but bien marqué, c'est de relever la gloire des des-
cendans de Tagleb, de ra[>peler les héros auxquels cette tribu a donné
le jour, de protester contre Tinjusie mépris de s^es rivaux, et de reven-
diquer le rang. qui lui nppariient entre toutes les tribus arabes. Une
fierlé poussée jusque Tenthoiisiasme, une sorte de rudesse et de brutalité
dans les sentimens et dans les expressions, des figures plus que hardies,
des ircn^itions brusques et que rien n'adoucit , quelques pensées sublimes
et ret^dues avec une noble simpliciié, tels sont les caractères de ce
poème, dont je vais ofîrir divers passages, sans prétendre atteindre à
ia concision et au grandiose de Toriginal.
*4 Ne te hâte point, dit Amrou, en s*adressant au roi de Hira, de
a» prononcer un jugement contre nous ; attends un moment, et nous
m t'apprendrons que nos étendards, qui sont d'une blancheur éclatante
; » quand nous marchons au combat , n en reviennent jamais sans élie
» ttint^ du sang dont ncus les avons abreuvés. Nous te rappellerons ces
,» }ouri ées longues et glorieuses, où nous avons réiisté à la puissante
' » d'un ici, et ttï\x%é de plier la lête sous le joug. Nous le retracerons
m
MAI. iBzo. 277
n le souvenir de ces princes doni la tête étoîl ceinte du diadème , qtiî
>» étoient le refuge et l'appui des opprimés : nous les avons étendus sur
5> la poussière, et nos chevaux sont demeurés tranquilles auprès de leurs
» cadavres , la bride sur le cou et un pied dans les entraves. »
Les motsl^^l «lOUl», que j*ai rendus par ta bridi sur k cou , n'ont pas
sans doute ère bien compris par le traducteur, qui les a rendus par
hsirucios hahcnis. L'expression arabe est tout-à-farl analogue à cclltrdont
nous nous servons en français.
« n n est, dit- il plus loin, aucune nation qui puisse se souvenir de nous
savoir vus donner des marques de foiblesse ou de Lkheté, Que per-
^ sonne ne s élève follement contre nous ^ de peur que nous ne répondions
» à une telle folie par une folie encore plus grande! Par quel caprice,
« Amrou fils de Hind, prêterois-tu roreiHe à nos détracteurs, et nous
» croîrois*tu dignes de tes mépris l Par quelle fantaisie voudroîs-tu que
>» nous obéissions à ceux qu'il te plairoit de nous donner pour maîtres !
^> Tu nous menaces, et tu prétends nous épouvanter! De grâce, suspends
« un peu ton ardeur. Quand avons- nous été» dis- le nous, les esclaves
>î de ta mère î * • . As-tu donc jamais ouï dire que, dans les temps passés ^
?> D/oschain fils de Becr ait éprouvé quelque défaite ! Nous avons hérité
^> de la renommée d'AIkama» fils de Seif, qui a soumis à notre domioa-
» lion les citadelles de la gloire. C'est moi qui ai hérité de MohailicI,
^ et de Zoheïr , pïus illu.stre que Moïialhel ; trésor précieux et digne
»d*eoviel Héritiers d*Attab, de Kelihoum , c'est d'eux que nous avons
» recueilli le patrimoine des héros les plus généreux. Le nom de Dhou1-
3> bora^dont tu as entendu raconter les exploits, estpournous unrejnpart
yy assuré f et, à Fabri de ce nojn , nous défendons les opprimés. De nous
» est sorti avant lui Colaïb, fameux par son agilité dans la course* Quel
35 est le genre de gloire dont nous ne nous soyons emparés!»
Ailleurs il dit : « A noire suite marchent nos compagnes, dont la
» blancheur égale la beauté ; nous veillons siu* elles , pour les préseï ver
>y par notre bravoure de devenir le partage de Tennemi, ou d'être ex*
» posées à aucune honte. Elles ont exigé de leurs époux qu'ifs leur
» promissent avec serment qu'au jour où ils rencontreroient les esca-
>> drons ennemis, ils enfeveroient les chevaux et les femmes, et
3> emmeneroîent les guerriers enchaînés. . . Elfes présentent la nourriture
» \ nos coursiers , et déclarent qu*eHes cesseront de nous reconnoître
« pour leurs époux, si nous ne les protégeons point contre les dangers;
35 filles de Djoçcham fils de Becr, elles uitissent à la beauté et à la vertu
^> une origine illustre, n
i^ JOURNAL DES SAVANS,
Enfin le poème se termine par ces vers : «< Toutes les tribus descen-
« dues de Maad savent qu au |our oit leurs pavilfuns sont dressés dans
*» les vallées, nous exerçons rhosphali té autant qu^ilesien noire pouvoir,
» et nous exterminons ceux qui provoquent notre vengeance. Nous nous
>• réservons les pâturages que nous voulons choisir, et nous fixons notre
» demeure par-tout où il nous ptaît. Nous refusons les dons de ceux qui
*> se sont attiré notre coière , et nous agréons les oUrandes de ceux qui
y* ont mérité notre bienveillance. Celui qui nous oLtît trouve près de
» nous un asile assuré, et les rebelles reçoivent de nous la punition due
» à leur résistance. Les eaux pures des citernes serv^ent h notre boisson ;
*> et après que nous les avons troublées, les autres s'y désaJièrent. . . .
» Nous avons rempli la terre, et elle est trop étroite pour nous; nos vaîs-
» seaux couvrent la surface de la mer. Le tnonde est îi nous, et loui ceux
» qui fhabitent ; et lorsque nous déployons notre puissance» c*est avec
» une force à laquelle rien ne peut résister- A peine nos enfâns sont- ils
« retirés de la mamelle, et déjà les héros se prosternent en leur
>' présence. >j
A ces morceaux choisis ajoutons quelques passages qui offrent des
idées terribles, ou des sentence^* remarquaLfes par un sens profond.
Les Arabes comparent habituellement la guerre à une meule, et disent
figurément /a meule de la guerre, Amrou s'empare de cette idée, eî dit :
« Lorsque nous transportons notre méuIe chez un peuple, ils nVn
>i approchent pas plutôt, qu*tls sont moulus sous son poids. Les con-
*» trées orientales de Nedjd sont le drap qui reçoit la farine, et tous
« les enftns de Kodhaa le grain dont nous remplissons le trou de la
« meule supérieure. >• Pour bien saisir cette figure, il faut se représenter
le moulin portatif des Arabes, qui, pour empêcher que la ftrîne ne tombe
par terre et ne se mêle avec des ordures, étendent un drap sous la
meule j et pour saisir toute la force de rexpre>sion, if fimt remarquer
qu'un seul mot exprime ce que je suis obligé de rendre par \me péri-
pi vra se, JUu le drap qui rcfoit Ij farine ; ^yJ le grain rfoni vn remplit te
trou de la meute supérieure (i). Cts deux vers, dans rorîgînaL sont ad-
mirables par la grandeur de la figure, la force et la conci ion dt l'ex-
pression. M, Kosegarien, ne s'étaiit pas aperçu que KoJhaa étoit le nom
dune tribu, a tout-à-fait altéré le sens du second vers.
(l) En traduisant ailleurs ce mcnif passage, jai snbsôïut* U tlutmu ni la
ifimie Au% deux idées de roriginal; mais cçtte sorte de lub^litution aTinconv.-
nicni d'âlicrcr la figure et OC détruire l'analogie àc iputçi les pnies dont
rcnsembic se compose.
MAI 1820,
279
Je n*a[ine pas autant la figure qu'on remarque dans les vers suivans;
iiidis je dois avouer qu'elle perd beaucoup dans une traduclioni qui est
nécessairement une sorte de paraphrase ;
«Avant toi, Ajnrou, nos lances ont refusé de fléchir devant nos
» ennemis > faiigués de leurs inutiles efforts : elles se révollent contre
» fe fer qui veut les dresser; inflexibles, intraitables, elles échappent
»à son tratichanl acéré; en se soustrajrant avec rofdeur à ses efforts,
j» elles font reienrir Tair d'un sifflement aigu; et blessant l'homme qui
j> vouloii leur faire violence, elles ijnpriment une trace sanglante sur
3» son front et sur la partie opposée de sa tête, «
Un vers remarquable est celui où le poète exprime rinévitable né-
cessité de mourir à Theure fixée par les destinées. Je rendrai ce vers
en latin, pour pouvoir imiter la construction et la précision de foriginal.
L
U »jj^ LiL-Àil U^jtNJ" ijj^ lit
Nos uil^ue mf âssequenmr faia ^ daûnata nùbh, nos destlnatoS.
Cette idée de finévitable destin, qui a disposé d'avance et h notre
insu des jours de notre vie, est rendue encore admirablement dans ce
Yer3 :
Dus hesternus , n hodiemus, tt qui hcstirnum seçuerar, opptgnerati sunt
feius quas ignoras.
Je pourrois encore ajouter quelques citations ; mais }e craînJroîs de
trop prolonger celte notice : je dirai seulement que le poème d'Ainrou
fit long-temps fes délices des Arabes de la tribu de Tagfeb, qu'il étoit
sans cesse à la bouche des vieillards et des jeunes gens, à tel point,
qu'un poète de la tribu rivale, les descendans de Becr, leur en fit un
reproche dans ces vers ; « Le poème d'Amrou ben-Kelthoum , en exaï-
y» tant l'orgueil des enfens de Tagleb, a éteint chez eux tout sentiment
» de générosité; ils ne cessent de le réciter depuis le temps où Amrou
» a^été h leur tète. Quel poème que celui dont jamais on ne se lasse! *>
Les notes de M. Kosegarten offrent des retnarques et des citations
d*un grand intérêt, et l'on regrette seulement qu'il n'ait i>as pu leur
donner plus d'étendue. Je n'en indiquerai qu'une seule, qui con«ienf
tn passage tiré d'un manuscrit des Moallakas, qui appartient à la biblio-
thèque du duc de Saxe-Gotha. Suivant fauteur de cette note, et les
autorités sur lesquelles il s'appuie, les sept poèmes nommés Moaliûkat^
c'est-à-dire, suspendus, n'auraient jamais été, comme on le croît com-
munément, suspendus dans le temple de la Caaba; ce nom leur vien-
droit de ce que k\ Arabes ^ quand ils entendoient réciter un beau poéme^
JOURNAL DES SAVANS,
s'écrioiem »yJU ûttacAei^U, c'est-h-dire t gravri-U dans votre mimûire.
Je ne veux point décider quelle confiance juértte cette opinion; mai»
M. Kosegarten a bien fait de publier ce texte important.
Nous fijiissons en répétant que cet ouvrage fait beaucoup cThonneur
au jeune professeur d'iéna, et confirme Tidée que nous nous éiion»
formée, il y a Iong*temps, de son talent, et de la solidité de ses con*
noi^sances dans la langue et la fittét-alure de TOrient.
SILVESTRE DE SACY,
Histoire de i Empire de Russie par M. Karamsiji ,
/m^z//7^/7^r yi/i4/. Saint-Thomas r/ Jauffret* Paris, impri-
merie de Belin , 1 8 1 ^ , tomes lil et I V , 4 i o et 4 5 ^ P^g^^
/Vi-^/, chez Treuttel et Wurtz, Corréard, Arthus-Ber-
îrand^ &c.
Les deux preîniers volumes de c«t ouvrage (i) ont conduit Thistoir^
de Russie jusqu'à l'an 1 1 69 : ils retnontoient aux origines de cet empfre {
iU avoient le genre d'intérêt qui s'attache aux résultats même incertains
des recherches difficiles. Plus positive et plus constante, la matière des
tomes III et IV sejnbîe moins propre à exciter la curiosité des lecteurs
et à exercer leur sagacité. L*auteur n'a plus à leur offrir que des faits
consignés dans les chroniques du XIl/ siècle et des deux suivans : il a
même écarté de son récit, et relégué dans des notes à la fin de chaque
volume, les détails fabuleux qui portoîent rempreinte de la crédulité de
cet âge» et qui peut-être auroient été quelquefois les plus piquans et les
plus remarquables» Fidèle aux lois d'une critique sévère et d'une méthode
rigoureuse, il n*a voulu exposer que ia vérité ; il a renoncé au parti qu'il
pouvoit tirer désirerions naïves et des grossiers mensonges: il instruit et
paroît craindre d amuser. L*avant3ge, bien plus solide, de ces deux
volumes , est de présenter le tableau le plus étendu et le plus vrai que
nous ayons encore des cent quatre-vingt-treize années de l'histoire de
Russie comprises entre t 165^ et i jéi. Les faits, nous devons l'avouer,
ne sont pas ordinairement d'une très-haute importance; ils ne tiennent
pas toujours aux grands intérêts de la société ; mais nous croyons quH
était impossible de les rassembler avec plus de soin , de les enchaîner
ptui étroitement, et difficile de les mieux faire connoître.
(0 Ko/q^Joumaldci Savatis^ novembre 1815», pag- 66 j-67^*
MAI 1820,
aSf
En n ^9, les états d'André se composoient des quatre gouvernemens
actuels dTarosfaf, de Kostroma, de Vladimir et de Moscou; rfune
partie de ceux de Novgorod, de Tever» de Nijnî-Novgorodj de Toula
et de Kafouga; il disposoit de la principauté de Kicf, coniiiiandoit aux
princes de Rczan, de Mourom , de Smulensk, de Polotsk, et même îl
ceux de Vofhynie : mais les princes de Scheriiigof, ceux de Galitch, et U
ville de Novgorod, avoîent conservé leur indépendance. Ce partage est
le pronostic assez manifeste d*une longue suite de troubles intérieurs t
de guerres civiles, de révoltes contre le chef de fempire quand il sera
foibie, d'entreprises de sa part quand il sera puissant. C est l'idée générale |
qu'on peut prendre des règnes d* André, de Michel II, et de Vsé-J
vofod III , qui mourut en r 21 2. Le surnom de grand, prodigué à lou|j
hs princes russes, est plus particulièrement appliqué à ce Vsévolod pa
les annalistes; ils célèbrent sa prudence, son équité, sa bonté méme^i
quoique, suivant une tradinon que M. Karamsin n'ose pas démentir, iU
ait fait coudre dans une corbeille et jeter à feau quelques pitoscrits^l
Elevé en Grèce, il passoit pour ruàé : il s'attacha les Novgorodiens ei^
flattant leur amour pour la liberté, et devint leur maître. Ce qui honor^
le plus sa mémoire, c*est qu'il sut, mieux que ses prédécesseurs, con^
tenir dnns la souïnîssron les princes apanages ou feudataires; on voî|
qu*il auroit volontiers aboli ce déplorable régime, s*il n'avoîtcru devoîl
quelque respect a d'anciennes coui urnes : il n'osa point ]>rendre le tiire de
monarque souverain ; mais il tendoît, par une sorte d'instinct, et autant
que les préjugés de ce siècle le pou voient permettre, à établir une monar*
chie proprement dite, où les intérêts du prince et des sujets auroient été
garantis contre rambîtiou des grands seigneurs. Nestor fe loue de n avoir
point fléchi h fa:>[iect d^s grands de la terre. Quoique M. Karanisin n*ait
aucunement Fintention de soutenir, en écrivant l'histoire , une doctrine
politique, son ouvrage se trouve être, par sa matière méine, le tableau
de tous les vices du système féodaf.
Au lieu de ciier des faits particuliers , qui perdroient , en se détachant
des autres, pre^que tuute espèce d'intérêt, nous nous arrêterons au
chapîrre oii Tauteur décrit Fétat de la Ilussie îi cette époque t ses apanages
s'étoient subdivisés presque h J*iafini. Par exemple, la principauté de
Smulen-fc avoît ses apan:iges particuliers de Toropetz et de Krasni.
Novgorod tlltr-ruénie, ancienne possession des souverains de Kief, et
qc*î s'e toit arrogé le droit d*éljre ses prîqces, ne pouvait plus conserver
rînicgrité de ^on territoire; les Pakoviens agîssoîent quelquefois codinie
des ciroyenii libres et indépeodans de leur métropole. On ne savoir eii
quoi consistoit la dépendance des vassaux et arrière-vassaux. Pour re-
t9i ^ JOURNAL DES SAV\NS,
mccîîer h ranarchîe.ona^Dii institue^ dçi con^t^iU griiéraux on assemblée»'
de f;TÎ xes, qui dévoient ranîiner Tamour de lu palms et qui acvinrenÇj
des foyers de dissensions et de guerrts întesiinci». Le droît in;il réglé d^ ^
-succession étoit Fune des causes les plus ordiiiaîres des inimiriés et de* -
CjuereJfes. D'après un usage antique, ce viéioil pa> le fils, niaiii fe frère
tïun prîiice dc-cédé , ou bon pnrent feplus ngé, quide^'oit fui succéder. Oi\
ifolacêtië coulume, on y^ substitua la succession que la nature indique,
htnîs qui parut une usurpation. Ces discordes intérieures encourugeoienl
les ennemis étrangers; jxlus d'une fois les Liihuaniens» les Bulgares,
lés Hongrois, les Polonais, tentèrent d'envahir les provinces russes; e|
il faut, dii j\L ICaramsin, attribuer au plus heufeux hasard» ou h la bra-
voure naizonate, ou à la prudence de quelques princes, le bonheur
^u*eut la Russie, pendant ces deux cents ans , de ne point perdre soii
j Indépendance. Quant au régime politique du pays, c'est toujours tyrannie
^ Ou licence; gouvernement et liberté, jamais. La législation demeuroit
fort confuse; ce qu'on y aperçoit de plus distinct, cest Tautorité qu'ob*
I tenoît une traduction du droit canon grec. Les évêques exerçoient de
I grands pouvoirs; le soin d'entamer les négociations de paix leur étoît
' téservé î maïs, choisis par le prince, ou élus par le peuple, ils pouyoienl
I être chaises, dès qu'ils avoîent mécontenté fun ou l'autre. Dans les
chroniques de ce temps, le mot de^r^wr désigne la garde du prince,
[alors composée de boyards, de jeunes officiers et de porte gfaîves :
[c'étoîent-lk les premiers élémensde Tannée; les simples pioyens et les^
|itans des campagnes ne s*y joîgnoient qu'en des cas extraordinaires»
iis chaque campagne , on recueilloît les armes de tous les soIdaL^, et
^ on les retenoït en dépôt jusqu'à une expédition nouvelle. Les années , fc
I plus souvent peu nombreuses, n'éloient jamais fort aguerries ; la cuirasse
^He s'endossoit qu'au moment du comijat , çt, jusqu'à ce moment aussi,
fes armes restoient sur les chariots : plus d\me fois les ennemis ont
[profité de cette circonstance pour tomber sur des soldats désarmés* Il
nous semble assez remarquable que, chez un tel peuple, le commerce
eût déjîi quelque activité: M. Karamsin dit Uïéme qu'il étoit fort éfendu.
Cette expression peut bien être exagérée; mais nous voyons que tous les
ans îl arrivolt de Constantînople à Kief des flottes marchandes , dont le
débarquement étoit protégé, contre la rapacité des Poloutsis, par des
troupes envoyées exprès des provinces même les plus éloignées. Les
Russes éihangeotent des peaux d'hermine et d'autres fourrures cof)lre
les épices et les étoffes de soie ou de coton que leur apportoient des
marchands orientaux. Dans les ruines d*une ville bulgare, non foin du
Volga, on a trouvé dcj injcriptîonç arméniennes et arabe j dont les dates
MAI 1820. ^^m twj]
sembrent élre de 1212 k 1341 de Fère chrétienne, etlÇ^î^ilestent,
ainsi que d autres monumens , ces relations commerciales. II en existe
une preuve encore plus directe dans le traité conclu en 1 zii entre le
prince de Sniolensk et des villes allemandes, la GothJandie et Riga,
Les Russes s'efforçoient d'attirer aussi chez eux des architectes, des
peintres, des médecins: ils commençoient à sentir le prix des arts, qu*ils
ne savoient pas cultiver eux-mêmes. Les .premiers élémens des études
littéraires n'existoîent encore qu'au sein des églises et des monastères;
cetoit I^ qu'on trouvoii descomputistes, des chroniqueurs et des poètes.
Al. Karamsin croit que le poème d'Igor, composé au XII.* siècle, est<
d'un laïc ; et fa seule raison qu*il en donne, est qu'un moine ne se seroît 1
pas permis de parler des dieux du paganisme et de leur attribuer les |
phéiiojnènes de la nature ; mais les veriificaieurs ecclésiastiques du]
moyen âge ne sont pas si scrupuleux; et il n'est pas rare que fa mytho-
logie s'introduise jusque dans leurs productions les plus chrétiennes, 1
Quoi qu'il en soit, on donne ici quelques extraits de ce poème d'Igor,]
dont les métapliores el les hyperboles traduites dans notre langue n'y |
conservent, à vrai dire, ni grâce ni énergie. Il n'y reste guère que de^
lieux communs, que des formules devenues extrêmement vulgaires îj
^fs Cdsques retentissant sous les coups répétés des glaives ; lu terre teinte eh\
sang et jonchée deaiduvres ; des héros furieux ainsi que des taureaux féroces^ '
plessés par un fer brûlant ; les rives du Niémen couvertes de têtes aussi \
nombreuses tjue Jes gerbes au temps de la moisson; les vents cruels qui ^
prêtent leurs ailes légères aux flèches ennemies', comme si ce nitoitpas asset j
four eux d* agiter les flots de la mer a-^uiêe et de balancer les vaisseaux \
russes sur la mer agitée, &€• Peut-être y a-t-il dans le texte primitif j
quelque expression ou même quelque pensée originale. M, Karamsin j
fait remarquer ces paroles : Une tête va mal sans épaules , et des épaules
vont mal sans tête; et les traducteurs nous apprennent que ce pro-
verbe signifie qu un prince et son peuple ont réciproquement besoin f un \
de l'autre.
Du reste , le chapitre sur l'état de la Russie est plein d mtérêt , et en
répand sur tous les autres : l'auteur le termine en observant qu^, m
alors la Russie eût été un éiat monarchique depuis le Dniester fusqu'k
la Livonie, la mer Blanche, le Kama, le Don et la Soula, elle ne F^ût
cédé en puissance à aucun des états de ce temps ; qu elle auroit pu se
soustraire au joug des Tatars ; et que, par ses liaisons intimes avec
la Grèce, dont elle pouvojt emprunter les arts et les luiiiières, elle
auroit marché de pair avec toutes les contrées européennes» sous le
rapport de la civilisation; mais le régime féodal favoit teilemeni énervée
Nn %
iH JOURNAL DES SAVANS,
et flétrie, que le voyageur Benjamin de Tudèle, en la traversant à Ut
fin du Xil/ siècle, n'y voit qu'un pays exirénieintint vaste, couvert de
bois et de montagnes, dont tes habitans n'osent sortir de leurs cabanes
d^irant Thiver, et ne s'occupent en d'autres saiirons que de la chasse des
martres zibeliries, excepié lorsqu'ils font, dit-îl^ le tralic des hoiujnes ( i ).
Benjamin de Tudèle n'est pas un observateur fort attentifs îi son té*
moignage on oppose, dans une note, celui de Nizami» poète persaîi du
Xil/ siècle» qui fait mention des Russes comme d'un peupk" allié d* A-
Iexandre*Ie-Grand ; ce qui prouve, dit-on, qu'b répoque de Nizaini les
Russes éioîent connus en Asie par Tétenduc et l^éclat de leur puissance.
Nous croyons bien qu'ils lYtoieju par Tétendue de leur territoire, et que
cela suflisoit pour que le poète persaii eût le droit de leur attiibuer de
Sous George II, fils et successeur de Vsévofod II, la Russie fut
envahie par Iqs Tatars. Tcmoutchin, après avoir soumis ses j>rQpres
sujets y prit le nom de Gcngkiscan,ovL grand khan, conquit les provinces
septentrionales de la Chine, et menaça la Russie en iiaj. l.e> Russes
perdirent la bataille de la Kalda; et ils n'avoi^^^nt plus aucun moyen de
résister, si les Tatars vainqueurs n'avoient soudainemeni disparu pour re-
joindre leur maître et le suivre dans une aurre expcdition, Dès-lors re-
commencent en Moscovîe les guerres civiles ; elles se prolongent sous h
règne dTarosIaf II ; elles favorisent les nouvelles entreprises des Mogols,
par qui les Russes sonr asservis en 12,45. ^l- Karanisin transcrit id h
partie de la relation de Plar-Carpin qui concerne les Russes ei les Tatars.
Les vainqueurs des Russes ne prenoiejit pas la peine dt; les gouverner,
et les laissoîenten proie à leurs dissensions civiles; en sorte que le mal-
heur de fasservissement ne les délivroit pas des fléaux de fanarchie.
Voilà ce qui complique leurs annales sous les règnes des successeurs
d'YjirosIaf II, si ToH] peut appeler règnes des troubles parliculieri qiri
$e perpétuoient sous l'oppression générale* Jean Calita inonia sur le
trône en 1 31S; et, dès son avènement, la paix et le n-pos commen-
cèrent k renaître dans la Russie septentrionale; les AlogoJs cessèrent de
ravager les provinces et de verser le sang des habitans. Après tant
d*années de carnage tt de détresse, il fut permis de respirer, et de ne
sentir que l'état d abjection et d*avilissement oîi Ton demeuroit i-cdujt*
Moscou reçut le notn de capitale. Jean saisissait les occasions de se
rendre maître des anciens apanages , de contenir au moins sous sa dé-
pendance les principautés dont il ne pouvoit s'emparer, et d'apaiser
(t) V<^ir Voyages recueillis par Bergeronjf. 6j,
MAIiSlO.
^
tes démêlés qui s'éfevoîeat emre les princes. On a malhenreitsemcnt à lai
► rej^rother dfs ;\c{çs lyranniques ei sanguinaires; ce n'est point snns
/réserve qu'on peut lui reiidre des hofninjges pour avoir montré h ses
, successeurs la route qui devoir conduire à Tunité monarchique et à [ordre
social. Il éloit fort cbaritable : uii kalita, ou sac plein d*argent, qu'il
portoii toujours et qui servoit à ses aumônes, lui fit donner le surnom
de KaliiaiW bâtit plusieurs églises, notamiTient la cathédrale de Mos-
cou, et reconstruisit te Kremlin, Deux fijis il vit sa capitale en flammes >
et répara si bien tant de malheurs, qu'après sa mon ses sujets jiont
conservé long- temps que fe souvenir des bienfaits de son règne,
H eut pour fils et pour successeur Siméon dît le Superbe, qui régna
depuis r 240 jusqu en 1 25 î , et fut , dit-on , le premier qui prit le titre
de gntnd prince de toutes les Russies; i[ iiavoit pourtant de puissance
que celle que les Mogols vouloîent bien lui laisser, et que lui disputoient
ses vassaux. C'est durant ce règne et celui de Jean II que brillent les
venus chrétiennes de S. Alexis. Après un tableau du règne fort court
de Umitri de Sousdal, monarque dont la foiblesse ranima fambition des
princes apanngés , un autre Dmitri, enfant de douze ans, prît en t 562
les rênes d'uo état morcelé, déchiré et asservi. Cet avènement lennine
-le tome IV, dont voici les dernières lignes : « \\ falloit réparer fes maux
» causés par Jean II et par son successeur; il falloit agir avec cette
n prudence, avec celte volonté ftrme et prononcée, dont lui bien peut
» nombre de monarques peuvent, à juste litre , se vanter dans Hiistoire.
» La nature avort accordé ces brillantes qualités au peiit-fîls de Jean
y> Kaiita, mais elles demandoient :i être mûries par l'âge ; et rÉtat auroit
» succombé dans cet intervalle, si la Providence n'eût entouré Diuitrî de
>ï sages instituteurs , de conseillers prudens, qui préparèrent et la grandeur
» de la Russie et la gloire de ce jeune prince, »
Les réflexions rares et concises que M. Karamsin a jetées dans ses
récits, se recommandent par une judicieuse simplicité, sans aucune
affectation de nouveauté ni de profondeur. Ses narrations ne brillent
pas non plus par la richesse des formes et par la vivacité des couleurs;
son style 5 si nous en jugeons par la traduction, a plus de clarté que
d éclat, plus de régularité que de mouvement: mais renchaînemeni des
faits est toujours naturtrl, le cours des idées Jlouyours facile; et si rien
n'est peint , ni les choses, ni les hommes, ni les catastrophes, ni les
inocurs ou fes caracières» tout est méthodiquement exposé. C*est un
excellent recueil de notions historiques ^ éparses dans des chroniques fort
peu lues et en des pièces manuscrites peu accessibles au pubîîc. Les
ouvrages composé^ en français $ur le piéme sujet ne pénètrent pa>
JOURNAL DES SAVANS,
[amsi avant dans les détails de cette histoire, et n*ofFrent pas au même degré
Lces connois&ances locales immédiates et précises, qu*il est difficile à des
étrangers de bien posséder. Nous croyons donc pouvoir recommander
,ces deux volumes aux lecteurs qui sentent le prix des véritables études
^historiques. La traduction nous a paru, dans ces tomes III et IV, mieux
écrite ejKore que dans les deux premiers, et plus correctement impriméei
quoiqu'il reste dans les notes, et pHrtrculièrement dans les citations
latines , quelques fautes dont Terraia ne fait pas meniion.
DAUNOU.
Le Palais de Se au ru s, ou Description d'une Maison romaine;
fragment d'un voyage fait a Rome, vers la fin de la république,
par Merovîr, prince des Suèves : i vol. ///-(f/ dt zy^ pages,
\ i8icy* De l'imprimerie de Firmin Didot.
L'auteur de cet intéressant ouvrage ny a pas mis son nom; ce-
pendant, puisque chaque page en fait la révélation au lecteur, nous
cro)ons qu on peut sans indiscrétion apprendre au pulilîc que cette des-
cription dune maison romaine a été faite par celui qui, en dessinant
dans sa belle collection des ruines de Pompéii un si grand noîiibre de
ruines de maisons antiques, pouvoit le mieux recomposer 1 ensemble
qu*annonce cette description.
Aussi sommes-nous dans le cas d'exprimer ici un regret; cVst que
Fauteur, écrivain, dessinateur et architecte tout eji^emble, n'ait pas
accompagné sa description de quelques planches propres à rendre sen-
sible ce qu il décrit, H lui en auroit peu coûié sans doute de donner à
son prince At$ Suèves, étudiant les arts à Rome, assez de dessin pour
réduire en un plan les détails de ses lettres*
Uauteur, en effet, à lexemple de plus d'un écrivain célèbre, a donné
à son érudition une forme dramatique: il suppose qu'Arioviste ayant été
vaincu par César* et obligé de fuir fusquau Rhint IMérovir, l'ainé de
ses fils, fut au nombre des prisonniers, et qu*après la dernière révolte
des Gaulois, le jeune prince fut envoyé en Italie; qu*nynnt déjà pris
quelque teinture des lettres, et contracté dans son séjour h Rome
beaucoup de goût pour les arts» il résolut d'écrire un<* relation de son
voyage, dans lequel se trouvoicnt beaucoup de détails curieux pour
rhisioire des arts et sur la vie privée de* Koinaias. L'auteur auroit donc
MAI i8zo, 2tr
txtrnit tÎLijûiunal de Mérovir le morceau qui regarde les habhauoas des^
Cette forme de founial suppo'ée par notre auteur, Touvrage est un
^composé de chapitres, en fortue de lettres, écrites par Mérovir ii ^on
[fini Ségiiner.
Ses récits commencent par une conversation qu'il eut avec un
certain Clirysippe, haljile architecte cité par Cicéron, er dans laquelle
fartisie propose au prince suève de lui faire connaître l'intérieur des
plus somptueuses habitations de Rome , et en particulier le parais
de Marcus Scaurus, que Pline a vanté pour la magnificence de sori
architecture.
Le rendez-vous est pris pour le lejidemain , et avant fe jour , selon les
coutume^du tejnps^que l'auteur s'e^t aitnché b retracer ; car eifectiveinent
l'usage étoit de cotrunencer Jes visites de cérémonie dès faurore. Ifs
partent donc avant le lever du soleil; et, à la lueur du crépuscule, ils
aperçoivent confusément dévastes bâiimeiis dont l'histoire na conservé
que les noms. En attendant l'heure de se présenter chez Scaurus, Chry-
sippe arrête son compagnon sur beaucoup d'objets relatifs à la cons-
truction des édifices, sur les machines à élever les pierres, sur les maté-^
riaux, sur hs lois des bâïimens , sur les changemens apportés par le lux©
dans l'architecture des palais. Ce chapitre du journal est» dans le fait,
un petit discours prélimiiiaire, qui contient beaucoup de notions
recueillies avec soin , et appuyées de leurs citations, sur la partie de tare;
Sue profe5^e fauteur. C'est une imitation parfaite de la manière employée.^
ans le Voyage du jeune Anatharsis, pour mettre, si Ion peut le dire^
ainsi, féruditioti en scène»
Le Scaums dont nous alJons voir le palais» étoit le fils de celui quir'^
avoit, dans son édilité, construrt . pour quatre-vingt mille spectateur^ , co <
théâtre teiiïporaire, dont la scène étoit ornée de trois cent soixante co-
lonnes, réparties en trois rangs l'un au-dessus de fautre, de manière quç
le premier lang étoit de marbre, le second en verre, le troisième de bois
doré. Dé\k , comme on le sait, le luxe des colonnes avoit été porté, dans
la disposition des palais, à un degré qui permet à noire auteur de s'en
montrer prodigue, en rej)roduisant l'idée d'une des merveilles de Rome
en fait de palais. Aussi à peine Mérovir est-îj entré dans ïûreu ou Fespèce
de place qui îe précède, qu il s'étonne déjà de ces colonnades spacieuseSt
par lesquelles on arrive à couvert jusquà la porte. Son éionnement
augmente dans le vestlhutum ; ce sont des salles disposées à droite et à
gauche de la porie d'entrée, et 4>u l'on attendoit Theure de la réception*
Toutefois Chrysippe fait objçrver à McrQvij que b$ colonnes qu'il voit^
lis JOURNAL DES SAVANS,
^sont de peu de valeur, et qu'il doit réserver son admiration pour celfej
qu'il verra dans rintérieur*
Au chtipiire qui suit, Tauteur introduit son monde dans un loca
qu'il appelle ^;<î/^^Ti/w, qui, dit-il, est un corridor assez large, où srfl
tiennent les ostiariK Ici , nous craignons que notre auteur n'ait un petfi
indistinctement compilé toutes les notions de Vîtruve dans le plan def
sa maison, et n ait oublié que , puisqu'il s'agit d'une maison romitine , i(J
ne convient pas d*y faire entrer des parties qui caractéri soient exclu îve-
mem fa maison grecque* Or Vitruve ne laisse aucun doute sur cettél
partiel qu'il appelle 5vpû»ff7«i', et non t^cs^vf^v, et qui étoit fe logementfl
du portier; et celte notion se trouve à rarticle de la jnaison grecque , oîi^
il dît fortnellement que celte disposition étoit partîculîére aux Grecs ^1
parce qu'ils n'avoient point A'arnum coïnme les llomains. Quant at^j
prothyrum des Grecs , que, selon Vilruve, on appeloit dïathyrum à RomeiH
il paroït encore que ce n*éloit autre chose qu'une espèce d'avant porter]
•t ce que nous appellerions porîi battante,
* Notre étranger est ensuite introduit , avec son conducteur Chrysîppe^' [
dans Vdttfum, dont ce dernier fait connoître les cinq espèces. Ce chapitra?]
#st un commentaire fort exact de Vitruve sur cette partie de la maison!!
des Romains, XJatrium du palais de Scaurus, comme on peut bien Ia*J
croire* étoit de ia troisiétne espèce, c est-à-dire, la plus magnifique; oui
lappeloit Vatnam corinthien. LV/m/z/rétoit la partie la plus essenrielle et
la plus curieuse des maisons : c'étoit là que chacun se rendoît, selon leS^J
aflaîres ou les rapports qu'il avoit avec le m.'Hire du logis. C'est Ijl aussi ^M
ou du moins dans une pièce qui en dépendoit, et appelée iablinum , qut
Scaurus donnoit ses audiences, Mérovtr et Chrysîppe laissent passer la
foule, et emploient ce temps à remarquer tous les détails de moeurs,
d'usages et de décoration que comportoii le focal Ils sont enfin accueillis
par Scaurus, qui les convie à souper pour le même soir, et les invite à
visiter, en attendant, toutes les curiosités de son palais.
•♦Cette invitation ne pouvoit manquer de leur être agréable, puisque
cMtoit fe Lut de leur visite; et fauteur fait irès-adroîtement sortir de chez
lui le propriétaire, pour donner h la curiosité de I étranger le moyen
de se satisfaire dans fes plus petits détails. Aussi commence-t-il j^ar visiter
Je lararium, pièce ordinairement placée autour de \\.'trium, et où chaque
Romain renfermoit les images de son cufre particulier: car il y avoit
réellement à Rome un culte domestique, différent du culte public; et
chacun pouvoit avoir des dieux de son * hoix et de son goftr.
Dès deux côtés du tablinum , ou pièce aux arLhives, éioient, dans fei
maisons lomainei, deux corridors qui condui$oient soit îi la pièce
:l
i
MAI 1820. •" aS?
tppèfée iasl/lijut, qui n'exîstoit pas dans toutes les maiions , soit au
peristylUim, enceinte au milieu de laquelle étoient une ci:erne, un bassin
et un parterre. C est par ce chemin que Chryî>ippe conduit Mérovir dans
les apparteinens particuliers > dont il lui fait parcourir toutes les variétés ;
car les descriptions des anciens nous montrent que ces intérieurs j où le
public n*é toit point introduit» réunissoient une suite de pi'cîces que ie
luxe avoit multipliées. Ainsi il y avoit une charnière à coucher pour la
nuit, et une autre pour dormir pendiicitle jour; il y en avoit pour chaque
saison, et diversement exposées, de formes très difleren tes, les une*
échauffées par des hyp9caustes , les autres par ce qu'on appeloît un poéle
solaire, heliocaminus. Ici Tauteur fait pénétrer les rayons du soleil au
travers d*un grand vitrage , et une note justitie 1 eini)Ioi du verre aux
châssis des fenêtres, en citant des passages d'auteurs et des fragmens de
carreaux trouves à Pompéii» Nul doute à cela ; cependant il Hiut dis-
tinguer les temps : d'abord, il est certain que Femploi considérable que
Fdn faisoit de toutes les espèces de pierres spécutaires, dont quelques-
unes avoient de grands avantages sur le verre, dut dispenser très-long-
temps d employer des carreaux de vitre; ensuite, Sénèque dit formelle-
ment que c'est d assez fraîche date que, de s:^n temps, le verre fut
employé à Home en carreaux de fenêtre, dou Ton peut croire qu'au
teiiip'. deScaurus fusage devoit encore en être inconnu,
La description des petits appartemens de Scaurus offre à notre auteur
Toccasion de rassembler dans un pfan qui pourroit à la fin devenir très-
arbitraire, et tout ce qu'un irès-grand nombre de petites habitations de
Pompéii [ui a suggéré, et tout ce que les passages des écriv;jrns de
diverses époques nous ont transmis sur les raffinemens du luxe et de fa
vohrpté.
Mais, fe lai éé\\ fait entendre» l'auteur, n*ayant point accompagné
son ouvrage d'un plan qu'on puisse confronter avec les chapitres dm
Vitruve qui traitent de la maison des Romains et de celle des Grecs,
s'est donné toutes les licences qu*il a voulues; et lurmême nous pré-
vient que, qu«jque le ^y/y^r^/z/V/j^ ou lappariement séparé des femmes»
app:trtînt à la distribution drs maisons grecques, il s'est permis de l'in-
troduire dnns Tensemble du palais de Scaurus,
Dans le fliit, l'ouvrage dont nous rendons compte se prête d'autant
moins h \m^ analyse exacte, que le nombre des détails détourne le
critique d'un examen régulier. C'est plutôt une histoire du luxe dt%
Romains dans leurs habitations, qu'un ouvrage de description archi-
tecturale. On se le persuade sur- tout en parcourant les nppartemens de
La/lia, ÏKimm^ de Scaurus, dans lesquels Tattenaon est arrêtée par une
00
t
«90 JOURNAL DES SAVANS,
multitude d objets de Iiive, de s«|^rfluités et de rnffinemcns voluptueux ^
pour ne rien dire dt plus, qui finissent par sLandafiser un peu le prince
gaulois, pressé d'éch^npper avec son csoiiducteur à ce spectacle de mau-
vaises moeurs.
L*auteur les conduit, par Tautre coié du perisryfium , dans hphûca^
thccii, ou gnferie des tableaux; ce qui lui donne ^occasion de mettre
sous les yeux de son lecteur quelques ouvrnges de Part grec transportés
à Rotne, et de rassembltr quelques notions sur la manie des lîomain»
en fait d*ari.
De là on passe dans la I ihliothèqne *, nouveau sujet, comme on peut
Je croire^ de présenter au lecteur des notions, sinon nouvelles, au moins
succincies et fidèles, Hir fa nature, la forme et la diversité des livres
chez les anciens, sur la manière de les ranger et de les disposer, et sur
plusieurs détails techniques en ce genre, dont les découvertes d'Her-
cuLanum et de Pompéîî ont fourni des autorités et des preuves.
L'auteur, dnns le chapitre suivant, nous avoue quil nous transporte
en Grèce; et effectivement plus on avance dans la description de la
maison romninfi que le titre de louvrage avoil promise, plus ou est
forcé de reconnoiire que ce tiîre n'est qu*ime fiction, qui, comme toutes
les fiction^ de ce genre, permet des hypothèses et des anachronisines,
pourvu qu'ils ne blessent pas trop directement la vraisemblance. Rome
ayant effectivement eïn()runté presqi^e tout des Grecs dans les arts, et
sur-tout dans rarchireciure, il ne peut être question que de savoir si,
à répoque indiquée par le nom de Scaurus, toutes les imitations des
palais de la Grèce et de leurs dispositions intérieures avoient déjà été
adoptées et prafiquées k Rome; mais, au lieu de se livrer à cette cri-
tique assez inutile, je conseilltrai pliaot au lecteur de se laisser con-
éuire par Chrysîppe dans toutes les autres parties du palais, quelque-
trânpers qu'aient pu être h Rome et leurs noms et leurs usages.
Ce ne sera pas sans (ilaisirquen parcourant chacune de ces pièces,
telles que les eeci, les txidres, il y lira une dissertation instructive sut
fturs furmes, leurs usages, leurs constructions, et y recueillera un
choi)C d'anecdotes et de notions qu on a rarement l'occasion de trouver
aus.**i bien laf^prochées et aussi heureusement encadrées-
If nous seroil îtiipossible, h moins de copier des pages entières de
cet ouvrnge, de fjîrt connoitre cette niultitude de détails dans lesquels
fauteur est entré; et le choix qu'on feroit de quelques-uns, ne feroit
qu irriter hcirriosiié sans la saiisfiiire. Qu'il nous suffise de dire qu'au-
cune partie des bat itatfons antiques n'a été omî.^e ou négligée : depuis
les caves et les cuisines ;u5qu*aux terrasses, les jardins et iou$ ies bâiî*-
Mai îtjio. H^HB ^"^
mens qm les ornoîent, les bains, les jeujc de paume et crexercîce , tout
est parcouru^ décrit, commenté, h laide des passages des écrivains, et
des vestiges qu on peut recueillir encore dans îes ruines de Tantiquiié.
Mais (auteur devoit au pfan dramatique de son ouvrage un dénoue-
ment; if se trouve tout naturellement dans l'invitation que Scaurus»
connue on l\i déjà dit, a fiiit à ses hutes de souper chez lui. Le soleil
aîloit disparoître sous Thorizon, lorsquVin clepsydre annonce la dixième
heure : on entre dans le trictinium, ou la salle du festin. Le lecteur
s attend à une description des services de la taLIe, des mets et des pjo-
dîgalités romaines en ce genre : son attente ne sera pas tout-à fait
trompée; mais sans doute il préférera encore de donner son attention
à /a beffe architecture de [a salle, aux tableaux qui en ornent les murs,
aur mosaïques qui en font le pavé, aux candélabres de bronze, à fa
magnificence des liis, aux bois rares des tables, aux vases dor et de
cristal, aur buffets sojnprueux, à ce plafond mobile qui s'ouvre pour
répandre des fleurs et faire descendre un service complet sur les tables,
aux danses enfin et aux jeux qui s^exécuient dans les intervalles dé$
services , jusqu'à ce que le chant du coq , annonçant une nouvelle
aurore, donne aux convives le signal de la retraite, Mérovir et Chrf«
§ippe se retirent aussi, et avec leur départ finit la description de la
maison de Scaurus et se termina tout Touvrage.
QUÂTREMÈRE DE QUINCY.
Le Parnasse occitan/en, ou Choix de poésies originales des
Troubadours , tirées des matiuscriis naîionaux, A Toulouse,
' chez Benichet cadet > imprimeur^libraire, i8ip, in-S." ,
Ix et 4 I ^ P^g^s.
L'auteur de ta coHection que f annonce, dit en terminant sa préface:
ce Nous avioni entrepris ce travail dans la seule intention d employer les
» heures de notre Ioi.^ir. Quelques savans, dont f amitié nous est chère ,
n ont jugé que ce travail avort son mérite et son utilité; ils nous ont en
» cotiséquence fortement pressés de le publier, n
Je rcspecterois fanonyme qu'il a voulu garder, si, dans le tome II de
ia collection que je publie sous k titre de Cioix de POÉSIES origi-
nales DES TROUBADOi/ns, tnon estime pour le talent et pour la
personne de Téditeur du Parnasse occitantEiS' ne m eût porté à
le nommer: en exprimant, pag, clxiij, mes regrets de n'avoir pu traiter
OO 2
ipa JOURNAL DES SAVANS,
que par correspondnnce diverses quesrîons littéraires avec M. de Rocht-
gucJe, :incien contre-amiral résidani à AlJy, j'avuii- annoncé qu'il devoit
pujjlier bientôt un recueil intitulé le Parnasse occitanie.n. J avoue
avec pfai ir que je suis du nombre des per&ojines qui ont pressé M. de
Koi.htgude de nous faire jouir du fruit de ses longuts ei sa\antes
recherches.
Dans une préface remarqualJe par le goût et Ptrudition» M. de
Rochegude remonte à l'époque où parurent Ils iroul.^adourr. Il ne dit
rien de la formation cl des progrès de leur langue, parce quil se
réserve d'en parler dans son GiOSSAiRE OCCITAMEN; mai^ il adopte
et développe les idées renfermées dans ce peu de mots de Papon
( Hfstolri de Provence ^ loni, III > p. 4^^ ) : « Tout est à eux, et le geiire^
« et la manière de le traiier* ^>
A cette occasion, il fait I observa'ion suivante :
«< Voici un service Lien iniportant rendu par ces poètes» et qui exige
>ï de notre part ujî juste tribut de reconnois^ance. Occupés sans relâche
» \l célébrer la galanterie et la loyauté , la politesse et la valeur, iU par-
» vinrent à rendre nationales ces qualités ainialUcs et brillantes, qui ont
>* fait et pourront faire encore ladmiratioii et le désesj>oir de nos voisins. »
Il est facile d'expliquer les causes de loubU dans lequel tombèrent les
ouvrages des troubadours , après que les provinces où avoient brillé
cts poètes^ eurent été réunies au royaume de France. M. de Rochegude
juge (es travaux qu'entreprirent deux académiciens, M. de Sainte- Pabye
et M. labbé Millot, pour les tirer de cet injuste oul>li. H fait remarquer
que les Italiens, les Espagnols et les Anglais ont recueilli leurs
anciennes poésies nationales, que les Allemands possèdent deux éditions
de leurs minnesingers; et il ajoute que raccueil favorable cjuont reçu
les trouvères publiés par Barbazan, est d'un heureux présage pour hs
auteurs qui les ont devancés* Il croit pourtaîii convenable d'aller au-
devant de foLjection qu*on pourrait faire en prétendant que les trou-
badours sont assez connus par l'Histoire littéraire de ces poètes publiée
par fabbé Millot; et à ce sujet, il donne quelques détails >ur les travaux
des deux académiciens.
Le but de M. de Sainte-Palaye étant de réunir tout ce qui pouvoit
illustrer notre moyen âge, il dut s'occuper beaucoup des troubadours:
au:»si lit-il transcrire tous les manuscrits et toutes les copies quil put se
procurer en France. Il fit fouiller dans les dilfértntes bibliuthéqucsa Italie,
pour en tirer ce qui manquoii k ses premiers recueils. Ces recherches
lui fournirent une très- grande quantité de [liéces et de fragmens. M. de
Ilo<.hegude poursuit en ces termes ; « Les soins que Samte-Palaye se
MAI 1820. iipî
' donna, et les dépenses qu'il fit pour compléter sa collection , prouvent
I» qull y attachoit beaucoup d'importance. Si rexécution du j.Ian ne
» répondit pas à fa beauté du dessin, ce fut peut-être moins faute de bons
, :*> niatériauîc , que faute d*un architecte qui possédât fart de les employer
^ haLifement, Sainie-Palaye savoit le vieux français . * , ; conclurons-nous
» de là qu*if savait Toccitanien î Nullement , . . , nous croyons qu il a plus
,» souvent deviné qu'entendu son texte. »
Ce jugement sur M. de Sainte-Palaye me paroît révère. J'aî en
occasion dlndiquer la principale cause qui ne permit pas h cet acadé-
micien studieux et zélé d^ubienir de ses vastes recherches plusieurs
résultais directement utiles à notre hltérature; c*est qu il ne sut pas
reconnoître les règles granimaticales, les principes fixes, qui existtn^^
dans la langue des troubadours et dans celle des trouvères, et alors îf
lui devint impossible de communiquer aux autres liiiérateurs le sens des
poé.sies qui! comprenoit lui-même, mais dont il ne pouvoit rendre un
compte exact et convaincant. Toutefois n^oublions pas que, si jamais
nous parvenoub à rétablir féditice régulier de nos anciens idiomes,
c'est h AL de Sainte-Pabye que nous serons redevables d'une panie du
succès I puisque c'est lui qui le premier a rassemblé, à grands frais et^
avec un ioin extrême, les matériaux nécessaires.
Si AL de Rochegude n'a pas été indulgent envers M. de Sarnte-Palaye,
on peut s'attendre c|u1[ ne le sera pas envers M. Tabbé Millot,
« Labbé MiJIot, dit-il, fut assez durement traité par un journalijie,
3» qui le taxa d^iïnpéritie et de négligence dans la rédaction des Jiiaté-
» riaux qui lui avoient été confiés; imputation qui iVest pas sans funde-
» tnent. Nous ajoutotis qu'il a trop étendu sa matière. »
Le journaliste dont parle JVL de Rochegude , étoit l'abbé de Fontcnai ,
rédacteur des Àffii/ws, annonces ti avis dhers ; en rendant compte de la
publication des fiibliaux par M. Legrand, il eut occasion de parler de
rHistoire iitléraire des troubadours par M. Fabbé Millot, dans le
n,*' 8 de son journal, année 1780* L'abi;é de Fontenai étoit du midi de
la France, il entcndoii la langue des troubadours, il pouvoit en apprécier
les qualités remarquables , et dès-lors il prononçoit en juge compétent*
M. de Rochegude recherche ensuite à quelle époque a commence Vjl
poésie des Iroufjadours. II déclare ayec bonne foi que MM. Huet et
Chasiueil ont eu tort d'avancer qu'on avoît la preuve de IVxistence 4Îe
ce- poètes au x.* siècle, Tun sans donner aucun garant, l'autre d'aprèi
Glaber, qui ne parle point précisément des troubadours; mais, ajoute
M. dtf Rochfgude, quoique les témoignages manquent, cette opinfori
jfcst pointa rejeter. Aux conjectures qui! fournit de la vraisemblance de
ri
ipi JOURNAL DES SAVANS
Texistence ancienne de fa poésie romnne, on petit joindre fa preuve
posfrive que J*:ii indiquée dans ce Journal (ocîùhrc iSib\pag, jpf)* ^t
qae fourmt répîiaj he de S. Adelhard, a!>hé de Corbie, rnurt en 826 ,
ftîre par Pascha.^e Raîhert, mort ful-méme peu d*années après. Celte
fpîtaphe invite les poètei à célébrer le saint abbé en vers romans
comme en vers Iaiîn$,
Des recherches de M. de Rochegude il résulte évidemment que, de
toutes les langues de TEurope latine » ceiie des troubadours présente les
pFus anciens rnonutnens, soit en prose, soit en poésie.
Jl parle ensuite de fa rime, et il ne pense pas que fes troubadours
l'aient empruntée des Arabes; il regarde celte dernière opinion comme
la moins probable. Je regreire que M. de Rochegude n'ait pas eu
connoijsance d'une disseriaiîon de labbé Assemani, dans laquelle ce
savant examine fa même question ( 1 )•
II y a, dans cette partie de la préface de M. de Rochegude » des détails
curieux dont la citation et Texamen m*entranieroient trop foin. Je me
bornerai à rapporter ces expressions remarquables» qui offrent le résultat
de sç:s recherches :
cf On a vu que la rime ne venoit ni des Arabes , ni des Visigoths. . . .
» Quoique naturelle à tous les peuples, on ne trouve aucunes poésies
» sujettes h ses lois, qui ne soient postérieures aox pièces latines que nous
» venons d'indiquer. II est donc vraisembfable que nous fa devons aux
» Romains. Lors de la décadence de leur langue» Vîsochîvnie qui Véloit
» introduite dans la prononciation » fit perdre la quaniiié, mal remplacée
»par les accens, et força de chercher d'autres bases k la poésie. La
» première de ces bases fut le nombre matériel des sylfabes; celle-ci ne
» suffisant pas, on ajouta successivement fa césure, le rhyihme et la
■« rime, agrémens sans lesquels nos fangues modernes nauroieni point
» de versification. M
Cette manière d'expliquer rintroduction de la rime dans les langues
qui I emploient aujourd'hui, est ingénieuse; et if ajoute avec raison:
«La rime étant ainsi usitée, les troubadours coniinuèrent de s'en servir,
» Leur prîncipaf mérite consiste dans la manière libre et variée dont ifs
>» surent lempfoyer; et nous ne croyons pas qu'à cet égard ils aient été
» surpassés par les poètes d'aucune nation. «
L'éditeur du Parnasse accïTANiEN ne pouvoit guère passer sous
silence la dispute littéraire qu'occasionna la publication des fabliaux des
(1) Cette dissenatian est iniitulêe, Se gli Arabi dttro alcutia }nfuai:^a sulV
êtigmi dith pocsia mùdcrna in Europa,
MAI 1820.
^9 S
xn/ et XiU/ siècles. M. de Kochegude avance et a raiM^n d'avancer
que M, Legrand dénatura la qiiescion : eti efi'et , H s'agusott de prouver
que les trouvères a voient précédé les troubadours i et, au lieu de **attacher
h cette discussion defiirt, M. Legrand entreprit d'exalter le mérite des
premiers, et de rabaisser Je inéiit^ des retonds, dont il m connoissoit
pas (a langue. Mais un tort plui grave de M. Legrând, ce lui de jeter
des semences de division entre les auteurs des difiérentes piirtics de la
France, quand tous contribuent, chacun selon ses moyens , h faire hon-
neur k leur commune patrie. J'applaudis d autant plus à ces sentimensi
que je les avois énoncés dans ce Journal (novembre iSi^, pûg. ^S^Js
en parlant des troubadours et des trouvères»
Après avoir expliqué les causes qui durent donner au langage ceci-
tanien les qualités qui le caractérisent» M. de Rochegude indique Ie$
sources où il a puisé les monumens qu'il publie* Ce vulujne contient
pf es de deux cents pièces de différens troubadours. Dans cette collection
publiée par AL de Rochegude, les pièces des divers troubadours sont
précédées d'une notice sur leur j>ersonne ei sur leurs ouvrages, écrite
en langue provençale, toutes les fois que les manuscrits la lui ont tour*
nie ; il a même inséré quelquefois cette notice sans publier auciin<î
pièce de Tauteur.
Comme la collection ne contient que le texte original, sans traduction ,
sans commentaire, sans notes, il seroit difficile de donner une id(!e
précise de son mérite et de son utilité aux personnes qui ne cunnoissent
pas la langue; cependant il ei>t des observations que tous les litté-
rateurs peuvent apprécier, sur^tout ceux qui sont familiarisés avec les
autres langues de I Europe latine.
Le comte de Poitiers est le premier troubadour de cette coîlectîon,
qui contient de lui une seule pièce. Elle me fournit l'occasion dé faire
deux remarques. La première est relative au mélange des vers et des
rimes. Quand on considère que le comte dy Poitiers a écrit avant Fan
1 100, et qu'on trouve dans toutes ses pièces des formes dîflerentes et
égaleoîent heureuses, soit pour le jnélange coml>iné des rîmes, pour
h variété de la mesure des vers, soit pour rassujettissement des vers et
des rîmes à des retours obligés , on ne peut disconvenir que ces formes
n'annoncent une littérature qui avoit acquis de la perfection; ce qui
indique évidemment une origine déjà ancienne.
Je rapporterai, non pour les idées, mnk k cau5e des rimes et de
1 harmonie, un couplet de Ja pièce du comte de Poitiers:
Fn^ ai lo vers no sai de cui|
E trameirai lo a celui
J*ai Un le vers sur je ne .sus «jtiQJ ,
et je le trausmrlirai 4 celui
^p6 JOXJRNAL DES SAVANS,
Que lô trametra pcr autrui
Lai ves Anjauj
Que m trameies Jel seu est ut
Lo contraclau*
qui le transmettra par lutrul
jusqu'en Anjou,
afin tju'H me transmette de son ctui
la contrc-cIcf.
Une autre remarque sera relative nu genre de la pièce ; c'est une sorte
de je nesah quoi , comme Fauteur Pappelle, où il aflTecie de n offrir que
des idées încohérenies, des propos non suivis. J'avoue que ce genre est
bizarre, et je suis /oin de demander grâce pour le mauvais goût qui
J*avoit inventé, ni pour celui qui Tavoit accueilli : mais il n'en est pas
moins certain que ce faux genre n'est que Tabus du vrai ; et quand on
!e rencontre dans une littérature, il est permis de croire quelle remonte
à des temps reculés i parce que ces sortes de raffinemens étiîgmatiques
ne peuvent amuser que les personnes qui ne se plaisent plus aujt pièces
dont la simplicité et la clarté forment le caractère.
Les vers du comte de Poiriers que jai criés, ont une Jiarmonie que
des oreilles exercées distinguent fitcilement. Voici des vers de Bernard
de Veniadour, où lenirelacemenl des rimes masculines et féminines
rend Tharmonie encore plus sensible. Ce troubadour, qui a écrit avant
la fin du XII.* siècle, est Tun de ceux qui, par le nombre et Tagrément
de leurs ouvrages, méritent le [)lus l'estime des lîitéraleurs.
Ces vers sont tirés de la pièce qui commence ainsi :
Quan la doss' aura venta
De ves vasrre pais (i),
M* es veiaire qu* icu senta
Odor de paradis &c.
De domnas m*es vefatre
Que gran fallimen fan,
Per so que no son gaire
A mat li ïin aman.
leu no deu ges rctraire
Mas so quVlas voîdran;
Mas greu mVs q'uns irichaire
D'amor ai' ab engan
O plus 0 atrestan
Corn ce! qu'es fins amaire.
Quand k doux léphir souffle
du cote de Yotre pays,
il me semble que je rcipirç
un parfum de par ad b &c.
Il me semble que Ici dames
commeucnt une grande erreur,
attendu que icâ vcrjt;ibles amans
ne sont guère aimcs«
Sans doute je ne dois obtenir d'elles
que ce qu'elles voudrunt m'accortlcr;
mais il mVst pénible qu*un am.int
trompeur obtienne par artifice
autant et même plus
que Tamant le pîui sincère.
En parlant des troubadours, on a souvent cîté leurs déclarations
d*amoiir, leurs chants langoureux, qui, dans les traductions, ne peuvent
(i) L'édition de M, de Rochegude porte nostre pÂiys : dans la colleciiofi
qtJe je public, j'ai împriitié VOSTRE, ainsi cjue le seoi l'exigeoil et que les uu*
Aascrits U permettaient,
MAI 1820, ïï9f
0âTir ni (a grâce, ni Tharmonie, ni suj^tout la variéié d'expressions, qu'on
distingue dans lotiginal : fe ne reviendrai pas sur ce point; mais fe
dirai quen lisant ces poésies, on irouve» dans le mérite du style et des
images, un véritabfe dédonimagemenl de la trop grande uniformité dei
pensées et d*s sentiniens.
Quelquefois tes troubadours se permettoient d'énoncer des opinion»
et de feire des déclarations qui secartoient des formes reçues; et je
crois en donner une preuve remarquable, en traduisant la pièce sui-
vante de Pierre de Barjac, qui est à la page 35 de la collection :
et Tout franchement, belle dame, je viens devant vous recevoir sans
inquiétude mon congé pour toujours. Je vous conserve une grande
reconnoissance pour les bontés que votre amour daigna m'accorder»
tant que feus fe bonheur de vous plaire; maintenant, puisque je n'ai
plus ce bonheur, il est juste que, si vous voulez vous procurer un amant
qui fasse mieux votre plaisir et votre* avantage, je ne m'y oppose point :
soyez certaine que je ne vous en voudrai pas ; mais nous vivrons poli»
ment et gaiement entre nous, et nous serons comme si de rien n*eût
été (1).
n Aussi, belle dame, je prendrai toujours une grande part à ce qui
vous intéressera; je veux retenir de nos anciens rapports ce sentiment
affectueux auquel il ne dépendrait pas de moi de renoncer; oui, je serai
toujours k vos ordres , excepté que je n'accepterai jamais les plus doue
bienfaits de l'amour , bien que vous ne soyez pas quitte envers moi d'une
charmante promesse sur laquelle vous m aviez permis de compter. Je
ne veux pas dire que je fusse indifférent sur vos bontés; si fe les eusse
obtenues dans fe temps, je vous avoue qu'il y a eu teJIe circonstance
où elles auroient fiit mon bonheur,
» Peut-être imaginez -vous que c'est un mouvement de dépit qui me
porte ï vous parler ainsi, sans que je le pense réellement : rassurez'vous ,
je vous donnerai bientôt des preuves de ma franchiset J*aï choisi la dame
k qui désormais j'adresserai mes hommages ; et je sais que vous avez choisi
un amant qui, malheureusement pour vous, n'ajoutera pas à votre
gloire, tandis que j*aîme une dame qui désire obtenir de l'estime, et en
qui augmente sans cesse la grâce qui déchoit en vous. Mon ftmfe ne
peut s'enorgueillir d'une naissance aussi illustre que la vôtre, mais elle
remporte du moins en beauté et en mérite.
(1) J'avais traduit seulemem le premier couplet de cette pièce dans fouvragc
întîtQÏé Des Troubadours it pes C0UR5 d'amqur. Parii, che^Phriuiû
Pîdot, 1817, m- A*, I vol,
ajl JOURNAL DES SAVANS,
» Si les promesses, si les scrmeus que nous nous sommes faîti fun à
rauLre, j^euveni > au jour de la rupture, nous porter malheur» allons
devant un prétret je vous absoudrai de vos eugagemens ^ ei vous maU
soudrez des miens; el alors nous pourrons désormais nous abandonner
plus consciencieusement h un autre amour. Si je vous causai jamais
quelques chagrins, pardonnez-les moi : je vous pardonnerai de même
avec siticérité; car un pardon n'est valable qu autant qu'il est accordé
de bon cœur,
ï» Méchante dame, quoique vous m eussiez donné de justes sujets de
jalousie, je ne fis jamais rien qui pût vous déplaire. Cependant un
jaloux n*a plus ni sens ni tsprit ; il ne sait ni ce cju il dit ni ce qu'il 6it :
on ne |J€UC concevoir la douleur qui faccable ; il n*a de repos ni soir
ni matin: un jaloux ne peut se tenir nulle part* Aussi vous aimerez à être
délivrée de moi. il vaudroit mieux être atteint de la lèpre que de la
jalousie : tous les lépreux ne sont pas insupportables. V ous qui me deviez
delà fidélité, comme je vous dois de la haine, acceptez mon congé,
car je me donne le vôtre. »
II se trouve dans ce recueil plusieurs j)îèce$ qui pcrmeitroient de
présenter le talent des troubadours sous un jour três-fav orable : je ter*
minerai mes citations en transcrivant et en traduisant une pièce très*
agréable de Bertrand de Lamanon {pûg, iioj; elle est du genre de
celles qu'on appeloit A ubades.
Us cavaliers si jazîa
Ab la res que plus volia ;
Soven ^ baisan , U dizia :
Doussa res, icii que farai,
Qu'el jorn ven e la noich vai!
Ai!
Qu'ieu aug que la gaîta cria ;
Via sus, qu'itu veî \q forn
Venir après Taiba*
Doussa res, s'esser podia
Que jamais alba ni dia
No fus, gran merccs séria ,
Al mens al loc ou estai
Fis amies ab se que 'l plai.
Ai! &c.
Doussa res , que qu om vos diai
No crc que laU dolors sta
CoQi qui partaïuic d'amia, ^
Urt cfievalîer *c trou voit
Avec l'objet qu'il préférojt ï tous nutres;
Souvent, en Icmbraisanf. il (ui dboit:
Charmaot objet, que ferai-le f
Le jour vient , U nuic s'en va;
Ah!
J'cnccudi Jii senti neilc cner :
Levci-vous, je vois le four
5 avancer npra Taube^
Charmant objet, slf pouvoit se Ïmtc
Que jiLmaiâ oe parut ni aube ni juur,
Ce se rot I un grand avantage »
Au moins d^m to» lieux où ou amanf
Est auprès de celle q»*i! aime.
Ahî&c.
^^sn «
Charmant objet^quot qu on puisse vous dire.
Je ne crois pai qu*II y ait de douleur ég^lc
A Là kpatëtioii (IVn ami et d'une amici
MAI 1820.
*W
Allas! quan pauca nokh fui !
Ail âic.
Douj^a res, feu renc ma via;
Vosiresci on que ieu sia;
Per Dieiij no nVobliderz mia ^
QuVI cor del cor» renia n sai^
Ni de vos mais no m panrai,
Ail&c.
Dous5a Tes, s'ieu no u? vezia
Breumentz, crezatz que morria,
Qu*d gran désirs m auciria ;
Per qu'icu tost retornarait
Que ses vos vida non au
Aiî
Qu'ieu aug que la gaita cria:
Via sus,qu'ieu vei lo jorn
Venir après i*aïba.
Je l'éprouve moi même à présent.
Hélas ! que k nuîc est courte '
Charmant objet, je me retire ;
Je suis à vom en quelque lieu que je tiylii
Au tium de Dieu , ne m oubliez pu ;
Mou cecur reste auprès de vous ;
Non jamais je n'en serai séparé.
Ah ' &c.
Charmant objet . si je ne vout rcroyoi^
Bientôt, croyez que je mourroii.
Oui, mes vifs dciirs me tuerotent;
Aussi je retournerai bientôt ,
Cir sans vous je ne vis poi.
Ah!
J'entends b scnthielle crier :
Lcvci-vouî, je vois le jour
S'jiTanccr âpres l'aube.
Si les observations ei fes ciiaiians que fai faites présentent quelque
intérêt aux personnes qui arment à s'occuper de la langue et de la (itlé-
rature des troubadours, je puis assurer qu'il est peu de ces poètes qui
ne m'ofiVissent le moyen de (aire des observattgns et des citations du
même genre; forcé d'abréger, je iraduirai Tune des vies ou notices qui»
dans quelques manuscrits^ soot ordinairement placées en tête des ouvrages
des troubadours ; je choisis la notice sur Bernard de Ventadour,
ec Bernard de Ventadour naquit dans le Limou*jin, au château de
n Ventadour. Il fut de basse extraction; son père étoit domestique du
3» château et employé à faire cuire le psin. Bernard étoit bel homme ,
» adroit : il chanta J>ïen , et trouva bieni î! f<^t bientôt courtois et savant.
» Le vicomte de Ventadour, son seigneur, prit intérêt à lui et à son
n talent t et 1 honora beaucoup. Le vicomte avoh une femme très-
3» gentille et très- gaie ; elle fut chirmée des chansons de Bernard , devint
H amoureuse du troubadour, qui s'enflamma pour ©Ile; tellement, qu*il
» consacra ses chansons k célébrer sa belle daine. Cet amour dura long-
» temps, avant que le vicomte ou toute auire personne s'en aperçûtj
n mais quand le vicomte eo fut instruit, il sHrrita contre le troubadour,
«et fit resserrer et garder la datne» qui donoa congé à son amant,
ap Celui-ci quitta lacontrte, et se rendit auprçs de la ducbçsse çle Nojr-
» mandie : elle étoit jeuae et d'un grand uiérite, se connois^oit en talcn^
îi at en gloire, et apprécioit IW^^^ louer avec grâce. Les dansons et
pp 1
loo JOURxNAL DES SAVANS,
9 les vers de Bernard de Venindour lui plarroîent beaucoup. Eile Te
» reçut, l*accueillit avec beaucoup d'égards. Il demeura long-temps k sa
» cour y devjnr amoureux de la duchesse» qui répondit à ses sendinens:
» elle devint robjet de plusieurs bo:: nés chansons. Tandis qu'il éroit
>» auprès d'elle, le roi Henri d'Angleterre Tépousa, et lemmena. Ber-
» nard resta sur le continent triste et chagrin; il se rendit à la cour du
» bon comte Raimondde Toulouse ^ et y demeura jusqu'à la mcrt de ce
» prince, Bernard en ressentit tant de douleur, qu'il se retira dans un
j» cloître; et il y mourut. »
^ i.e biographe ajoute : « Le comte Ebles de Ventadour, qui fut fils de
» la vicomtesse que Bernard avoit aimée , me raconta à moii Huguei de
»Saint-Cyr, ce que j'ai fait écrire de ce troubadour. »
Je ne m arrêterai point h examiner si [es réc-ts du biographe s'nccor*
dent avec les ftits et les dates que fournit l'hi>toire généiale; mars je
ferai remarquer que c'est un troubadour^ Hugues de Saint-Cyr, quia
dicté la notice sur Bernard de Ventadour : celte circonstance permet de
croire que les notices qui précèdent les poésies, sont en général
Touvrage de personnes instruites et distinguées. On trouve dans cette
collection , avec une pièce d'Hugues de Saint-Cyr lut- même > une notice
sur ce troubadour.
Je crois avoir donné une idée suffisante du mérite Fittérairt de fa
collection qu'a publiéeM.de Rochegude: j*aurai à parlerdu Vocabulnira
occitanîen. On ne peut qu'applaudir à la manière utile et honorable dont
un militaire distingué a occupé ses loisirs.
RAYNOUARD,
PouoRCêTiQUE DES Anciehs , OU de F Attaque et de la Défense
des places arant l'invention de hi poudre ; par M. Dureau
de la Malle , membre de f Institut foyal de France. Paris , 1 8 i p,
de rimpiimerie de F. Didot; i vol. ia-SS de ^%% pages,
avec sept planches liihographiées.
Les recherches des critiques modernes, tels que Juste-Lîpse, Fofaid,.
Maizeroy, la Luzeme, &c* , ont jeté quelque jour sur les tUverses branche»
de l'art militaire chez ks anciens; cependant il s*enfaut encore beaucoup
qu'ils soient parvenus à tout expliquer : fes uns^ fort érudits, mais peu
ttni% dâui la matière qu'ih vouloient éclaircir , n*om pu s'eaviromief
^^^ TAÏ 1820.
d*assez de mmîws pour interpréter avec succès les icxie» tiïâëmy
autres , fort bons militaires, rryais dépourvus des connoissances phiiolo^ •
gîquc*, ont trop souvent prêté aux anciens leurs propres idées,
La poliorcéliqiJe, ou lart de l'attaque et de la défense des places;
la balistique» ou Tart de lancer les traits, cher les peuples anciens, pré-
sentent donc encore une foule de difficuttés, contre lesquelles on a jus-
qu'ici Itiifé sans succès. M. Dureau de la Malte > qui a senti ces diffi-
cultés, a conçu le projet de les soumettre à une discussion nouvelle»
pour tâcher de les lever entièrement , ou du moins d en diminuer beau-
coup le nombre. H s'est proposé, en conséquence, de rc^unir toutes le^
notions relatives à ces deux branches de Tart militaire dans uii travail
général, où elles soient liées entre elles, rapprochées, et éclairées les
unes par les autres.
Ce vaste sujet, pour être traité avec succès, t-xige du temps, de
lactiviié, de la constance, une réunion de connoissances toujours diffi-
cile à rencontrer. Il na point effrayé le courage et I ardeur de AK Du-
reau de la Malle* Nous allons rendre compte du premier volume de
son travail, qui comprend Thistoire de la poliorcétique chez les Égyp-
tiens et chez les Hébreux* Quoique ce volume ne soit qu'une partie
d'un tout, il forme cependant à lui seul un ensemble séparé. Nous ap-
pellerons Tatteution de Fauteur sur les poinis qui nous ont paru laisser
quelque chose à désirer; et nous avons respoir que nos observations ne
lui seront pas inutiles pour la suite de ses recherches.
Pour se fil ire une idée de Tétat de la poliorcétique chez les Égyp-
tiens, il fàudroit comioître la construction des foriei esses qu^ils ont
élevées, les machines de guerre dont ils se sont senîs : cette connoi^^
sance peut s'acquérir par des monumens, ou, à leur défaut, par des
descriptions bien ftiîtrs d'écrivains^ qui auroient eu ces objets sous les
yeux. Les monumens de ce genre manquent presque enuèremeni en
Egypte; et, quant au témoignage des auteurs, M. Dureau de la Malle
atteste lui-même que «les récits des Grecs sont de maigres abrégés ,
J> dépourvus des détails nécessaires pour assurer et préciser les idées,»:»
Dans ce^ dénuement absolu , ce savant a recours aux bas-reliefs ou ana-
glyphes représentant des scènes guerrières, sculptes sur les temples de
la Thébaïde. Les deux premières parties de son ouvrage sont consacrées
i lexplication de ces dîfiérenies scènes.
Avant de procéder à cette explication, M. Dureau de la Malle se
livre à quelques considérations sur le degré de confiance qu*il con-
vient d'accorder aux auteurs anciens qui ont parlé de fLgy^pte, princi-
palement à Hérodote, i Manéthon , à Ôiodore de Sicile, II prend contre
joz JOURNAL DES SAVANS,
M. Larcher la dcfense du dernier historien, et tnonlre« put dçty^ '
sotis qui nous ont paru bien déduite», que Diodore a élé traité avec
beaucoup d • rigueur par le traducteur d'Hérodote, Sans nous laisser
entramer à l:i prévention défavorable que M, Larcher élève contre le
témoignage de Diodore de Sicile, nous craindrions de prendre autant à
la lettre que le fini M, Dureau de la Malle, le récit de cet historien
sur les découvertes et les expéditions d^O^iris. Les écrits des Grecs pré-
sentent pluMeur^ fois la preuve irrécusable que les prêtres égyptiens,
passablement entêtés de fantiquité de leurnation,ont beaucoup abusé de
il crédulité des voyageurs qui leur rendoient visite; et, par exemple, il
est permis de croire qu'en expliquant h Sirabon ( i ) eiii Gennanicus (2)
les hiéroglyphes qur, selon eux, faisoienl mention des ricljesses, des
innombrables armées et des conquêtes de leurs anciens rois, ils ont un
peu compté sur h difficufré quM y avoit it reconnoître si ces hiéroglyphes
disoient réellement ce qu'ils leur faisoient dire: du moins esl-il prudent
de ne pas trop presser les conséquences de pareils faits *, et nous aurions *
désiré qu'à cet égard M. Dureau de la Malle eût montré plus de réserve*
Cette première partie , qui contient d'ailleurs des rapprocheinens nou-
veaux, ii*e&t pas tellement nécessaire au plan de fauteur, que nous
devions nous y arrêter plus lorvg-tenips ; nous passerons à la seconde,
consacrée principalement à lexplication des scènes guerrières peintes
ou sculptées sur les tempJes de Thèbes.
Ces tenifïles offrent une énorme quantité de ces sculptures. Il auroit
failu, disent les membres de la Commission d Egypte, une année entière
pour les copier: aussi nen oni*ils pu destiner qu'une trés-foible partie,
M. Duroau de la Malle a mis à contriijution non-seulement les belles
planches de Touvrage sur TÉgypte, mais ks dessins de i\L Denon, ceux
de M. Hatnihon, et le juurnal tnanuscrit dont ce savant voyageur lui
a donné communication^ 'i
M* Dureau de la Malle regrette que, dans le nombre des sujets re-
présentés sur les bas reliefs dessinés jusqu'ici , il ne se trouve point
de siège de ville proprement dit : un seul bas-relief du toml)eau dO^y*
inandiai représente fattaque brusque d'une {r>rlere«se; deux autres, des
batailles sous les remparti de deux villes Ibriihées, ou plutôt de deux
fortins. C e>t Bien peu pour faire connoîire ia poliorcérique des Égyp-
tiens : aussi verrons-nous que ces bas reliefs apprennent biçn peu de
chose.
De même que MM. Jollois et DeviHiers, auteurs de la Description de
fi) SiTab. x^'it, f. 8*6. ^{x) Tacit. Annai U , 60,
MAI l820, t«3
Thèbes, M.X)vreau de la Malle voit sur ces baft-reliefs des guerres faites
hors de f Egypte: il croît même pouvoir y distinguer les trois races qui i
dil-il, se partiigent l'ancien monde; la raa caucasienne eu européenne,
ta TMCi t^grt, la rc^ce asiatique ou mongole i et il cherche à prouver que
'a scène de ces combats se passe dans la région du Caucase. Comme
cette opinion se ratuche à des faits historiques encore très-obscurs
auxquels elle donneroit une grande consistance » nous allons mettre le
lecteur en état d'apprécier la validité des preuves que lauteur apporte
à l'appui des idées qu'il présente.
Sur la face nord du palais de Carnak, on voit un héros égyptien
jnonté sur un char dont les chevaux sont lancés au grand galop.;
il poursuit dans |a plaine les ennemis» qui fuient vers une forteresse
crénelée, carrée, à deux enceintes, située au sommet d'un escarpemenr:
cet escarpement est formé de trois gradins , que M. Dureau de la Malle
prend pour des banquettes recouvertes de gazon ( i ^ semblables au glacis
de nos places fortes. Cette indication poUorcitique seroit curieuse, si elle
étoit sûre; mais, comme ces banquettes s'élèvent en échelons les unes
au-dessus des autres, il est bien plus vraisemblable qu elles représentent
\ts rampes d'une montagne, au sommet de laquelle la forteresse est
bâtie. Dans tous les cas , nous ne partagerions pas Fopinion de M. Du^
reau de la Malle, qui les compare à ces glacis escarpés que Josèpbe
et Diodore placent au-devant des murs de Méroé et de Memphis. Ces
auteurs parlent non de glacis escarpés, mais de chaussées, de digues
[A^iua7«t] élevées au devant des murs de ce:» villes', situées en plaine,
j7our détourner le courant du fleuve pendant Tinondation (2).
Venons au lieu de la scène représentée sur ce bas-relief et sur d'autres
représentant aussi des sujets militaires ; car M. Dureau de la Malle re-
connort qu'elle se passe dans le même pays. En avant de la forteresse,
on voit des arbres paraissant avoir la forme des conifères. M. Duretu
de la Malle remarque que cette forme de quenouille n'est propre qu'à
trois espèces d'arbres, parmi les vingt- cinq mille végétaux que nous
connoissons aujourd'hui ; ce sont le cyprès pyramidal / cupressus
sempcT'virens ] , le peuplier é^lulie f populus Italica^ ou fasligiaio-J ,
et le chêne pyramidal de Portugal [quercusfasiigiataj. Rapprochant
ensuite ce premier caractère, de diverses circonstances qu'offrent fes
autres tableaux, il cherche à établir par la forme du crâne des person*
(i) Voj^, Description de l'Egypte, pL ^0, A. vol. Ul^fig ^* — W Diod.
Sic. i , Pi Joseph. Anu Jud, II, io.
î*4
JOURNAL DES SAVANS,
nages» par leur cosrume, leurs armures , que la scène a dû se passer»
!•* dans un clhnar tempéré » mais sujet à de fréquentes vicissitudes
de froid et de chaud; 2/ dans un pays de montagnes» Pour découvrir
quel est ce pays, Fauteur procède par élijninaiion. Des trois espèces
d'arbres à forme pyramidale, deur habitent le Portugal et Tlialie, dont
on Jes croit originaires; reste le cyprès pyramidal, dont fa pairie est
Ja Grèce et TA^ie mineure: M. Dureau de la Malle remarque, dans
deux de ces* tableaux, des bœufs qu'il croit être de race européenne,
parce qu'ils ont de petites carnes , tournées en avant; ce qui le confirme
dans lïdée que îa scène se passe dans l'Asie mineure , en Colchide ,
pays où Hérodote dit que les Egyptiens laissèrent une colonie. Les hr**
birans de la Colchide, d'après les traits recueîHis par M. Dureau de U
Malle, lui semblent avoir du rapport avec les guerriers figurés dans les
bas-reliefs des temples de Thèhes : il croit même pouvoir assigner
quel peuple de la Colchide s'y trouve représenté, et it s'arrête aux
Mûsyneques, Sans doute, fauteur a fait preuve d'érudition et de sagacité
dans les rapprochemens dont nous venons de présenter fanalysci mais
ces rapprochemens et ces recherches conduisent-ils à des résultats qui
nient quelque certitude! Voilà ce que nous n'oserions assurer; et peut-
être qu*à raison des conséquences historiques que M. Dureau de la Malle
tire de ces rapprochemens, nous devons lui indiquer franchement les
principaux motifs de nos doutes,
I •'' Le caractère tiré de (a forme pyramidafe ou fitsifdrmJtâes arbres, sur
lequel il insiste de préférence et qu'il regarde comme îndubitdble , nous
paroît extrêmement incertain; et M. thireau de la Malle auroit été de
notre avis, si, au lieu de s'arrêter à un seul bas-relief, il eût examiné
aussi les autres planches de l'ouvrage sur TEgypte. Or il est si peu vrai
que cette forme d'arbre indique la Colchide ou tout mtre pays hors de
f*Egypte, qu'on la retrouve dans plusieurs %cèv\t$ de la vie civile des
Egyptiens : 1 ,** sur le grand bas-relief d'EIethyia qui représenteles travaux
du labourage, de la pêche, de (a chasse, en Egypte (1); 1.* iur un
autre bas-relief d'Elethyia [t] , où 1 on volt toutes les cérémonies relatives
è rembaumement et à ta sépulture d*un L^piien { çelui-çî esf d'autant
plus remarquable, quil offre deux rangées d'arbres : Tune d^ pa/mlm ,
bien disdnceement représentés; l'autre de ces sitbte^fuîffirmes ) ; j.* sur
un bas-relief de Thèbes oît il ne s'agit ni de guerre ni de siège , ni de
Caucase ni de Colchide (j); 4*'* ^^^ ^^ hypogées de Beny-Hasan,
(1) Description de TÉgypic antîq. voL /, pi 6$, n/^, — (2) Eadnn , pi, 70,
»•• î-— (J) ^aitm, vol. lil, pi. 14, n.» 4.
, . MAI 1820. -^ • joj
oîi sont représentées, comme dans les grottes d'EIeihyia, des scènes de
la vie civile des Égyptiens (1); 5.'' enfin sur deux papyrus trouvés dans
les hypogées de Thèbes : en tète de I^écriiure , on voit diverses scènes, et
entre au rres une de labourage; au milieu, s'élèvent des arbres de cette
ibnne (2) ; et en général, j observe qu'on les trouve principalement
dans des scènes de ce genre. Ces rapprochemens prouvent sans réplique
que cette indication, dont M. Dureau de la Malle a cru tirer un grand
parti, n'a rien de commun avec les Mosynèques, Il est fort possible que
ces arbres soient réellement des cyprci, comme on i'avoît déjà soup-
çonné (j). A vrai dire, je ne vois aucune raison bien solide pour nier
qu'if y ait eu autrefois des cyprès en Egypte, comme il y en a maîjite-
nant ; ou bien , plutôt , c'est \xne forme de convention adoptée par les ariistei
^gypîîens pour exprimer grossièrement et indistinctement tous les
arbres autres que le palmier ; et Tun des dessins cités plus haut don-
neroit quelque poids à cette conjecture. Ce qui prouve d'ailleurs que
ce n est quune représentation bien grossière, c est